A la rencontre des écoliers valaisans,Pas facile d
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A la rencontre des écoliers valaisans,Pas facile d
Une génération sacrifiée au Kurdistan irakien Auteur: Rawa Ali Si durant l’enfance on doit vivre comme un adulte, comment vivra-t-on quand on sera adulte ? Au Kurdistan irakien et en Irak, les luttes entre les différents partis politiques s’aggravent jour après jour. L’attention de tous les journaux et des chaînes de télévision au Kurdistan irakien est focalisée sur la guerre, sur les affaires financières et politiques. Chacun donne sa version des faits et propose sa vision du futur sans penser que c’est la nouvelle génération qui édifiera l’avenir. Hélas on a tendance à l’oublier sous la pression des événements. La situation des enfants est cachée sous le tapis aussi bien dans les journaux, sur les sites et à la télévision. On ignore le sort qui est réservé aux enfants qui ont perdu tous leurs droits et qui sont traités comme des adultes. Anéantir l’esprit critique Une des causes de cette catastrophe humanitaire est que beaucoup d’enfants vivent dans des zones occupées par des groupes fondamentalistes (Daech) qui terrorisent la population kurde et irakienne. L’autre cause est l’application par le régime du Kurdistan irakien de mesures qui visent à affamer sa population. Son but est d’anéantir son esprit critique pour continuer à la dominer. Les enfants ne sont pas scolarisés car ils doivent travailler pour gagner de quoi vivre, comme on le voit sur cette photo ci-dessus prise par mon frère à Solaymania où deux fillettes en uniforme de l’école vendent des chewing-gums dans la rue. Quand on agit sans penser aux risques pour l’avenir, c’est le futur des prochaines générations qui s’annonce très sombre. Si la situation reste la même, on prépare une génération d’analphabètes qui fera reculer toute la population de cent ans dans le passé. Notre avenir ne sera pas meilleur que maintenant, car aujourd’hui déjà le pays est dirigé par des gens incultes qui ont eu pour seuls maîtres d’autres anciens dictateurs. De plus, ils ferment les yeux sur les conséquences qu’ont eues les anciennes dictatures comme celle de Saddam Hussein et ne veulent pas voir les conséquences auxquelles aboutira leur propre dictature. « J’ai mieux à faire ! » Le 21 décembre 2014, j’étais comme journaliste sur le territoire de Chengal, (une région revendiquée par l’Irak et le Kurdistan irakien) pour la couverture médiatique de la guerre entre les Pechmergas (combattants kurdes) et Daech. C’était le soir. J’avais dormi dans la voiture. Au matin, en ouvrant les yeux, j’ai vu un tout jeune berger qui portait un fusil à l’épaule presque de la même taille que lui. Je l’ai pris en photo, puis je suis allé vers lui et je l’ai salué. Il m’a répondu et je lui ai demandé ce qu’il faisait là. Il m’a dit : « Je suis berger ». Je lui ai alors demandé : « Tu ne vas pas à l’école ? » Il m’a répondu : « Non, laisse tomber j’ai mieux à faire ! Est-ce que vous connaissez ces Pechmargas là-bas ? Vous pouvez leur demander qu’ils me donnent des munitions pour mon fusil ? » La demande de ce garçon m’a fait beaucoup réfléchir au fait que, au Kurdistan irakien, nous n’avons pas seulement raté le passé et le présent mais que nous sommes également en train de rater l’avenir. Revan Noori Membre de la rédaction neuchâteloise de Voix d’Exils A la rencontre des écoliers valaisans Marcus jouant au « Awele » avec les élèves, un jeu typique d’Afrique de l’Ouest. Photo: Voix d’Exils. En Valais depuis près de 3 ans, Marcus est toujours dans l’expectative concernant sa demande d’asile. En attendant une réponse des autorités suisses, cet Ougandais en exil perfectionne son français et apprend à découvrir le canton et ses habitants. Dernièrement, il a collaboré à un projet pédagogique mené dans les écoles de la région. Une expérience unique pour un contact privilégié avec les étudiants valaisans et leurs enseignants. Des rencontres qui ont inspiré Marcus. Depuis quelques temps, je n’ai plus beaucoup écrit. Plusieurs