Frédéric II et Voltaire - L`Anti-Machiavel

Transcription

Frédéric II et Voltaire - L`Anti-Machiavel
Ce travail a été réalisé par S. Bolyn et G. Dubois,
dans la cadre du cours de Médiation Muséale et
Patrimoniale, LHAGI 2550, UCL, 2011-2012, OL-
HAGI 2550
ÉCRIVAINS: MODES D’EMPLOI
DE VOLTAIRE À BLEUORANGE
2 novembre 2012—17 février 2013
L’Anti-Machiavel (1740)
Écrit par Frédéric II
Corrigé par Voltaire
Documentation pédagogique
Musée royal de Mariemont
B-7140 Morlanwelz
064 21 21 93
www.musee-mariemont.be
Frédéric II et Voltaire, gravure, XIXe siècle, BNF, estampes, EF-130A.
ÉCRIVAINS: MODE D’EMPLOI
DE VOLTAIRE À BLEUORANGE
Exposition 2 novembre 2012—17 février 2013
L’Anti-Machiavel
Écrit par Frédéric II et corrigé par Voltaire
ion a été publiée chez Paupie et correspond à un remaniement approfondi du texte
par Voltaire. La troisième édition, diffusée seulement en 1847 par Preuss, est le
manuscrit original de Frédéric II. Les deux premières versions laissent apparaître
que Voltaire n’a pas lésiné sur les corrections, au grand désarroi de Frédéric II.
En effet, le philosophe a corrigé un grand nombre de fautes de style et de français
ainsi que les expressions triviales, comme cela lui avait été demandé, mais a également supprimé des phrases entières pour les remplacer par d’autres. Ainsi, Voltaire
n’a pas réalisé la simple correction d’un texte mais en a modifié la nature et le sens,
allant parfois jusqu’à écrire des pensées contradictoires à celles du prince de
Prusse.
Le contenu de l’ouvrage et ses antécédents
En cette fin d’année 2012, le Musée de Mariemont offre au public une
exposition consacrée aux écrivains du XVIIIème siècle à nos jours. Le présent
dossier a été conçu dans le but d’introduire l’enseignant à l’un des ouvrages
mis en scène à l’occasion de cet évènement; ceci afin qu’il puisse à son tour
en effectuer la médiation auprès de ses élèves. Outre les informations relatives
à l’œuvre, ses auteurs et son contexte, le document apporte plusieurs pistes
pédagogiques destinées à permettre l’exploitation de l’information et ce, indépendamment de la visite de l’exposition.
L’ « Anti-Machiavel » est une opportunité pour Frédéric II d’exprimer ses
idées politiques à partir de la réfutation d’un traité politique connu, « Le Prince ».
Écrit par Nicolas Machiavel (homme politique et écrivain florentin) en 1587, cet ouvrage était destiné à donner des conseils aux dirigeants de l’époque sur la manière
d’obtenir le pouvoir et de le conserver. Les idées qu’il véhiculait furent fortement
discutées, certaines étant considérées comme immorales. Contrairement aux autres
traités de l’époque, « Le Prince » ne livrait aucune recommandation morale et, à
l’inverse, suggérait parfois des actions contraires aux bonnes mœurs. En effet, pour
Machiavel, « la fin justifie les moyens ».
Histoire de l’« Anti-Machiavel »
Frédéric II, en despote éclairé, insiste sur la nécessité de gouverner selon
la raison et accuse Machiavel de négliger le bien-être du peuple. Il condamne la
trop grande importance que donne Machiavel aux machinations du prince qui, selon
lui, aboutissent toujours à la catastrophe car elles sont effectuées au détriment de la
prospérité du peuple. Pour appuyer ses revendications, Frédéric II pointe du doigt de
nombreux cas pour lesquels Machiavel a ignoré ou minimisé les conséquences désastreuses engendrées par des manœuvres scélérates et discrédite ainsi les personnages que Machiavel utilise comme modèles.
Début 1739, Frédéric II de Prusse écrit « l’Anti-Machiavel ». A ce moment, il
n’est encore qu’un jeune prince se préparant à hériter du royaume de son père. Depuis 1736, Le prince entretient une correspondance avec Voltaire. Influencé par les
idées des « Lumières », il se met lui aussi à philosopher et écrit une réfutation du
célèbre « Prince », un ouvrage rédigé cent-cinquante ans plus tôt par Nicolas Machiavel. Il nomme son opus « Anti-Machiavel, ou Essai de critique sur le Prince de
Machiavel ». À travers son texte, Frédéric II se présente comme un « bon prince
éclairé ». Il s’attire de ce fait les inimitiés de ses contemporains, qui voient dans son
œuvre une manière habile de manipuler son peuple et les autres nations européennes. Fin 1739, Voltaire accepte, sur la demande de Frédéric II, de corriger et d’éditer
« l’Anti-Machiavel ». En mai 1740, le prince devient roi de Prusse et, conscient que
son œuvre n’est pas conforme à l’idée que le public peut se faire d’un roi, il ordonne
de faire arrêter la publication. Néanmoins, quelques mois plus tard, il décide finalement de publier son œuvre.
