État des connaissances sur les drogues facilitant les agressions

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État des connaissances sur les drogues facilitant les agressions
État des connaissances sur les drogues
facilitant les agressions sexuelles et sur les
interventions infirmières
Myriam Bartura inf. B. Sc. M. Sc. (étudiante)
Judith Lapierre Ph. D.
Professeure du département des sciences infirmières, UQO
Novembre 2005
Tables des matières
Introduction ....................................................................................................... 2
Portrait des agressions sexuelles au Canada ................................................... 3
Les drogues facilitant les agressions sexuelles (les drogues du viol) ............... 5
Tableau de comparaison des diverses « drogues du viol » .............................. 6
Points à mentionner à une victime qui croit avoir été sexuellement
abusée et droguée ........................................................................................... 11
Programme SANE .......................................................................................... 12
Conclusion ...................................................................................................... 16
Références ...................................................................................................... 17
Annexe A : Répertoire des services aux survivantes et survivants
adultes de violence sexuelle à l’égard des enfants, au Québec ...................... 23
Au Canada , une jeune fille sur cinq de niveau secondaire est au prise
avec une relation amoureuse abusive. Dans 60% des agressions sexuelles, la
victime est âgée de moins de 18 ans. Plus de 13 femmes et fillettes sont
agressées sexuellement, chaque jour, en Colombie Britannique. Seulement
10% des agressions sexuelles commises sur des femmes sont rapportées à la
police. Au Canada, il y a environ 509 860 cas d’agressions sexuelles, rapporté
ou non à la police, chaque année. Ceci représente 1 397 agressions sexuelles
chaque jour. Cela équivaut à une femme ou un enfant agressé sexuellement
chaque minute, quotidiennement.
Depuis la nuit des temps, les agressions sexuelles sont taboues. Certains
crient au sexisme de la communauté, d’autres expliquent ce phénomène par la
mode vestimentaire ou par la violence et la nudité véhiculées par les médias.
Quoiqu’il en soit, il s’agit d’une réalité sociale incontournable, franchissant les
frontières de l’âge, du sexe, de la classe sociale et de l’ethnie. N’aidant en rien,
diverses drogues employées pour commettre des agressions sexuelles ont
récemment fait leur apparition.
Le présent document a pour but d’informer et de faciliter le dépistage
d’utilisation de drogues du viol, notamment lors d’agressions sexuelles. Il est
important de prendre conscience que certaines victimes auront consommé des
substances qualifiées de drogues du viol, à leur insu, alors que d’autres les
auront consommées volontairement (U.S. Department of Justice, 2004). Ceci
dit, une victime de viol n’est en aucun cas responsable de ce qui lui est arrivé.
Le gouvernement du Québec (2001) en collaboration avec divers
ministères ont produit des orientations gouvernementales en matière
d’agression sexuelle. Voici la définition qu’ils ont élaborée :
3
« Une agression sexuelle est un geste à caractère sexuel,
avec ou sans contact physique, commis par un individu sans le
consentement de la personne visée ou, dans certains cas,
notamment dans celui des enfants, par une manipulation affective ou
par du chantage. Il s’agit d’un acte visant à assujettir une autre
personne à ses propres désirs par un abus de pouvoir, par
l’utilisation de la force ou de la contrainte, ou sous la menace
implicite ou explicite. Une agression sexuelle porte atteinte aux droits
fondamentaux, notamment à l’intégrité physique et psychologique et
à la sécurité de la personne. »
Portrait des agressions sexuelles au Canada
Selon Statistique Canada (2005), les taux d’agressions sexuelles au
Canada tendent à être en constante régression depuis 2000. Les taux les plus
bas se retrouvent au Québec (58,6 par 100 000 habitants) et les taux les plus
élevés en ordre croissant sont au Yukon, dans les Territoires du Nord-Ouest et
finalement au Nunavut, qui atteint un taux de 941,2 par 100 000 habitants, en
2004. Malgré le fait que le taux d’agression sexuelle au Québec soit très bas, il
importe de le remettre en question. En effet, ce taux reflète-t-il une sorte de loi
du silence qui serait toujours présente ou est-il réellement représentatif de la
situation? Quoiqu’il en soit, il est important de se rappeler que l’objectif à
atteindre est un taux de zéro agression sexuelle. Au Canada, les agressions
sexuelles chez les enfants sont surtout faites par des membres de la famille ou
des proches. Cependant, les adolescents de 14 à 17 ans sont les plus
susceptibles d’être agressés par un pair ou un étranger (Statistique Canada,
2005).