raisons à cela : d’abord, j’ai essayé d’améliorer mon français, que ce soit écrit ou parlé. Durant quelques mois, j’ai également participé à un programme d’intégration. Cette période n’a bien sûr pas été uniquement faite de travail. J’ai aussi pris beaucoup de plaisir. J’ai d’ailleurs développé de nouveaux intérêts en plus de mon obsession pour la course à pied, à commencer par la danse et… les combats de reine, que j’ai découverts au Châble, près de Verbier, invité par un ami suisse. Quel suspense ! J’ai adoré regarder lutter ces animaux bien nourris. Peut-être vous en dirai-je d’avantage dans mon prochain article. Cette fois, je voudrais vous faire part des quelques jours que j’ai passés à Conthey dans le cadre d’une exposition au cycle d’orientation «CO de Derborence». Je n’étais pas là en tant qu’étudiant, mais pour partager ma culture, mon expérience avec les élèves de l’établissement. Un labyrinthe leur montrait également le processus que les requérants d’asile traversent avant de se voir octroyer ou non le titre de réfugié. Quelques jours avant l’exposition, l’excitation et la peur se mêlaient en moi. J’étais heureux d’avoir à pratiquer ma nouvelle langue, content de pouvoir redonner aux Suisses un peu de ce qu’ils m’avaient offert. Mais j’étais aussi apeuré à l’idée du défi linguistique qui m’attendait. La crainte envahissait mon esprit : et si les enfants ne comprennent pas ce que je leur dis ? Aujourd’hui, je suis juste heureux que le positivisme et le courage aient surpassé ma peur. Le premier jour, la réception chaleureuse des enseignants et des étudiants a rendu les choses plus faciles. Répondre à leur intérêt était très encourageant. A ma grande surprise, les étudiants étaient très intéressés à apprendre quelques chose de nouveau, alors qu’ils n’auront peut-être jamais à jouer à nos jeux ou à parler nos langues. J’y vois là une des raisons qui fait le succès de la Suisse : ce besoin inné d’apprendre est un pas vers la créativité. Lorsque je leur présentais l’un des jeux pratiqués dans mon pays, l’Awele/Manchala, les enfants et enseignants m’écoutaient religieusement. Au début, je voyais bien que le nombre de graines dans le support en bois sculpté les faisait douter. Ils se demandaient s’ils pourraient un jour apprendre ce jeu. Mais, à la fin de la séance, leurs sourires ne mentaient pas. Certains m’ont même demandé où ils pouvaient acheter ce jeu. Qu’aurais-je pu demander de plus : non seulement ils ont compris le jeu, mais en plus ils l’ont aussi apprécié. Une autre leçon importante pour moi a été de constater la paix et le calme qui régnaient dans cette école. Étant donné l’âge des élèves, pour la plupart adolescents, j’ai été stupéfait par l’harmonie qui y régnait. Aucun signe de gang ou d’agression entre étudiants. Je comprends maintenant pourquoi beaucoup de parents vivant dans d’autres pays veulent envoyer leurs enfants dans des écoles helvétiques. J’ai aussi découvert le secret qui se cache derrière la paix en Suisse. C’est la formation donnée aux enfants. De gros fusils et une armée de l’air hypersophistiquée protègent peut-être contre une agression extérieure, mais la paix civile ne peut être maintenue que par la bonne éducation des enfants à la maison, à l’école et dans la société. Depuis, il n’est plus surprenant pour moi d’être arrêté par ces charmants enfants qui me tendent une main et me saluent. J’oublie peut-être leurs noms, mais je me rappelle clairement de leurs visages défilant devant les stands où nous présentions nos cultures, dans une ambiance familiale. Le dernier jour, lorsque nous nous sommes dit au-revoir, les émotions étaient très fortes. J’aurais aimé passer plus de jours dans cette école mais comme le disait le roi Salomon : il y a un temps et une saison pour chaque chose. La saison était arrivée à sa fin. Nous devions partir. Durant cette période, les souvenirs de mes écoles primaire et supérieure me sont également revenus. Je me suis aperçu à quel point les années passent. Les générations vont et viennent comme le monde continue de