HIHI .F0 10 Le gouvernement britannique et la Fédération des

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HIHI .F0 10 Le gouvernement britannique et la Fédération des
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BUREAU INTERNATIONAL
DU TRAVAIL
GENÈVE
Etudes et Documents
Série A
HIHI
.F0 10
27 octobre 1920
Le gouvernement britannique
et la Fédération des mineurs de Grande-Bretagne.
Une conférence importante a eu lieu, le 22 septembre 1920,
entre le premier ministre de Grande-Bretagne et la « Triple
alliance industrielle », — laquelle se compose des Fédérations
des mineurs, des cheminots et des ouvriers des transports, — en
vue d'examiner les demandes formulées par les mineurs britanniques.
Ces demandes, dont le principe fut posé à la conférence annuelle
de la Fédération des mineurs, qui s'ouvrit le 6 juillet dernier,
portaient sur les points ci-après :
1) — Réduction de 14 shillings 2 pence par tonne du prix du
charbon employé pour l'usage domesligue en Grande-Bretatagne '.
,
.
2) — Augmentation
des salaires quotidiens des mineurs, selon
l'échelle suivante : adultes, 2 shillings ; jeunes gens, 1 shilling ; garçons, 9 pence.
Le gouvernement ayant, le 26 juillet, rejeté définitivement leurs
demandes, le 1er septembre les mineurs se déclaraient en faveur
de la grève par 606,782 voix contre 238,865. Des avis de grève
étaient aussitôt transmis dans toutes les régions minières, invitant
à cesser le travail le 25 septembre au plus lard.
En présence de cette décision, Sir Robert Home, président du
Board of Trade, invita le comité exécutif de la Fédération à
prendre part à une conférence qui devait avoir lieu le 9 septembre, « en vue, portait l'invitation, de dissiper tout malentendu
en ce qui concerne nos points de vue respectifs 2.»
A la suite de cette conférence, les mineurs modifièrent leurs
propositions comme suit :
1
Le 12 mai 1920
prix de ce charbon de
2
Un compte rendu
a paru dans les Etudes
Série « A », n° 5.
le gouvernement britannique avait augmenté le
14 sh. 2 pence par tonne.
sténographique, en anglais, de cette conférence,
et Documents du Bureau international du Travail,
.
— 2 —
a) le gouvernement accordera immédiatement l'augmentai ion de
salaire demandée de 2 shillings par ¡our ;
b) le gouvernement consent à ce que ¡es frais
supplémentaires
nécessités par celte augmentation de salaire ne soient pas aioutés
au prix du charbon employé à l'usage domestique ;
c) une commission compétente, composée des représentants des parties intéressées, sera nommée en vue de rechercher si, étant donné
la situation financière actuelle de l'industrie minière, une réduction du prix du charbon, employé à l'usage domestique, est possible, et, si oui, dans quelle mesure celte réduction pourrait être
effectuée ;
d) une commission compétente sera chargée de faire une enquête
sur les causes de la diminution du rendement et de suggérer
des mesures en vue de ramener le rendement à un niveau rationnel ;
e) une enquête approfondie sera ouverte, en ce qui concerne le barème
des salaires en vigueur dans l'industrie minière, en vue d'accorder
des salaires correspondant aux nécessités actuelles aux ouvriers
à la pièce et aux ouvriers à l'heure et à la journée.
Ces propositions donnèrent lieu à des pourparlers, entre le
président du Board of Trade et le comité exécutif de la Fédération
des mineurs, qui eurent lieu les 16, 17 et 20 septembre; toutefois, il fut impossible d'en venir à un accord, par suite, d'une part,
du rejet par les mineurs de l'offre du gouvernement tendant à
renvoyer la question des salaires à une commission d'enquête,
et, d'autre part, du refus du gouvernement de prendre en considération la demande d'une augmentation immédiate des salaires
formulée par les mineurs.
Le 21 septembre, les délégués de la Fédération des mineurs
approuvaient l'attitude du comité exécutif, et, le lendemain,
les mandataires de la Triple Alliance, réunis en assemblée spéciale, décidaient d'appuyer les demandes des mineurs. Le même
jour (22 septembre), le premier ministre, en réponse à une invitation de la Triple Alliance, rencontrait les dirigeants de celle
organisation. Nous donnons ci-dessous le compte rendu in extenso
de la discussion qui eut lieu à cette occasion, ainsi que le texte des
communications qui furent échangées subséquemmenl entre le
premier ministre et le comité exécutif de la Fédération des mineurs.
*
*
*
Cette conférence eut pour résultai que la question soulevée par
les demandes des mineurs fit l'objet, le 23 septembre, d'un nouvel
examen de la part des représentants de la Triple Alliance et des
délégués de la Fédération des mineurs, qui se réunirent en assemblées spéciales le même jour.
Le 24 septembre une autre conférence eut lieu, à laquelle prirent
part le premier ministre et les mineurs, et ces derniers acceptèrent
de repousser d'une semaine la publication des avis de grève, en
vue d'essayer de nouveau d'en venir à un accord sur la base des
propositions du gouvernement, à savoir que toute augmentation
de salaire devrait dépendre du rendement des mines.
En conséquence, différents pourparlers eurent lieu au Board of
Trade, les 25, 27, 28 et 29 septembre, entre le comité exécutif de
— 3—
la Fédération des mineurs et le comité de l'Association minière
de Grande-Bretagne (association des propriétaires de mines).
A l'issue de la réunion du 29 il fui annoncé qu'aucun accord
n'avait pu être conclu en ce qui concerne le chiffre du rendement
d'après lequel pourraient être calculées les augmentations de salaires. Les propriétaires des mines offraient en effet de fixer ce chiffre
à 242,000,000 de tonnes, soit la moyenne entre les rendements
respectifs des premier et second trimestres de l'année courante,
tandis que les mineurs désiraient que ce chiffre fût égal à celui du
rendement du troisième trimestre. Les propriétaires des mines
offraient une augmentation immédiate d'un shilling par jour, à
condition que le chiffre du rendement prévu fût atteint; de leur
côté, les mineurs insistaient pour obtenir une augmentation de
2 shillings par jour, avec effet rétroactif à partir du 14 juillet.
Les délégués de la Fédération des mineurs se réunirent le
30 septembre pour examiner la situation et, le lendemain, une
conférence avait lieu qui réunissait le premier ministre, les
délégués de la Fédération des mineurs et des représentants de
l'Association minière de Grande-Bretagne. Une nouvelle proposition fut faite par les propriétaires des mines aux termes de
laquelle était fixé à 240,000,000 de tonnes le chiffre de la production à atteindre pour accorder aux mineurs une augmentation de
salaire d'un shilling par jour; cette proposition prévoyait, en
outre, un barème d'augmentation calculé à raison de 6 pence par
jour, par 4,000,000 de tonnes supplémentaires, avec, comme maximum, une augmentation de 3 shillings par jour, correspondant à
une production totale de 256,000,000 de tonnes.
Au cours d'une réunion des représentants de la Fédération
tenue le 1er octobre il fut décidé de procéder ci un nouveau scrutin
sur la question de la grève et, à cet effet, de repousser au 16 octobre la date de la suspension du travail dans les mines.
Le 14 octobre la Conférence nationale des délégués de la Fédération des mineurs était de nouveau convoquée pour examiner les
résultats du scrutin, qui avait donné les chiffres suivants :
En faveur de l'offre des propriétaires des mines..
Contre
» »
»
»
Soit une majorité défavorable de
180,428
635,098
451,070
Le comité exécutif invita la Conférence, en raison des résultats
de ce vote, à limiter au samedi suivant le délai d'expiration des
préavis de grève; la Conférence approuva celle proposition et résolut en outre de faire connaître au premier ministre les résultats du scrutin, ainsi que la décision adoptée par les délégués des
mineurs relativement à la cessation du travail.
En réponse à la notification qui lui fut faite de cette décision,
le premier ministre en exprima un vif regret et il proposa de
nouveau d'adopter les deux seules solutions possibles qu'avait
suggérées le gouvernement, c'est-à-dire que la demande d'augmentation des salaires fût soumise à un tribunal d'arbitrage et
que l'on fît dépendre l'augmentation des salaires d'un accroisse-
_
4 —
ment de la production égal au chiffre fixé par les patrons, de telle
sorte que le pays pût bénéficier d'un rendement des mines égal à
celui du premier trimestre de l'année courante.
Le 15 octobre les délégués de la Fédération des mineurs s'assemblèrent de nouveau en conférence et il fui décidé d'aviser par
télégraphe les mineurs de tous les bassins, à l'exception du personnel nécessaire à l'entretien des mines, de cesser le travail dès le
lendemain.
Conformément à ces instructions, la grève commença le 16 octobre.
M. Lloyd George était accompagné de M. Bonar Law, de Sir
Robert Home {président du Board of Trade), de M. W. C. Bridgeman, député (secrétaire des Mines), de M. R. Duncan (contrôleur des charbons) et de Sir D. J. Shacklelon
(co-secréiaire
permanent au ministère du Travail).
Les représentants de la Triple Alliance comprenaient des membres du Comité exécutif de la Fédération des mineurs, ayant à
leur tête M. R. Smillie (président) et M. Frank Hodges (secrétaire), ainsi que M. J. H. Thomas, député, M. C. T. Cramp
(Union nationale des employés de chemin de fer), M. H. Gosling
et M. R. Williams (Fédération des employés des transports).
Le
P R E M I E R MINISTRE.
— E h bien, M. Smillie ?
M. S M I L L I E . — J e tiens à m'excuser, M. le premier ministre, de
l'importance de notre deputation, ainsi que du délai limité
q u e nous vous avons laissé pour nous recevoir, mais la question
était urgente. J e suis certain que vous avez suivi de très près les
procès-verbaux des débats, dactylographiés et imprimés.
L E P R E M I E R MINISTRE. — Oui, j ' a i lu le compte rendu des
discussions, vous pouvez en être certain, avec la plus grande
attention, et Sir Robert Horne m'en a rendu compte lui-même.
J ' a i lu très attentiveroent ce qui a été dit de p a r t et d'autre.
M. S M I L L I E . — Ceci abrégera considérablement ce que nous
avons à nous dire.
Le P R E M I E R MINISTRE. —
:
Oui.
M. S M I L L I E . — Nous aimerions vous convaincre, s'il nous est
.possible, de l'urgente nécessité qu'il y a à accorder cette augmentation de salaires aux mineurs, s'ils doivent se maintenir
a u niveau social où, je crois, vous désirez les voir. A la suite de
notre communication, dans laquelle nous vous demandions de
recevoir cette deputation, vous n'ignorez pas quel est le résult a t d'une réunion commune entre les représentants des cheminots, des employés des transports et" des mineurs. Vu la liaison
qui existe entre ces trois corporations, l'arrêt de l'une ou l'autre
de ces branches d'industrie affecterait très rapidement les deux
autres. P o u r cette raison, nous sommes plus étroitement unis
— o —
que les autres trade unions du pays. Dans une conférence tenue
aujourd'hui et où ces trois corporations étaient pleinement
représentées il fut décidé que nous vous demanderions de recevoir une deputation afin que nous puissions vous faire toucher
du doigt l'opportunité de faire droit aux demandes d'augmentation des mineurs. Outre la question d'augmentation,
d'autres questions, vous le savez, ont été soumises à Sir Robert
Horne, qui, du point de vue national, sont aussi importantes
que l'est pour les mineurs celle de l'augmentation, à savoir la
question de la production, celle du nouveau calcul des salaires,
etc. Mais c'est surtout au sujet de l'augmentation des salaires
que nous désirons vous entretenir ce soir. La conférence a
estimé bon de demander à des représentants des cheminots
et des employés de transport de se joindre ce soir au comité
exécutif afin de vous dire quelques mots sur la question. J'ai
été prié de demander à M. Thomas, de l'Union nationale des cheminots, ainsi qu'à M. Gosling, de dire quelques mots.
Je ne crois pas utile de prolonger mon exposé, étant donné que
vous connaissez tout ce que je pourrais dire sur ce sujet.
Le PREMIER MINISTRE. — Oui, je l'ai suivi de très près. Je
connais votre point de vue et j'ai la réponse de Sir Robert
Horne.
M. J. H. THOMAS. — M. le premier ministre, je vais traiter
la question du point de vue de 500,000 cheminots qui, à moins
d'entente, seront automatiquement touchés et il est presque
inutile de dire que les cheminots désirent vivement éviter, si
possible, un conflit, ce qui est fort naturel. Il est assez curieux
qu'il y a aujourd'hui douze mois, en ce moment même, à 5 h. 30,
autour de la même table, vous et moi étions en train de discuter, afin d'éviter une grève qui éclata le vendredi soir. Une chose
remarquable, c'est que l'entrevue que j'appellerais fatale eut
lieu exactement il y a douze mois, jour pour jour, à l'heure même
à laquelle nous nous rencontrons aujourd'hui. Nous nous souvenons naturellement de toutes les circonstances de cette grève
et de ses conséquences. Je désire avant tout insister sur le fait
que, si les mineurs font grève, nous serons affectés. Personne
plus que vous n'a payé un tribut à la solidarité des classes ouvrières. Vous l'avez comprise et appréciée et vous seriez le
premier à vous rendre compte que, dans un grand mouvement
des classes ouvrières où des centaines de mille hommes seront
automatiquement forcés de chômer, si ces hommes estiment que
la cause pour laquelle ils chôment est justifiée, et que les mineurs
sont dans leur droit et que leurs revendications sont fondées,
je n'ai pas besoin de recourir envers vous à la persuasion et à
des arguments, vous qui connaissez si bien la nature humaine,
pour vous dire que le sentiment naturel et instinctif de ces
hommes les porte à donner leur appui à leurs camarades.
