reglementation enseignes p zavoli

Transcription

reglementation enseignes p zavoli
L’enseigne en secteur protégé
Philippe ZAVOLI
Doyen de la Faculté de Bayonne
Université de Pau et des Pays de l’Adour
L’installation des enseignes en général et en secteur protégé en particulier est régie par les
articles L.581-1 et s. du Code de l’environnement (ci-après C Env). L’article L.581-3-2° la
définit d’ailleurs comme étant toute inscription, forme ou image apposée sur un immeuble et
relative à une activité qui s’y exerce.
Toutefois, comme elle est susceptible de surplomber le domaine public, des règlements de
voirie peuvent être adoptées en vue d’en déterminer l’implantation. D’emblée, indiquons que
ces règlements de voirie sont d’un moindre intérêt. En effet, l’objectif poursuivi est la
conservation du domaine public. Autrement dit, on est en présence d’une alternative
autorisation/refus sans que l’autorité administrative puisse poursuivre une politique esthétique
en la matière, contrairement aux dispositions du code de l’environnement qui poursuivent un
objectif de protection du cadre de vie.
Remarque : L’enseigne échappe aux dispositions du Code de l’urbanisme et en particulier au
permis de construire ou à la déclaration préalable. Mais on observera que la rédaction de
l’article R.425-29 est plus sujette à discussion que celle de l’ancien article L.421-1. En effet, il
est désormais dit que, « lorsque le projet porte sur un dispositif de publicité, une enseigne ou
une préenseigne, l’autorisation prévue par les sections 2 et 3 du chapitre 1er du titre VIII du
livre V du Code de l’environnement (en bref les art. L.581-4 à L.581-20) dispense de la
déclaration préalable ou du permis de construire ».
L’ancien article L.421-1 prévoyait que, « le permis n’est pas exigé pour l’installation des
dispositifs ayant la qualification de publicité, d’enseigne ou de préenseigne, au sens de la loi
n°79-1150 du 29 décembre 1979 ».
Quoi qu’il en soit, ajoutons que le régime de l’enseigne est précisé par les articles R.581-55 à
R.581-70 et R.581-74 à R.581-79 C Env. En outre, l’article L.581-44 C Env. avait également
prévu qu’un décret fixerait les conditions d’application des dispositions relatives à la
publicité, aux enseignes et aux préenseignes à un PSMV rendu public ou approuvé. Ce décret
n’est toujours pas intervenu…
I : Le régime général de l’enseigne
Considéré comme étant l’accessoire à l’exercice d’une activité économique, l’enseigne est
dotée d’un régime que l’on qualifiera de faussement libéral. Libéral parce que l’enseigne n’est
que rarement interdite et peut, par exemple, être indistinctement installée en agglomération ou
hors de celle-ci contrairement à la publicité ou être installée dans des secteurs protégés ainsi
qu’on le verra plus loin.
1
Faussement libéral parce qu’elle est soumise à de très nombreuses prescriptions rendant
délicate son installation (A) auxquelles se superpose un régime d’autorisation préalable
lorsqu’elle est installée en secteur protégé (B).
A) Le régime de droit commun
Après avoir précisé de manière générale que l’enseigne doit être constituée par des matériaux
durables, maintenue en bon état de propreté, d’entretien et, le cas échéant, de fonctionnement
par la personne exerçant l’activité qu’elle signale et qu’elle doit être supprimée dans les trois
mois de la cession de l’activité qu’elle signalait (art. R.581-55), le Code de l’environnement
prévoit des dispositions selon le mode d’installation de l’enseigne et selon sa taille.
Par exemple :
Lorsqu’elle est perpendiculaire au mur qui la supporte, elle ne doit pas dépasser la limite
supérieure de ce mur. Elle ne doit pas constituer, par rapport à ce mur, une saillie
supérieure au dixième de la distance séparant les deux alignements de la voie publique,
sauf si des règlements de voirie plus restrictifs en disposent autrement ; dans tous les cas,
cette saillie ne peut excéder deux mètres (art. R.581-57) ;
Lorsqu’elle est installée au sol, l’enseigne de plus d’un mètre carré ne peut être placée à
moins de dix mètres d’une baie d’un immeuble situé sur un fonds voisin lorsqu’elle se
trouve en avant du plan du mur contenant cette baie (art. 581-59) ;
La surface unitaire maximale de l’enseigne installée au sol est de 6 m2 qui peut être portée
à 16 m2 dans les communes de plus de 10 000 habitants ou qui font partie d’un ensemble
multicommunal de plus de 100 000 habitants. L’enseigne ne peut néanmoins dépasser 6,
50 m de haut lorsqu’elle a plus d’un mètre de large ou 8 m de haut lorsqu’elle a moins de
un mètre de large (art. R.581-60).