4
La lutte n’est pas terminée puisqu’à l’heure actuelle, neuf agressions sur
dix (10) ne sont pas dénoncées (Radio-Canada, 2005). La Sûreté du Québec
estime pour sa part qu’entre 75 et 90% des abus sexuels ne sont pas signalés
aux organismes de protection (Service des relations communautaires de la
Sûreté du Québec, 1999). Le service des relations communautaires de la Sûreté
du Québec (1999) affirme aussi qu’une femme sur trois et un homme sur six ont
été abusés sexuellement avant l’âge de 18 ans (Radio-Canada, 2005). Il est
primordial de comprendre que peut importe l’âge, le sexe ou l’orientation
sexuelle des victimes, l’agression sexuelle est possible. En effet, il semblerait
que la fréquence de la violence domestique chez les couples homosexuels est
la même que chez les couples hétérosexuels (aardvarc), incluant la violence
sexuelle. Fineran (2002) admet qu’il y a un problème d’harcèlement sexuel chez
les étudiants homosexuels mais que cela est souvent mal rapporté par les
professionnels du milieu car ces derniers tendent à banaliser la problématique,
voir à l’ignorer.
Au niveau municipal, les CALAS de l’Outaouais affirment avoir répondu à
220 demandes d’aide, incluant 59 accompagnements effectués dans le cadre
du service d’accompagnement d’urgence en matière d’agression sexuelle
(CALAS, 2005). Parmi ces demandes d’aide, l’organisme communautaire a vu
une augmentation de la demande provenant particulièrement du groupe d’âge
des 12-17 ans qui représente maintenant, 22% de la « clientèle », au même titre
que le groupe d’âge des 30-39 ans (22%). Il est à noter que 37% des victimes
qui ont recourt aux services offerts ont été agressées entre 0 et 11 ans. Ce qui
porte à un total de 69% des victimes qui ont été agressées avant l’âge de 18
ans, alors que 32% d’entre-elles l’ont été entre 12 et 17 ans (CALAS, 2005). Les
agressions incestueuses sont de l’ordre de 40%, dont 38% étaient commises
par le père des victimes (CALAS, 2005).
5
Les CALACS de Laval qui accompagnent les femmes tout comme les
hommes à travers leur croissance, ont un portrait de la situation pratiquement
similaire à celui de l’Outaouais. En effet, 27% des demandes d’aide sont faites
par des victimes appartenant au groupe d’âge des 30 à 45 ans. Vient ensuite, le
groupe des 12 à 17 ans qui représente pour sa part 21% de la « clientèle ». De
plus, 40% des victimes qui consultent ont été agressées entre 0 et 11 ans.
L’inceste est le type d’agression le plus représenté en étant de l’ordre de 42%
(CALACS, 2005). Cette dernière statistique est explicable par la forte proportion
de victimes ayant été agressées entre 0 et 11 ans. En effet, tel que démontré
précédemment à l’aide de statistiques, les enfants sont généralement agressés
par des membres de la famille (Statistique Canada, 2005). Cette affirmation est
soutenue par le fait que le lien entre la victime et l’agresseur, dont le
pourcentage est le plus élevé, est à 27% le père ou le beau-père des victimes.
Vient ensuite les connaissances à 19 % et la parenté à 17% (CALACS, 2005).
Les drogues facilitant les agressions sexuelles (les drogues du viol)
Lorsque l’on parle de « drogues du viol », on fait principalement mention
à trois substances : le GHB (gamma hydroxybutyric acid), le rohypnol
(flunitrazepam) et la kétamine (ketamine hydrochloride) (voir Tableau 1).