Aussi, Monsieur, je tiens à vous faire sentir pourquoi ils croient
qu'une entente devrait être possible. La question n'est pas limitée aux salaires et nous ne pouvons qu'enregistrer avec piai-
— G —
sir que, comme résultat des négociations présidées par Sir
Robert Horne et le comité exécutif de la Fédération des mineurs,
il est réjouissant de constater le degré d'entente qui existe,
malgré le désaccord sur un seul et unique point, lorsqu'il s'agit
de l'avenir de cette industrie ; et c'est pourquoi, je le répète, je
me bornerai, manifestement et exclusivement, à dire pourquoi
les cheminots trouvent que vous n'avez pas examiné avec assez
d'égards la demande des mineurs. En premier lieu, ils comprennent le point de vue du public qui dit : « Puisque leur cause est
bonne, pourquoi les mineurs ne s'adressent-ils pas à un tribunal ?»
Ils comprennent tout à fait cet argument ; mais les cheminots
y répondent en vous soumettant deux propositions. Tout
d'abord, le gouvernement ayant pris le contrôle à la fois des mines et des voies ferrées, devint directement l'employeur des
hommes. Lorsque, pour la première fois après la prise du contrôle par le gouvernement, nous eûmes une entrevue avec les
compagnies de chemin de fer, avant même et depuis que votre
ministère est au pouvoir, les représentants des compagnies de
chemin de fer posèrent comme base de discussion le fait qu'ils
agissaient uniquement pour le compte du gouvernement.
Dans toutes les entrevues qui ont eu lieu et au cours de toutes les
négociations, y compris les toutes dernières, il a été clairement
exposé que le gouvernement était l'employeur. Cette situation
a été admise par vous en ce qui concerne les mineurs. En mars
dernier, à la suite de la décision Sankey, les revendications des
mineurs vous furent soumises. Vous aviez en vue ce que la
commission Sankey avait recommandé et ce qu'elle accorda et,
ayant toutes les données possibles à votre disposition, vous
êtes arrivés à une décision et vous avez fait une certaine concession aux mineurs directement et en qualité de chef du gouvernement. Et c'est pourquoi nous tenons à vous dire, Monsieur, qu'à notre avis vous n'êtes pas en droit de vous écarter
de cette voie dans l'état actuel des pourparlers. J'ai parlé ici
exclusivement de la voie à suivre.
J'en viens maintenant aux revendications en elles-mêmes
et je ferai, en me plaçant toujours au point de vue des cheminots, deux propositions précises. En premier lieu, les chiffres
du gouvernement, généralement reconnus, révèlent une augmentation du coût de la vie de 161%. Ceci sans tenir compte
d'une rubrique très importante qui doit figurer dans les chiffres
de ce mois-ci : d'abord l'augmentation des tarifs de chemins de
fer qui, pour les billets d'ouvriers dans certains cas, va jusqu'à
3 sh. 6 et 5 sh. et qui, en raison de la date de sa mise en vigueur,
ne sera portée que dans les chiffres du mois prochain et non dans
ceux de celui-ci ; et secondement, en raison de l'augmentation
de loyers qui, elle aussi, entre en vigueur ce mois-ci et n'y figure
pas non plus. Mais laissant de côté ces deux rubriques et nous
en tenant aux 161% ci-dessus, les chiffres'du Board of Trade
généralement reconnus montrent que l'augmentation moyenne
des salaires aux mineurs est de 155%, où est encore comprise
une part contestée de 30%. D'une part on dit que ces 30% furent
donnés par la commission Sankey pour améliorer le niveau
économique du mineur en 1914 ; quiconque examinera ces données en tirera, j'en suis convaincu, la même conclusion. Mais
admettons qu'il s'agisse d'un chiffre contesté et tenez-en compte
dans la mesure que vous voudrez. En mars, inspirés par les recommandations de cette commission, vous avez accordé directement une certaine augmentation aux mineurs ; or,- depuis le
jour où elle a été accordée, laissant de côté les deux rubriques
mentionnées par moi et ne prenant en considération que le chiffre du Board of Trade de 161%, l'augmentation du coût de la
vie généralement admise est de 131 %. Donc, Monsieur, à notre
avis, ceci justifie pleinement la demande d'amélioration de 2 sh.
au moins par jour pour les mineurs du pays. Je ne veux pas
arguer de l'importance de leurs fonctions. Vous le savez aussi
bien que moi. Vous savez quelle moralité règne parmi eux, je
ne vais pas insister sur ce point et je ne m'y arrête pas...
Le PREMIER MINISTRE. — Ceci a été exposé avec énergie et
éloquence par M. Smillie dans un de ses discours.
M. THOMAS. — Vous le savez et c'est pourquoi je vais terminer
en disant que d'abord je me rends compte, et que tous mes collègues ici présents se rendent compte que la question est si
grave que le gouvernement ne doit négliger aucune occasion
de causer avec les intéressés. Nous apprécions hautement le
fait que, de la part du Conseil exécutif des mineurs et de votre
part, aucune question de dignité et d'orgueil n'intervient. Je dis
très sérieusement, en homme convaincu, que si cette grève devait
éclater, personne ne peut en entrevoir les conséquences. Aucun
homme ne' peut dire où cela nous mènerait. Mais vous et moi,
vous spécialement, savez bien que, si la grève éclate, quel qu'en
soit le résultat, l'effort financier qui serait demandé au pays
est tel qu'une grève avec toutes ses conséquences pourrait
facilement être le signal de la débâcle. Personne en cette salle,
ni de votre côté, ni du nôtre, ne désire une grève pour le plaisir
de faire grève. Il n'y a personne du côté des mineurs, et en tout
cas pas du côté des cheminots et des employés des transports,
qui ne contemple avec horreur toute la situation. Mais vous
connaissez les classes ouvrières suffisamment bien, et vous savez
suffisamment bien que les mineurs ont le droit de dire : « A
moins que l'on ne nous rende justice, nous devons avoir recours au
seul pouvoir que nous possédons. » Nous désirons nous abstenir
d'en faire usage. Je crois, Monsieur, que c'est notre obligation solennelle, tant de votre côté que du nôtre, de trouver d'ici à quelques
heures un terrain d'entente, si c'est possible. Notre peuple ne
permettra pas que des questions secondaires soient un obstacle.
Pour terminer je voudrais seulement vous demander de vous
souvenir que les cheminots, qui sont eux-mêmes des ouvriers,
qui seront les premiers à souffrir et qui savent toutes les conséquences qui pourraient et doivent en résulter, sentent qu'ils
ne font que leur devoir en insistant à la onzième heure pour
que vous reconnaissiez le bien-fondé de leur cause.
-
8 —
Nous admettons que la revendication des 2 sh. est reconnue.
Nous croyons que la chose est indiscutable ; c'est parce que
nous vous demandons de reconnaître ces faits et ces circonstances qu'au nom des cheminots je vous conjure de reconnaître,
avec nous, d'ici à quelques heures, la gravité de la situation
et d'accorder ce que nous croyons être une demande qui non
seulement mettra fin au conflit, mais ce qui est plus important,
si nous voulons rétablir le crédit du pays, essayer de réparer
ses pertes, une seule chose pourra le faire, c'est de rétablir
la confiance dans toutes les industries, spécialement dans l'industrie minière. S'il y avait lutte et que vous soyez le vainqueur,
cela ne résoudrait pas le problème. Vos hommes seraient aigris
et exaspérés et ils reprendraient le travail non pas pour faire
de leur mieux, mais uniquement pour attendre la prochaine
occasion de revendiquer leurs droits. C'est parce que je crois
que vous avez une occasion d'acheter avec de la justice la bonne
volonté des mineurs du pays que nous, les cheminots, vous
recommandons aujourd'hui de donner suite à leurs demandes.
M. GOSLING. — J'ai seulement quelques mots à ajouter,
M. le premier ministre, nous estimons que cette concession
devrait être faite pour les mêmes raisons que M. Thomas vient
d'exposer. Nous serons affectés, que nous le voulions- ou non,
mais la raison principale pour laquelle mes collègues et moi
nous sommes ici est de vous prouver que nous sommes entièrement d'accord avec les mineurs et croyons qu'ils ont raison.
Nous estimons qu'ils ont prouvé le bien-fondé de leur ca,use, il
y a longtemps déjà, du temps de la commission Sankey, et
qu'on ne devrait pas continuellement exiger d'eux de le prouver
à nouveau avant qu'il soit reconnu. S'ils ont prouvé la justesse
de leur cause, le seul point à examiner maintenant est celui de
savoir de combien leurs salaires doivent être augmentés. Nous
estimons toujours, à en juger par nos propres expériences et
par ce qui a été considéré comme juste, qu'ils ont prouvé leur
droit. Pour ces raisons et parce que nous serons touchés d'une
façon aussi grave, je vous demande, au nom de la Fédération
des employés des transports, de leur faire cette concession,
quitte à laisser les autres questions, qui pourront être réglées
d'une autre façon, à la décision commune des deux parties.
Mais sur la question qui considère purement et simplement
les salaires, nous ne doutons aucunement que les mineurs ont
droit à ce qu'ils demandent. Je vous prie instamment, au nom
des employés des transports, de faire cette concession et de nous
permettre de ne pas chômer.
M. SMILLIE. — Je ne crois pas que quelqu'un d'autre doive
parler.
Le PREMIER MINISTRE. — M. Smillie, Messieurs, j'approuve
tout ce qui a été dit sur le sérieux de la situation si les mineurs
ne croient pas pouvoir accepter une entente que le gouvernement, agissant au nom de la nation, croit de son devoir d'offrir.
— 9—
L'arrêt des mines est ce qu'on peut imaginer de plus grave dans
l'industrie, car, comme M. Thomas le dit très bien, il affecte
non seulement les cheminots et les employés des transports,
mais encore toutes les autres industries dans le pays. Ici nous
sommes en présence — et, jusqu'à un certain point, c'est un
avantage, car cela dissipe certains préjugés — d'une difference d'opinion non entre employeurs et ouvriers, entre capital
et travail, mais d'une différence d'opinion entre la nation représentée par le gouvernement et une partie de la communauté,
partie qui a droit, et personne n'y a plus de droit, à toute considération de la part des citoyens de tout le pays. Mais ils admettront que les autres parties de la communauté ont, elles aussi,
droit à la sauvegarde de leurs intérêts dans ce grand problème
et c'est à ce point de vue que nous l'examinons.
Avec beaucoup de patience et de soin, Sir Robert Horne s'est
livré à une étude approfondie des différentes propositions qui
ont été formulées et nous avons agi suivant son conseil, que nous
approuvons pleinement. M. Bonar Law et moi plus spécialement,
nous avons été en contact étroit avec lui pendant les négociations. Nous avons eu tous les rapports et la cause a été exposée
de part et d'autre avec une habileté toute spéciale. Nous avons
également eu le privilège d'avoir des entrevues continuelles
avec Sir Robert Horne. Vous savez aussi bien que moi combien
celui-ci était désireux de trouver une solution à ce différend.
Voyons maintenant quelle est la situation. Je me bornerai à la
demande d'augmentation qui a été formulée et je dois prendre
note de certains des arguments avancés par M. Thomas. Si je
ne me trompe pas, il prétend que les mineurs n'ont pas eu une
augmentation qui corresponde au renchérissement de la vie;
sur ce point nous sommes en complet désaccord avec M. Thomas et les délégués des mineurs. Nous ne pouvons accepter
cet exposé. Je ne citerai qu'un ou deux arguments de la partie
adverse, mais permettez-moi dès maintenant de dire que,
puisqu'il y a désaccord, voire même un désaccord clair et défini
entre le gouvernement et les délégués des mineurs sur cette très
importante revendication, j'aurais pensé que c'est justement
dans un cas de ce genre qu'un tribunal impartial pourrait faire
une enquête sur les faits. Je reviendrai plus tard là-dessus.
Quels sont les faits ? Vous me reprendrez si je fais erreur. Le
renchérissement de la vie fut un des sujets soumis à la commission Sankey. Or, je l'ai examiné et voici ce que j'y ai trouvé.
Voici un extrait du rapport signé par MM. Smillie, Frank
Hodges et Herbert Smith et par d'autres encore qui étaient
complètement d'accord avec eux. Mais les mineurs ne demandent pas seulement que leurs salaires soient proportionnés
au coût de la vie afin d'éviter un recul de leur niveau d'existence,
mais encore qu'il leur soit donné la possibilité d'améliorer leurs
conditions d'existence ! Ces deux revendications sont formulées, -— les deux revendications auxquelles M. Thomas a fait
allusion : à savoir une demande d'augmentation de salaires
basée sur le renchérissement de la vie, ainsi qu'une demande
— 10 —
concernant l'amélioration de leur niveau d'existence. Puis il
continue comme suit : « Nous considérons cette enquête comme
raisonnable (voilà, je crois, la conclusion de la commission)
en raison non seulement de la nature du métier de mineur,
mais encore de l'amélioration du niveau d'existence obtenue
par certaines autres catégories de salariés, en comparaison avec
le niveau d'il y a cinq ans. » Telle était la conclusion. Cela est
un extrait du rapport de MM. Smillie, Frank Hodges et Herbert
Smith. Puis la commission fit un rapport favorable à une augmentation de 2 sh. par journée d'ouvrier qui fut acceptée par
les mineurs. Maintenant je pars de ce point-là. A ce moment,
le renchérissement de la vie était représenté par 120%.