B) Le régime d’autorisation préalable
1-Champ d’application
Le législateur dresse une liste de secteurs protégés dans lesquels l’enseigne, outre le respect
des règles évoquées auparavant, devra bénéficier d’une autorisation préalable.
Selon l’article L.581-4 C. Env., il s’agit :
des monuments historiques classés ou inscrits ;
des monuments naturels et des sites classés ;
des cœurs des parcs naturels et des réserves naturelles ;
des arbres.
Ce régime d’autorisation préalable s’applique également, conformément à l’article L.581-8 C
Env. :
dans les zones de protection délimitées autour des sites classés ou autour des monuments
historiques classés ;
dans les secteurs sauvegardés ;
dans les parcs naturels régionaux ;
dans l’aire d’adhésion des parcs nationaux ;
dans les sites inscrits et dans leurs zones de protection ;
2
à moins de 100 m et dans le champ de visibilité des immeubles classés ou inscrits ;
dans les ZPPAUP.
Enfin, ce régime d’autorisation préalable s’applique dans les ZPR que celles-ci prévoient ou
non des dispositions particulières aux enseignes.
2- Procédure
Le dossier doit être adressé au maire en deux exemplaires par LRAR ou déposé en maire
contre récépissé. Le maire doit faire connaître par lettre au demandeur, dans les quinze jours
de la réception du dossier complet, le numéro d’enregistrement du dossier et la date avant
laquelle la décision devra lui être notifiée. On observera qu’il n’existe pas de formulaire type
(cerfa).
Cette date va dépendre de l’intervention ou non de l’ABF et, si c’est le cas, de la nature de
l’avis qu’il formule. En effet, si l’on a pris soin de distinguer plusieurs hypothèses, c’est parce
qu’elles correspondent à des procédure distinctes. Ainsi pour tous les lieux visés à l’article
L.581-4 auxquels il faut ajouter les secteurs sauvegardés, l’ABF doit formuler un avis
conforme ; le délai d’instruction est alors de quatre mois1. Pour les lieux visés à l’article
L.581-8 sans les secteurs sauvegardés, l’ABF doit formuler un avis simple ; le délai
d’instruction est alors ramené à deux mois. Enfin en ZPR, l’avis de l’ABF n’étant pas requis,
le délai d’instruction n’est que d’un mois.
Lorsque l’avis de l’ABF est requis, le maire lui transmet sans délai l’un des exemplaires du
dossier. L’avis est réputé favorable s’il n’a pas été communiqué au maire quinze jours avant
l’expiration des délais indiqués.
Lieux concernés
Edifice classé ou inscrit (L.581-4)
Monument naturel et site classé (L.581-4)
Parc national et réserve naturelle (L.581-4)
Secteur sauvegardé
Parc naturel régional (L.581-8)
Site inscrit et zone de protection (L.581-8)
Moins de 100 m et champ de visibilité des
édifices classés ou inscrits (L.581-8)
ZPPAUP (L.581-8)
ZPR (L.581-18)
Sans avis
de l’ABF
Avis simple
de l’ABF
Avis conforme
de l’ABF
X
X
X
X
X
X
X
X
X
Il est important de connaître ces délais d’instruction dans la mesure où ils commandent la
formation d’une autorisation tacite.
1
Curieusement il n’est que de 2 mois pour l’installation d’une enseigne dans un cœur de parc national ou dans
une réserve naturelle alors que l’avis conforme de l’ABF est requis.
3
Si la décision est expresse, il revient donc au maire, agissant au nom de l’État, de délivrer
l’autorisation dès lors que l’enseigne répond aux prescriptions fixées par le Code de
l’environnement. Mais, le juge administratif a clairement indiqué que « si l’autorisation du
maire doit être refusée lorsque le dispositif …) ne respecte pas les interdictions ou
prescriptions édictées par les dispositions législatives et réglementaires, le maire peut
également fonder une décision de refus sur d’autres motifs tirés de la protection du cadre de
vie mentionnée à (l’article L.581-2 du Code de l’environnement) » (CE, 7 novembre 2001,
Ministre de l’aménagement du territoire et de l’environnement, req. n°221207, Lebon p.542,
RJE n°3/2002, p.467, chron. Ph. Zavoli.
