Cabinet A.FADIKA - Tribunal de Commerce d`Abidjan

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Cabinet A.FADIKA - Tribunal de Commerce d`Abidjan
KAD/KF/GS
REPUBLIQUE DE CÔTE D’IVOIRE
------------------COUR D’APPEL D’ABIDJAN
--------------TRIBUNAL DE COMMERCE D’ABIDJAN
--------------RG N° 2693/2015
JUGEMENT CONTRADICTOIRE
du 19/11/2015
-----------Affaire :
LA SOCIETE ETABLISSEMENT JEAN ABIL GAL
COTE D’IVOIRE dite JAG-CI
(Cabinet A.FADIKA & Associés)
AUDIENCE PUBLIQUE ORDINAIRE DU 19 NOVEMBRE 2015
Le Tribunal de Commerce d’Abidjan, en son audience
publique ordinaire du jeudi dix-neuf novembre de l’an deux
mil quinze tenue au siège dudit Tribunal, à laquelle
siégeaient :
Docteur François KOMOIN, Président du Tribunal ;
Contre
LA SOCIETE GENERALE DE BANQUES EN
COTE D’IVOIRE dite SGBCI
(Paul KOUASSI et Associés)
---------------DECISION
-----------Contradictoire
-----------Rejette les exceptions soulevées ;
Déclare la société JAG-CI et la SGBCI recevables
en leur demande principale et reconventionnelle ;
Constate la non conciliation des parties ;
Dit la société JAG-CI mal fondée en sa demande ;
l’en déboute ;
Dit que la créance de la SGBCI existe à l’égard de
la société JAG-CI ;
Dit la SGBCI partiellement fondée en sa demande
reconventionnelle ;
Condamne la société JAG-CI à lui payer la somme
de dix millions (10.000.000) de Francs CFA à titre
de dommages et intérêts pour procédure abusive ;
Condamne la société JAG-CI aux dépens.
Mesdames TIENDAGA Gisèle et DJINPHIE Amenan
Hélène, Messieurs ALLAH KOUAME Jean Marie,
N’GUESSAN Gilbert, TALL Yacouba et René Max
DELAFOSSE
Assesseurs ;
Avec l’assistance de Maître KONE Songui Adama,
Greffier ;
A rendu le jugement dont la teneur suit dans la cause
entre :
La Société ETABLISSEMENT JEAN ABIL GAL Côte
d’Ivoire, dite JAG-CI, société anonyme au capital de
4.000.000.000 F CFA, sise à Abidjan, Cocody, 16 Rue des
Hortensias, Boulevard Latrille, RCCM n° 173413 du 13
octobre 1993, 01 BP 7454 Abidjan 01, agissant aux
poursuites et diligences de son représentant légal,
Monsieur BAKOU Gonaho François, Président Directeur
Général, de nationalité ivoirienne ;
Demanderesse représentée par le Cabinet A. FADIKA &
Associés, Avocats à la Cour d’Abidjan, y demeurant
Abidjan-Plateau au 22, Avenue Delafosse, 01 BP 4763
Abidjan 01, Tél. 20 33 22 15/20 33 21 63/Fax. 20 33 22 32,
e-mail : [email protected] ;
D’une part ;
Et ;
1
La Société GENERALE de BANQUES en Côte d’Ivoire
dite SGBCI, société anonyme au capital de 15.555.555.000
F CFA, inscrite au Registre de Commerce et de Crédit
Mobilier d’Abidjan sous le numéro CI-ABJ-1962-B-2641,
compte contribuable n° 0100774 W dont le siège social est
à Abidjan-Plateau, 5 & 7, Avenue Joseph Anoma, 01 BP
1355 Abidjan 01, Tél. 20 20 12 34, prise en la personne de
son représentant légal, Monsieur Hubert De Saint Jean,
Directeur Général,
Défenderesse représentée par la SCPA Paul KOUASSI &
Associés, Avocats près la Cour d’Appel d’Abidjan ;
D’autre part ;
Enrôlée pour le 16 juillet 2015, l’affaire a été appelée et
renvoyée successivement pour tentatives de conciliation
jusqu’au 29 octobre 2015 ;
A cette date, le dossier est mis en délibéré au 19 novembre
2015 après constat de la non conciliation des parties ;
Advenue cette audience, le tribunal a vidé son délibéré
comme suit :
LE TRIBUNAL
Vu les pièces du dossier ;
Vu l’échec de la tentative de conciliation ;
Ouï les parties en leurs fins, demandes et conclusions ;
Et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
FAITS, PROCEDURE ET PRETENTIONS DES PARTIES
Par exploit d’huissier daté du 08 juillet 2015, la Société
ETABLISSEMENT JEAN ABIL GAL Côte d’Ivoire dite
JAG-CI a donné assignation à la Société Générale de
Banques en Côte d’Ivoire dite SGBCI d’avoir à comparaître
le 16 juillet 2015 par devant le Tribunal de ce siège pour
s’entendre :
-
dire que la créance de la SGBCI n’est pas établie à
son égard ;
2
-
subsidiairement,
prescrite ;
dire
que
ladite
créance
est
A l’appui de son action, la société JAG-CI explique que
prétextant qu’elle lui doit la somme de deux milliards six