M. Frank HODGES. — Je pense que vous trouverez que ce
chiffre est inexact. L'augmentation du coût des denrées alimentaires était de 120%.
Sir ROBERT HORNE. — M. Hodges et moi avons déjà discuté
ce point. Il dit 115% ; moi je dis 120%,.
M. FRANK HODGES. — Vous le trouverez dans le document
même que vous citez.
Le PREMIER MINISTRE. — Le fait qu'il s'agit de 115 ou 120%
ne change pas grand'chose à la question. Si elle se bornait à cette
différence entre 115 et 120%, ce serait sérieux, j'en conviens,
mais ce n'est pas le cas.
M. FRANK HODGES. — Mais il serait tout de même préférable d'avoir les chiffres exacts.
Le PREMIER MINISTRE. — Très bien. Aujourd'hui le renchérissement est de 161%. La différence, dis-je, est de 41 points.
M. Hodges dit qu'il y a une différence de 46 points. Que cela
signifie-t-il ? Nous avons résolu cela au moment de l'enquête
sur les chemins de fer. Je pris part à ces pourparlers, comme
M. Thomas l'a rappelé à la deputation. Finalement nous tombâmes d'accord sur une échelle de salaires. A ce moment-là,
nous ne savions pas exactement si le coût de la vie augmenterait ou baisserait. Il y avait certains indices qui faisaient entrevoir une baisse. Mais personne alors ne put faire des pronostics
sur le cours des événements qui dépendaient pour une si grande
part de la question des changes et des récoltes étrangères, chose
indépendante de notre volonté. Mais il fut décidé que nous
aurions une sorte de chiffre provisoire et il fut convenu que,
si le coût de la vie montait, il y aurait une augmentation d'un
shelling par semaine pour tous les 5 points. Ceci fut convenu
entre les cheminots et le gouvernement. En tablant sur mon
chiffre de 120%, cela signifierait une augmentation aux mineurs
de 8 sh. par semaine. En tablant sur ceux de M. Hodges, l'augmentation serait de 9 sh. par semaine. Mais, depuis le rapport
Sankey, les mineurs ont en réalité obtenu des augmentations
s'élevant à 12 sh. C'est pourquoi je dis qu'il importe en somme fort
peu que le chiffre soit 115 ou 120%.
— 11 —
M. FRANK HODGES. — Je ne voudrais pas vous reprendre sans
nécessité, M. le Premier ministre, mais nous n'avons pas eu une
augmentation de 12 sh. depuis l'allocation Sankey. Tout au
plus peut-il être question de 10 sh.
Le PREMIER MINISTRE. — Bien, voilà des chiffres contestés.
Vous contestez certains des chiffres donnés par le gouvernement. Le premier chiffre que vous contestez n'a pas grande importance. Celui-ci non plus. Si vous parlez de 10 sh., vous êtes
encore de 2 sh. au-dessus de mon chiffre moyen, et vous êtes
de 1 sh. au-dessus du vôtre, car, de votre propre aveu, il serait
de 9 sh. Je prétends qu'il est de 8 sh. Les augmentations, ai-je
dit, sont de 12 sh. ; à vous en croire, elles sont de 10 sh. Si vous
prenez vos chiffres les plus favorables, vous avez 1 sh. de bon.
Je n'ai pas l'intention de me lancer dans la comparaison entre
la cause des mineurs et celle des cheminots, mais elle est opportune, très opportune. Ils avaient un salaire moyen beaucoup
plus bas que les mineurs. Dans notre pays, les poseurs de rails
étaient payés de 16 à 18 sh. par semaine pour faire un travail
très pénible et dangereux. Rien de comparable en ce qui concerne les mineurs. Ils avaient donc sous ce rapport une plus
grande distance à parcourir. Pourquoi ai-je dit ceci ? Afin d'en
arriver au point suivant : que le mineur a obtenu depuis la
guerre une augmentation moyenne hebdomadaire de 55 sh.
9 d. Les cheminots ont eu une augmentation de 47 sh. 3 % d.,
ceci en dépit du fait que leur point de départ est infiniment
plus bas. Il n'y a rien dans le cas des mineurs qui soit comparable aux salaires payés aux poseurs de rails.
Je fus un des premiers à admettre que les salaires payés à
certains des cheminots étaient un vrai scandale. Je l'ai dit
avant la guerre, je l'ai dit pendant la guerre et je l'ai répété
lorsque j'eus le plaisir de recevoir ici les cheminots, les employés
de transport au moment de la grève des chemins de fer. Les deux
corporations obtinrent et une réduction des heures et une augmentation des salaires. Les cheminots travaillaient 48 heures
par semaine; les mineurs 4,9 journées d'ouvrier par semaine
à raison de 7 h. par jour.
M. SMILLIE. — Appelez-vous cela 7 heures ?
M. BONAR LAW. — Dans la mine.
M. SMILLIE. — Appelez-vous cela 7 heures ?
Sir ROBERT HORNE. — Je sais qu'il est question de modifier
les heures, dont il y a lieu de tenir compte.
M. SMILLIE. — M. Lloyd George ne voulut pas accepter
cela.
Le PREMIER MINISTRE. — Je laisserai de côté les 7 heures.
Je ne veux rien qui soit l'objet d'une contestation.
M. SMILLIE. — C'est une question on ne peut plus sérieuse.
— 12
-
Le PREMIER MINISTRE. — Je la laisserai de côté. Je ne veux
rien qui soit l'objet d'une contestation.
M. SMILLIE. — Ceci' ne saurait être contesté, car cela figure
dans les dossiers du Home Office.
Le PREMIER MINISTRE. — Alors laissez-le de côté. Les mineurs
travaillent 4,9 journées d'ouvriers par semaine. Je dis cela au
moment même où l'un des délégués des cheminots prétend que
nous agissons d'une manière extrêmement injuste envers les
mineurs. Je tiens à lui exposer quelle est la situation réelle en
ce qui concerne les chemins de fer.
M. SMILLIE. — Quel est le nombre de journées d'ouvrier dans
les chemins de fer ?
Le PREMIER MINISTRE. —
Six.
M. SMILLIE. — Ce qui fait six jours contre 4,9. Le cheminot
touche six jours de salaires contre 4,9 jours.
Le PREMIER MINISTRE. — Six jours de salaires et avec une
augmentation de 47 sh. 3 % d. pour six jours de travail. Voilà
ce que les cheminots ont obtenu pour leurs six jours. Dans le
cas du mineur, l'augmentation est de 59 sh. 9 d. pour 4,9 journées de travail. Voilà le point sur lequel je tenais à insister. Le
gain annuel moyen de toutes les catégories d'ouvriers mineurs
est de 226 livres sterling. Il était de 82 livres avant la guerre.
C'était alors la moyenne. C'est une moyenne pour tous les ouvriers qui travaillent dans les charbonnages, y compris femmes
et garçons. Nous représentons ici la nation et je dois exposer le
cas de ce point de vue-là. Les salaires ont été augmentés, les
heures diminuées et l'extraction a considérablement baissé.
C'est inutile de vouloir prétendre qu'il n'est pas très regrettable que toute augmentation ait été suivie d'une diminution
de la production. Ce dernier trimestre, elle a atteint un chiffre
qui, je crois, est le plus bas par homme et par journée d'ouvrier.
J e viens de faire établir les chiffres. En juin 1914, la production
d'un homme était de 21 quintaux anglais par journée d'ouvrier ;
en août 1920, elle était de 15y2 quintaux et cela avec des frais
d'exploitation beaucoup plus élevés.
Or, quelles sont les propositions du gouvernement ?
Nous contestons l'exactitude des chiffres avancés. Nous
prétendons qu'il ne saurait être question ici du renchérissement
de la vie, car il a été plus que couvert par les augmentations.
De votre côté vous prétendez qu'il n'a pas été couvert. Je vous
ai signalé les raisons pour lesquelles nous croyons qu'il y a eu
une marge dans les augmentations qui a été donnée en plus
du renchérissement de la vie, en appliquant l'échelle des salaires des cheminots, échelle qui fut très soigneusement discutée et acceptée par une corporation forte de 500,000 ouvriers
et qui expose aujourd'hui son opinion. M. Thomas accepta cela.
M. THOMAS. — J'y répondrai.
— 13 —
Le P R E M I E R MINISTRE. — Que disons-nous à ce sujet ? N ' y
a-t-il donc rien à faire que de rester chacun sur sa position et
de régler le litige p a r la force brutale ? Il nous est impossible
de céder, car ce serait une injustice envers la nation. Nous
prétendons q u e le bien-fondé des revendications n'est p a s établi
et, si nous cédions, nous ferions une chose que nous n'avons pas
le droit de faire en qualité de mandataires de la nation. D ' a u t r e
part, vous dites que vous êtes les mandataires des mineurs
et- que vous n'avez pas de raison pour abandonner votre
point de vue. E n t o u t pays civilisé du monde, il n'y a qu'une
façon de régler des litiges de ce genre: c'est de recourir à un
tribunal impartial. L'ancienne méthode barbare était la force.
Nous tendons avec soin et ardeur à nous abstenir de cette
méthode de violence internationale, sans grand succès du reste,
je le crains, mais nous avons essayé toutes sortes de moyens
afin d'atteindre u n résultat qui soit plus conforme a u x lois du
bon sens et de l'humanité que le simple recours à la force brutale, à la famine générale, à l'arrêt des industries du pays,
condamnant des millions d'hommes au chômage et conduisant
le pays, comme l'a dit M. Thomas, à deux doigts de la b a n q u e route. De votre côté vous pouvez dire « privant les mineurs
eux-mêmes de leurs moyens d'existence ». N ' y a-t-il donc p a s
d'autre solution suggérée par le bon sens et p e r m e t t a n t de régler un conflit de ce genre où deux personnes diffèrent d'opinion
au sujet de chiffres, de faits et de revendications exposées ?
T o u t ce que je puis dire, c'est q u ' u n tribunal, accepté par M. Thomas qui défend m a i n t e n a n t la cause des mineurs, un tribunal
qui a été accepté p a r MM. Gosling et Williams...
M. GOSLING. — P a s sur les salaires, mais sur les conditions
de travail.
Le P R E M I E R MINISTRE. — N'avez-vous pas un tribunal poulies questions de salaires ?
Sir R O B E R T H O R N E . — Les ouvriers des transports s'adressent régulièrement au tribunal industriel pour les questions
de salaires. Nous pouvons le demander à Sir David Shackleton.
M.
fois ?
GOSLING.
Sir D A V I D
— Quand s'v sont-ils adressés pour la dernière
SHACKLETON.
—
Les
salaires
qu'ils
touchent
m a i n t e n a n t o n t été fixés par lui ?
M.
GOSLING.
— Les ouvriers des transports ?
Sir D A V I D SHACKLETON. —
M.
WILLIAMS.
Le
P R E M I E R MINISTRE.
Oui.
— Oui, une partie.
— C'est ce que je voulais dire.
M. W I L L I A M S . — Mais le cas classique du r a p p o r t Shaw n'est
pas comparable du t o u t .
— 14 —
Le PREMIER MINISTRE. — Il l'est dans une certaine mesure.
Mais il existe réellement un tribunal établi en vertu de l'entente entre les cheminots et le gouvernement et qui connaît
des conflits de ce genre. J'ai été frappé par ce qu'a dit M. Smillie.
Il s'est exprimé d'une façon qui ferait croire que c'est une atteinte et une insulte aux mineurs que de leur proposer un tribunal impartial. M. Thomas donna deux raisons pour lesquelles
un tribunal ne pouvait pas être accepté. L'une d'entre elles
était que le gouvernement est employeur. C'est une excellente
raison militant en faveur de ce tribunal. Il a à sa disposition
toutes les ressources de l'Etat et il ne veut pas en faire usage uniquement pour accorder à l'une ou l'autre des fractions de la
•communauté — peu importe qu'elle soit forte ou faible — quelque chose qui ne soit juste en soi-même. C'est pour cela que le
.gouvernement dit : « soumettons le cas à un tribunal impartial ».
Si vous nous aviez dit : « Le tribunal que vous nous proposez
n'est pas impartial », on pourrait discuter là-dessus. Si vous disiez : « Nous ne croyons pas, pour telle ou telle raison, que ce
tribunal puisse être impartial », on pourrait discuter là-dessus.
