L`amour et la musique en partage

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L`amour et la musique en partage
L’amour et la musique en partage
Reza et Kristina. Photo: David Crittin.
Visages de l’asile
« Les hommes font partie du même corps.
Ils sont issus de la même essence.
Si le destin faisait souffrir l’un des membres
Les autres n’en auront pas de repos.
Toi qui es indifférent aux malheurs des autres
Tu ne mérites pas d’être nommé un Homme. »
Ce poème phare de Saadi, célèbre poète de la littérature perse, est
devenu le leitmotiv de la vie de Reza, un jeune Iranien aujourd’hui
requérant d’asile en Suisse.
Le sens de l’autre, c’est ce qui l’a amené à prendre son bâton de pèlerin
pour se mettre en route et aller au carrefour des cultures et des
continents. Sur la terre arménienne, il rencontre Kristina, son amour.
Une même passion pour la musique les réunit : la guitare pour Reza et,
pour Kristina, le qanun, un instrument de musique traditionnelle en
Arménie.
La vie les pousse sur les chemins de l’exil. Ils arrivent en Suisse où
ils
déposent
difficile
:
une
ils
demande
font
d’asile.
l’expérience
L’installation
brutale
du
en
Valais
déracinement,
est
de
l’isolement, de l’incertitude et de la maladie… Mais la musique, cet art
sans frontière qui comme l’amour pousse aux horizons lointains, vient
éclairer leur chemin.
Leur entourage, à Sion où ils vivent, se rend tout de suite compte de
leur passion pour la musique. Heureuse coïncidence, la fête du
bicentenaire du Canton du Valais est en pleine préparation. Les
organisateurs les convient à participer à un spectacle intitulé « la
danse de soi, le pont de l’autre ». Ils répondent favorablement… Les
voilà donc embarqués, Reza à la guitare et Kristina au piano, pour plus
d’une année de préparation. Au cours de cette période, trois mois avant
le jour J, ils accueillent leur premier enfant. Certes, ce changement au
sein du couple n’allait pas faciliter leur disponibilité, mais ils ont
tenu leur engagement jusqu’au bout.
Le 8 août dernier, ils étaient au lieu du rendez-vous, Reza avec sa
guitare et Kristina derrière son piano. Dans la simplicité, l’unique
couple du spectacle et les seuls requérants d’asile parmi les musiciens
ont été très remarqués. Reza, avec l’humilité qui caractérise le couple,
dira : « Nous avons eu simplement la joie de partager notre passion ;
bien sûr, au milieu de cet événement interculturel, nous étions
emblématiques : je suis Iranien, ma femme est Arménienne, notre fille est
née en Suisse. Mais l’identité, ce n’est pas le passeport, c’est la
personne que l’on est. »
Le couple mélomane n’entend pas s’arrêter là. Ils comptent mettre sur
pied un duo pour un enrichissement mutuel et l’enchantement du public.
Que le bon vent les accompagne !
La rédaction valaisanne de Voix d’Exils
« Le personnel médical vaudois offre
une aide considérable aux migrants »
Fbradley Roland en compagnie du personnel médical de la PMU du Flon à Lausanne. Photo: Voix
d’Exils
Ecrivain et ancien rédacteur de Voix d’Exils, Fbradley
Roland s’adresse au personnel de la Policlinique
Médicale Universitaire du canton de Vaud
A l’heure où de nombreux Européens se mobilisent pour accueillir des
migrants chez eux, le personnel médical de la Policlinique Médicale
Universitaire (PMU) a invité à la permanence du Flon l’écrivain et ancien
rédacteur de Voix d’Exils FBradley Roland. A bâtons rompus, ce dernier
retrace le parcours difficile des migrants et souligne l’apport vital du
personnel de santé qui les accueille.
Dans son exposé du jeudi 23 juillet 2015, FBradley Roland porte la voix
des migrants devant une dizaine d’infirmières et de médecins. Compte
rendu.
Depuis ses débuts dans le journalisme, il dit avoir toujours manifesté
son désir de « parler sans être interrompu…». Une façon, pour lui, de
s’opposer aux entraves dont souffre la liberté d’expression. Pour mieux
réaliser son vœu, il sort un livre intitulé « Air Mawari ». Un moyen de
corriger par la plume les non-sens concernant les vérités sur les
odyssées des migrants en direction de l’Europe, de « dénoncer l’ignominie
dans laquelle nous évoluons… Sensibiliser les européens et surtout
humaniser les politiques ». L’essentiel, selon lui, est que les acteurs
de la santé ne se laissent jamais influencer par les discours politiques
beaucoup plus concentrés sur « les chiffres alarmants » que sur l’aspect
humain de la question migratoire. Pour cela, il pense que « si on
n’arrête pas de dire que c’est un numéro de plus, un requérant d’asile de
plus, on s’en fout de ce qui arrive, c’est comme si on passe à côté de sa
vocation. ». Derrière chaque requérant, dit-il à son auditoire, il y a
toute une vie, toute une histoire qui doit être sérieusement prise en
compte. C’est très important de comprendre que nous autres qui venons
d’ailleurs, on a une histoire, il faut essayer d’entrer dans la vie de la
personne même pour quelques secondes, c’est très important, poursuit-til.