cent quarante et un millions quatre cent soixante et un mille
cinq cent vingt-six (2.641.461.526) Francs CFA, la SGBCI
lui a fait servir un commandement afin de saisie immobilière
daté du 09 mars 2015 pour poursuivre la réalisation d’une
hypothèque prise sur le TF 1020 de la circonscription
foncière de Bingerville ;
Cependant, la société JAG-CI affirme ne devoir aucune
somme d’argent à la SGBCI ;
En effet, dit-elle, dans le commandement suscité la SGBCI
fait référence à la «grosse dûment en forme exécutoire d’un
acte d’ouverture de crédit des 21 et 24 novembre 1989.» ;
Or, elle fait noter que cet acte concerne la société JEAN
ABIL GAL SA dite JAG-SA, la BIAO-CI, la BICICI, la SGBCI
et la SIB.
Elle soutient que la société JAG-SA est différente d’elle ;
En outre, elle fait remarquer que l’état des droits réels
produit par la SGBCI ne l’indique pas comme étant le
propriétaire du TF 1020, mais uniquement la société JAGSA ;
Selon la demanderesse, il apparait très nettement de ce qui
précède qu’elle n’est pas la débitrice de la SGBCI ;
Subsidiairement, elle indique que si la créance de la SGBCI
était établie à son égard, cette créance est prescrite au
motif que depuis l’édition des documents sur lesquels se
fonde la SGBCI notamment l’acte notarié des 21 et 24
novembre 1989 et une convention de crédit du 03 février
2000, il s’est écoulé 26 ans pour l’acte notarié et 15 ans
pour l’acte sous seing privé ;
Elle fonde son action en prescription sur l’article 189 du
code de commerce ancien en ce que, dit-elle, les faits sont
antérieurs à l’avènement de l’acte uniforme portant sur le
droit commercial général ;
3
En réplique, la SGBCI soulève l’irrecevabilité de l’action
pour trois raisons, à savoir le défaut de base légale, la
renonciation à la prescription et l’autorité de la chose jugée ;
S’agissant du défaut de base légale, la SGBCI indique que
la prescription étant une fin de non-recevoir, elle ne peut
être invoquée que lorsque l’adversaire de celui qui a initié
l’action élève une prétention en face ;
En outre, elle ajoute qu’étant un moyen de défense, la fin de
non-recevoir ne peut être soulevée par la partie qui s’en
prévaut pour annihiler la prétention de son adversaire que
devant le même juge dans le prétoire duquel l’adversaire a
élevé sa prétention ;
Or, en l’espèce, relève-t-elle, la prescription est soulevée
par la JAG-CI, demanderesse à l’action, alors que celle-ci
n’a pas invoqué cette fin de non-recevoir à l’audience
éventuelle tenue le 08 juillet 2015 dans ses dires et
observations ;
Dans ces conditions, conclut-elle, l’action doit être déclarée
irrecevable ;
Par ailleurs, la SGBCI soutient que la demanderesse ne
peut plus se prévaloir de la prescription pour y avoir
renoncé ;
En effet, elle fait observer que pendant la procédure de
saisie immobilière initiée par la BIAO au cours de l’année
2014 et portant sur le même titre foncier, la société JAG-CI
n’a jamais contesté sa créance, encore moins invoqué la
prescription de ladite créance au cours de l’audience
éventuelle ; de sorte que le juge de l’audience éventuelle,
après avoir constaté les caractères certain, liquide et
exigible de sa créance, a ordonné sa collocation sur le prix
de vente de l’immeuble ;
Elle en déduit que celle-ci a renoncé à cette prescription
conformément aux dispositions des articles 2220 et 2221 du
code civil, et que son action doit être déclarée irrecevable ;
Enfin, la SGBCI soutient que la demande de la société JAGCI a acquis l’autorité de la chose jugée au motif que par
jugement daté du 29 juillet 2015, le tribunal de céans a déjà
statué sur la question et a déclaré nulle cette demande et l’a
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rejetée ;
En l’espèce, dit-elle, les parties étant les mêmes ainsi que
la chose demandée et la cause, l’action doit être déclarée
irrecevable pour autorité de la chose jugée ;
Au fond, la SGBCI allègue que la société JAG-CI n’a jamais
contesté la créance dans la mesure où elle s’est reconnue
débitrice à l’audience éventuelle tenue le 14 juillet 2014
suite à une procédure de saisie du même immeuble initiée