L’installation d’une enseigne peut ainsi légalement être refusée :
lorsqu’elle aurait pour conséquence de surcharger le rez-de-chaussée d’un immeuble tout
en n’étant pas compatible avec le caractère de site inscrit de la zone considérée (TA Paris,
10 mars 1994, Sté Sayag Electronic, req. n°s 9003836/7 et 9009596/7) ;
lorsque son installation risque « d’altérer l’aspect esthétique de l’immeuble considéré »
(CE, 3 octobre 1997, SARL Mil Mike, req. n°169514, Lebon tables p.671, RJE, n°3/2000,
p.471, chron. Ph. Zavoli) ;
« sur un axe déjà saturé et (contribuant à) une atteinte à la perspective urbaine sur la
basilique » (TA Marseille, 6 juillet 2004, M. Roudaut, req. n°0103104, RJE n°/2005, p.44,
chron. Ph. Zavoli) ;
sur la façade d’un immeuble au motif que « la taille des écritures porterait atteinte au
caractère historique des lieux » (TA Strasbourg, 5 avril 2005, Société Sogeca, req.
n°0402854) ;
lorsqu’elle est visible d’un secteur où un programme immobilier est en cours de
réalisation ce qui affecterait la qualité de l’environnement urbain du nouveau quartier (CE,
7 novembre 2001, Ministre de l’aménagement du territoire et de l’environnement, précité)
En revanche, si l’enseigne, de dimensions modestes, est implantée sur un bâtiment « qui ne se
distingue en rien de tous les autres bâtiments identiques construits dans ce secteur (…) que
des enseignes similaires sont implantées dans des conditions identiques et non choquante sur
des immeubles de même caractère dans cet environnement », le refus sera jugé illégal (CAA
Nancy, 27 septembre 2004, Commune de Strasbourg, req. n°s 01NC01193 et 01NC01216).
C) Le régime particulier des enseignes temporaires
Il existe un régime particulier pour les enseignes temporaires fixés par les articles R.581-74 à
R.581-78. Sont concernées :
les enseignes qui signalent des manifestations exceptionnelles à caractère culturel ou
touristique ou des opérations exceptionnelles de moins de trois mois ;
les enseignes installées pour plus de trois mois lorsqu’elles signalent des TP ou des
opérations immobilières de lotissement, construction, réhabilitation, location et vente ;
les enseignes installées pour plus de trois mois lorsqu’elles signalent la location ou la
vente de fonds de commerce.
Ces enseignes peuvent être installées trois semaines avant le début de la manifestation ou de
l’opération qu’elles signalent et doivent être retirées au plus tard une semaine après la fin de
la manifestation ou opération.
4
Elles sont soumises à des conditions d’implantation et de taille définies par l’article R.581-76
et sont soumises à autorisation lorsqu’elles sont implantées dans les mêmes lieux qu’évoqués
plus haut.
En revanche la procédure d’autorisation est différente eu égard à leur caractère temporaire.
C’est ainsi que l’avis simple de l’ABF est requis lorsque les enseignes temporaires de plus de
trois mois sont installées dans les lieux définis à l’article L.581-4-I.
Si l’avis de l’ABF est requis l’autorisation est tacitement accordée à l’expiration d’un délai de
deux mois. En l’absence d’avis de l’ABF, l’autorisation est tacitement accordée à l’expiration
d’un délai d’un mois.
II : La diversité des réglementations locales
Si les élus locaux estiment que les règles nationales qui viennent d’être évoquées ne sont pas
suffisamment adaptées aux caractéristiques de leur commune, il leur est loisible d’y apporter
des modifications. Deux procédures sont prévues par les textes, une « lourde » définie à
l’article L.581-18 al. 2 C Env. au terme duquel « les actes instituant les ZPA, les ZPR et les
ZPE peuvent prévoir des prescriptions relatives aux enseignes » (A), une seconde, « allégée »
définie à l’article R.581-61 (B).
A) La procédure de droit commun
1- Le déroulement de la procédure
Il incombe au conseil municipal de prendre l’initiative de l’élaboration d’un règlement local
de la publicité. Comme la procédure n’est pas décentralisée, le préfet compose un groupe de
travail chargé d’élaborer le projet et dont la présidence est assurée par le maire avec voix
prépondérante.
Les membres de droit sont, en nombre égal (en pratique quatre ou cinq), des membres du
conseil municipal et éventuellement un représentant de l’assemblée délibérante de l’EPCI
auquel appartient la commune, compétent en matière d’urbanisme ainsi que des membres des
services de l’État (DDE, DIREN, service de l’architecture et du patrimoine, etc.).
Les membres facultatifs sont, à leur demande :
Des membres des chambres consulaires (CCI, chambre de métiers, chambre d’agriculture)
dans une limite de deux représentants par chambre ;
Un membre d’une association agréée d’usager au sens de l’article L.121-5 du Code de
l’urbanisme ;
Cinq représentants des professionnels de l’affichage choisis par le préfet après
consultation des organisations professionnelles représentatives.
