"Envoyer les juristes plaider au tribunal est un acte de management

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"Envoyer les juristes plaider au tribunal est un acte de management
9/12/2015
[Direction juridique] L'actualité actuEL DJ : "Envoyer les juristes plaider au tribunal est un acte de management", pour E. Duval
"Envoyer les juristes plaider au tribunal est un acte de
management", pour E. Duval
09/12/2015
Elisabeth Duval, la directrice juridique
contentieux de l’opérateur SFR incite ses
collaborateurs à défendre leurs dossiers
devant le tribunal de commerce ou les
juridictions de proximité. Un acte de
management fort, au bénéfice du
collaborateur comme de l’entreprise.
Explications.
Faire plaider les juristes, un moyen de leur permettre de progresser dans leurs tâches au quotidien et
de les valoriser, c'est la conviction d'Elisabeth Duval, directeur juridique contentieux & PI et
compliance officer chez SFR.
Comment se structure la direction juridique de SFR ?
La direction juridique emploie une soixante de personnes, réparties entre une direction grand public,
qui gère notamment les questions de marketing ou de distribution, et une direction contentieux en
charge des litiges qui traite également de la propriété industrielle, et élabore les programmes de
compliance. La direction contentieux comprend onze personnes, qui ne sont pas toutes des juristes
puisqu’il y a également des profils administratifs.
Vous incitez les membres de votre équipe à plaider devant les tribunaux. Pourquoi ?
Je suis moi­même juge au Tribunal de commerce de Paris depuis 2011. J’ai pu constater que peu
d’entreprises envoyaient leurs collaborateurs défendre les dossiers en audience, alors que c’est
parfaitement possible. La présence d’un avocat n’est pas obligatoire devant une juridiction de
proximité ni devant le tribunal de commerce (TC), où la procédure est orale. Or, il se trouve que les
juristes et les non­juristes de mon équipe connaissent parfaitement leurs dossiers, puisqu’ils les ont
travaillés en profondeur. Par ailleurs, en tant que salariés de SFR, ils connaissent très bien
l’entreprise. Ils sont donc à même d’aller jusqu’où bout du processus et, plutôt que de transmettre le
fruit de leur travail à un avocat, d’aller devant les juridictions pour plaider. Cette initiative s’inscrit
comme un acte de management, directement bénéfique au collaborateur. Une fois devant le tribunal,
celui­ci touche du doigt la réalité de l’audience et sa solennité : le vocabulaire, le protocole, le
déroulement, avec le demandeur qui prend la parole en premier, etc. Tout cela est plutôt
impressionnant pour des non­avocats et a le mérite d’inciter le juriste à se dépasser.
Y a­t­il des dossiers plus spécifiquement concernés, et comment les juristes se préparent­ils
à plaider ?
Dans les faits, environ la moitié de notre équipe contentieux s’est rendue devant les tribunaux, qu’il
s’agisse de juridiction de proximité, du TC voire du tribunal d'instance (TI). Toujours sur la base du
volontariat. Concernant les affaires choisies, il n’y a pas de question de montant, mais c’est plutôt leur
typologie qui inspire les collaborateurs à plaider. Ce sont, par exemple, les litiges concernant des
factures ou des dysfonctionnements. Nous avons pris le parti de nous rendre au tribunal pour le
maximum de dossiers, y compris ceux qui peuvent être perçus comme à enjeu mineur, car une
affaire mal terminée peut faire tâche d’huile. Nous avons un parc de 20 millions d’abonnés, nous ne
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pouvons pas nous permettre de traiter les litiges à la légère et il nous faut circonscrire les risques.
Les collaborateurs préparent leur dossier de façon classique et nous leur donnons les moyens de
transiger. Au final, ils ne passent pas de temps additionnel sur l’affaire dont ils ont la charge, en
revanche ils s’entraînent souvent chez eux à parler et à argumenter. Car la difficulté de l’exercice
consiste à se positionner face à un public, notamment face à l’avocat de la partie adverse, et à
plaider.
Comment vos partenaires avocats et votre hiérarchie perçoivent­ils la démarche ?
Nous travaillons au forfait avec les avocats. Le fait que deux ou trois audiences leur échappent n’a
donc aucune incidence sur notre fonctionnement. En revanche, ils constatent qu’un juriste qui a
pratiqué partiellement leur métier connaît de nouveaux ressorts et la communication n’en est que
meilleure. Côté hiérarchie, le directeur juridique apprécie aussi l’initiative et sa portée managériale,
d’autant qu’il s’agit d’une à deux audiences par an pour les collaborateurs volontaires. C’est donc un
phénomène très ponctuel, qui ne les éloigne pas du reste des tâches quotidiennes.
Au final, quels bénéfices retirent les collaborateurs de cet exercice ?
C’est une démarche gratifiante et valorisante, un challenge pour le juriste ou le cadre administratif qui
l’amène à se mettre en lumière et à se dépasser. Tous reviennent ravis de l’audience, car ils ont pu
être convaincants. C’est aussi une façon d’acquérir de la confiance et de l’aisance à l’oral, ce qui est
aussi très précieux. Nous menons de nombreuses formations en interne, notamment auprès de nos
collègues opérationnels, il est donc important d’apprendre à parler en public et à capter l’attention.
Propos recueillis par Olga Stancevic
Ecrit par
Propos recueillis par Olga Stancevic
Mots­clés
Contentieux
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