tourner. Quand nous avons passé l’enceinte de l’école, je me suis rappelé de la diversité de toutes les cultures à l’école : les enfants d’Asie, d’Afrique et de différentes parties d’Europe. Discrètement, je me suis mis à chanter le refrain d’une chanson populaire appelée «Black and white », de Three dogs a night. Voici quelques paroles de sa version originale : «The paper is white, the ink is black, the child black, the child is white and together we learn to read and write. What a wonderful world». Marcus Membre de la rédaction valaisanne de Voix d‘Exils Le labyrinthe, qu’est-ce que c’est ? Le labyrinthe. Photo: Voix d’Exils Le labyrinthe est un parcours cheminant entre des panneaux en bois. Il permet de suivre l’histoire du requérant arrivé en Suisse et plus précisément en Valais. Des dessins de François Maret accompagnent des textes basés sur des histoires réelles. Des jeux d’adresse et de mémoire proposent également aux visiteurs de s’adonner à des activités. Ce labyrinthe a été conçu par le centre «Le Botza», qui forme et occupe des requérants d’asile. Le projet est né de l’envie de montrer le chemin physique et émotionnel de la personne qui arrive en Valais. Il doit permettre aux visiteurs de se rendre compte des difficultés rencontrées par les migrants, mais aussi de leurs étonnements à notre égard. La première ouverture au public de ce parcours didactique a eu lieu en 2013 dans le cadre du Festival des Cinq Continents à Martigny. Depuis, il est exposé au cycle d’orientation de Derborence, à Conthey. Pas facile d’éduquer des enfants dans les circuits de l’asile Des enfants du Centre de Perreux à Neuchâtel. Photo: Voix d’Exils Dans différents centres pour requérants d’asile, nous découvrons que les adultes sont préoccupés par l’issue de leur procédure d’asile. En même temps, le sort de leurs enfants – en termes d’éducation et d’avenir – se trouve lié à leurs soucis quotidiens. Comment s’y prennent-ils pour assurer l’éducation de leurs enfants dans ces milieux plutôt difficiles où se côtoient, sans préparation préalable, des cultures, des religions, des aspirations et des origines qui, parfois, n’ont rien en commun ? Voix d’Exils a exploré cette question en se rendant au Centre de Perreux à Neuchâtel La loi suisse stipule que l’enfant d’un étranger obtient le statut juridique de ses parents. Ainsi, les enfants de requérants d’asile reçoivent le statut consécutif au processus d’asile de leurs parents. Ils sont admis avec eux dans les centres d’enregistrement, où seul un billet de sortie fait office de pièce d’identité. Ici, on dort dans un dortoir avec pour unique distinction le sexe et non l’âge. Quelque soit le sexe de l’enfant, jusqu’à l’âge de 10 ans, il reste avec sa mère. Avec les dames, il partage les mêmes douches, fréquentent les mêmes toilettes. Avec le reste des requérants, dont il partage désormais le statut, il occupe le réfectoire et les espaces communs où l’on passe le temps quand les dortoirs sont fermés. Il retrouve les autres enfants qui viennent de plusieurs pays et partage avec eux les espaces de jeux mis à leur disposition. Si les parents passent « l’épreuve du feu » lors de la première interview, qui est menée par les services de l’Office fédéral des migration peu de temps après l’entrée sur le territoire suisse, et qu’ils sont envoyés dans l’un des centres de premier accueil, où ils reçoivent le permis de séjour temporaire – le permis N-, les enfants reçoivent alors le même permis. Dans ces centres aussi, même si les conditions se modifient un peu du fait que les enfants vivent dans des chambres avec leurs parents, il n’en demeure pas moins qu’ils sont toujours confrontés à la cohabitation avec d’autres enfants, dans un espace où éduquer son enfant comme on le souhaite est difficile. Pour en savoir davantage, nous nous sommes rendus au Centre de Perreux, situé dans le canton de Neuchâtel, pour nous entretenir avec les parents, les enfants et leurs encadrants afin de découvrir la réalité éducative des enfants de requérants d’asile. Un contexte éducatif difficile