Mais venir dire, lorsqu'il y a conflit et qu'on arrive à une impasse
•où il n'y a rien, si ce n'est d'une part le sentiment qu'il serait
injuste de céder et de l'autre la même résolution de ne pas renoncer à sa cause, chacun pensant être dans le bon droit, — je
ne connais pas de métho'de créée par la civilisation autre que
•celle qui consiste à demander à une personne impartiale de trancher la question. Je ne connais pas d'autre moyen de le faire
•et voilà la proposition que nous faisons. Vous dites que mes chiffres sont faux ; je dis que les vôtres le sont également. Très
bien. Alors chargeons quelqu'un de décider.. C'est là mon opinion. Je crois que c'est une solution qu'approuvera le bon sens
de la nation. M. Thomas a dit qu'il y avait une grande solidarité entre les classes ouvrières. Il est certain qu'elle existe,
ce qui est très juste ; je le sais et je suis enchanté qu'il en soit
ainsi. Mais il dit ensuite que, si elles estiment justes les revendications des mineurs, elles leur prêteront leur appui. Si elles
estiment ces demandes justes, il est de leur devoir de leur prêter
leur appui ; mais si elles ne les trouvent pas justes, non seulement elles devraient leur refuser cet appui, mais encore devraientelles venir en aide à la communauté, dont elles forment la partie
la plus importante et dont la prospérité leur tient tout particulièrement à cœur. Vous demandez à 500,000 cheminots de se
sacrifier au cas où ils refuseraient quelque chose que leurs
chefs leur ont conseillé d'accepter. Je ne crois pas que l'on
puisse appeler cela de la solidarité. Ce n'est pas de la vraie
solidarité d'appuyer quelqu'un dans une cause injuste.
M. THOMAS. — Si elle est injuste.
Le PREMIER MINISTRE. — Si elle n'est pas injuste, il y a un
moyen de s'en assurer. Je ne veux pas soulever la question.
S'il existait un tribunal, Sir Robert Horne lui soumettrait le
cas et dirait : « Voici nos chiffres », M. Smillie ferait de même.
— 15 —
Le tribunal pourrait dire : « Vous avez tort ». Il pourrait dire
cela à nous. Nous dirions alors : « Très bien, n'en parlons plus. »
M. Hodges semble croire que c'est là une chose très amusante.
J e ne crois pas qu'elle le soit le moins du monde. C'est ce qu'il
aurait à faire pour une question personnelle si quelqu'un lui
causait du tort. J e ne doute pas le moins du monde qu'il aurait
recours dans ce cas à la protection des t r i b u n a u x du pays.
M. H O D G E S . — Mais alors vous avez la prétention d'être à la
fois juge et partie.
Le
P R E M I E R MINISTRE.
— Non, certainement pas. Pourquoi ?
M. H O D G E S . — Parce que le gouvernement s'est mis dans la
t ê t e que la revendication n'est pas justifiée.
Le
P R E M I E R MINISTRE.
M.
HODGES.
Le
P R E M I E R MINISTRE.
— J e vous demande pardon.
— Vous l'avez dit.
— J e ne l'ai pas dit, M. Hodges.
M. H O D G E S . — Vous avez dit que le bien-fondé de notre cause
n'est pas établi.
Le P R E M I E R MINISTRE. — Ou je n'ai pas bien exposé ma manière de voir, ou vous ne l'avez pas bien saisie. J ' a i dit : « Nous
disons que votre cause n'est pas juste. Vous, par contre, vous
dites qu'elle l'est. » J e dis que lorsque deux personnes ne sont
pas d'accord sur une question de faits, de chiffres et de bienfondé d'une demande, il n'y a q u ' u n e façon de régler le litige:
c'est en s'adressant à un tribunal impartial. Mais la nation a
certainement le droit d'être représentée dans celui-ci et de pouvoir exposer sa cause.
Sir R O B E R T H O R N E . — J e crois que M. Hodges pensait que
vous proposiez que je fisse partie de ce tribunal.
Le P R E M I E R MINISTRE. — Non, je ne propose pas cela du t o u t .
J ' a i dit que vous exposeriez la cause. Qui est-ce qui l'exposerait, sinon vous ? Quelqu'un du ministère exposerait celle de la
nation, mais le tribunal ne serait pas plus influencé par Sir Robert
Horne que ne le sont les juges de la Haute-Cour. Voilà ce que
j ' a i dit sur ce point. Puis j ' y vois un autre avantage. Cela éviterait la position odieuse où nous a mis l'état de guerre et les
conditions, inévitables qui ont surgi depuis, d'un gouvernement
intervenant directement entre patrons et ouvriers. J e trouve que
c'est une situation très désagréable dans laquelle soit un ministère, soit des ouvriers puissent être placés — oui, très désagréable — et un tribunal de ce genre nous l'éviterait.
Or, Sir Robert a suggéré, comme alternative, une autre proposition, à savoir que vous vous efforciez de régler ce litige en arriv a n t à une entente sur la base de l'extraction des mines e t en
organisant une conférence entre patrons et ouvriers...
M.
SMILLIE.
— Qui sont les employeurs ?
— 16 —
Le P R E M I E R MINISTRE. — Je veux dire entre mineurs et propriétaires de mines.
M. S M I L L I E . — Le gouvernement n'est ni le propriétaire des
mines, ni l'employeur.
Le P R E M I E R
mines.
M.
SMILLIE.
MINISTRE.
— Non, il n'est pas le propriétaire des
— Ni l'employeur.
Le P R E M I E R MINISTRE. — ...en présence d'un fonctionnaire
du gouvernement afin de fixer une augmentation de salaire
basée sur une augmentation de production.
Laissez-moi maintenant vous exposer calmement ce que j ' a i
à dire sur cette question. J e crois que l'on a d m e t t r a généralem e n t que l'extraction est insuffisante. Les mineurs le reconnaissent — et, en fait, c'est un de leurs a r g u m e n t s — qu'elle est insuffisante, et c'est un de leurs arguments dans d'autres domaines
qu'elle est très insuffisante et qu'elle pourrait être augmentée.
Les propriétaires de mines le reconnaissent sans nul doute et
le pays en a-fortement l'impression. Les mineurs disent qu'elle
ne p e u t être augmentée sans la coopération des employeurs et
des directeurs. Oui, je suis t o u t à fait d'accord qu'elle devrait
être augmentée par la collaboration de tous ceux qui sont occupés dans cette industrie importante et vitale. La production
insuffisante a un effet très désastreux sur l'industrie. Qu'étaitelle a v a n t la guerre ? Elle était alors de plus de 287 millions
de tonnes. E n tablant sur la production des trois derniers mois,
elle serait maintenant d'environ 232 millions de tonnes. C'est
là une diminution désastreuse pour un produit essentiel à la
vie de la collectivité. C'est une cause de chômage. Les dockers
se plaignent continuellement d'être obligés de chômer vu l ' a b sence de charbon à exporter.
M. W I L L I A M S . — Vous en connaissez certainement la raison
depuis ces derniers mois.
M. S M I L L I E . —Vous n'en rendezjcertainement pas responsables
les mineurs ?
Le P R E M I E R MINISTRE. — Si vous voulez bien attendre un
moment, je vous fixerai sur ce point. J e n'accuse ni les mineurs,
ni les propriétaires de mines, mais c'est en vue d'une proposition soumise par Sir Robert. Ce n'est une accusation contre personne, mais c'est une proposition pour sortir de cette difficulté.
Il n'est pas douteux du t o u t que vous avez moins de charbon
disponible pour l'exportation et, si vous en avez moins, les
dockers et les cheminots en ont moins Les cheminots ont
souffert en Galles du Sud et o n t été obligés de chômer parce
qu'il y avait moins de charbon pour l'exportation. Vous serez
d'accord. Ceci se passe de commentaires. E n outre, d'autres
industries ont également souffert. Puis il y a les plaintes qui
nous parviennent de l'étranger, s u r t o u t de nos alliés de France
— 17
-
et d'Italie qui souffrent du fait que nous sommes incapables
de leur fournir le charbon nécessaire à leur industrie.
M. SMILLIE. — De France ?
Le PREMIER MINISTRE. — Oui, je crois, de France.
Sir ROBERT HORNE. — Oui, j'en suis sûr.
Le PREMIER MINISTRE. — Elle avait encore l'intention de
soulever la question à Spa.
Sir ROBERT HORNE. — Oui, elle a été soulevée à Spa.
Le PREMIER MINISTRE. — C'est ce dont je me souviens, et à
Boulogne aussi. Oui, certainement, la France et l'Italie se trouvent
dans une situation très embarrassée. M. Giolitti m'a dit combien
l'Italie souffrait du fait qu'elle n'avait pas du charbon en
suffisance et je lui ai dit que, dans le pays, nous souffrions
également du fait que la production avait tellement baissé. Je
n'ai pas besoin d'insister sur l'influence de cet état de choses
sur le coût de la vie. Si nous devons envoyer nos navires sur lest,
cela veut dire que nous payons un fret double pour amener
dans le pays des produits alimentaires et des matières premières,
alors qu'autrefois le charbon payait souvent les frais du voyage.
Aussi y va-t-il de l'intérêt de toutes les classes de la société que
la production augmente et il vaudrait la peine d'augmenter la
rétribution des mineurs afin de les encourager à augmenter l'extraction. (Très bien, très bien). De cette façon, si la production
augmentait, les mineurs en profiteraient ; les autres industries
du pays en bénéficieraient, ainsi que toute la collectivité, parce
que cela entraînerait une réduction du coût de la vie ; nos alliés
même en profiteraient. Je pensais qu'il aurait valu la peine,
avant de vous lancer dans une lutte aussi sérieuse, de voir s'il
ne vous est pas possible d'obtenir une augmentation du salaire
des mineurs en suivant une voie qui, tout en sauvegardant
leurs intérêts, serait avantageuse à toute la collectivité. Votre
refus de soumettre votre cause à un tribunal provoquerait un
violent mécontentement et il ne faut pas vous imaginer que ce
serait un conflit de classes. Il y aura des ouvriers qui seront
mécontents, beaucoup plus mécontents que n'importe quel capitaliste, si une grève de ce genre, causée par le refus des mineurs
de soumettre leur cause à un tribunal, entraînait du chômage,
des souffrances et des privations. D'autre part, si vous cherchez
à améliorer la condition des mineurs en restant sur le terrain
de l'augmentation de la production, vous obtiendrez nécessairement les augmentations de salaires. Toutes les enquêtes
que j'ai faites à ce sujet — j'en ai fait quelques-unes indépendamment des départements auprès de certaines personnes
connaissant les mines du pays — j'ai rencontré l'autre jour
quelqu'un, je crois qu'il était du Yorkshire, qui disait qu'il
était certain que s'il y avait un bon accord et une complète
coopération entre les mineurs et les propriétaires de mines dans
tout le pays, il est indubitable que certaines propositions pour-
— 18 —
raient être faites des deux côtés pour améliorer par exemple
la machinerie et, dans une certaine mesure, l'organisation,
et qu'ainsi vous augmenteriez la production, ce qui amènerait
l'augmentation de salaire nécessaire.
M. SMILLIE. — Comment ?
M. HERBERT SMITH. — C'est ce que je voudrais savoir.
Le PREMIER MINISTRE. — Si vous augmentez la production
et concluez une entente par laquelle cette augmentation représentera une augmentation de salaire.
M. BONAR LAW. — Il veut faire ressortir qu'il n'y aura pas
de diminution de salaire si la production augmente, bien au
contraire celui-ci augmentera.
Le PREMIER MINISTRE. —
Oui.
M. SMILLIE. — Vous avez l'argent et vous refusez de le leur
donner.
Le PREMIER MINISTRE. — Mais non !
M. SMILLIE. — Oui, vous l'avez.
U N DÉLÉGUÉ. — Vous aurez tout simplement plus d'argent,
c'est tout.
Le PREMIER MINISTRE. — Comme l'a dit M. Bonar Law, l'augmentation serait automatique. Vous auriez par exemple un
chiffre-indice et diriez : « Prenez-le tel qu'il est. » Tout ce qui
sera au-dessus représentera une augmentation de tant pour les
mineurs du pays.
Sir ROBERT HORNE. — C'est un taux de salaires.
Le PREMIER MINISTRE. — Oui. Cela équivaudrait à une augmentation appréciable des salaires des mineurs si vous éleviez
la production au chiffre proposé par quelques-uns d'entre nous
à la Chambre des Communes, en rendant plus étroite la collaboration entre ceux qui sont intéressés au bon fonctionnement
des mines. Cela représenterait une augmentation sensible.
Maintenant tout ce que je vous demande est ceci : avant que
vous plongiez le pays des mineurs, les cheminots et les employés
des transports, ainsi que des millions d'autres travailleurs du
pays occupés dans des industries dépendant entièrement de
l'industrie houillère, dans cette désastreuse guerre intestine,
je vous demanderai d'examiner attentivement leurs propositions entre lesquelles vous pourrez choisir : la première est que,
en cas de divergence d'opinion entre nous concernant les faits
et .les chiffres, elle sera tranchée par un tribunal impartial,
tribunal dont vous ne pourriez contester l'impartialité. Ou,
comme alternative, que vous consentiez à établir, de concert
avec les propriétaires de mines et le gouvernement, quelque
projet par lequel, en échange d'une augmentation de production, vous puissiez obtenir une augmentation de salaires qui,
— 19 —
je crois, vous laisserait un avantage légèrement supérieur à
celui que vous demandez ; ce projet donnerait en échange une
compensation au pays et celui-ci aurait l'impression que cette
augmentation n'a pas été donnée sans compensation et qu'il
n'aurait pas été fondé à la donner sur les bases actuelles. A
propos de cette augmentation, le pays lui-même sentirait que le
gouvernement serait complètement fondé à conclure une entente avec les mineurs. Je ne crois pas que nous demandions
quelque chose qu'un homme honnête considérerait comme injuste.