Cependant, « l’alcool, le cannabis, la cocaïne et les benzodiazépines peuvent
également favoriser les relations sexuelles forcées et être considérés comme
des drogues du viol. » (Cybersciences.com, 2002). Le premier cas recensé
d’agression sexuelle au Canada utilisant le rohypnol a eu lieu à Edmonton, en
Alberta le 4 février 2000 (Banks & Cole, 2002).
Différents auteurs s’accordent pour dire que le GHB est une drogue
particulièrement
prisée
lors
de
« raves »
(Cyberpharmacie,
2005;
cyberscience.com, 2002; Bernèche et al., 2000; ). O’connell et al. (2000)
Tableau 1 Comparaison des diverses « drogues du viol »
Nom des drogues
Présentation
physique de la
drogue
GHB (gamma hydroxybutyric Rohypnol (flunitrazepam)
acid)
Liquide, sans odeur ni Comprimé qui se dissout dans
les liquides, sans couleur.
couleur;
(NWHIC, 2004).
Poudre blanche;
Comprimé ou poudre blanche
(cyberpharmacie, NWHIC,
(Banks & Cole, 2002, RTCSM)
2004; RTCSM).
Ketamine
(ketamine
hydrochloride)
Poudre blanche (NWHIC,
2004).
Poudre
(RTCSM)
ou
liquide
N.B. les nouveaux comprimés
deviennent bleus au contact
d’un liquide. (NWHIC, 2004 et
Goût salé (Banks & Cole, Banks & Cole, 2002)
2002).
Comprimé; (NWHIC, 2004,
RTCSM).
Effets
La cyberpharmacie affirme
que les effets cliniques
deviennent manifestes 5 à 15
min. après la prise du produit.
Sa demi-vie est de 27 min.
Les effets varient de 1 à 4
heures.
Les effets physiques les plus
communs: amnésie durant
la durée d’action, dépression
du système nerveux central
(dépression respiratoire,
bradycardie, hypotension,
Selon Banks & Cole (2002),
les effets du rohypnol se font
sentir en 20 à 30 min.
Cependant,
avec
la
combinaison
d’alcool,
les
effets sont intensifiés.
Le pic d’action se situe entre 1
à 3 heures avec une amnésie
variant de 20 min. à 4 heures.
Les effets physiques les plus
commun : amnésie durant la
durée d’action, hypotension,
somnolence, anxiété,
Les effets de la kétamine
se font sentir environ 15
min après une ingestion
orale. Le pic d’action est
de 3 heures. L’amnésie
dure de 1 à 2 heures. Il
s’agit d’un stimulant du
système nerveux central
qui cause de la rigidité
musculaire,
nystagmus,
des
tremblements,
dépression
respiratoire,
perte temporaire de vision,
nausée,
vomissement,
7
Autres noms
somnolence, diminution de la
fréquence respiratoire, coma
(lorsque induit par GHB, il
peut durer de 3 à 6 heures))
dyspnée, tremblement,
sudation, impression de
rêver,
photophobie, ataxie, vertiges,
nystagmus, nausée,
vomissement, myoclonies,
paupières tombantes,
mouvements saccadés des
yeux, incapacité des yeux de
converger, convulsions, mort
(surtout lorsque mélangé
avec alcool, augmentation de
la dépression respiratoire,
arrêt respiratoire, mort)
(Banks & Cole, 2002,
cyberphar-macie, NWHIC,
2004; RTCSM).
Bodybuilder’s, cherry meth,
smart drug dans les party
rave, Grievous Bodily Harm,
GBH, Liquid X, Liquid E,
Liquid Ecstasy, Easy Lay,
G,Vita-G, G-Juice, Georgia
Home Boy, Great hormones,
Somatomax, Bedtime scoop,
Soap, Gook, Gamma 10,
augmentation des rêves,
altération du jugement et
étourdissement, impression
d’être « soul », problème
d’élocution, diminution de la
motricité, perte du tonus
musculaire, perte de
conscience, confusion,
problème de vision, problème
gastrique. (Banks & Cole,
2002; NWHIC, 2004; RTCSM,)
éruptions
cutanées,.