Trois versions différentes ont été éditées. La première est l’édition réalisée
par Van Duren comprenant les premières corrections de Voltaire. La deuxième vers-
L’ « Anti-Machiavel » exposé au Musée
La Réserve précieuse du Musée de Mariemont, consacrée aux livres anciens
et modernes, compte de nombreux ouvrages d’exception : une trentaine d’incunables, un important ensemble de livres du XVIe siècle, de multiples livres imprimés
aux XVIIe et XVIIIe siècles, des éditions néoclassiques et romantiques, les tout premiers livres de peintres, des ouvrages « fin de siècle » parmi lesquels figurent un
grand nombre de livres ornés d’images « Art Nouveau » ainsi que maints livres des
XXe et XXIe siècles . Pourquoi avoir choisi l’« Anti-Machiavel » pour faire partie de
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l’exposition « Écrivains : mode d’emploi » ? En quoi cet ouvrage est-il important pour
comprendre l’écrivain ?
Le rôle de l’écrivain
Premièrement, ce livre illustre l’un des principaux rôles tenus par l’écrivain :
tenter d’agir sur la société, en amenant celle-ci à réfléchir. En effet, l’écrivain n’est
pas qu’un artiste capable de jongler avec les figures de styles, les rimes et les mots ;
son but ne se limite pas forcément à distraire ses lecteurs avec des scénarios bien
ficelés et une esthétique hors pair. Souvent, l’écrivain cherche aussi à faire passer un message à ses contemporains, au travers de son texte. Ce message est
plus ou moins facilement repérable, selon le désir de l’auteur et les contraintes de
l’époque. Sous l’Ancien Régime, il n’était pas permis d’exprimer son avis comme il
est possible de le faire aujourd’hui. Au XVIIIe siècle, Voltaire promeut les grandes
libertés humaines dont la liberté d’expression. Il se permet donc de manifester ses
idées, sans les maquiller. Il va même jusqu’à détourner certains passages de
l’ « Anti-Machiavel », lors de sa correction, pour les faire correspondre à ses propres
conceptions.
Bien qu’il soit protégé par les grands de l’époque, le philosophe se heurte
néanmoins, au cours de sa carrière, à la censure exercée par le pouvoir et prend
conscience de l’effet que peut produire la littérature sur la société. Cette influence nouvelle de l’écrivain sur ses contemporains peut être expliquée par plusieurs phénomènes. L’ascension de la bourgeoisie est sans doute le plus important d’entre eux. Au temps des Lumières, la classe bourgeoise cherche à accéder à
la vie culturelle et trouve, dans les philosophes des Lumières, le relais de ses aspirations. L’attitude de ce public, réceptif et avide d’informations, accélère la circulation
des idées et donne aux débats intellectuels une portée inédite. Faisant le lien entre
l’écrivain et ses lecteurs, l’imprimerie connait une forte progression : le nombre de
textes imprimés augmente et l’on assiste à la constitution d’importants groupes éditoriaux, capables de diffuser les livres à une échelle européenne et de contourner les
interdits de la censure. En outre, des lieux d’échanges philosophiques et littéraires,
tels que les salons, cafés et académies, sont créés, ce qui permet la discussion et
la circulation des idées.
Une reconnaissance inédite
Historiquement, pour qu’émerge l’écrivain engagé, il a fallu que celui-ci
acquière un certain statut au sein de la société, et que soit reconnue l’importance
de sa fonction. Au XVIIIe siècle, le rôle social des écrivains est reconnu et leur prestige diffusé à travers toute l’Europe.
Toutefois, malgré cela, leur vie demeure difficile. En effet, il est pratiquement impossible pour un écrivain de vivre de sa plume. Il lui faut posséder une
fortune personnelle, exercer une activité professionnelle en complément de son métier d’écrivain ou se mettre au service d’un mécène. Voltaire est l’un des seuls
écrivains indépendants de son époque, libre de diffuser ses propres opinions.
Il entretient pourtant des relations étroites avec les grands personnages de
son époque, tout particulièrement avec Frédéric II. Leur relation sera longue et tourmentée, vacillant entre l'admiration et la méfiance réciproques. Pour le roi, Voltaire
est un « Cicéron », un « Démosthène ». Pour le philosophe, Frédéric II est un
« César », un « Salomon ». Leur correspondance, qui durera plus de 15 ans, étonne
l’Europe. Les deux hommes discutent de leurs intérêts communs, tels que la politique, l’art dramatique ou la langue française. En 1752, ils se disputent au sujet de
Maupertuis, président de l'Académie de Berlin que Voltaire ne voit pas d’un bon œil,
et mettent fin à leurs échanges.
Cette amitié, qui aujourd’hui paraîtrait ordinaire, est tout à fait atypique à
l’époque. En effet, l’écrivain est généralement au service de l’homme politique et se
contente d’obéir à ses ordres. Or, Frédéric II et Voltaire, eux, traitent d’égal à égal.
Plus inhabituel encore, le roi considère Voltaire comme son véritable « maître à penser ». Ce bouleversement des rôles illustre à merveille la reconnaissance nouvelle
que reçoit l’écrivain au cours du XVIIIe siècle.
Voltaire, un écrivain engagé
L’Anti-Machiavel met donc en lumière un acteur spécifique du monde littéraire :
l’écrivain engagé. La notion de littérature engagée renvoie usuellement à la démarche d’un auteur qui lutte pour une cause soit par l’intermédiaire de ses œuvres, soit
par son intervention directe, en tant qu’ « intellectuel », dans les affaires publiques.
Selon cette définition, Voltaire peut être considéré comme un écrivain engagé. En
effet, par le biais de ses textes, il soutient un principe qui lui semble juste et naturel : la liberté. Issu de la bourgeoisie et distingué par l’aristocratie, il est particulièrement bien placé pour faire passer ses idées et se présente comme un porte-parole
universel, bien que ses valeurs restent fondamentalement bourgeoises.