M. HODGES. — Est-ce que réellement vous suggérez, lorsque
vous parlez de cette seconde alternative, que si les mineurs
étudient de concert avec les propriétaires de mines et les représentants du gouvernement un projet pour l'établissement
futur des salaires, ceci se produira après que vous ayez accordé
aux ouvriers ce qu'ils demandent maintenant ?
Le PREMIER MINISTRE. — Mais non. Je croyais avoir dit
clairement qu'il s'agissait d'une alternative. Ma première suggestion est que la question des deux shillings soit soumise à un
tribunal. Si cela est repoussé, je propose comme alternative
un projet d'augmentation de salaires qui corresponde à celle
de la production. Mais c'est là une alternative.
M. BONAR LAW. — Qu'on leur donne les deux.
Le PREMIER MINISTRE. — Oui, nous voudrions le tribunal
industriel et l'autre.
Sir ROBERT HORNE. — Oui, je crois m'être exprimé clairement. Je ne crois pas que M. Hodges se méprenne sur la situation.
M. HODGES. — Je voudrais être au clair sur ces alternatives.
Le PREMIER MINISTRE. — Je crois avoir maintenant envisagé
la question sous toutes ses faces.
Sir ROBERT HORNE. — J'ai naturellement bien expliqué qu'il
n'y aurait pas de retard en ce qui concerne le projet de rémunération extraordinaire sur la production, de sorte qu'elle puisse
entrer en vigueur à partir du 1 er octobre. Cela, je l'ai dit clairement. J'ai également exposé clairement, d'accord, je crois,
avec les vues de M. Smillie, lesquelles ont été formulées avec
énergie, que vous étiez aussi sûrs que moi-même que l'augmentation de production pouvait être obtenue et que, par conséquent, avec votre collaboration, il n'y avait pas de doute —ceci me semblait inévitable — que l'augmentation de salaire
s'effectuerait sous une forme qui se justifierait dans l'esprit de
tout le monde.
M. SMILLIE. — L'augmentation de salaires que nous demandons aujourd'hui nous est due. M. Lloyd George et moi, nous
avons toujours dit que la première chose à faire était de recher-
— 20 —
cher les causes de la diminution de la production. Il ne suffit
pas, par exemple, qu'une personne quelconque, un profane qui
ne comprend rien aux questions minières, se borne à aligner
des chiffres et à en tirer des conclusions. Par exemple, il pourrait
y avoir une baisse dans la production de chaque personne employée et cependant il pourrait y avoir un effort plus considérable de la part de ces personnes pour augmenter la production. (Très bien, très bien). Il pourrait y avoir une baisse dans la
production de chaque personne employée, alors que toutes ces
personnes travaillent avec plus d'assiduité que précédemment
Mais quiconque ne connaît pas les faits dirait : « Vous voyez
bien, il y a une réduction par personne employée — par homme,
par jour, ou par personne employée par jour. » Somme toute
les nouvelles méthodes d'exploitation minières, de criblage
et de lavage, d'après lesquelles les mines, sont transformées
en fabriques au-dessus du sol et emploient 40, 50 ou 60 personnes à la surface pour la même production, réduisent inévitablement le total par jour et par personne employée. Mais
beaucoup de gens vous diront : « Vous voyez bien, la production
baisse maintenant d'une façon régulière. » Là où vous n'aurez
pas ouvert de nouveaux puits, vous ne l'avez pas fait et
comme les autres houillères s'éloignent de plus en plus du
fond de la fosse...
Sir ROBERT HORNE. — Mais, M. Smillie...
M. SMILLIE. — Mais cela est très intéressant. (Très bien,
très bien). On ne devrait pas le passer sous silence. Je vous ai
donné une raison qui pourrait expliquer...
Le PREMIER MINISTRE. — Mais voyez-vous, M. Smillie, je
ne pourrais pas discuter avec vous, vous qui vous y connaissez
dans la question. Je suis ignorant et profane en la matière ;
mais aussi vous devez vous rappeler que les mineurs travaillent un nombre de journées d'ouvriers moindre qu'auparavant.
M. WINSTONE. — Pourquoi ?
Le PREMIER MINISTRE. — C'est justement ce que je désire
que vous discutiez. Tout ce que je vous suggère est ceci : c'est
que ni moi, ni quelqu'un qui ignore tout des mines n'établisse
un projet de ce genre, mais que les propriétaires de mines et
les délégués des mineurs discutent ensemble cette question
en présence d'un fonctionnaire du département du contrôle
du charbon, et qu'ils soient les personnes compétentes. C'est
tout ce que je demande. Je ne suggère pas que ce soit moi qui
élabore un projet de ce genre. Je n'y songerai même pas.
M. SMILLIE. — Mais je crois que, dans une affaire de ce genre,
vous désireriez savoir s'il y a une question telle que celle-ci.
J'irai jusqu'à dire que nous ne pouvons maintenir la même production par personne employée si vous continuez à exploiter
d'anciennes mines, en vous éloignant de plus en plus du fond
de la fosse, et à négliger, comme nous avons été obligés de le
faire, le développement de nouvelles mines, dont nous avons
dû arrêter le creusement, car elles n'ont pas été ouvertes à l'exploitation comme elles auraient pu l'être. Dans ce cas-là, la
production de charbon par personne employée aurait été considérablement supérieure à la moyenne obtenue actuellement.
J e ne veux pas dire cependant que ce fait explique entièrement
la baisse de la production.
Le
— C'est là où je voulais en venir.
P R E M I E R MINISTRE.
M. S M I L L I E . — Mais nous sommes aussi désireux que vous
d'augmenter la production. J e l'ai dit à Sir R o b e r t Horne et
je crois qu'il le reconnaît. Vous ne pouvez augmenter la production des mines qu'avec de la bonne volonté.
Le
P R E M I E R MINISTRE.
— J e suis d'accord avec vous.
M. S M I L L I E . — C'est la seule façon d'y arriver. Il vous sera
impossible de gagner la bonne volonté dans une question où
nous disons que depuis juillet dernier nos hommes avaient
besoin d'une augmentation de salaires pour entretenir leurs
familles de la façon que vous considérez comme désirable. Vous
ne pouvez gagner cette bonne volonté et ce désir d'augmenter
le plus possible la production, conditions que nous exigerions
de t o u t e commission mixte ; et les personnes qui rempliraient
ces conditions seraient les mineurs e t les propriétaires, pourvu
qu'ils aient la bonne volonté de se réunir dans le b u t de rechercher les causes et d'y remédier. On n'arrivera pas à ce b u t sans
cet état d'esprit. J e crois que la grande majorité des employeurs
seraient désireux d'agir dans cet esprit. Beaucoup d'entre eux
ne le seront pas, pour des raisons qu'ils connaissent très bien
et que nous-mêmes connaissons assez bien. Mais nous sommes
désireux de le faire. Nous désirons augmenter la production.
J e crois que...
Le P R E M I E R
faire ?
M.
SMILLIE.
MINISTRE.
— E t vous croyez que cela pourra se
— J e le crois.
L E ' P R E M I E R M I N I S T R E . — Bien, c'est ce que je veux dire.
E n ce moment, je ne discute pas vos arguments. J e voudrais
au contraire traiter une question sur laquelle nous sommes
d'accord. J e sais. M. Smillie, que vous reconnaissez qu'une augmentation considérable de la production pourrait être obtenue.
M. S M I L L I E . — J e sens que la production pourrait être considérablement augmentée.
Le
lons.
P R E M I E R MINISTRE.
— Eh bien, c'est t o u t ce que nous vou-
M. S M I L L I E . — Mais nos hommes ne peuvent vivre de l'air
du temps en a t t e n d a n t que l'augmentation soit accordée.
M.
BONAR LAW.
— Elle sera appliquée le 1 er octobre.
— 22 M. S M I L L I E . — Vous ne pouvez le faire en une semaine ou
deux. Nous devrons nous réunir le plus vite possible.
Le P R E M I E R MINISTRE. — Il est oiseux de parler de vivre de
l'air du temps, M. Smillie. J e n'ai pas d'idée préconçue au sujet
de votre demande, mais en même temps vous voyez que les
chiffres que l'on me soumet démontrent que les salaires des mineurs, comparés à ceux des cheminots, sont très loin d'être
négligeables. Ce n'est pas l'air du temps.
M. S M I L L I E . — J e ne voudrais pas dire que nous ne saurions
contester ces chiffres. Nous voulons que cela figure au procèsverbal, car vous avez fait, en toute sincérité, je crois, un exposé
fort raisonnable sur les gains et leur comparaison, exposé que
nous ne pouvons passer sous silence, car le public pourrait
croire que nous n'avons rien à répliquer.
M. H O D G E S . — Ce que démentent les chiffres de votre propre
ministère.
Le P R E M I E R MINISTRE. — J'ajouterai à mon exposé que,
au nom du gouvernement, je suis prêt à soumettre à un tribunal
impartial n'importe lequel des chiffres que j ' a i avancés. Vous
avez dit, je crois, que vous n'êtes pas disposé à soumettre vos
chiffres à un tribunal impartial.
M.
SMILLIE.
Le P R E M I E R
inconvénient.
— Cela au moins devrait figurer au procès-verbal.
MINISTRE.
— Oh oui, je n'y vois pas le moindre
M. S M I L L I E . — M. Hodges voudrait vous répondre quelques
mots, Monsieur.
M. H O D G E S . — Monsieur le premier ministre, en ce qui concerne les chiffres sur lesquels vous vous êtes longuement étendu
cet après-midi, je voudrais vous faire observer combien il est
facile de faire un exposé en contradiction directe avec des faits
acceptés, des faits reconnus. Les faits reconnus, lorsque nous
nous sommes rencontrés avec le contrôleur au sujet de cette
demande, et qui ont été par la suite communiqués à la presse
par Sir Robert Horne, sont que l'augmentation de salaires des
ouvriers adultes de plus de 18 ans était de 157%. Personne
n'a contredit jusqu'ici le fait que l'augmentation moyenne est
de 155%. Ni au cours de nos négociations avec le contrôleur,
ni lors de celles avec Sir Robert Horne, il n'a été dit que l'augmentation moyenne p a r personne employée a été au-dessus
de 155%.
Sir
RORERT HORNE.
— J'ai dit 157%. Vous avez raison.
M. H O D G E S . — Maintenant, écoutez et suivez-moi bien.
Voyons comment la situation des salaires se reflète dans ce
chiffre reconnu. Mais je voudrais dire en passant que l'Association houillère fit une enquête sur les salaires de la première
quinzaine de juin et, comme nous-mêmes, elle fut surprise de
— 23 —
trouver que le salaire moyen d'un casseur, d'un terrassier,
était moindre que celui que nous avions calculé nous-mêmes.
Ainsi nous trouvons que les casseurs, au lieu d'avoir un salaire
moyen de 1 livre 1 sh. 9 % d., ont le salaire moyen qu'ils avaient
obtenu eux-mêmes dans le b u t très spécial de la propagande
(Très bien, très bien) et qui s'éleva à environ 1 livre 0 sh. 9 d.,
et non pas à notre chiffre.
Sir R O B E R T H O R N E . — J e ne connais pas ces chiffres.
M. H O D G E S . — Ils ont été publiés par la presse.
Sir R O B E R T H O R N E . — J e ne les reconnais pas.
M. H O D G E S . — Bien. E n somme, il nous suffit, en ce qui concerne ces t a u x de salaires, de marcher d'accord avec le départ e m e n t du contrôle. Jusqu'ici nous avons reçu une augmentation de 1 5 5 % ; le coût de la vie a augmenté de 1 6 1 % . Nous
sommes donc de 6 % au-dessous du coût de la vie. E n disant cela,
M. le premier ministre, que devons-nous en déduire ? Que la
totalité de l'augmentation Sankey, obtenue pour améliorer notre
niveau d'existence, s'est évanouie, car le niveau d'existence est
m a i n t e n a n t de 5 % au-dessous de notre salaire actuel.
M. R O B E R T H O R N E . — C'est précisément ce que nous n'admettons pas, parce que nous voyons la chose sous un jour
différent.
M. H O D G E S . — J e vous demande pardon, Sir Robert. E n ce
moment, je ne discute pas vos assertions en ce qui touche tel
ou tel aspect de l'allocation Sankey. Ce que j ' a v a n c e comme une
vérité m a t h é m a t i q u e c'est que si le renchérissement de la vie
est de 1 6 1 % et l'augmentation de notre salaire moyen généralement admise de 155%, nous sommes au-dessous du coût de la
vie e t t o u t e l'augmentation que le salaire Sankey nous a accordée
a disparu. Nous demandons maintenant une augmentation de
2 sh. Que signifie-t-elle dans notre échelle de salaires? Elle signifierait que nos salaires seraient augmentés de 184% si nous
ajoutons 3 0 % à notre situation actuelle. En réalité il ne s'agit
pas t o u t à fait de 3 0 % , car l'augmentation de 2 sh. se résume
en somme à une moyenne de 1 sh. 10 d. p a r personne, de sorte
que notre nouveau salaire moyen serait de 16 sh. 4 , % d. p a r
journée d'ouvrier. Ceci serait notre nouveau salaire moyen, qui
est de 1 8 4 % au-dessus du niveau d'avant-guerre, si toutefois
cette augmentation est intégralement accordée. Quelle sera alors
notre position ? Nous serons de 2 3 % au-dessus du coût actuel de
la vie ; t r a d u i t en argent, cela signifie qu'en moyenne nous gagnerions à ce moment 1 sh. 5 d. de plus par jour qu'en juillet
1914, si nous obtenions l'augmentation. Ah ! monsieur le premier
ministre, est-ce raisonnable ? Quelles qu'aient été les ententes
au sujet de la relation existant entre salaires et prix, est-ce suffisant pour des hommes occupés dans une industrie comme la
nôtre, dont vous connaissez l'importance, la valeur, ainsi que
les dangers qu'elle présente ? J e dis q u ' u n salaire qui ne peut
être résumé que par une moyenne d'avant-guerre de 7 sh. 10 d.
par journée d'ouvrier, en ajoutant 1 sh. 5 d. aux 6 sh. 5 d., est
un salaire disproportionné à la nature de notre métier et au
rôle que nous jouons dans la communauté. J e ne discuterais pas
cette question d'une façon aussi détaillée si ce n'était que je
sais que le gouvernement doit se déclarer d'accord avec ces
calculs arithmétiques au cas où l'on procéderait à une analyse
de ces chiffres. M. le premier ministre, c'est une chose très simple de prendre, comme vous l'avez fait, le salaire annuel de
1914, de multiplier le salaire général par 4 et de montrer ensuite
par comparaison que nous sommes dans les environs de 1 7 5 % .