Comme tous les enfants, « les nôtres ont les mêmes envies, les mêmes désirs. Ils nous demandent des Le Centre de Perreux à Neuchâtel. Photo: Voix d’Exils. jouets, veulent aller au cinéma pour enfants, à la piscine, sortir de temps en temps. Seulement, ils n’ont pas la possibilité de vivre comme tous les autres enfants et leur donner une éducation saine est un cassetête pour nous », nous a confié un couple béninois s’occupant de trois enfants qui vit dans le Centre de Perreux. Malgré toute la bonne volonté des responsables des centres pour apporter une attention particulière aux enfants des requérants d’asile, le contexte reste difficile pour assurer une bonne éducation. L’enfant est un être fragile, mais qui apprend vite par l’observation et le mimétisme. De ce point de vue, la situation dans laquelle vivent les parents, avec une incertitude permanente quant à l’issue de leurs procédures d’asile, ne leur permet pas d’assumer un projet éducatif stable et serein. Ce qui présente le risque de voir les enfants se forger des habitudes de l’environnement ambiant, sans que cela soit forcément du goût éducatif de leurs parents. C’est ainsi que nous avons voulu savoir comment les parents font concrètement pour éduquer leurs enfants Des enfants du Centre de Perreux appliqués à bricoler. Photo: Voix d’Exils dans un tel contexte. Notre couple béninois n’a eu que deux mots pour exprimer son angoisse : « c’est difficile » mais, poursuit-il, « nous faisons un effort pour parler régulièrement à notre enfant chaque fois que nous sommes seuls dans notre chambre ». En plus, ce couple nous a avoué n’être pas capable de satisfaire les désirs de leur fillette de cinq ans en matière de loisirs : « quand nous allons dans des magasins, par exemple, elle voit des jouets dont elle a envie, mais nous ne pouvons pas les lui offrir par manque de moyens. Elle doit se contenter des jouets mis à la disposition des enfants par le Centre ». Mais leur préoccupation majeure reste la scolarisation de leur enfant: « pourra-telle avoir un niveau scolaire qui ne compromet pas son avenir ? », nous a demandé sa mère. C’est à ce sujet que nous nous sommes entretenus avec la responsable du Centre de Perreux, Mme Françoise Robert. La scolarisation des enfants au Centre de Perreux Mme Françoise Robert, directrice du CAPE. Photo: Voix d’Exils Selon Mme Françoise Robert, il s’agit d’un programme spécial destiné aux enfants requérants d’asile. Il a été mis sur pied quand les enfants ne pouvaient plus aller à l’école de la commune de Boudry. Le fait que la plupart des enfants ne parlent pas français était une contrainte supplémentaire pour les enseignants qui devaient disposer de plus de temps et de matériel pour ces enfants. Des difficultés financières avec la commune sont venues compliquer la scolarisation des enfants à Boudry. C’est ainsi que les responsables du programme de l’enseignement obligatoire ont décidé que les enfants requérant d’asile seraient scolarisés dans le Centre, en y ouvrant une classe. Ce qui est regrettable, de l’avis de Mme Françoise Robert car, explique-t-elle, « les enfants prennent l’école au Centre comme un moment de divertissement. Ils arrivent en retard et des fois il faut courir dans les corridors pour les obliger à aller en classe. » En plus, poursuitelle, « les enfants qui ont connu l’école de la commune sont un peu perdus quand il faut suivre la nouvelle initiative. Ces rencontres avec d’autres enfants de leur âge leur manquent, des enfants francophones avec qui ils assimilaient rapidement le français, sans oublier le manque d’activités comme le sport et la piscine. » Cependant, sans s’abandonner à des regrets interminables, les responsables du Centre essaient de faire de leur mieux pour que les enfants ne soient pas totalement coupés de la réalité scolaire dans le contexte particulier qu’est le leur. En ce sens, la contribution du Centre consiste à veiller au bon fonctionnement de cette scolarisation en sensibilisant toujours les enfants et en responsabilisant de plus en plus les parents, étant donné