Le migrant : une personne dangereuse ?
« L’immigré n’est pas une personne dangereuse, mais une personne en
danger ». Un message fort qu’il lance pour recentrer le débat sur la
récupération politique dont fait l’objet l’immigration. Les requérants
d’asile sont, d’après lui, des boucs émissaires qui continuent d’avoir
mauvaise presse dans les pays d’accueil. Ceci, n’étant pas un fait du
hasard, démontre nettement la volonté de certains politiques de vouloir
vaille
que
vaille
criminaliser
l’impact
socio-économique
de
ces
mouvements humains. « L’immigration c’est le fonds de commerce pour
certains politiques, on monte les uns contre les autres. On se trouve
dans une situation où on croit que l’immigré, qui est là à côté, est la
source des problèmes. » déclare-t-il.
Les lois sur l’accueil, mises en place, semblent être axées sur le
dissuasif pour rendre moins attractive la destination suisse. Les longs
séjours dans les abris de Protection Civile (abris PC) ou « bunkers »,
les longues durées de procédure pour certaines catégories de personnes ne
font qu’accentuer la vulnérabilité de ces derniers.
Pour cela, les auxiliaires de santé ont toujours du pain sur la planche,
car pour garantir l’intégration de cette catégorie d’étrangers, il faut
assurer une bonne prise en charge de leurs problèmes émotionnels.
Le personnel médical au chevet des migrants
Bien que tout ne soit pas rose dans l’accueil, le grand tableau qu’offre
ce phénomène de la migration comporte néanmoins des faits positifs
appréciables. D’après FBradley, le programme d’assistance médicale pour
les migrants, mise en place dans les cantons, joue encore un rôle
fondamental dans leur accompagnement. En effet, beaucoup d’entre eux ont
réussi à surmonter des épreuves difficiles grâce au soutien psychologique
des membres du Centre de Soins Infirmiers (CSI) de Béthusy, du Centre
Hospitalier Universitaire Vaudois (CHUV) ou des autres structures de
santé du canton. L’accueil, l’écoute et le suivi de personnes ayant perdu
l’équilibre moral, contribuent à établir le climat de confiance
nécessaire pour comprendre les mobiles de certains comportements. En
pareilles occasions, les infirmières s’investissent beaucoup avec les
manières adéquates. L’ouverture d’esprit, la souplesse et l’appréhension
positive à l’endroit des sujets qui se présentent à elles, sont hautement
appréciées d’après l’auteur de « Air Mawari ».
Madame Pascale, l’une parmi elles, demande en substance : « Est-ce que
par rapport aux bunkers, puisque maintenant il y en a de plus en plus,
est-ce que vous avez conscience, quelque part, des limites dans
lesquelles les infirmières travaillent ? ». Pour conforter la légitimité
de cette question, FBradley souligne les risques que prennent certains
auxiliaires de santé dans l’exercice de leur mission. Souvent des actes
extra-professionnels sont posés dans le souci d’épauler l’autre qui est
manifestement dans le désarroi. « Faire bien son boulot, c’est déjà
remarquable, le reste peut-être ne dépend pas de vous, il y a beaucoup de
gens qui ne savent pas aller jusqu’au bout et qui s’arrêtent au moindre
obstacle. » répond-t-il. D’ailleurs, dans son exposé et au nom de tous
les requérants d’asile, il rend hommage à ces braves dames en ces
termes : « Vous faites un boulot incontournable, vous ne pouvez pas
imaginer combien de vies vous sauvez ». Ce témoignage de reconnaissance,
bien accueilli par ses hôtes, n’a pas manqué de susciter la réaction du
Docteur Jacques Goin qui ajoute : « Merci de venir nous dire ça parce
qu’on a souvent pas de retours de la part de ces patients, parce qu’on
les voit durant une petite période de leur vie. Ensuite, soit ils
disparaissent dans la clandestinité, soit ils obtiennent le permis B. On
bénéficie de peu de retours quant à ce qui s’est passé, est-ce que ça
s’est bien passé par eux ? Finalement, vous nous rendez une partie de la
monnaie…».
Après une série de témoignages et de remerciements formulés de parts et
d’autres, une séance de dédicace du livre « Air Mawari » marque la fin de
la rencontre. L’enthousiasme et la cordialité s’affichent dans les
visages d’un personnel de santé motivé et encore prêt à agir
pour sa
mission sacerdotale : veiller à la bonne santé physique et mentale des
migrants.
Issa
Membre de la rédaction vaudoise de Voix d’Exils
La Paix
Image réalisée par Hossein, membre de la rédaction neuchâteloise de Voix d’Exils.
La Paix
La Paix était tellement fatiguée
Qu’elle n’arrivait pas à réfléchir…
Elle a allumé une cigarette…
Elle s’est allongée sur le canapé en cuir
Elle a essayé de tout oublier
L’Univers et ses conflits…
Un peu plus tard…
Comme une petite fillette
Elle s’est endormie
Hossein
Membre de la rédaction neuchâteloise de Voix d’Exils