Si vous voulez prendre le salaire de 1914 il vous faut attendre
que le salaire total de 1920 ait été établi. Alors seulement vous
pourrez faire une comparaison exacte.
Sir R O B E R T H O R N E . — Naturellement, ceci est basé sur une
production très basse.
M. H O D G E S . — Il en est peut-être ainsi ; mais nous avons des
informations, avec lesquelles vous n'êtes pas d'accord, à savoir
que, alors que le salaire peut avoir atteint un certain point pour
le trimestre se t e r m i n a n t fin juin, il est vrai que vous pouvez
avoir une augmentation de salaire avec une production moindre
si plus d'hommes sont occupés à des t r a v a u x de réparation et
de mise en état des mines et qu'on les compare avec les casseurs
occupés dans la mine même (Très bien, très bien). C'est une chose
très évidente et t o u t directeur de mine l'admettrait immédiatement.
Le P R E M I E R M I N I S T R E . — Me permettriez-vous de demander
ceci ? Si vous avez réellement confiance dans ces chiffres et si
vous dites que vous avez une telle confiance en eux que vous
pensez pouvoir convaincre le gouvernement, pourquoi ne pas
avoir recours à un tribunal impartial ?
M. H O D G E S . — J e vais vous en dire la raison et ceci nous amène
au nœud même de la question. Voici vos chiffres ; voici vos
chiffres de salaires ; voici vos chiffres du coût de la vie. Les
conclusions sont manifestes. Si ces chiffres sont les vôtres, et
si nous sommes prêts à les accepter comme exacts, comment
pourrions-nous espérer obtenir d'un tribunal autre que vousmême un verdict en notre faveur lorsque vous-même avez décrété que notre cause est injuste ? Comment pourrait-on le
faire ? (Très bien, très bien).
Le
P R E M I E R MINISTRE.
— Pourquoi pas ?
M. H O D G E S . — J e vais vous dire pourquoi je pense que cela
n'est pas possible.
Le P R E M I E R MINISTRE. — Cela signifierait-il que toutes les
fois que la Couronne s'adresse à un tribunal, ce dernier tranche
toujours en sa faveur ? Ce n'est pas le cas le moins du monde.
Les t r i b u n a u x prononcent continuellement des sentences contre
la Couronne.
— 25 —
M. H O D G E S . — Vous dites, M. Lloyd George, que le gouvernement représente la nation.
Le P R E M I E R M I N I S T R E . — Naturellement, c'est le devoir de
t o u t gouvernement.
M. H O D G E S . — Très bien ; donc, si vous représentez la nation,
comment pouvez-vous, vous qui avez le dernier m o t dans la
représentation de l'opinion publique, nous demander de nous
soumettre à une autorité inférieure ? Comment pouvez-vous
nous demander de nous adresser à la nation, si vous dites que
vous la représentez ?
Le P R E M I E R MINISTRE. — Vraiment, ceci v a au principe
même de t o u t le système judiciaire. J e n'ai jamais entendu
un argument de ce genre. Entendez-vous dire par là qu'il vous
est impossible de citer un gouvernement devant une cour de
justice parce que le gouvernement est le mandataire du juge
et par conséquent l'autorité suprême ?
M.
HODGES.
— La constitution britannique ne dit pas cela.
Le P R E M I E R MINISTRE. — J e suis d'accord avec vous, c'est
ce que j ' a i dit. La constitution britannique dit que vous pouvez intenter u n e action contre le gouvernement et les cours
de justice t r a n c h e n t continuellement des litiges entre un citoyen
et l'autorité gouvernementale, constamment, chaque jour.
M.
SMILLIE.
— Nous ne discutons pas sur les chiffres.
Le
P R E M I E R MINISTRE.
M.
SMILLIE.
— C'est ce que je dis.
— J e dis que nous ne sommes pas en désaccord.
Le P R E M I E R M I N I S T R E . — Nous le sommes. Nous n'acceptons
vraiment pas votre exposé et vos chiffres.
M. S M I L L I E . — Mais ce sont vos chiffres à vous. Acceptezvous vos propres chiffres ? Nous, nous n'avançons aucun chiffre. Nous vous demandons simplement de reconnaître les vôtres.
Le P R E M I E R M I N I S T R E . — Si ce sont nos chiffres, j'aurais pensé
qu'un tribunal dirait immédiatement, si Sir Robert Horne ou
quelqu'un d'autre en son nom comparaissait devant lui : « Tels
sont les chiffres du gouvernement, les contestez-vous ? » C'est
un cas qui est du ressort d'un tribunal. Si vous êtes si convaincu
d'avoir obtenu les chiffres du gouvernement et que ces chiffres
entraînent une conclusion inévitable, un tribunal pourrait
régler la chose. Mais nous n'acceptons pas l'exposé de la cause
et c'est la raison pour laquelle nous vous invitons à recourir
à un tribunal impartial.
Sir R O B E R T H O R N E . — Cela dépend de votre façon d'examiner
les chiffres et des déductions que vous en tirez.
M. S M I L L I E . — Il y a une chose que je voudrais faire ressortir. Si vous avez rendu, en mars dernier, plus que justice
— 26 —
aux mineurs, vous leur rendez maintenant beaucoup moins
que justice, en raison du coût de la vie. Si vous avez pris à leur
égard une décision juste en mars dernier, ces 2 sh. que nous
demandons nous sont dus.
Le PREMIER MINISTRE. — C'est la question en litige. Et c'est
un point que nous sommes parfaitement disposés à soumettre
à un tribunal honnête. Vous n'avez pas encore contesté l'honnêteté de ce tribunal.
M. HODGES. — Je crois vous avoir donné des raisons très
claires et sincères pour lesquelles nous croyons que vous êtes
le tribunal et qu'il appartient à vous de décider. D'après vous,
ou nous avons raison, ou nous avons tort. Tout chiffre qui pourrait être soumis au tribunal sera toujours un chiffre du gouvernement, car celui-ci est le seul organe qui puisse établir des statistiques. Vous avez parlé de nos futures conditions de salaires.
Voilà une question importante, très importante pour nous,
M. le premier ministre. Je crois que vous m'avez plus d'une
fois entendu exprimer à cette même table un sincère désir de
voir cette industrie prospère à l'avenir. Mais, si.vous me demandiez maintenant si je pense que ce projet, esquissé par Sir
Robert, est un projet qui donnerait le résultat désiré par nous
tous, je vous dirais qu'avant de pouvoir y répondre par l'affirmative, moi ou quelqu'un des membres de mon comité exécutif, cette question nécessiterait une analyse beaucoup plus étendue et poussée. (Très bien, très bien). Tout projet ayant pour
but la réorganisation de notre industrie doit, comme l'a dit
M. Smillie, être basé sur la bonne volonté. Pour étudiera fond
un projet qui nous place à l'avenir, nous et les propriétaires,
dans une situation en rapport avec cette industrie, il faudra
beaucoup de temps. Même si on pouvait le faire en peu de temps,
il vaut la peine d'y consacrer le temps voulu. (Très bien, 1res
bien). Une conversation et des conférences de ce genre, qui
pourraient avoir lieu d'ici au 1er octobre, ne pourraient influencer la production que dans un certain nombre de mois.
Elle va de pair avec la question des salaires. Si vous dites non,
Sir Robert, quel serait votre argument ?
Sir ROBERT HORNE. — Je dis non pour la raison suivante.
Vous commencez l'année avec une production de 248,000,000
de tonnes dans le-trimestre ; le trimestre suivant, la production
est de 232,000,000 de tonnes. Le troisième trimestre, pour
autant que nous puissions en juger jusqu'ici, semble être sensiblement le même, un peu meilleur, quoique encore bas. Je suis
tout à fait certain que vous avez la conviction intime de pouvoir augmenter la production du dernier trimestre de l'année
d'une façon suffisante pour vous assurer une augmentation
considérable de salaires, basée sur la production. Je dis cela
en toute sincérité. Il n'y aurait pas de difficulté au sujet de l'entrée en vigueur au 1er octobre.
— 27
-
M. H O D G E S . — E h bien, si vous connaissez suffisamment
notre industrie, Sir Robert, vous saurez et vous devez savoir
que dans le dernier ou dans le premier trimestre de chaque année, même autrefois, la production a toujours atteint son point
maximum.
Sir R O B E R T
commencé.
— Parfaitement. Aussi vous avez bien
HORNE.
M. H O D G E S . — Mais, monsieur le premier ministre, c'est
indépendant de t o u t projet spécial sous forme de primes à la
production ; c'est t o u t à fait indépendant de ce fait. (Très
bien, très bien).
M. B O N A R L A W . — Ceci ne signifie-t-il pas en fait que nous
augmentons vos salaires sans obtenir une plus forte production ?
M. H O D G E S . —
M.
BONAR LAW.
Non.
— J e crains bien que ce ne soit cela.
Le P R E M I E R MINISTRE. — J e suis persuadé que cela dépend
entièrement de la courbe de production. Si vous la prenez au
plus h a u t point, je suis d'accord avec vous que ce ne sera pas'
cela. Si au contraire vous la prenez près du point le plus bas,
ce serait cela. Cela dépend entièrement de votre courbe de production.
M. H O D G E S . — S'il est vrai que, sur la base d'une échelle
convenue, cela pourrait avoir pour conséquence de m e t t r e à la
disposition de l'industrie certains fonds supplémentaires qui
pourraient être affectés au paiement de salaires supplémentaires, il n'en reste pas moins que cette solution vague ne saurait
m e t t r e fin aux difficultés réelles qui s'opposent à l'augmentation de la production. E n remaniant les salaires vous ne pouvez pas dissocier notre industrie de ce que M. Smillie a dit au
sujet des causes techniques (et, si vous voulez, politiques)
qui affectent la production. (Très bien, très bien). Il faut faire
quelque chose de plus profond et de plus fondamental avant
de pouvoir réorganiser l'industrie d'une façon convenable,
même sous le régime actuel de la propriété. (Très bien, très bien).
Le P R E M I E R MINISTRE. — Ceci est réellement important au
point de vue de ce que les mineurs obtiendraient de suite. Sir
Robert dit que la production du premier trimestre est de
248,000,000 de tonnes et celle du trimestre dernier de 232,000,000.
Vous dites que les maxima sont atteints au cours du dernier
trimestre de l'année et du premier.
M. H O D G E S . — Ils ont été atteints en général.
Le P R E M I E R MINISTRE. — P a r conséquent je pense qu'on
atteindra ce m a x i m u m le trimestre prochain.
Sir
ROBERT HORNE.
— Nous espérons que ce sera le cas.
M. BONAR L A W . — E n se basant sur les expériences faites.
-
28
-
Le PREMIER MINISTRE. — Oui, on atteindrait le maximum.
En supposant par conséquent que vous preniez la courbe de
production à un point légèrement inférieur au maximum,
vous obtenez une augmentation immédiate. Ne s'agit-il pas
plutôt de la courbe de production elle-même ? C'est pourquoi
je dis qu'il y a matière à discussion.
M. HODGES. — La question comporte beaucoup d'autres
aspects que la courbe de production.
Le PREMIER MINISTRE. — Je suis d'accord avec vous, mais
je vais vous dire ce qu'implique la fixation de la courbe de production. Ce qu'elle implique, c'est une réponse à votre remarque
que plusieurs mois s'écouleraient avant qu'elle portât ses fruits.
Les effets s'en feraient sentir en moins d'un trimestre si votre
courbe est fixée au-dessous du maximum moyen du dernier
trimestre. J'en suis persuadé.