qu’il s’agit de l’avenir de leurs enfants. Le Centre veille aussi au maintien de la parfaite collaboration qui existe entre les enseignants et la direction du Centre pour le bien des enfants dont la situation est déjà particulièrement difficile. Un programme scolaire spécial On l’aura deviné : à situation scolaire spéciale, programme scolaire spécial. Donné par deux enseignantes, à Caroline et Geneviève, les deux enseignantes du CAPE. Photo: Voix d’Exils raison de trois matins par semaine pour l’une et de trois après-midis par semaine pour l’autre, les enseignantes font plus de l’encadrement scolaire qu’un programme scolaire précis pour des enfants compris entre 4 et 14 ans. D’ailleurs cet accompagnement « n’a aucun objectif comme dans une école normale. Il vise juste à donner aux enfants une petite base en français ainsi qu’en en mathématiques, et à disposer d’une approche de l’école suisse afin de pouvoir éventuellement se débrouiller plus tard », nous a confié Mme Marie-Jeanne Tripet, l’une des maîtresses des enfants. Ce qui fait qu’il n’y a pas de méthodologie définie au préalable. Elle est contextuelle et adaptée à la situation de chaque enfant. A noter que certains enfants arrivent sans avoir été scolarisés auparavant : « ils ne savent pas tenir un crayon, écrire sur un papier. Si cela est déjà difficile pour un enfant qui connaît le français, on peut imaginer la situation d’un enfant qui arrive sans connaître un mot de français! », précise Mme Marie-Jeanne. La limite de la langue reste la difficulté majeure de cette classe à domicile, car elle empêche les enfants d’apprendre rapidement. Le reste du temps Des enfants du Centre de Perreux. Photo: Voix d’Exils Les enfants qui se réveillent d’habitude entre 6h30 et 7h00 et occupent leur journée selon leur âge. Ceux qui atteignent l’âge de quatre ans rejoignent l’école, pendant que les autres restent avec leurs parents ou se rendent à la salle de jeux. En dehors des heures de scolarisation, les enfants jouent entre eux. Leur nombre est souvent un facteur de socialisation, car ils s’adonnent plus facilement à des jeux en groupe, ce qui diminue l’envie d’avoir plus de jouets, comme c’est le cas pour des familles à un ou deux enfants. Il ne leur reste plus qu’à espérer qu’un jour, ils trouveront des conditions plus favorables pour leur vie future. Mais, en attendant, ils supportent mieux leur situation que leurs parents qui se font davantage de soucis pour leur avenir. Ce qui semble loin des préoccupations des enfants. A les voir jouer entre eux, de fois sans se comprendre à cause des différences de langues, on les imagine heureux à leur manière. Pourvu que leur avenir ne leur réserve pas de mauvaises surprises. Angèle BAWUMUE NKONGOLO Membre de la rédaction neuchâteloise de Voix d’Exils Tout est possible! Une étudiante en soins infirmiers. Auteur: Lower Columbia College (CC BY-NC-ND 2.0) Pita, jeune Guinéen de 23 ans et requérant d’asile dans le canton du Valais depuis 14 mois a accepté de répondre à nos questions. Quand Pita (nom d’emprunt) est arrivé en Suisse, il n’avait comme bagage que ses trois années passées à la faculté de médecine de son pays. Très vite, il a intégré l’équipe valaisanne de Voix d’Exils, ainsi que l’atelier de formation serrurerie du centre de formation et d’occupation « Le Botza » à Vétroz. Aujourd’hui, il se confie à nous : « Dès mon arrivée en Suisse, mon premier objectif était d’éviter l’inactivité qui est la source de tous les maux des requérants d’asile (vol, vente de drogue, etc.), je savais que le chemin serait long et semé d’embûches. Mon souhait était de continuer mes études dans un domaine médical, même si j’avais de la peine à croire que ce soit possible. Après un laps de temps nécessaire pour m’adapter à mon nouveau pays d’accueil et grâce à l’écoute des encadrants qui s’occupaient de moi, j’ai émis le désir de m’inscrire à la HES-SO (Haute Ecole Spécialisée de Suisse occidentale) de Sion, dans le domaine d’étude de la santé. Cette école, avec ses sept filières de spécialisation, prépare des