À côté de ses compositions théoriques, Voltaire œuvre également dans le cadre
de situations concrètes. Ainsi, il écrit, en 1763, le « Traité sur la tolérance », destiné
à réhabiliter Jean Calas, un protestant accusé à tort et exécuté pour avoir assassiné
son fils afin d’empêcher ce dernier de se convertir au catholicisme. De même, la
veille de sa mort, il lutte encore pour la réhabilitation du chevalier de la Barre,
condamné au bûcher pour impiété en 1764.
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ANNEXES
Activités pédagogiques
Bien que Frédéric II de Prusse demeure l’auteur principal de l’«Anti-Machiavel », la
plupart des activités que nous proposons tournent plus spécifiquement autour du
personnage de Voltaire, ceci afin de s’intégrer plus aisément au cours de français.
Voltaire a néanmoins joué un rôle important dans la publication de l’« AntiMachiavel ».
1. Analyses et comparaisons textuelles
Lis ces trois extraits et réponds aux questions ci-dessous, en t’aidant des documents
contextuels (voir pp. 7-9 + vocabulaire p. 10).
« Je demande ce qui peut porter un homme à s'agrandir ? En vertu de quoi
il peut former le dessein d'élever sa puissance sur la misère et sur la destruction
d'autres hommes ? Et comment il peut croire qu'il se rendra illustre en ne faisant que
des malheureux ? Les nouvelles conquêtes d'un Souverain ne rendent pas les États
qu'il possédait déjà plus opulents [ni plus riches], ses peuples n'en profitent point, et
il s'abuse s'il s'imagine qu'il [en] deviendra plus heureux. »
FRÉDÉRIC II, avec toutes les corrections de VOLTAIRE, L’Anti-Machiavel. Chapitre V. Des États
conquis, 1740 (dans Le prince; suivi de, L'anti-Machiavel, Paris, Librairie Garnier Frères, 1941).
« Voici une différence plus essentielle entre Rome et l’Angleterre, qui met
tout l’avantage du côté de la dernière: c’est que le fruit des guerres civiles de Rome
a été l’esclavage, et celui des troubles d’Angleterre, la liberté. La nation anglaise est
la seule de la terre qui soit parvenue à régler le pouvoir des rois en leur résistant, et
qui d’efforts en efforts ait enfin établi ce gouvernement sage où le prince, toutpuissant pour faire du bien, a les mains liées pour faire du mal; où les Seigneurs sont
grands sans insolence et sans vassaux, et où le peuple partage le gouvernement
sans confusions. »
VOLTAIRE, Lettres philosophiques. Lettre VIII. Sur le parlement, 1733 (sur Lettre VIII. Sur le parlement, 21 juin 2005, http://www.voltaire-integral.com/Html/22/11_Lettre_08.html, [14/05/2012]).
Le premier est de le ruiner ;
Le second, d’aller l’habiter
Le troisième, de lui laisser ses lois, de tirer un tribut et d’établir un petit
nombre de personnes, pour former un gouvernement qui conserve ce pays en paix.
Ce nouveau gouvernement, créé par le Prince, sait qu’il ne subsiste que par sa
faveur et sa puissance, et il est intéressé à tout faire pour le maintenir. On conserve
plus facilement une ville accoutumée à la liberté en la gouvernant par ses propres
citoyens ».
Nicolas MACHIAVEL, Le Prince. Chapitre V. Comment il faut gouverner les villes ou les principautés qui avant d’être conquises se gouvernaient par leurs propres lois, 1515 (trad. du latin par
Guiraudet, revue et corrigée, dans Le prince; suivi de, L'anti-Machiavel, Paris, Librairie Garnier
Frères, 1941).
Questions:
•
•
Quelle idée cherche à promouvoir Frédéric II?
•
En quoi Frédéric se présente-t-il comme un despote éclairé, dans cet extrait ?
•
•
•
•
Quelle cause veut défendre Voltaire ?
Quel élément de sa biographie est-il en contradiction avec l’idée qu’il défend ?
Comment argumente-t-il ?
Pourquoi l’Empire romain a-t-il périclité, d’après lui ?
Le fait que Voltaire choisisse l’Angleterre comme exemple n’est pas un hasard. Quelle en est la raison ?
•
•
•
En quoi ce texte est-il dans la lignée de la philosophie des Lumières ?
•
•
Sur quel point Machiavel rejoint-il Voltaire ?
Quelle est l’idée maîtresse du discours de Machiavel ?
Dans cet extrait, quels sont les éléments qui pourraient être considérés
comme contraires à la morale ?
Pourquoi son point de vue ne correspond-il pourtant pas à la philosophie des
Lumières ?
•
Que pensent Frédéric II, Voltaire et Machiavel de la manière dont un souverain doit s’imposer à ses sujets ? Sont-ils d’accord ?
« Si l’état conquis est accoutumé à la liberté et à ses lois, celui qui s’en est
emparé a trois moyens pour le conserver :
•
Question bonus : peux-tu expliquer l’adjectif « machiavélique » ?
4
En complément ou en remplacement de ces questions, il est également
possible de demander à l’élève de réaliser un tableau comparatif de ces trois textes.
Les consignes lui préciseraient de prévoir trois colonnes, la première contenant les
éléments de comparaison ; la deuxième, les points communs et la troisième, les
divergences.