Difficulté à séparer les
rêves de la réalité par la
suite. (Banks & Cole,
2002)
« The forget drug », Roofies,
Rophies, Roches, Roaches, La
Rochas, Rope, Rib, Forget Pill,
Poor, Man’s Quaalude,
Whiteys, Trip-and-Fall, Mind
Erasers, Mexican Valium,
Lunch Money (se qui réfère à
son prix modique (Banks &
Cole, 2002; Rape Treatment
Gift of blankness, special
K, super acid
K, Vitamin K, Black hole,
Bump, Jet, K-Hole, Kit Kat,
Psychedelic Heroin,
Purple (Banks & Cole,
2002; Rape Treatment
Center de Santa Monica).
Hallucinations, perte de la
notion
du
temps et
d’identité, distorsion de la
perception des sons et de
la
vue,
convulsions,
engourdissement, perte de
coordination,
comportement violent ou
agressif,
problème
d’élocution.
(NWHIC,
2004; RTCSM).
8
Statut légal
Energy Drink (Banks & Cole,
2002; Rape Treatment Center
de Santa Monica).
Le GHB est légal depuis peu
aux États-Unis, pour le
traitement exclusif de la
narcolepsie. Par contre, il est
disponible dans des
« smartshops » aux Pays-Bas
(cyberpharmacie). Au
Canada, le médicament n’est
pas encore commercialisé,
mais pourrait devenir
disponible légalement sous
prescription seulement (un
avis de conformité pour le
Xyrem (GHB) a été émis par
Santé Canada:
http://www.nocdatabase.ca/).
Le GHB est une drogue dite
« drogue contrôlée » au
Canada.
Center de Santa Monica).
Le rohypnol est illégal aux
Etats-Unis. Au Canada, il s’agit
d’une substance contrôlée non
commercialisée (donc non
disponible sous prescription),
et donc illégale. Il est
considéré comme une
substance ciblée au Canada.
Par contre, sa distribution est
d’autant plus facile qu’au
Mexique, en Europe, en Asie,
en Amérique du sud et en
Australie, il demeure
disponible sous prescription
(Banks & Cole, 2002). À la
base, il s’agit d’un médicament
prescrit lors d’insom-nie et en
tant qu’anesthésique.
La kétamine est légale aux
États-Unis et est utilisée
comme anesthésique chez
les humains et surtout
chez les animaux. Il est à
noter que plusieurs
cliniques vétérinaires se
font cambrioler pour la
kétamine.
Au Canada, la kétamine
est disponible légalement
sous
prescription
seulement. La kétamine
est considéré comme un
stupéfiant
depuis mai
2005 (Santé Canada).
N.B. Presque tous les articles traitant du rohypnol et du GHB, mentionnent un potentiel de dangerosité important
lorsque mélangés avec de l’alcool. En effet, puisque ces deux substances dépriment le système nerveux central,
le potentiel d’arrêt respiratoire en est augmenté.
9
reconnaissent que les jeunes sont les principaux consommateurs de GHB mais
il ne faut pas oublier les culturistes puisque le GHB aurait des propriétés qui
stimuleraient l’hormone de croissance et par conséquent la masse musculaire
Au service de police de la ville de Montréal, « les agressions sexuelles
liées aux drogues du viol représentent environ 10% des 1 500 cas» traités
annuellement (Deléglise, 2002). À la clinique pour victimes d’agression sexuelle
de l’Hôtel-Dieu, les agressions sexuelles susceptibles d’être liées aux drogues
du viol seraient de 15% (Bernèche et al.,2000). Cependant, dans une étude
menée par Slaughter (2000), sur 2 003 spécimens d’urine, le GHB et le rohypnol
étaient présents dans moins de 3 % des cas. Ce dernier résultat est
probablement explicable par le fait que ces drogues demeurent extrêmement
difficiles à dépister. En effet, non seulement il faut à la victime quelques heures
pour se rappeler ce qu’elle vient de vivre (lorsqu’elle y parvient) mais en plus la
honte et la culpabilité font souvent en sorte que la victime n’ose pas se
présenter à un hôpital. De plus, afin de détecter adéquatement les substances
absorbées, des analyses doivent être faites de 12 à 48 heures suite à leur
ingestion (Bernèche et al., 2000). Ceci dit, Deléglise (2002) affirme que des
analyses d’urine permettent de détecter quelques substances chimiques au-delà
de 72 heures. Le U.S. Department of Justice (2004) suggère des analyses
d’urine jusqu’à 96 heures lorsqu’il est suspecté que des « drogues du viol » ont
été utilisées.