par la BIAO-CI au cours de laquelle elle a été colloquée sur
le prix de vente de cet immeuble ;
Elle estime donc que le moyen relatif à l’inexistence de la
créance est inopérant et que la demanderesse doit être
déboutée de son action ;
Poursuivant la SGBCI indique que la société JAG-CI a initié
la présente action dans l’intention de nuire à ses intérêts ;
En effet, déclare-t-elle, pour soutenir son action la
demanderesse a prétendu que la grosse de la convention
qui sert de base à la procédure de saisie immobilière ne la
concerne pas au motif fallacieux que cette convention
donne à lire qu’elle a été conclue entre le pool de banque
constitué par elle et la société JAG-SA, qui est distincte
d’elle ;
Cependant elle relève que la société JAG-CI a, par le
procédé de la fusion, absorbé la société JAG-SA ; que par
cette fusion-absorption, la société JAG-CI se substitue
activement et passivement à la société JAG-SA ; que dans
ces conditions la demanderesse est devenue la nouvelle
débitrice des banques constituant le pool bancaire en
remplacement de la société JAG-SA ;
Selon la SGBCI, la société JAG-CI n’a jamais ignoré cela
dans la mesure où juste après la fin de la fusion, elle l’a
informée par un courrier de sa qualité de nouvelle débitrice
en remplacement de la société JAG-SA qui, elle, a été
dissoute ;
En outre, ajoute-t-elle, au cours de la procédure de saisie
immobilière initiée courant 2014 par la BIAO-CI et portant
sur le même immeuble, la société JAG-CI n’a jamais
contesté sa créance de sorte qu’elle a été colloquée sur le
prix de vente de l’immeuble ;
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Au surplus, elle fait savoir que cette demande tendant à
faire juger que la demanderesse n’est pas débitrice ou que
cette créance est prescrite avait été déjà soumise au juge
de l’audience éventuelle le 08 juillet 2015 lequel l’avait
rejeté comme mal fondée, et qu’en dépit de tout cela, la
demanderesse l’a assignée devant le tribunal de céans pour
la même demande ;
La SGBCI soutient, au vu de ce qui précède, que le tribunal
constatera que cette action de la société JAG-CI traduit sa
mauvaise foi et son intention de nuire à ses intérêts ; cette
action ayant été introduite par elle dans le seul but de
gagner du temps et continuer de la priver aussi longtemps
possible de cette créance. Elle sollicite donc la
condamnation de la demanderesse à lui payer la somme de
cinq cent millions (500.000.000) de Francs CFA à titre de
dommages et intérêts pour procédure abusive et téméraire ;
La société JAG-CI rétorque que le code de procédure civile,
commerciale et administratif n’a pas fait de la prescription
de l’action une exception ni une fin de non-recevoir et que
c’est pour cette raison que dans une instance similaire, la
juridiction de céans a déclaré recevable l’action d’un
justiciable qui lui demandait de « constater la prescription
d’une action commerciale » ;
Par ailleurs, elle affirme n’avoir jamais renoncé à la
prescription qu’elle a invoquée aussi bien dans la procédure
initiée par la BIAO-CI que lors de la procédure initiée
récemment par la SGBCI ;
Elle ajoute qu’en l’espèce, il n’y a pas autorité de la chose
jugée en ce sens qu’au moment où elle initiait la présente
procédure à la date du 08 juillet 2015, aucune décision sur
la prescription n’avait encore été rendue, la décision du 29
juillet 2015 étant intervenue après la saisine du Tribunal ;
Enfin, elle souligne que la fusion-absorption dont se prévaut
la défenderesse n’a jamais eu lieu et que la SGBCI n’en
rapporte pas la preuve tel qu’il ressort de la décision de la
chambre immobilière du Tribunal de céans qui a « constaté
que l’immeuble dont la vente est poursuivie par la SGBCI
n’appartient pas à la société JAG-CI » ;
Partant, elle estime que son action n’avait pour but que de
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préserver ses intérêts et n’a jamais eu l’intention de nuire à
la SGBCI ;
C’est la raison pour laquelle elle sollicite que la demande
reconventionnelle de la SGBCI soit rejetée ; celle-ci étant
mal fondée.