M. HODGES. — En réalité, beaucoup d'éléments en dépendent
qui ne peuvent être fixés d'ici au 1 er octobre. Il y a lieu de
tenir compte des prix, des valeurs, des actions de propriétaires,
des actions d'ouvriers, des actions du gouvernement, mais
nous nous sommes déclarés prêts à examiner cette voie ou toute
autre par laquelle on pourrait réorganiser l'industrie pour l'avenir. Mais cette voie spéciale, proposée par Sir Bobert, est une
voie qui, à l'heure actuelle ne nous semble pas susceptible
d'être étudiée à fond et de nous permettre de sortir de l'état
actuel avec une industrie mieux organisée. Cela est très important pour nous. Lorsque cette question de salaires sera liquidée, si nous pouvons faire face à la situation actuelle, — et
nous pouvons y faire face, M. le Premier ministre, comme
vous le savez, avec l'argent qui se trouve déjà dans notre industrie, sans augmenter d'un penny le prix du charbon pour les
particuliers, l'argent est là, même pour juin l'argent est là
et nous l'aurons certainement avec les chiffres actuels, l'argent est là maintenant pour faire face à cette damande, — l'industrie pourra continuer à travailler jusqu'à ce que nous-mêmes
et les propriétaires arrivions à la solution idéale pour l'exploitation future de l'industrie. Nous désirons arriver à cette solution idéale. Nous le désirons vivement, mais en attendant,
si au moins vous pouviez pour un instant admettre notre point
de vue, nous nous trouverions de part et d'autre en présence de
chiffres acceptés par tous. Si nous pouvons surmonter cette
difficulté et si vous acceptez que les 2 sh., le 1 sh. et les 9 d.
peuvent être accordés, vous introduisez dans l'industrie la mesure exacte pour cette analyse, cette enquête et cette réorganisation, qui est si vitale pour nous pendant les mois à venir.
La mesure, le point de vue juste et la psychologie de la part des
ouvriers et des propriétaires, voilà ce qui est pour moi d'importance primordiale. Je sais que vous nous l'avez entendu dire
précédemment.
-
29 —
Le P R E M I E R MINISTRE. — Vous avez dit cela lors de la dernière augmentation.
M. H O D G E S . — Qu'arriva-t-il lorsque vous nous entendîtes
dire cela précédemment ? Vous avez élevé le prix du charbon
de 14 sh. 2 d. la tonne, alors que le besoin ne s'en faisait pas
réellement sentir. (Très bien, très bien). Vous ne nous avez pas
consultés sur ce point. Vous nous avez éloignés plus encore de
notre propre industrie et du contrôle de cette dernière. Vous
en avez profité pour insinuer aux propriétaires que le m o m e n t
était venu pour eux de réorganiser intérieurement l'industrie
en vue de la suppression du contrôle, cela sans nous consulter
ou sans vous consulter. Comment pourriez-vous espérer de
nous cette collaboration, alors que nous connaissions ces faits ?
(Très bien, très bien).
Le
P R E M I E R MINISTRE.
— J e ne comprends pas bien.
M. S M I L L I E . — Il est très i m p o r t a n t que vous expliquiez cela
au premier ministre.
M. R O B E R T H O R N E . — A v a n t de faire cela nous nous sommes
efforcés de faire nommer une commission consultative de concert avec vous, mais ils ne voulurent pas y entrer.
M. S M I L L I E . — Il est bon que ceci vous soit expliqué. C'est
une question de la plus h a u t e importance pour l'industrie
houillère que M. Hodges traite en ce moment, question que nous
nous chargerons d'éclairer complètement.
M. H O D G E S . — Monsieur le premier ministre, je ne vous ai
pas entendu dire que vous avez précédemment entendu mon
exposé. Vous avez entendu cet exposé précédemment, c'est
certain.
Le
P R E M I E R MINISTRE.
— Sur la dernière augmentation.
M. H O D G E S . — Sur la dernière augmentation. J ' a i expliqué
et je vais essayer d'expliquer pourquoi cela ne s'est pas réalisé.
Lorsque la dernière augmentation fut accordée, le contrôleur
manifesta le désir de nous voir collaborer avec lui et de rétablir une commission consultative. Au m o m e n t même où nous
étions en train d'examiner la possibilité d'adopter cette proposition, le prix du charbon m o n t a et toutes les conséquences qui
s'en sont suivies ont grandement contribué à nous éloigner.
Cette proposition a été renouvelée depuis la majoration des
14 sh. 2 d. Nous l'avons étudiée, mais, au m o m e n t même où
nous l'examinions, nous nous trouvions dans une situation qui,
contre notre gré, nous éloignait de plus en plus de l'industrie
elle-même. Les propriétaires, lorsque les prix furent majorés de
14 sh. 2 d., lorsque la mine la moins rémunératrice p u t faire
ses frais, lorsqu'ils surent que le plus grand pas dans la suppression du contrôle était fait, furent convaincus que, sous peu,
la mine -la plus pauvre pourrait se tirer d'affaire, ou plutôt le
plus pauvre district. Ils dirent : « Nous allons avoir la suppres-
— 30 —
sion du contrôle, la suppression du contrôle des prix — non,
non, pas des prix, mais de la distribution ; — les offices locaux de
contrôle ont disparu, nos commissions régionales seront composées en grande partie de propriétaires de charbon et de commissionnaires. La prochaine démarche à faire est de supprimer
complètement le contrôle et, à cet effet, nous achèterons du bois
de construction et des entrepôts, nous ferons des installations,
nous ferons mille choses pour être prêts le jour où le contrôle
aura vécu, et ce capital placé se transformera en production
et en une augmentation de bénéfice pour nous, bénéfice qui ne
sera soumis qu'aux impôts ordinaires. » Voilà ce qu'ont fait
les propriétaires. Nous pourrions vous citer le cas d'une mine
qui, de toute l'année dernière, n'a jamais eu un wagon de bois,
mais qui, en juin, avait sur le carreau plus de charbon qu'il
n'en fallait pour un an. Ne voulez-vous donc pas voir que la
collaboration sera impossible tant que cet état de choses continuera ? Les frais le prouvent, en voilà la démonstration pratique.
Le PREMIER MINISTRE. — Ceci n'est-il pas plutôt un argument
en faveur de la proposition de Sir Robert Horne, de vous rencontrer et de discuter cette question avec les propriétaires de
mines sous la présidence d'un délégué du contrôle du charbon ?
M. SMILLIE. — Il est bon que vous sachiez ces choses-là.
Nous les connaissons.
M. HODGES. — Avant cela, et comme condition préalable,
nous vous disons que notre situation économique est pire
qu'elle ne l'était avant que nous commencions à présenter des
revendications avant la guerre. Nous voulons qu'il soit remédié
à cet état de choses ; nous voulons obtenir gain de cause autant
qu'il nous sera possible ; l'argent nécessaire à cela se trouve
dans l'industrie. Le consommateur n'aura pas à payer. Alors
nous aurons la voie libre pour essayer de réorganiser, dans la
mesure du possible, l'industrie sur des bases convenables.
Telle est notre situation et, si nous avons insisté là-dessus,
c'est dû au fait que nous sentons et savons que notre cause
est juste.
M. SMILLIE. — M. le premier ministre, permettez-moi de
dire que vous avez jeté un regard du côté de M. Hodges et avez
dit que vous avez déjà entendu cette histoire. C'était lorsque
nous défendions notre dernière augmentation de salaires.
Le PREMIER MINISTRE. — Je crois qu'il s'agissait des 2 derniers shillings. C'était l'argument avancé par M. Hodges ; il
est naturel que nous désirions que la production augmente
pour le plus grand bien de l'industrie houillère du royaume
et nous nous sommes laissé dire que cela aurait pour conséquence dans les mines une bonne volonté et un état d'esprit
tels que nous aurions l'augmentation de production désirée.
— 31 —
M. SMILLIE. — Vous rappelez-vous pendant la guerre deux
occasions où le gouvernement fit appel aux ouvriers et aux propriétaires ? Vous fîtes un appel ; sir John Simon et M. Asquith
en firent un en même temps. Serait-il exact de dire qu'il en résulta quelque chose de réel et qu'un changement extraordinaire en a été la conséquence ? Je sais que c'est vrai.
Le PREMIER MINISTRE. — J'accepte vos affirmations.
M. SMILLIE. — Je sais que les hommes qui, à ce moment,
engagèrent leur parole envers vous, se mirent à l'œuvre, collaborèrent et travaillèrent avec ardeur et assurèrent une production supérieure.
Le PREMIER MINISTRE. — Après les avoir vus, alors j'étais
certain qu'ils tiendraient parole.
M. SMILLIE. — Ils obtinrent une production supérieure à
celle qui aurait été obtenue dans des conditions normales sans
cette intervention. Mais nous nous intéressons à la question
de la production, car nous savons, quoique peut-être moins bien
que vous, et nous nous rendons compte de l'importance qu'a
pour la nation une production accrue ; ce serait une chose
énorme pour l'Europe d'obtenir plus de charbon qu'elle n'en
obtient maintenant. Les propriétaires de mines nous ont fait
savoir — car, en dépit de toutes les conversations qui ont eu lieu,
il n'existe pas d'animosité personnelle entre nous et les propriétaires de mines, ceci devrait être reconnu — qu'à leur avis cette
augmentation devrait être accordée et qu'il devrait être établi
—- le nom me frappa vu sa singularité — des commissions de
bonne volonté dans toutes les mines si possible, avec le désir
d'augmenter la production. Mais la production ne peut pas être
augmentée sans que les employeurs soient prêts à étendre leur
exploitation autant qu'ils le peuvent ; cela pourra être le développement de parties de mines qui attendent encore d'être
exploitées. J'ai reçu aujourd'hui une lettre au sujet d'une mine,
comme l'a dit M. Hodges, au sujet des piles de bois qui s'y trouvaient et j'ai promis au contrôleur du charbon de lui fournir
des détails sur la production dans le Durham. J'ai demandé à
son secrétaire d'être autorisé à le faire. Toutes ces choses retardent la production et les salaires de beaucoup de mineurs
sont diminués et abaissés considérablement au-dessous de ce
qu'on appelle le salaire normal, vu l'impossibilité de sortir
les matériaux. Notre honneur et notre réputation sont en jeu.
Il ne vous serait pas aisé de voir nos hommes et de chercher à leur
faire comprendre que c'est notre affaire de nous joindre aux
propriétaires actuels des mines afin de trouver d'abord, je crois
dans un délai très limité, comment la production pourrait commencer à être augmentée, si nous nous rencontrions. Je crois
que les premières démarches pourraient être faites sans qu'elles
nécessitent à l'heure actuelle l'extension d'aucune mine ; des
démarches pourraient, si les deux parties étaient d'accord,
être faites aux fins d'obtenir une amélioration immédiate de la
— 32 —
production, mais il est impossible d'attendre pour cela que
nos salaires soient augmentés, — voilà la difficulté. Supposons
que nous obtenions cette augmentation de salaires et établissions une commission de ce genre, en nous basant sur la
courbe de production que vous mentionnez maintenant ; je
crois comprendre que s'ils produisaient davantage, non seulement ils toucheraient des salaires plus él&vés parce qu'ils
extraieraient davantage, mais l'industrie entière aurait droit
à une part de l'augmentation de la production de charbon,
les hommes travaillant à la journée aussi bien que ceux travaillant aux pièces, c'est-à-dire la production de charbon
étant augmentée par nos efforts communs, ceux des employeurs
et les nôtres. Si j'ai bien compris, c'est ce que Sir Robert Horne
a voulu dire. Entre temps le gouvernement retire actuellement
de la vente du charbon plus qu'il ne faut pour faire face à
cette augmentation. Nous sentons qu'il est nécessaire de défendre la cause de nos hommes et si, en échange, il est possible à l'industrie houillère d'augmenter sa production de
500,000 tonnes par mois dans un délai rapproché ou de
10,000,000 de tonnes par an, si cela pouvait se faire à une
époque où nous pourrions exporter tout le surplus de la production, — car vous veillez maintenant aux besoins du pays, —
si cela pouvait être fait à un moment pareil, le gouvernement
serait placé, tant que le contrôle des prix subsistera, dans une
situation lui permettant de rémunérer la main-d'œuvre d'une
façon intéressante et d'y trouver lui-même son profit. Nous ne
sommes pas venus ici pour nous entretenir du rendement de
l'extraction. Mais nous désirons sincèrement — notre Comité
exécutif tout entier le désire — nous efforcer d'augmenter la
production de charbon et cela ne devra se faire et ne pourra
se faire que si nous nous rencontrons avec les propriétaires de
mines pour discuter sur les mêmes bases que précédemment
et leur dire : « Attelons-nous maintenant à cette question et
recherchons les causes de la baisse de la production; commençons à augmenter le rendement aussi rapidement que possible ».
Voilà la seule alternative pour éviter un conflit industriel désastreux. Désastreux, il le sera pour tout le monde, car si les mines
chômaient pour une quinzaine, un mois ou six semaines, elles
seraient, lors de la reprise du travail, dans l'impossibilité
absolue d'atteindre même la production actuelle et cela pendant
plusieurs mois. Nous le savons.
Le PREMIER MINISTRE. — Je le reconnais avec vous, c'est
une affaire sérieuse.
M. SMILLIE. — Nous désirons sérieusement ne pas voir les
mines dans cet état. Telles qu'elles sont actuellement, nous
croyons que leur production peut être sensiblement relevée
et vous pouvez compter sur notre collaboration pour obtenir
cette sensible augmentation de rendement, afin que nous puissions exporter du charbon et acheter ainsi à l'étranger des
quantités plus considérables des marchandises dont nous avons
— 33 —
besoin et en même temps rendre service aux pays européens
qui ont besoin de ce charbon pour l'hiver prochain.