En résumé, le rohypnol, le GHB et la kétamine agissent tous en 10 à 30
minutes. Leur durée d’action se situe entre une à quatre heures. Bien entendu,
cette durée est approximative et est en fonction du poids de la personne, du
contexte de la consommation (si l’individu a consommé d’autres drogues ou
alcool en même temps), de la voie d’absorption et du métabolisme de l’individu.
10
Les effets qu’ont en commun toutes ces drogues sont principalement de
l’amnésie, de la difficulté à séparer les rêves de la réalité (sensation de rêver) et
une dépression respiratoire. Les malaises gastriques (nausées, vomissements)
sont présents pour chacune de ces substances. L’hypotension et la somnolence
sont deux effets que l’on retrouve lors de la consommation de rohypnol ou de
GHB. La kétamine et le rohypnol peuvent tous deux entrainer des troubles de
l’élocution. La dépression respiratoire, les convulsions et le coma peuvent être
des conséquences possibles, surtout lors de la consommation concomitante et
en forte dose d’alcool.
En ce qui a trait au GHB, il peut, en plus des autres symptômes
mentionnés ci-haut, créer de la bradycardie, de la dyspnée, des tremblements,
de la sudation (attention au risque de déshydratation), de la photophobie et des
vertiges. Des nystagmus, des myoclonies (souvent confondues avec des
convulsions) et de l’ataxie peuvent se produire. Finalement, des troubles dans la
région oculaire peuvent survenir, tel que des paupières tombantes, des
mouvements saccadés des yeux et une incapacité des yeux à converger.
Quant
au
rohypnol,
l’anxiété,
l’altération
du
jugement
et
des
étourdissements sont communs. Des problèmes d’ordre moteur peuvent
survenir tel qu’une perte du tonus musculaire et une diminution de la motricité.
La confusion, l’impression d’être « soul » et la perte de conscience sont d’autres
manifestations possibles.
La kétamine pour sa part cause de la rigidité musculaire, la perte de
coordination, des tremblements, des nystagmus et de l’engourdissement. Les
hallucinations, la perte de la notion du temps et d’identité, la distorsion de la
perception des sons et de la vue ainsi que la perte temporaire de vision sont
11
autant de symptômes qui peuvent surgir. Un comportement violent ou agressif
peut se manifester.
Points à mentionner à une victime qui croit avoir été sexuellement abusée et
droguée
Le National Women’s Health Information Center (2004) font les
recommandations suivantes à toute victime potentielle d’agression sexuelle
sous l’influence d’alcool ou de drogue :
-
Aller à une station de police ou à un hôpital le plus rapidement possible;
-
Faire un test d’urine le plus tôt possible afin de détecter les drogues
utilisées;
-
Ne pas uriner avant d’avoir obtenu de l’aide;
-
Ne pas prendre de douche, de bain ou ne pas changer de vêtement avant
d’avoir eu de l’aide. Cela peut effacer des pièces à conviction (Bernèche et
al., 2000);
-
Le Rape Treatment Center de Santa Monica ajoute même qu’il ne faut pas
se brosser les dents, ne pas se laver les mains, ne pas manger ni boire
avant l’évaluation médicale.
Il est aussi pertinent de donner les coordonnées de centres d’aide aux victimes
(voir annexe A).