L’idéal est de laisser quelques minutes de temps libre aux élèves afin qu’ils
répondent aux questions, seuls ou par deux, puis d’effectuer la correction de leurs
réponses oralement.
de dire que l’animal, quel qu'il soit, est une sous-race comparée à l'homme ! »
ANONYME, posté le 28/12/2011 sur Public.fr (ABB, « Kim Kardashian : dans la ligne de mire des
défenseurs d’animaux », 28/12/2011, http://www.public.fr/News/Kim-Kardashian-dans-la-lignede-mire-des-defenseurs-des-animaux-170023, [13/05/2012]).
Ce texte a été légèrement remanié afin de respecter la grammaire et l’orthographe françaises ;
toutefois, la substance n’a pas été modifiée.
Compétences mobilisées: produire un exposé argumentatif
2. Travail de recherche: l’engagement littéraire au XXI
e
Au cours des XVIIIe, XIXe et XXe siècles, de nombreux écrivains ont partagé
leurs opinions socio-politiques par le biais de leurs œuvres. Ce phénomène perdure
au XXIe siècle.
Présente un écrivain qui milite/a milité au XXIe siècle à travers ses textes
pour une cause relevant du domaine socio-politique:
4. Débat: artistes, médias et liberté d’expression
•
•
•
•
qui, à juste titre, est formellement interdit par la loi, d’autres sujets semblent être
tabous et dangereux à exprimer. Nous présenterons brièvement ci-dessous trois
exemples actuels conduisant à un débat sur la liberté d’expression.
Réalise une courte biographie
Identifie la cause qu’il soutient et rédiges-en un bref état de la question
Aujourd’hui, dans notre société européenne, contrairement à ce que l’on
pourrait penser, la liberté d’expression n’est pas totale. En dehors du négationnisme
Expose ses principaux arguments
Présente les conséquences auxquelles a mené son action littéraire
Cette activité doit être réalisée à la maison, seul ou par groupe. Elle peut être suivie
d’une présentation orale à l’ensemble de la classe.
Compétence mobilisée: conduire une recherche documentaire
3. Dissertation: la contre-argumentation
Voici un texte, fais-en la réfutation, comme Frédéric II et Voltaire l’ont fait vis-à-vis du
Prince de Machiavel.
« Moi, je suis pour le port de la fourrure ! Tant que c'est un choix, on fait ce
qu'on veut ! Puisqu’on mange de la viande, je ne vois pas pourquoi on ne pourrait
pas en porter ! Si ça dérange certaines personnes, qu'ils n'en portent pas mais ils
n’ont pas le droit de forcer d’autres personnes à les rejoindre dans leurs mouvement.
Si on parlait de religion, on appellerait ça une secte ! [>] Eh non, je n’ai pas honte
•
Le cas de Dieudonné
Prenons, pour commencer, le cas de l’humoriste français dont le nom de scène
est Dieudonné M’bala M’bala. Les spectacles de ce dernier sont aujourd’hui complètement boycottés par les gouvernements français et belge, car Dieudonné est accusé (à tort ou à raison) de véhiculer des idées « antisémites » à travers certains de
ses sketchs « comiques». Ce cas de censure nous mène à une question intéressante : « Peut-on rire de tout ? »
•
Les caricatures de Mahomet
En 2005, un journal danois publie une douzaine de caricatures du prophète
Mahomet. Cela scandalise le monde musulman et provoque des manifestations
violentes au Danemark et dans de nombreux autres pays du globe. Dans ce cas, la
liberté d’expression est liée au phénomène de la mondialisation. À la question
« qu’est-ce qui peut ou ne peut pas être publié ? », on constatera que tout dépend
du point de vue. Bien que cela gène une partie de la population, la publication de ces
caricatures doit-elle forcément être prohibée pour les autres ?
5
•
Les cas de certains rappeurs
De nombreux groupes de rap (NTM, Sniper, Youssoupha,]) ont été condamnés à des amendes ou à des peines de prisons pour certains propos tenus dans
leurs chansons. Ici encore, il s’agit d’une preuve flagrante du fait que l’on ne peut
pas s’exprimer librement sur tout, ni de n’importe quelle façon.
5. Visite d’une exposition
Dans le cadre de la compétence « Participer à la vie culturelle », nous
proposons évidemment la visite de l’exposition.
Voltaire est également l’auteur de quelques pièces de théâtre dont il est
éventuellement possible d’assister à la représentation.
==> Reportage vidéo : « Rap et liberté d’expression » (7,39’)
http://www.dailymotion.com/video/x1f30p_rap-et-liberte-d-expression_news
Questions de débat:
•
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•
Qu’est-ce que la liberté d’expression ?
•
Pourquoi la liberté d’expression n’y est-elle pas permise ? Que craignent les
gens qui l’interdisent ?
•
•
•
•
Quelles sont les dérives auxquelles peut conduire la liberté d’expression ?
•
Penses-tu que beauté formelle et expression d’opinion peuvent aller de
pair ? D’après toi, est-ce que l’argumentation mise en place par l’auteur pour
défendre une cause peut nuire à l’esthétique de son texte ?
Que penses-tu de la liberté d’expression dans le monde, à l’heure actuelle ?
Où n’est-il pas permis de s’exprimer librement ?
Que penses-tu de la liberté d’expression sur internet (Facebook) ?
Que penses-tu de la liberté d’expression dans les magazines people ?
Penses-tu qu’il est une bonne chose que des artistes diffusent des idées
politiques ? Quels sont les risques ?
Pour introduire au débat, le professeur peut faire la lecture de la partie introductive à la classe ou laisser quelques instants aux élèves afin qu’ils en prennent
connaissance eux-mêmes. Il est ensuite recommandé de diffuser le reportage aux
élèves, si cela est possible. Le débat peut alors démarrer. Selon le nombre d’élèves
et leur attitude générale, l’enseignant choisira d’effectuer un débat engageant tous
les élèves de la classe ou de séparer ceux-ci en groupes plus restreints.