professionnels à participer à la promotion de la santé et au développement d’une politique de santé communautaire. Les formations sont conçues en alternance entre études et terrain dans des lieux de pratiques professionnelles. Après une première demande écrite qui a été refusée par le SPM (Service cantonal de la population et des migrations), j’ai reçu une réponse positive, un mois plus tard, suite à une deuxième demande. A l’époque j’habitais à Martigny avec plusieurs colocataires qui n’avaient pas le droit de travailler ; ainsi ils veillaient la nuit et dormaient la journée, donc c’était compliqué pour moi d’étudier et de trouver l’argent pour me payer les transports jusqu’à la HES-SO. Mais tout s’est enchaîné pour mon plus grand bonheur, le Service de l’asile m’a trouvé, à Sion, une petite chambre qui n’a pas de cuisine mais qui me permet de me concentrer sur mes études, sans être dérangé. En contrepartie, j’officie en tant qu’appui aux devoirs scolaires pour les requérants d’asile mineurs accueillis au RADOS (structure d’accueil pour requérants d’asile mineurs non accompagnés à Sion) et je peux y prendre mes repas. A l’école, la couleur de ma peau me fait de la pub. Jamais je n’aurais cru être si bien accueilli, tout le monde me connaît et discute avec moi. Pour eux, je ne suis pas un requérant d’asile, je suis un collègue. Une étudiante venant de Brigue m’a avoué n’avoir jamais discuté avec un Noir avant de m’avoir rencontré. Elle m’a proposé de me donner des cours de ski cet hiver. Je dois vous avouer que j’ai été très surpris de remarquer que ce que racontent certains politiques et médias afin de discréditer les requérants d’asile est totalement différent de ce que pensent les étudiants de cette école. Ce qu’il y a de bien, à part les cours, c’est l’ouverture d’esprit des étudiants et…le nombre de jolies filles ! Dans le cadre de ma formation, j’ai eu l’opportunité d’effectuer mon stage au sein du service de gériatrie d’un établissement hospitalier. Les objectifs de ce stage étaient de découvrir les différentes professions du domaine de la santé; de réaliser des actions de soins et d’accompagnement; d’évaluer mes aptitudes à travailler dans une équipe de soins et d’affirmer ma motivation de poursuivre mes études dans le domaine de la santé en général et, plus particulièrement, en soins infirmiers. Ce stage a été très enrichissant pour moi, tant au point de vue professionnel (j’ai pu valider mon stage avec 92 points sur 100) que relationnel et, sur ce deuxième point, je vais vous conter quelques anecdotes. Souvent les patients me demandaient d’où je venais et je leur répondais que j’étais Haut-Valaisan. Devant leur mine ahurie et quand ils me demandaient : mais de quelle commune ? Je précisais enfin que je suis Africain. Un jour, une patiente m’a demandé : Est-ce que vous faites de la magie pour changer aussi souvent de taille: le matin vous êtes petit et le soir vous êtes grand ? Je suis resté sans voix et, en réfléchissant, j’ai compris ce qu’elle voulait dire. Dans le même service que le mien se trouvait un collègue Sud-Américain très grand et de peau foncée. En fait, cette dame, très âgée, nous confondait (je suis plutôt petit). Une autre patiente m’appelait son rayon de soleil, cela me réchauffait le cœur. Au terme de ce stage, j’ai eu la satisfaction d’avoir atteint mes objectifs. Mais plus que cette satisfaction, ce stage a été très enrichissant pour moi. J’espère donc continuer mes études de Bachelor en soins infirmiers, en Suisse ou ailleurs, car je n’ai toujours aucune garantie de pouvoir rester ici. » Ce que Pita nous a transmis par son témoignage, c’est que la clé de réussite est d’essayer car tout est possible avec de la bonne volonté. La rédaction valaisanne de Voix d’Exils Le calvaire des enfants des rues de Mogadiscio Des enfants qui errent dans les rues de Mogadiscio. Source: http://www.flickr.com/creativecommons/ Depuis la chute du gouvernement somalien sous l’égide du président Mahamed Sayad Baree, en 1991, la Somalie a connu des guerres civiles qui n’ont épargné