12
Programme SANE
Il serait impossible de discuter d’agressions sexuelles sans présenter un
programme qui prend de plus en plus d’ampleur aux États-Unis et qui est en
émergence au Canada. Il s’agit du programme SANE (« Sexual Assault Nurse
Examiner »). Ce programme est une initiative infirmière ainsi que de quelques
leaders communautaire (Melton & al., 2001). Il voit le jour pour la première fois
vers la fin des années 1970, à Minneapolis (Minnesota), Memphis (Tennessee)
et Amarillo (Texas) (SANE, 2005).
La mission du modèle SANE est d’offrir un traitement confidentiel,
sympathique et approprié aux victimes d’agression sexuelle. Le programme aide
aussi le système légal en amassant des preuves médico-légales et en
témoignant lors d’audience devant la cour. Le programme a également pour
mission de sensibiliser la communauté au problème des agressions sexuelles
en faisant parvenir l’information pertinente à divers leaders politiques ainsi
qu’aux corps policiers et médicaux. De plus, l’éducation et la prévention dans
les écoles et les groupes communautaires font aussi partie intégrante du
mouvement (Melton et al., 2001). Pour leur part, Du Mont et Parnis (2003)
résument le but ultime du programme SANE comme étant d’augmenter le
rendement, la cohérence et la qualité des soins de santé et des preuves
d’agression (prélèvement, photo, ….) en utilisant qu’un seul professionnel.
Le principal accès à ce service se fait par les hôpitaux mais quelques
cliniques l’offrent aussi. En juillet 1999, la fondatrice du Programme SANE
estimait à 300 le nombre de points de service majoritairement disponibles aux
États-Unis (SANE, 2005). Pour sa part, l’association américaine des infirmières
a reconnu en 1995 le « forensic nursing » comme une spécialité infirmière
(SANE, 2005).
13
Le fonctionnement du programme SANE est d’avoir un groupe
d’infirmières spécialisées, ayant reçu la formation SANE. Elles sont disponibles,
par téléavertisseur, à tour de rôle. Le service doit être en fonction 24 heures par
jour, sept jours par semaine. L’infirmière de garde se doit de répondre aux
appels en 30 à 60 minutes. En général, le personnel médical des urgences
(infirmières ou médecins) doivent s’assurer qu’aucune blessure de la victime ne
met sa vie en danger. On estime à environ 3% les victimes nécessitant des
traitements urgents pour leur blessure (Kagan-Krieger & Rehfeld, 2000;
Williams, 2003). Par la suite, l’infirmière SANE prend le relais. Cette dernière a
pour mandat d’intervenir en situation de crise, afin de diminuer l’anxiété de la
victime et obtenir les preuves d’une agression, que la force a été utilisée et
finalement trouver des preuves sur l’identité de l’assaillant. (Kagan-Krieger &
Rehfeld, 2000). Pour ce faire, l’infirmière SANE se doit :
-
D’obtenir, au courant de l’entrevue, les informations pertinentes au
traitement telles que l’histoire de santé du patient et les détails du crime;
-
Accomplir un examen fonctionnel psychologique afin de déterminer si la
victime est orientée dans les trois sphères (temps, espace, personne) et
évaluer si un risque de suicide est présent;
-
Exécuter un examen physique (examen spécifique);
-
Amasser et préserver des pièces à conviction. Documenter le tout;
-
Effectuer des prises de sang ainsi qu’un prélèvement urinaire et envoyer le
tout à un laboratoire désigné qui est en mesure de déceler l’usage possible
de « drogues du viol »;
-
Traiter et/ou référer la personne pour un traitement médical (l’infirmière
SANE est en mesure de traiter des blessures mineures tel que de légères
abrasions et lacérations);
-
Octroyer à la victime un traitement prophylactique contre des infections
transmises sexuellement et par le sang (ITSS);
-
14
Apporter à la victime les références médicales et psychologiques
nécessaires ainsi que des soins et du support (Littel, 2001).
Il est à noter que les examens ne sont jamais exécutés sans le
consentement des victimes (SANE, 2005).
L’infirmière SANE est habituellement en étroite collaboration avec des
agents de police, des avocats ainsi que des organismes communautaires
spécialisés dans l’accompagnement des victimes. Au Québec, les CALACS
seraient un exemple d’organisme communautaire d’accompagnement.
