Théor`eme d`Ascoli

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Théor`eme d`Ascoli
Développement n◦ 39/74
Benjamin Groux
Théorème d’Ascoli
Mon développement
Dans tout ce développement, (X, d) est un espace métrique compact et (Y, d′ ) est un
espace métrique complet. On rappelle que, muni de la distance
D∞ : (f, g) 7→ sup d′ (f (x), g(x)) ,
x∈X
l’espace C 0 (X, Y ) des fonctions continues de X dans Y est complet.
Théorème (Ascoli). Soit A une partie de C 0 (X, Y ). A est relativement compacte si et
seulement si
(i) A est équicontinue, i.e.
∀x0 ∈ X, ∀ε > 0, ∃η > 0, ∀x ∈ X, d(x, x0 ) < η ⇒ sup d′ (f (x), f (x0 )) < ε .
f ∈A
(ii) Pour tout x ∈ X, l’ensemble Λx = {f (x), f ∈ A} est relativement compact dans Y .
• On commence par démontrer le sens direct. On suppose donc que A est relativement
compacte.
En particulier, A est précompacte, donc pour tout ε > 0, il existe f1 , . . . , fp ∈ A tels que
A⊂
p
[
BD∞ (fi , ε) .
i=1
Les fonctions f1 , . . . , fp étant continues sur le compact X, d’après le théorème de Heine, elles
sont uniformément continues sur X. Il existe donc δ > 0 tel que pour tous x, y ∈ X,
d(x, y) ≤ δ ⇒ ∀i ∈ J1, pK, d′ (fi (x), fi (y)) ≤ ε .
Soit alors f ∈ A. D’après les deux points ci-dessus, d’une part il existe i ∈ J1, pK tel que
D∞ (f, fi ) ≤ ε, et d’autre part pour tous x, y ∈ X tels que d(x, y) ≤ δ, on a
d′ (f (x), f (y)) ≤ d′ (f (x), fi (x)) + d′ (fi (x), fi (y)) + d′ (fi (y), f (y)) ≤ 3ε .
Autrement dit, A est équicontinue.
Par ailleurs, soit x ∈ X. Λx est l’image de A par l’application ϕx : f 7→ f (x), qui est
continue car 1-lipschitzienne. Λx = ϕx (A) est donc inclus dans ϕx (A), qui est compact dans
Y en tant qu’image du compact A par une application continue. On en déduit que Λx est
relativement compact.
Le sens direct est donc démontré.
• Réciproquement, on suppose que A vérifie (i) et (ii).
Soient ε > 0 et x ∈ X. D’après (i), il existe ηx > 0 tel que
∀y ∈ X, d(x, y) < ηx ⇒ sup d′ (f (x), f (y)) <
f ∈A
1
ε
.
2
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Comme X est compact et X =
Benjamin Groux
S
x∈X
Bd (x, ηx ), il existe x1 , . . . , xn ∈ X tels que
X=
n
[
Bd (xi , ηi )
i=1
où on a noté ηi = ηxi .
De plus, d’après (ii), Λx1 , . . . , Λxn sont relativement compacts donc précompacts, donc
leur union également. Il existe donc y1 , . . . , ym ∈ Y tels que
n
[
i=1
Λxi =
m
[
ε
Bd′ yj ,
.
2
j=1
Pour toute fonction ϕ : {x1 , . . . , xn } → {y1 , . . . , ym }, on note
Cϕ = {f : X → Y | ∀i ∈ J1, nK, ∀x ∈ Bd (xi , ηi ), d′ (f (x), ϕ(xi )) < ε} .
D’une part, le diamètre de Cϕ est au plus 2ε. En effet, soient f, g ∈ Cϕ . Pour tout x ∈ X, il
existe i ∈ J1, nK tel que x ∈ Bd (xi , ηi ) donc
d′ (f (x), g(x)) ≤ d′ (f (x), ϕ(xi )) + d′ (ϕ(xi ), g(x)) ≤ 2ε .
Donc D∞ (f, g) ≤ 2ε.
D’autre part, l’union des Cϕ est égale à A. En effet,
soit f ∈ A. Puisque pour tout i ∈ J1, nK,
il existe ki ∈ J1, mK tel que f (xi ) ∈ Bd′ yki , 2ε , on peut définir l’application ϕ qui à tout
xi associe yki . Elle vérifie pour tout i ∈ J1, nK et tout x ∈ Bd (xi , ηi ), d′ (f (xi ), ϕ(xi )) < 2ε et
d′ (f (x), f (xi )) < 2ε , donc d′ (f (x), ϕ(xi )) < ε. On en déduit bien que f appartient à Cϕ .
Finalement, A est égale à l’union des mn ensembles Cϕ , chacun étant de diamètre inférieur
ou égal à 2ε. En choisissant un élément dans chaque Cϕ , on peut donc recouvrir A par une
union finie de boules de rayon 2ε. A est donc précompacte et, puisque l’espace C 0 (X, Y )
est complet, on en déduit que A est à la fois précompacte et complète, donc compacte.
Autrement dit, A est relativement compacte.
Références
J’ai utilisé [Ska04, p. 148]. On peut aussi consulter [ZQ07, p. 151], [Lan83, p. 210].
Leçons correspondantes
J’utilise ce développement pour les leçons 201, 203, 228.
Remarques
– Il faut simplifier la version du théorème si on le présente dans la leçon 228, car celle-ci
concerne les fonctions réelles d’une variable réelle.
– L’utilisation de ce développement dans la leçon 203 est contestable. En effet, on utilise
la compacité pour démontrer un résultat de compacité...
– Dans le sens direct, pour montrer que Λx est relativement compact, on peut utiliser la
caractérisation séquentielle des parties relativement compactes.
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Benjamin Groux
– On peut changer l’hypothèse (i) en l’hypothèse plus forte ≪ A est uniformément équicontinue ≫,
c’est-à-dire η est indépendant de x0 . Cela ne simplifie que très peu la démonstration.
De plus, il vaut mieux avoir les hypothèses les plus faibles possibles puisque c’est la
réciproque du théorème d’Ascoli qui sert le plus en pratique.
– Le théorème d’Ascoli permet de démontrer le théorème des familles normales de Montel
ou le théorème de Cauchy-Arzelà-Peano notamment.
Questions possibles
1. Montrer que l’espace (C 0 (X, Y ), D∞ ) est complet.
2. Définir les notions de compacité qui interviennent dans le développement et préciser
leurs liens.
3. Montrer qu’une partie d’un espace métrique est compacte si et seulement si elle est
complète et précompacte.
4. Justifier qu’une partie est relativement compacte si et seulement si toute suite admet
une suite extraite qui converge.
5. Dans le cas où Y = Rn , comment l’énoncé se simplifie-t-il ?
6. Citer une application du théorème d’Ascoli.
7. Soit K un compact de Rn . Montrer que l’inclusion
C 1 (K, C), k.kC 1 ֒→ C 0 (K, C), k.k∞
est compacte.
8. Soit K : [a, b] × [a, b] → R une application continue. Montrer que l’opérateur
C 0 ([a, b], R) → C 0 ([a, b], R)
Rb
K:
f
7→ x 7→ a K(x, y)f (y) dy
est compact.
Références
[Lan83] Serge Lang : Real analysis. Addison-Wesley Publishing Company, 1983.
[Ska04] Georges Skandalis : Topologie et analyse, 3e année. Dunod, 2004.
[ZQ07] Claude Zuily et Hervé Queffélec : Analyse pour l’agrégation. Dunod, 2007.
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