SUR CE
En la forme
Sur le caractère de la décision
La SGBCI a été assignée à son siège et a conclu ; il y a lieu
de statuer par décision contradictoire.
Sur le taux du ressort
L’article 8 de la loi organique n°424/14 du 14 Juillet 2014,
portant création, organisation et fonctionnement des
juridictions de commerce dispose que : « les Tribunaux de
commerce statuent :
-
en premier ressort, sur toutes les demandes dont
l’intérêt
du litige excède un milliard ou est
indéterminé.
-
en premier et dernier ressort, sur toutes les
demandes dont l’intérêt du litige n’excède pas un
milliard de FCFA. »
En l’espèce, l’intérêt du litige est indéterminé ; il convient de
statuer en premier ressort.
Sur la recevabilité de l’action
La SGBCI soulève l’irrecevabilité de l’action pour trois
raisons à savoir le défaut de base légale, l’autorité de la
chose jugée et la renonciation à la prescription par la
demanderesse ;
Relativement au défaut de base légale, la SGBCI soutient
que la prescription étant une fin de non-recevoir et donc un
moyen de défense, elle ne peut constituer le fondement
d’une action principale de sorte que la présente action doit
être déclarée irrecevable ;
7
Cependant, il s’évince de l’acte introductif de la présente
procédure que la demande principale de la société JAG-CI
est de dire et juger que sa créance n’est pas établie ;
La prescription qu’elle invoque est donc une demande
subsidiaire qui intervient comme une défense au fond ;
En effet, s’agissant en l’espèce d’une prescription extinctive,
la demanderesse l’oppose à la SGBCI pour soutenir que
son droit de créance est éteint en raison de son inaction
prolongée ;
Il convient dès lors de dire le moyen tiré du défaut de base
légale mal fondé et le rejeter ;
Relativement à l’autorité de la chose jugée, la SGBCI
s’oppose à l’action initiée à son encontre par la société
JAG-CI en ce que le Tribunal de ce siège a déjà connu de
cette action, qui a fait l’objet d’un jugement rendu le 29
juillet 2015 ;
La société JAG-CI y résiste en soutenant qu’au moment où
elle initiait la présente action, le jugement sur lequel se
fonde la SGBCI n’avait pas encore été rendu ;
Il est constant que l’autorité de la chose jugée n’a lieu qu’à
l’égard de ce qui a déjà été jugé, et qu’il faut que la chose
demandée soit la même, que la demande soit fondée sur la
même cause et faite entre les mêmes parties dans les
mêmes qualités selon l’article 1351 du code civil ;
L’autorité de la chose jugée suppose donc l’existence d’une
triple identité des parties, de cause et d’objet ;
L’objet de la demande est la prétention, c’est-à-dire le
résultat que son auteur sollicite que le juge lui reconnaisse
ou lui attribue ;
En l’espèce, la société JAG-CI sollicite dans le cadre de la
présente procédure que le Tribunal juge que la créance de
la SGBCI d’un montant de deux milliards six cent quarante
et un millions quatre cent soixante et un mille cinq cent
vingt-six (2.641.461.526) Francs CFA à son égard n’est pas
établie ;
Dans l’instance précédente, la SGBCI a initié une procédure
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de saisie vente immobilière portant sur le titre foncier
n°1020 pour obtenir le paiement de sa créance d’un
montant de deux milliards six cent quarante et un millions
quatre cent soixante et un mille cinq cent vingt-six
(2.641.461.526) Francs CFA ;
Le Tribunal constate à l’analyse des pièces de la présente
procédure, que ce litige ne porte pas sur le même objet que
la précédente ;
Il s’infère de ce qui précède qu’il n’y pas autorité de la
chose jugée en l’espèce ;
Relativement à la renonciation à la prescription, la SGBCI
affirme que la société JAG-CI a renoncé à la prescription en