Compétence mobilisée: prendre sa place dans une discussion
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Documents contextuels
Doc. 1: Quelques repères temporels
À l’aube du XVIIIe siècle, l’Europe domine le monde. L’Angleterre, matériellement
avantagée par le traité d’Utrecht (1713), jouit d’une prospérité commerciale sans
précédent, ce qui lui permet d’étendre les libertés sociales et économiques de ses
citoyens : elle se constitue en monarchie constitutionnelle et parlementaire. À la tête
de la recherche scientifique et du mouvement des idées, elle représente un modèle
pour les autres états européens et prend le pas sur la France, marquée par le décès
de Louis XIV (1715). Cette dernière est reprise en main par Louis XV en 1743, après
avoir été régentée pendant cinq ans par Philippe d’Orléans puis dirigée successivement par deux ministres, le duc de Bourbon (1723 – 1726) et le cardinal Fleury
(1726 – 1743).
Parallèlement, de nouveaux États, la Prusse et la Russie, gagnent du terrain d’un
point de vue militaire et diplomatique. En effet, l’accession de Frédéric Ier, électeur de
Brandebourg, au titre de roi de Prusse, le 18 janvier 1701, puis le règne de son successeur, Frédéric II, entraine un agrandissement considérable de la Prusse et permet désormais à la maison de Hohenzollern de rivaliser avec les Habsbourg d’Autriche. Côté russe, le tsar Pierre Ier le Grand fait de la Russie une véritable puissance
européenne. Lorsqu’en 1689, il s’impose comme souverain du pays, il entreprend
une transformation complète de la Russie, tant d’un point de vue politique que culturel, ainsi que son ouverture sur la mer Baltique et la mer Noire. La fondation d’une
nouvelle capitale, Saint-Pétersbourg, est le meilleur symbole de la nouvelle orientation du pays. Sur les autres continents, les nations européennes rivalisent pour la
possession de colonies. Ce que l’on appelle communément le « siècle des Lumières » s’achève, en 1789, sur l’épisode sanglant de la Révolution française qui marque un tournant capital dans l’histoire de l’Europe.
Doc. 2: La philosophie des Lumières et le despotisme éclairé
Les intellectuels qui participent de ce mouvement suivent le principe de la
« raison raisonnable » afin de sortir des « ténèbres ». En d’autres termes, ceux-ci
tentent de résoudre les problèmes de la vie aux seuls moyens de la raison, en laissant de côté les dogmes et les superstitions. La religion chrétienne, basée sur des
dogmes, sera à ce titre fortement critiquée. L’importance du rapprochement à la
nature et une « foi» presque aveugle en le progrès sont aussi des concepts omniprésents au sein de la « philosophie des Lumières ».
Dans le cadre de ces réflexions, le XVIIIe siècle voit l’avènement d’un concept
politique nouveau, le despotisme éclairé. Selon cette doctrine, le pouvoir est exercé
par un souverain absolu dont les décisions ne sont plus légitimées par le droit divin
mais guidées par la raison. Le souverain, à l’instar du philosophe, doit agir en tout
par raison et apprécier « toute opinion en fonction de sa logique interne, de sa
conformité avec les relations du ‘bon sens’ et de son accord avec ‘l’expérience’ ». Il
œuvre pour le bien-être du peuple, même si le pouvoir demeure tout entier entre ses
mains. Sa devise pourrait être formulée comme suit : « Tout POUR le peuple mais
rien PAR le peuple ».
Le chef de file de la dite « philosophie des Lumières » fut le magistrat et baron de
Montesquieu qui analysa et critiqua tous les régimes politiques existant à l’époque.
Au rang des grandes figures de ce courant, il faut également citer les incontournables Voltaire, Rousseau, ou encore Diderot et d’Alembert (à qui nous devons la première Encyclopédie). Les philosophes de ce mouvement ont tout décrit, tout observé, tout classé, touché à tout et abordé toutes les disciplines. Leurs travaux ont nourri, depuis deux siècles, notre réflexion et leurs idées occupent, aujourd’hui encore,
une place centrale dans notre conception de l’homme et du monde.
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Doc. 3 : Frédéric II
Doc. 4 : Voltaire et son œuvre
Frédéric II est considéré comme l’archétype du despote éclairé. Au cours de son
règne, il n’eut de cesse d’œuvrer au développement de son pays. Pour ce faire, il
intensifie la colonisation des campagnes, encourage les progrès de l’industrie et du
commerce et étend son armée. Cherchant à unifier son territoire et à asseoir sa
puissance, il se lance dans plusieurs opérations de conquêtes et prend part à une
série de guerres. Il entreprend également plusieurs réformes administratives, telles
que la suppression de la torture ou la levée plus égale des impôts. De même, il garantit à tous ses sujets la liberté de culte et impose l’enseignement jusqu’à l’âge de
13 ans. Cependant, l’exécution de ces mesures demeure relative. En effet, l’imprimerie reste soumise à la censure et le manque de professeurs ne permet pas à tous
les enfants d’être scolarisés jusqu’à l’âge légal.