Les membres de droit ont voix délibérative, les membres facultatifs ont voix consultative.
Une fois élaboré, le projet est transmis pour avis à la commission des sites, perspectives et
paysages (formation dite « de la publicité »). L’avis est réputé favorable s’il n’est pas
intervenu dans un délai de deux mois. Le projet établi par le groupe de travail, qui a recueilli
5
l’avis favorable de la commission est arrêté par le maire après délibération du conseil
municipal.
Le règlement local est en principe arrêté par le maire au nom de la commune (CE, 8 déc.
2000, Commune de Gières, RJE 2001 n°3 p.479). Il fait l’objet d’un affichage en mairie,
d’une publication au recueil des actes du département ainsi que d’une mention en caractères
apparents dans deux journaux régionaux ou locaux diffusés dans tout le département.
Conformément à l’article L.581-43 C Env, les dispositifs installés antérieurement à
l’institution du règlement local, sous réserve de ne pas contrevenir à la règlement antérieure et
sans que cela permette leur maintien au-delà de la première échéance des contrats et
conventions en cours d’exécution, peuvent être maintenus pendant un délai de deux ans à
compter de l’entrée en vigueur du règlement, sauf pour les dispositifs soumis à autorisation où
le point de départ du délai de 2 ans commence à courir à compter de la décision de l’autorité
de police ordonnant sa suppression ou sa mise en conformité.
Il n’existe pas de procédure particulière d’adaptation de la réglementation. Celle-ci s’effectue
conformément à la procédure qui a conduit à l’élaboration du règlement local.
2- Le contenu de la réglementation
Généralement, le règlement local institue des ZPR c’est-à-dire des zones dans lesquelles la
publicité ou les enseignes sont soumises à des prescriptions plus sévères que le régime
général. De manière constante, le juge administratif précise que le maire dispose « d’un large
pouvoir d’appréciation » dans la fixation de ces règles qui doivent poursuivre un objectif de
protection du cadre de vie. On précisera que, conformément à l’article L.581-18, dans les
ZPR, l’installation d’une enseigne est soumise à autorisation. Cela ne permet cependant pas
au maire d’instituer un régime d’autorisation préalable sur l’ensemble du territoire communal
et donc dans des secteurs qui ne sont pas couverts par une ZPR (CAA Marseille, 2 juin 1998,
Courquin, RJE n°3/2000 p.472).
Force est cependant de constater la faiblesse du contentieux en matière de règlement local des
enseignes. La participation des principaux intéressés à l’élaboration des règles qu’ils devront
par la suite respecter y est très probablement pour beaucoup. Il ne faut pas perdre de vue que
l’enseigne est un accessoire essentiel à l’exercice d’une activité économique et que si la
protection du cadre de vie est d’intérêt général, la liberté du commerce et de l’industrie l’est
tout autant…
Toutefois a été jugé illégal, le règlement de Montpellier interdisant par mesure générale toute
enseigne par projection intermittente à l’exception des journaux électroniques que la ville
installera pour son propre compte (CE, 20 septembre 1993, Sté Sayag Electronic).
En revanche, a été jugé légal, le règlement de la ville de Paris instituant une ZPR n°2 dans
laquelle les enseignes devront suivre des prescriptions relative à la lumière et aux caractères
des enseignes autorisées (CE, 29 juill. 1994, Ministre de l’équipement c/ Sté Sayag
Electronic, Quot. Jur. 29 nov. 1994, p.5).
B) La procédure allégée
6
Elle est prévue aux articles L.581-4-II et L.581-4-III. Ici la mise en place du groupe de travail
n’est pas nécessaire, un arrêté municipal suffit après l’avis de la commission départementale
des sites dont l’avis est réputé acquis s’il n’a pas été émis dans les deux mois de la demande
adressée par le maire au préfet.
Cette procédure allégée a une contrepartie tenant aux possibilités limitées d’adaptation du
régime national.
En effet, les adaptations ne concernent que :
les modalités d’implantation des enseignes apposées à plat sur un mur ou parallèlement à
un mur (R.581-56) ;
la dérogation à l’interdiction d’apposer des enseignes perpendiculaires au mur devant une
fenêtre ou un balcon (dernier alinéa de l’article R.581-57) ;
les modalités d’installation des enseignes installées sur les toitures et les terrasses en
tenant lieu (troisième et quatrième alinéa de l’article R.581-58) ;
enfin, uniquement lorsque les enseignes contribuent de façon déterminante à la mise en
valeur des lieux considérés ou aux activités qui y sont exercées, des dérogations aux
conditions de surface définies par l’article R.581-60.
7