ce qu’elle ne l’a jamais invoquée au cours des procédures
antérieures ;
Aux termes des dispositions de l’article 2221 du code civil,
« la renonciation à la prescription est expresse ou tacite : la
renonciation tacite résulte d’un fait qui suppose l’abandon
du droit acquis » ;
En l’espèce, il est constant comme résultant des pièces du
dossier notamment de la décision n°2236/2015 du 29 juillet
2015 que la société JAG-CI n’a jamais invoqué la
prescription pendant la procédure de saisie immobilière
initiée par la BIAO le 11 février 2014 et portant sur le même
titre foncier ;
Des pièces du dossier notamment du jugement n°479 CIV
3 F du 14 juillet 2014 rendu par le Tribunal de Première
Instance d’Abidjan à l’initiative de la BIAO-CI, il ressort que
par acte d’huissier, la SGBCI a déposé des dires aux fins de
collocation sur le prix de vente de l’immeuble saisi ;
Il ressort également de ladite décision que la société JAGCI n’ayant pas contesté sa qualité de débitrice envers cette
dernière du montant de sa créance objet de la présente
procédure, sa demande de collocation a été jugée bien
fondée ;
Dès lors, s’agissant de la même créance, objet de la
présente procédure, la société JAG-CI ne peut plus
invoquer la prescription, en application de l’article 2221 du
code de procédure civile, commerciale et administrative ;
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Il résulte de ce qui précède que la société JAG-CI n’ayant
pas opposé la prescription à la BIAO-CI au cours de la
procédure de saisie immobilière par celle-ci, elle est
considérée y avoir renoncé tacitement et ne peut l’invoquer
dans la présente procédure s’agissant de la même
créance ;
Il y a donc lieu d’accueillir favorablement ce moyen tout en
précisant qu’elle ne peut entrainer l’irrecevabilité de l’action,
celle-ci, telle que susjugé, étant relative à l’existence de la
créance ;
La société JAG-CI ayant au total régulièrement initié son
action, il convient de la déclarer recevable ;
Sur la recevabilité de la demande reconventionnelle
La demande reconventionnelle de la SGBCI sert de défense
à l’action principale ; il y a lieu conformément aux
dispositions de l’article 101 du code de procédure civile,
commerciale et administrative de la déclarer recevable ;
AU FOND
Sur l’existence de la créance de la SGBCI
La SGBCI affirme que sa créance à l’égard de la société
JAG-CI est incontestable ;
Aux termes des dispositions de l’article 1315 du code civil,
« celui qui réclame l’exécution d’une obligation doit la
prouver.
Réciproquement, celui qui se prétend libérer doit justifier le
paiement ou le fait qui a produit l’extinction de son
obligation » ;
Pour justifier sa créance, la SGBCI produit la décision n°479
CIV 3 F rendue le 14 juillet 2014 par le Tribunal de
Première Instance d’Abidjan Plateau suite à la procédure de
saisie immobilière du titre foncier n°1020 initiée par la BIAOCI au cours de laquelle elle avait déposé des dires aux fins
de collocation ;
Le Tribunal lit dans cette décision ce qui suit : « la société
JAG-CI n’ayant à aucun moment de la procédure contestée
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sa qualité de débitrice envers la SGBCI, il y a lieu de donner
acte à la SGBCI de ses dires aux fins de collocation et dire
que celle-ci sera colloquée sur le prix de vente de
l’immeuble saisi» ;
Il appartient donc à la demanderesse de rapporter la preuve
qu’elle s’est libérée de sa dette ;
En dehors d’une telle preuve, celle-ci est mal fondée à
soutenir qu’elle n’est pas débitrice de la SGBCI ; la créance
de la SGBCI étant bien établie à son égard ;
Partant, il y a lieu de déclarer sa demande mal fondée et la
rejeter.