François-Marie Arouet, dit Voltaire, nait à Paris en 1694 dans une famille aisée,
ce qui lui permet de recevoir une bonne éducation dans un collège jésuite. Il meurt
en 1778, à l’âge de 84 ans. Destiné à devenir avocat, il décide cependant de gagner
sa vie en tant qu’écrivain. Ainsi, il écrit sans relâche dans de nombreux genres
(pièces de théâtre, poèmes épiques, contes philosophiques, lettres de correspondance, pamphlets, essais) et publie de son vivant une œuvre considérable. Les textes de Voltaire et ses qualités à gérer l’argent font rapidement de lui un homme riche, ce qui n’est pas sans importance : grâce à cette fortune, rare pour un écrivain,
Voltaire peut se permettre d’être totalement indépendant.
Né le 24 janvier 1712, le fils de Frédéric-Guillaume Ier de Prusse et de SophieDorothée de Hanovre se passionne très tôt pour la philosophie, les langues (surtout
le français), la littérature française et la musique. Dès 1736, il s’entoure d’une cour
composée de philosophes et des gens de lettres et entame une correspondance
avec Voltaire. Celui-ci supervise ses travaux et l’incite à publier l’Anti-Machiavel, un
ouvrage où le prince expose ses idées sur une monarchie contractuelle, soucieuse
du bien des citoyens. Il reçoit ainsi en 1740, alors qu’il succède à son père, le titre de
roi-philosophe.
Bien que ses poèmes, contes et pièces de théâtre fussent très appréciés à l’époque,
ce sont surtout ses écrits philosophiques que notre postérité a retenu de lui.
Convaincu que l’homme doit être guidé par la seule raison, il critique de façon virulente le fanatisme et le dogmatisme religieux. Pour lui, une société heureuse ne peut
être établie qu’à condition de séparer la religion du pouvoir politique et judiciaire.
C’est dans cet ordre d’idée qu’il consacre une partie de sa vie à défendre « les victimes d’erreurs judiciaires » liées au fanatisme religieux. Voltaire est l’un des premiers
auteurs à discuter de la peine de mort. Bien qu’il ne soit pas en faveur de son abolition, il en promeut une application modérée et une baisse de leur fréquence.
Voltaire fait partie de ces personnages qui ont influencé la société en incitant la
polémique et la réflexion. Son œuvre constitue donc une pièce majeure, sans laquelle le grand puzzle que représente notre civilisation actuelle n’aurait pu exister.
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Doc. 5 : Politique et écrivains
De tout temps, les écrivains ont cherché à diffuser des opinions politiques par le
biais de leurs textes. Beaucoup ont même exercé conjointement la fonction d’homme
politique. C’est par exemple le cas de Cicéron, illustre sénateur de la Rome antique,
et Démosthène, homme d’état athénien, connus pour leurs actions politiques mais
aussi pour leurs écrits. Au Moyen Âge, les diatribes politiques se font plus discrètes
mais ne cessent pas pour autant d’exister. Des allusions à la politique apparaissent
dans la poésie et dans les chansons, spécialement dans les chansons de gestes. En
outre, les princes s’entourent d’écrivains qui dressent leur portrait, rédigent l’histoire
de leur pays ou écrivent des traités destinés à former les princes à leurs devoirs.
La Renaissance est caractérisée par le développement d’une littérature d’idées,
inspirée d’Érasme, dont Montaigne est la figure de proue. Ses « Essais », qui prônent la liberté et la tolérance, inspireront nombre d’écrivains du siècle suivant. Dans
un autre genre, celui du roman, Rabelais exprime ses idées humanistes sur la politique et l’ordre social (entre autres) à travers les aventures de Pantagruel et Gargantua. Le XVIIe siècle, marqué par l’omnipotent Louis XIV, voit peu d’ouvrages politiques. C’est en 1689 que nait Montesquieu, premier philosophe dit « des Lumières »..
Aux XVIIIe, XIXe et XXe siècles, bien des auteurs prendront position. Parmi ceuxci, Victor Hugo dénonce les exactions de l’empereur Napoléon III dans Les Châtiments (1853). Émile Zola, lui, écrit « J’accuse », dans lequel il exprime son indignation à l’égard du procès du capitaine Dreyfus, faussement accusé de trahison. Quant
à Aimé Césaire, poète et homme politique français, son « Cahier d’un retour au pays
natal » (1939) et son « Discours sur la négritude » (1987) font de lui le chantre de
l’anticolonialisme et de la négritude.
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Vocabulaire
Anticolonialisme (n. m.) : opposition au colonialisme, c’est-à-dire à un système
légitimant l’occupation, la domination et l’exploitation de territoires par un pays colonisateur.
Machinations (n. f.) : ensemble de manœuvres secrètes déloyales.
Mécène (n. m.) : personne riche qui soutient financièrement les écrivains, les artistes.
Monarchie (n. f.) : régime politique dans lequel le chef de l’état est un monarque, un
souverain personnel héréditaire (empereur, prince, roi).
Archétype (n. m.) : modèle.
Art nouveau (n. m.) : l 'Art nouveau est un mouvement artistique ayant cours de la
fin du XIXe au début du XXe siècle. Il apparait en réaction à l’industrialisation du XIXe
siècle qui laisse peu de place à la variété et à la créativité. Il se caractérise par l'inventivité, la présence de rythmes, de couleurs, d’ornementations - inspirées des
arbres, des fleurs, des insectes et des animaux – et s’applique au décor du quotidien
afin d’introduire plus de sensibilité dans la vie de tous les jours.