Les bénéfices que procurent le programme SANE aux victimes
d’agression sexuelle et dans certains cas, de violence conjugale, sont les
suivants :
-
Un temps d’attente diminué en comparaison au temps d’attente dans une
salle d’urgence (Stermac & Stirpe, 2002; Little, 2001). Ceci s’avère très
important puisque durant le temps d’attente, la victime ne doit ni manger, ni
boire, ni même uriner car tout cela risque de détruire des preuves de son
agression (Campbell, 2004);
-
L’excellence de l’intégrité des pièces à conviction et la crédibilité des
infirmières SANE lors de témoignages en cours (Melton et al., 2001);
-
L’augmentation de l’efficacité et de la rapidité de la collecte de preuves
médico-légales, une diminution des coûts pour les patients (dans les pays
dont le système de santé n’est pas universel et gratuit) (Melton et al., 2001);
-
Un meilleur accompagnement des victimes étant donné le temps
d’interruption plus faible lors des soins (20%) que celui des médecins
(25.1%) (Stermac & Stirpe, 2002).
15
Au Canada, ce programme est disponible au Manitoba (Kagan-Drieger
& Rehfeld, 2000), en Colombie Britannique par le biais du « Sexual Assault
Services » au « BC Women`s Health Centre » à Vancouver ainsi qu’à Prince
George. À Edmonton, en Alberta, le service est disponible (Kent, 2000) et
l’Université de Calgary ainsi que celle de Mount Royal College offrent un
diplôme en Forensic Nursing. L’Université de Saskatchewan en fait de même.
En Ontario, plus précisément à Toronto ainsi qu’à Ottawa (Stermac & Stirpe,
2002), un tel programme SANE est en fonction. L’hôpital général de North Bay
vient de se doter de ce programme (Stephens, 2004), lui aussi. Pour sa part, la
Nouvelle-Écosse a emboîté le pas avec un projet pilot de trois ans (Nova Scotia
Department of Health, 2001). Malheureusement, au Québec, aucun document
ne fait mention d’un tel programme. Pourtant, selon un communiqué de l’Ordre
des infirmières et infirmiers du Québec, la loi 36 permet à l’infirmière de remplir
la trousse médico-légale.
Conclusion
Le présent document a fait état de quelques statistiques en ce qui a trait
aux agressions sexuelles au Canada. Les drogues facilitant les agressions
sexuelles ont été expliquées, ainsi que le programme SANE. Finalement un
répertoire des services aux survivantes et survivants adultes de violence
sexuelle a été joint en annexe.
Pour terminer, bien que les taux d’agression sexuelle aient diminué de
manière constante depuis 2000 et que le Québec détient le taux le plus faible au
Canada, il importe de ne pas se réjouir de ces chiffres dans l’immédiat. En effet,
la réelle interrogation est de connaître la raison pour laquelle le Québec a ce
faible taux. Est-ce parce que la loi du silence est toujours de mise ou est-ce
parce que les programmes de prévention initiés par l’agence de santé publique
et la Sûreté du Québec commencent à porter fruits? Quoiqu’il en soit, la
meilleure arme dont on dispose pour le moment est très certainement la
prévention mais aussi le dépistage précoce des agresseurs.
Références
Périodiques
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Bernèche, F., Bouffard, M., Lacroix, L., Moretti, J., Marcil, A., Founier, J.,
Labonté, F. (2000). Agressions sexuelles et « drogues du viol ». Bibliothèque
nationale du Québec.
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CALAS (2005). Rapport d’activités. Gatineau.
Campbell, R. (2004). The Effectiveness of Sexual Assault Nurse Examiner
(SANE) Programs. Applied Research Forum: National Electronic Network on
Violence Against Women.
Du Mont, J., Parnis, D. (2003). Forensic Nursing in the Context of Sexual
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Mental Health, Homophobia, sexual violence in School, Social Work, 47(1),
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Appendice A
Répertoire des services aux survivantes et survivants adultes de violence
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