rien ni personne. Les jeunes, et en particulier les filles, sont les plus touchés par les privations et les violences qui étranglent le pays. Selon la Convention des Droits de l’Enfant : «L’enfant est reconnu, universellement, comme un être humain qui doit pouvoir se développer physiquement, intellectuellement, socialement, moralement, spirituellement, dans la liberté et la dignité». Dans les pays sous développés, hélas, les enfants ne profitent pas de ces droits. En Somalie, où règne la guerre, la famine, la sécheresse et les épidémies, ce sont les jeunes qui sont les plus touchés. Depuis 30 ans, les nouvelles générations se succèdent et grandissent dans un pays chaotique. Elles n’ont jamais connu la paix, le respect des droits humains. Un adolescent de 15 ans déclarait en mars 2010 à Amnesty International : « J’ai vécu la plus grande partie de ma vie dans la peur »,et d’après cette même Organisation Non Gouvernementale (ONG), les enfants représentent la moitié de la population somalienne. Des enfants livrés à eux-mêmes Beaucoup d’enfants perdent leurs parents, soit parce qu’ils ont été tués lors de combats, soit parce que ces mêmes combats les ont séparés. Ils perdent alors la protection et l’affection et sont victimes de mauvais traitements, surtout dans le sud et le centre du pays où règne un chaos généralisé. Les orphelins qui restent à Mogadiscio s’établissent aux alentours des restaurants pour manger les restes. Interrogé par la radio royale somalienne lors d’un reportage, Deeqow Caamir, un adolescent de 14 ans, confie : « Je vis dans un lieu dangereux et je n’ai personne qui puisse m’aider. J’ai besoin de nourriture, d’un abri, de vêtements, d’étudier, de soins… et beaucoup d’autres choses encore dont un enfant a besoin dans ce monde. Je suis exposé à des balles perdues et des obus de mortiers, car je dors au pied d’un mur… Moi et les animaux, on dort ensemble (il pleure). La famine et la peur m’ont conduit à consommer toutes sortes de drogues comme l’alcool, le kat, les cigarettes… pour oublier mon calvaire ». Le reportage a également observé que des jeunes filles âgées de 9 à 17 ans vivent également dans la rue. Elles mendient en groupe autour des restaurants en tendant des gobelets et des assiettes. Elles sont exténuées, affamées, assoiffées et personne ne s’occupe d’elles, car chacun est submergé par ses problèmes personnels. Outre la faim, la peur et le froid, elles sont encore confrontées aux viols. Une femme somalienne témoigne : « Ça nous touche profondément de voir des jeunes filles qui dorment dans la rue, elles sont beaucoup plus vulnérables que les garçons. C’est une situation alarmante, mais qui nous dépasse ! ». L’aide de la famille ou des ONG Il y a deux systèmes de prise en charge des enfants. Le premier, voulu par le système clanique, consiste à répartir les enfants issus de parents très pauvres ou qui les ont perdu durant la guerre, au sein de leurs familles élargies pour qu’elle couvre leurs besoins basiques : avoir un toit, être vêtu, nourri et scolarisé. Certaines familles considèrent ces enfants comme les leurs, tandis que d’autres les exploitent. Le deuxième système fait appel aux ONG. Tel est le cas de « l’association de prise en charge des enfants de la rue », une association locale qui se trouve actuellement à Mogadiscio. Elle est composée de jeunes étudiants qui se sont mobilisés avec très peu de moyens pour tendre la main aux enfants de la rue. Elle finance ses projets en majeures parties grâce à des cotisations et fait de son mieux pour améliorer leurs conditions de vie en fournissant des logements, des vêtements, de la nourriture et la possibilité d’étudier. Elle aide en particulier les adolescents et les jeunes adultes qui ont perdu leurs parents et qui doivent prendre en charge leurs frères et sœurs plus jeunes qu’eux. Hochardan Membre de la rédaction vaudoise de Voix d’Exils Infos : Vous pouvez aider ces enfants en vous adressant à : Amnesty International Bureau régional romand Rue de la Grotte 6 CH – 1003 Lausanne Tél. 021 310 39 40 www.amnesty.ch