Monarchie constitutionnelle et parlementaire : type de régime politique qui reconnaît un monarque élu ou héréditaire comme chef de l'État, mais où une constitution
limite ses pouvoirs. Les monarchies constitutionnelles modernes sont le plus souvent
des monarchies parlementaires avec un système de séparation des pouvoirs où le
monarque est le chef symbolique du pouvoir exécutif. Ce pouvoir est en pratique
dévolu à un premier ministre nommé par le monarque, et devant avoir le soutien du
Parlement, envers lequel, son gouvernement est seul responsable.
Constitution (n. f.) : textes fondamentaux qui déterminent la forme du gouvernement d’un pays.
Négationnisme: le négationnisme est la position de ceux qui nient, contestent ou
minimisent la réalité du génocide des Juifs par le régime nazi pendant la Seconde
Guerre mondiale. Il consiste notamment à prétendre que l'existence des chambres à
gaz et la volonté de persécution sont un mythe.
Diatribe (n. f.) : critique violente.
Négritude (n. f.) : appartenance à la race noire.
Doctrine (n. f.) : ensemble de notions qu’on affirme être vraies et par lesquelles on
prétend fournir une interprétation des faits ou diriger l’action.
Parlement (n. m.) : assemblée ou chambres qui détiennent le pouvoir législatif.
Chantre de (n. m) : personne qui célèbre quelqu’un ou quelque chose.
Poème épique (adj.) : texte qui raconte, en vers, une action héroïque.
Dogme (n. m.) : point de doctrine établi ou regardé comme une vérité fondamentale,
incontestable (dans une religion, une école philosophique). Opinion émise comme
une vérité incontestable.
Prusse (n. propre) : ancien état de l’Allemagne du Nord.
Scélérat (n. m.) : criminel.
Électeur « de Brandebourg » (n. m.) : prince-évêque de l’Empire germanique qui
élisait l’empereur.
Trivial (adj.) : qui, à force d’usage, est devenu ordinaire, commun.
Exactions (n. f.) : mauvais traitements, sévices.
Fanatisme religieux (n. m) : animé envers une religion, d’une foi absolue et d’un
zèle aveugle.
Incunable (n. m.) : ouvrage imprimé avant 1500 (très rare).
Inimitié (n. f.) : sentiment hostile envers quelqu’un.
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Extraits
Chapitre V. Des États conquis.
Chapitre VIII. De ceux qui sont devenus Princes par des crimes.
Vous dites, Machiavel, qu’un prince doit détruire un pays libre nouvellement
conquis, pour le posséder plus sûrement; mais répondez-moi: à quelle fin a-t-il entrepris cette conquête? Vous me direz que c’est pour augmenter sa puissance et pour
se rendre plus formidable. C’est ce que je voulais entendre, pour vous prouver qu’en
suivant vos maximes, il fait tout le contraire; car il se ruine en faisant1 cette conquête,
et il ruine ensuite l’unique pays qui pouvait le dédommager de ses pertes. Vous m’avouerez qu’un pays [dévasté], saccagé [et] dépourvu d’habitants, [de monde, de
villes et, en un mot, de tout ce qui constitue un État,] ne saurait rendre un prince
[formidable et] puissant par sa possession. Je crois qu’un monarque qui posséderait
les vastes déserts de la Libye et du Barca ne serait guère redoutable, et qu’un million
de panthères, de lions et de crocodiles ne vaut pas un million de sujets, des villes
riches, des ports navigables remplis de vaisseaux, des citoyens industrieux, des
troupes, et tout ce que produit un pays bien peuplé. Tout le monde convient que la
force d’un État ne consiste point dans l’étendue de ses bornes, mais dans le nombre
de ses habitants.
[La vérité oblige cependant Machiavel de faire de temps en temps des aveux où il
parait faire amende honorable à la vertu. La force de l’évidence l’oblige de dire
« Qu’un prince doit se conduire d’une manière toujours uniforme, afin qu’en des
temps malheureux il ne se voie point obligé de relâcher quelque chose pour faire
plaisir à ses sujets, car en ce cas sa douceur extorquée serait sans mérite, et ses
peuples ne lui en sauraient aucun gré ». Ainsi, Machiavel, la cruauté et l’art de se
faire craindre ne sont donc point les uniques ressorts de la politique, comme vous
paraissez l’insinuer, et vous convenez vous-même que l’art de gagner les cœurs est
le fondement le plus solide de la sûreté d’un prince et de la fidélité de ses sujets. Je
n’en demande pas davantage; cet aveu de la bouche de mon ennemi doit me suffire.]
1
Il me semble qu’un prince ne saurait assez récompenser la fidélité de ceux qui le
servent avec zèle; il y a un certain sentiment de justice en nous, qui nous pousse à
la reconnaissance, et qu’il faut suivre. Mais, d’ailleurs, les intérêts des grands demandent absolument qu’ils récompensent avec autant de générosité qu’ils punissent
avec clémence; car les ministres qui s’aperçoivent que leur vertu est* l’instrument de
leur fortune n’auront point assurément recours au crime, et ils préféreront naturellement les bienfaits de leur maître aux corruptions étrangères.
2
Correction de Voltaire: « il lui en coûte beaucoup pour] ».
Correction de Voltaire: « fournit ».
Chapitre XVIII. Comme les Princes doivent tenir leur parole.
Le politique, non content d’avoir démontré, selon sa façon de raisonner, la facilité
du crime, relève ensuite le bonheur de la perfidie; mais ce qu’il y a de fâcheux, c’est
que César Borgia, le plus grand scélérat, [le plus grand traître], le plus perfide des
hommes, [que] ce César Borgia, le héros de Machiavel, a été [effectivement] très
malheureux. Machiavel se garde bien de parler de lui à cette occasion. Il lui fallait
des exemples; mais d’où les aurait-il pris, que du registre des procès criminels, ou de
l’histoire [des papes*? C’est pour ces derniers qu’il se détermine, et] il assure qu’Alexandre VI, l’homme le plus faux, le plus impie de son temps, réussit toujours dans
ses fourberies, puisqu’il connaissait la faiblesse des hommes sur la crédulité.