Sur la demande reconventionnelle de la SGBCI
La SGBCI sollicite la condamnation de la société JAG-CI à
lui payer la somme de cinq cent millions (500.000.000) de
Francs CFA pour procédure abusive ;
Il est constant en droit processuel que l’exercice d’une
action en justice n’est regardée comme abusif que si son
auteur l’a fait dans une intention de nuire ou avec une
négligence coupable ou en détournant l’action de sa finalité
sociale ;
En l’espèce, en saisissant la juridiction de céans pour voir
dire et juger qu’elle n’est pas débitrice de la SGBCI, la
société JAG-CI exerce une voie de droit ;
La SGBCI trouve le caractère abusif de cette action dans le
fait que la demanderesse prétend qu’elle n’est pas sa
débitrice, mais que cette débitrice est plutôt la société JAGSA qu’elle a absorbée d’une part, et d’autre part, celle-ci
conteste sa créance à cette audience alors qu’elle ne l’a
pas contesté à l’audience éventuelle tenue le 14 juillet 2014
ayant donné lieu au jugement du 14 juillet susmentionné ;
Le Tribunal constate que par un courrier daté du 24 avril
1997 de la société JAG-CI adressé à la SGBCI, cette
société a écrit « que suite aux différentes opérations de
fusion absorption, tous les engagements de la société JAGSA sont maintenant à sa charge » ;
En faisant une telle déclaration, la demanderesse s’est
expressément reconnue débitrice de la SGBCI aux lieu et
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place de la société JAG-SA ;
En outre, il est établi qu’elle a également reconnu sa qualité
de débitrice de la SGBCI au cours de l’audience éventuelle
du 14 juillet 2014 ;
Il est donc curieux que la société JAG-CI initie encore une
procédure pour contester la créance alors qu’elle ne produit
aucune pièce justifiant le paiement de cette créance et se
prévaut en plus de la prescription à laquelle elle a renoncé ;
Il est ainsi évident qu’en initiant toutes ces procédures, la
demanderesse fait preuve de mauvaise foi et n’a pour but
que de nuire aux intérêts de la SGBCI en la privant de cette
créance importante en son quantum ;
Or, le non-paiement de la créance a une incidence négative
sur l’activité de la SGBCI en ce qu’elle réduit
considérablement sa capacité à consentir des prêts qui lui
permettent d’acquérir des gains ;
Dans ces conditions, la SGBCI est en droit de solliciter la
condamnation de la société JAG-CI à lui payer des
dommages et intérêts pour procédure abusive ;
Toutefois, en tenant compte des circonstances de la cause,
il convient de condamner la société JAG-CI à lui payer la
somme de dix millions (10.000.000) de Francs CFA à titre
de dommages et intérêts pour procédure abusive.
Sur les dépens
La demanderesse succombe ; il convient de la condamner
aux dépens.
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement, contradictoirement, en premier
ressort ;
Rejette les exceptions soulevées ;
Déclare la société JAG-CI et la SGBCI recevables en leur
demande principale et reconventionnelle ;
Constate la non conciliation des parties ;
Dit la société JAG-CI mal fondée en sa demande ; l’en
déboute ;
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Dit que la créance de la SGBCI existe à l’égard de la
société JAG-CI ;
Dit la SGBCI partiellement fondée en sa demande
reconventionnelle ;
Condamne la société JAG-CI à lui payer la somme de dix
millions (10.000.000) de Francs CFA à titre de dommages
et intérêts pour procédure abusive ;
Condamne la société JAG-CI aux dépens.
Ainsi fait, jugé et prononcé publiquement les jour, mois et
an que dessus ;
ET ONT SIGNE LE PRESIDENT ET LE GREFFIER. /.
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