* Correction de Voltaire: « ] l’histoire des Nérons et de leurs semblables ».
Chapitre XXII. Des Secrétaires des Princes.
* Correction de Voltaire: « sera ».
Ces extraits sont issus de MACHIAVEL, FRÉDÉRIC II et VOLTAIRE, Le prince; suivi de,
L'anti-Machiavel, introd. et notes par Raymond Naves, Paris, Garnier, 1941.
Cette édition présente la version complète de l’« Anti-Machiavel » écrit par Frédéric
II, selon le manuscrit édité par Preuss en 1847. Les corrections de Voltaire, reprises
à la version de Paupie, ont été intégrée au moyens crochets (suppressions) et d’appels de notes (corrections et ajouts).
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Ressources
Médias
•
Images
Frédéric II et Voltaire, gravure, XIXe siècle, BNF, estampes, EF-130A (Le siècle des
lumières : un héritage pour demain, 19/11/2009, http://expositions.bnf.fr/lumieres/
grand/333.htm, [14/05/2012]).
Cette gravure, destinée à illustrer les relations entretenues par Frédéric II et
Voltaire, peut être commentée en classe.
Diaporama : Les écrivains en politique (Les écrivains en politique - L’EXPRESS,
28/10/2009, http://www.lexpress.fr/diaporama/diapo-photo/culture/livre/les-ecrivainsen-politique_824694.html?p=11, [14/05/2012]).
Ce diaporama peut être utilisé pour illustrer et compléter les quelques lignes
relatives aux écrivains engagés des XIX et XXe siècles (voir 1. Documents contextuels ; L’écrivain et la politique).
•
Vidéos
Voltaire et l’affaire Calas (2007, DVD)
Frédéric II : roi de Prusse (2011, diffusé le 7/01/2012 sur ARTE et regardable en
deux parties sur Dailymotion :
1ère partie : http://www.dailymotion.com/video/xo19l1_frederic-ii-de-prusse-12_people
2ème partie : http://www.dailymotion.com/video/xo1cga_frederic-ii-de-prusse-22_people#rel-page-under-3)
Ces deux films s’inspirent de l’œuvre et des idéaux de Voltaire sans y être
directement liés. Il peut être intéressant de les visionner en partie ou dans leur intégralité et de demander aux élèves de retrouver les traces de l’œuvre ou de la pensée
de Voltaire, afin de justifier le titre des films.
Frédéric, l’écrivain (docu-fiction diffusé sur ARTE le 4/01/2012, regardable sur VIDEO
ARTE
à
l’adresse
http://videos.arte.tv/fr/videos/frederic_l_ecrivain6311312.html)
Cet extrait, très bref (40’’), peut être utilisé en guise d’introduction au dossier
pédagogique.
•
Site internet
À l’occasion du 300e anniversaire de Frédéric II (24/01/2012), la chaine de
télévision ARTE a réalisé un espace internet consacré au roi de Prusse http://
www.arte.tv/fr/Frederic-le-Grand/4603124.html). Cet espace présente un certains
nombres d’explications relatives à l’existence de Frédéric II organisées de manière
thématique. À presque chaque thématique correspond une ou plusieurs vidéos très
courtes, publiées sur le site.
« Frédéric, le bâtisseur », « Frédéric, le militaire », « Frédéric et la musique » et « Frédéric, l’écrivain » sont visionnables dans le cadre d’un quizz
« Promenade à Sanssouci ». Celui-ci peut être effectué par les élèves pour leur introduire le personnage de Frédéric II.
Le professeur peut également utiliser le site internet comme ressource documentaire pour les élèves. Il pourrait, par exemple, inviter ceux-ci à réaliser un petit
travail de recherche afin d’établir une courte biographie de Frédéric II, plutôt que de
leur fournir directement le texte issu du document pédagogique.
Ces documents vidéos relatent, pour l’un, un épisode de la vie de Voltaire et,
pour l’autre, l’existence de Frédéric II. Ils peuvent être utilisé, intégralement ou en
partie, pour présenter les deux personnages d’une manière moins conventionnelle.
Candide (1960, DVD)
C’est la faute à Voltaire (2000)
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Bibliographie sélective
L’engagement littéraire, Paris, CNDP, 2011 (Textes et documents pour la classe, n°
1015).
L’esprit des Lumières. Un héritage à éclipses, Paris, CNDP, 1996 (Textes et documents pour la classe, n°716).
Les philosophes par les textes de Platon à Sartre, Paris, Nathan, 1989.
XVIIIe siècle, Paris, Hatier, 2000 (Itinéraires littéraires).
BARBIER F., Histoire du livre, 2ème éd., Paris, Armand Collin, 2009 (Collection U).
DENIS B., Littérature et engagement de Pascal à Sartre, Paris, Éditions du Seuil,
2000.
DENIS M. et BLAYAU N., Le 18e siècle, 3ème éd., Paris, Armand Collin, 2004 (Collection
U).
MACHIAVEL, FRÉDÉRIC II et VOLTAIRE, Le prince; suivi de, L'anti-Machiavel, introd. et
notes par Raymond Naves, Paris, Garnier, 1941.
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