M. THOMAS. — Monsieur le premier ministre, on a dit tellement de choses dans la dernière partie du débat que je ne me
sens pas disposé à faire une réponse au sujet de la situation des
cheminots, si ce n'est de vous rappeler que, lorsque je plaidai
leur cause et discutai celle des mineurs, vous avez fait un rapport tout aussi éloquent en faisant une différence entre ces deux
catégories ; vous avez dit alors que je ne devais pas les comparer.
Le PREMIER MINISTRE. — Depuis cette date, les mineurs ont
eu une augmentation de 12 sh.
M. THOMAS. — Et c'est pour cela que je ne suis pas disposé le
moins du monde à dire un mot qui nous délivrerait de la dernière partie d'un élément aussi intéressant et vital dans cette
discussion. Deux choses vous ont été dites par les mineurs.
Vous, monsieur le premier ministre, vous avez ouvert la discussion en disant que le litige et le différend, sont entre nous,
le gouvernement et les mineurs. M. Hodges réplique en disant :
« Nous acceptons les chiffres du gouvernement. » Or, qu'est-ce
que cela prouve ? Cela prouve que pendant tout le temps que
vous avez discuté, pendant toutes les négociations, vous avez
réuni les données et les documents sur la base desquels vous
pouviez encore solutionner cette question difficile. Et en la solutionnant, voici ce qui arriverait. Supposons pour un moment
que les pourparlers au sujet des 10,000,000 de tonnes ne concernent pas seulement l'augmentation du rendement, mais, ce qui
est plus important, ouvrent la voie à une question beaucoup
plus vaste pour l'avenir. Maintenant, Monsieur, je me permettrai de vous suggérer la solution suivante : Comme M. Smillie
vous l'a fait savoir, nous ne sommes pas une commission de
négociation. Nous ne sommes ici que pour insister sur ce que vous
ne savez que trop bien: les résultats terribles qu'entraînerait
ce différend, au cas où l'on ne lui trouverait pas de solution.
Je ne puis quitter ce sujet sans faire cette proposition. Je la
fais sans accord préalable avec les mineurs et sans aucune responsabilité, mais je prétends que vous avez déclaré ici aujourd'hui que vous pourriez continuer à discuter cette question
sans aucun tribunal indépendant. Vous avez tous les éléments
en mains, ainsi que tous les faits, — vous nous l'avez montré.
Vous avez débattu point par point les arguments de la cause,
dont le bien-fondé est clairement établi, voire même plus qu'établi, mais c'est ce que vous avez fait autrefois. En mars, vous
l'avez fait avec les éléments qui étaient à votre disposition.
Vous avez maintenant les éléments et, sans dire vouloir prendre
part aux débats, je pourrais dire bien des choses sur la cause
des cheminots. Je ne veux pas les dire car, au lieu de prendre
part aux débats, je préfère voir s'il est possible de tomber
d'accord. Je ne doute pas que vous ne connaissiez la question et
— 34 —
n'ayez les éléments pour répondre aux mineurs ; eux-mêmes, en
demandant les 2 sh., ont établi le bien-fondé de leur cause,
par vos chiffres et non par ceux de quelqu'un d'autre.
M. SMILLIE. — Voulez-vous nous accorder cette augmentation de salaires et nous arranger avec les employeurs et la personne que Sir Robert Horne pourrait nommer ? Laissez-nous
nous mettre à l'œuvre au cours de la semaine ou de la quinzaine
prochaine, et convoquez-nous à nouveau dans six semaines ou
deux mois afin d'étudier les résultats.
Le PREMIER MINISTRE. — Ceci signifie tout simplement,
M. Smillie, que si nous accordons tout ce que vous demandez,
vous êtes disposés à discuter le reste.
M. THOMAS. — Veuillez écouter maintenant cette proposition ; M. Smillie va plus loin que cela.
M. SMILLIE. — Nous avons toujours été prêts à discuter le
reste. Sir Robert et vous, vous semblez en douter. M. Ronar
Law et moi pensons que tous ceux qui touchent au gouvernement croient que toute augmentation de salaires accordée entraîne une réduction de la production. Il n'y a pas de raison
pour qu'il y ait une réduction de production.
Le PREMIER MINISTRE. — C'est ce qui est arrivé. Je ne dis pas
que les deux choses soient nécessairement en corrélation, mais,
en fait, toute augmentation de salaire a été jusqu'ici suivie d'une
diminution de production.
M. HARTSHORN. — Ce n'est pas tout à fait exact.
Sir ROBERT HORNE. — Toutes les augmentations récentes,
je crois.
M. HARTSHORN. — Je suis d'accord avec vous pour la dernière.
Le PREMIER MINISTRE. — Je voulais dire les deux ou trois
dernières. Je veux parler de la production de ces derniers
temps.
M. HODGES. — Vous pourriez remonter à vingt ans en arrière,
M. Lloyd George, et vous trouveriez une baisse de production
par homme au cours de ces vingt ans, indépendamment de la
question des salaires.
Le PREMIER MINISTRE. — Je fais allusion aux dernières augmentations.
M. ROBERT HORNE. — J'ai toujours dit que nous sommes
prêts à écouter tout argument supplémentaire qui pourrait êfre
avancé, car, comme le dit fort bien M. Smillie, je n'ai pas de
parti pris et je tiens à peser le pour et le contre de toute chose.
Si les conférences futures, suggérées par M. Thomas, sont de
nature à être efficaces, je me tiens à la disposition de la Fédération des mineurs, mais nous ne pouvons plus parler bien long-
— 35 —
temps, car vous avez donné votre préavis de grève et, une fois
celle-ci déclarée, nous ne pouvons plus causer. Cela ne pourrait se faire que si le préavis était suspendu.
M. B R A C E . — M. Smillie, à ce que je crois savoir, nous fait
cette proposition dans le b u t d'essayer de trouver un terrain
d'entente commun pour l'augmentation des salaires et celle de
la production.
Le P R E M I E R M I N I S T R E . — Il dit qu'il devrait être accordé u n e
augmentation immédiate de 2 sh.
M.
BRACE.
— J e crois que c'est là que vous faites erreur.
M. S M I L L I E . — J'ai fait cette proposition au Premier ministre et à M. Bonar Law. Il se demande s'il sera fait des efforts
ou non, ou plus exactement si un effort qui pourrait être fait
aurait des résultats. J e crois qu'il y en aura si les employeurs —
et je pense que ceux-ci seront d'accord — veulent causer avec
nous dans le m ê m e esprit que nous causerons avec eux, Il est
beaucoup d'employeurs, je crois, qui sont aussi désireux que
nous de voir ces mines donner un rendement maximum, mais
ils ne connaissent pas les faits. Or, ils devraient les connaître et
nous devrions nous efforcer de les leur faire connaître. Il
est possible que beaucoup d'employeurs nous diraient, si nous
causions avec eux, que nos hommes ne travaillent pas comme ils
devraient le faire, et nous aimerions savoir cela. Il est possible
que nous puissions arriver à trouver une solution. Si vous voyiez
la possibilité d'accorder l'augmentation de salaires, Sir R o b e r t
a suggéré que nous pourrions nous rencontrer avec les employeurs. J e crois que nous pourrions commencer de suite les
pourparlers. Que l'Association houillère de Grande-Bretagne
nomme ses dé égués ; de notre côté nous nommerons les nôtres,
qui rencontreront les vôtres et commenceront à causer de la
production et des moyens de l'améliorer. Vous pourriez nous
demander de reprendre les pourparlers si, dans six semaines
ou deux mois, il n'y avait pas une augmentation sensible de la
production et vous pourriez nous en demander la raison. Nous
serions alors à même de vous donner une réponse. J e crois cependant que vous auriez alors une augmentation de production.
Le P R E M I E R M I N I S T R E . — Soyons très précis sur ce point,
essayons de bien nous comprendre. Cela doit-il signifier que les
2 sh. doivent être donnés sans égard à la production et qu'au
bout de six semaines, vous auriez vos 2 sh. d'augmentation pour
t o u t e cette pédiode, que l'extraction ait augmenté ou qu'elle
ait baissé, et que cette augmentation de salaire n'ait aucun r a p port avec la production ? C'est bien cela ?.
M. S M I L L I E . -— Notre avis sincère est que nous croyons que
le coût de la vie va augmenter.
Le
tion.
P R E M I E R MINISTRE.
— Voilà encore une nouvelle sugges-
-
36 —
M. S M I L L I E . — Nous croyons que vous avez l'argent disponible pour payer cette augmentation. Nous croyons que si les
employeurs et nous-mêmes étudiions cette question dans l'esprit où nous devrions l'étudier, nous pourrions sensiblement
augmenter la production. J e tiens à souligner que si nous pouvons l'augmenter de 1 million de tonnes dans les 2 ou 3 mois
prochains, ceci vous indemnisera amplement pour les dépenses
que vous avez à payer maintenant.
Le P R E M I E R MINISTRE. — Ceci est un argument, voyez-vous,
qui tend à faire dépendre de la production l'augmentation de
salaires. C'est là une chose que nous pouvons justifier aux yeux
de la nation, ce qui n'est pas le cas pour l'autre solution. Nous
aurions alors vraiment à en courir le risque. Nous ne pourrions
recommander à la nation de le faire. Si un tribunal décidait
que c'est justice, alors cela ne dépendrait plus de nous. Mais
nous ne saurions recommander à la nation de consentir à ce
que l'industrie paye 2 sh. de plus par jour sans égard au rendem e n t et sans une enquête de la p a r t d'un tribunal impartial qui
trancherait la question. Mais si vous croyez qu'en discutant avec
les propriétaires il serait possible de m e t t r e sur pied un projet
qui augmente la production et, de cette façon, augmente
sensiblement le salaire des mineurs, il y aura alors une seule et
unique façon de le faire. Il est impossible de faire cela en 48 heures.
L a seule façon de procéder consiste à suspendre le préavis
de grève et à convoquer une assemblée de ce genre afin de voir
si vous ne pourriez pas établir un projet. Si vous trouviez alors
qu'il n'est pas possible d'en établir un, vous pourriez toujours
en revenir à la situation actuelle et, si vous y tenez, lutter jusqu'au bout.
M. S M I L L I E . — Il n'y aura pas d'augmentation de salaires
jusqu'au jour où nous causerons avec les employeurs et donnerons la preuve que la production a baissé ou qu'elle a augmenté.
C'est bien cela, n'est-ce pas ?
Le P R E M I E R MINISTRE. — Non. Mais bien qu'un projet soit
établi prévoyant une augmentation de salaires qui serait subordonnée à une augmentation de production.
M. B R A C E . — Ce que vous suggérez, c'est que l'on nous accorde
une augmentation de 2 sh., mais ce sont 2 sh. basés sur une
courbe de production. Est-ce cela que vous nous dites ?
Le P R E M I E R MINISTRE. — Non. C'est ce que je me suis laissé
dire par mon entourage. M. Smillie m ' a rappelé que je ne suis
q u ' u n profane dans cette question, ce qui est exact.
M.
SMILLIE.
— J e ne l'entendais pas dans ce sens-là.
Le P R E M I E R MINISTRE. — Non, vous l'avez dit de façon la
plus aimable du monde. J e ne l'ai pas considéré comme une
offense. Mais voici ce que l'on me dit : c'est qu'il serait possible
de mettre sur pied un projet qui, t e n a n t compte de t o u t ce qu'a
— 37 —
dit M. Smillie au sujet de l'ouverture de nouvelles mines et des
difficultés créées par la guerre, permettrait d'augmenter la
production au point que les mineurs obtiendraient, grâce à un
projet de ce genre, leurs 2 sh. et que la nation aurait l'augmentation de production qu'elle désire. Il est probable que, par un
projet de ce genre, les mineurs obtiendraient davantage, mais
alors la nation aurait aussi une compensation.
M. V E R N O N H A R T S H O R N . — Voulez-vous dire qu'ils obtiendraient leurs 2 sh. de suite ?
Le P R E M I E R MINISTRE. — Oui, si la production augmentait.
J e suis d'accord avec vous qu'il s'agit uniquement de savoir où
prendre la courbe de production. J e ne me permettrais pas de
suggérer une courbe, mais je suis entièrement persuadé qu'en
a d o p t a n t une courbe raisonnable les mineurs auraient la possibilité de gagner leurs 2 sh. basés sur une augmentation du rendement et que bientôt ils obtiendraient beaucoup plus ; la
seule chose que je suggère, c'est que le préavis de grève soit
ajourné. Si vous l'ajourniez p e n d a n t la durée de la discussion
préliminaire et si vous trouviez que le projet est irréalisable,
vous pourrez revenir à votre position première, position que
vous n'abandonnez pas. Naturellement je conteste et discute
cette position, mais à vous à décider. Rien ne vous empêche d'y
revenir. Pourquoi ne faites-vous pas en t o u t cas l'expérience
d'une assemblée préliminaire avec les propriétaires et le contrôleur du charbon afin de voir si vous ne pourriez établir un
projet qui donne satisfaction à la collectivité dans son ensemble et qui probablement donnerait aux mineurs plus des 2 sh.
en question sur une production augmentée, ce qui est t o u t à fait
possible ?
M.
FINNEY.
— 11 y a des ouvriers aux pièces et à la journée.
Le
P R E M I E R MINISTRE.
M.
FINNEY.
Le
P R E M I E R MINISTRE.
— Oui, mais voyez-vous...
— J e veux poser ma question, si vous permettez.
— J e vous demande pardon.
M. F I N N E Y . — Vous parlez t o u t le temps de production...
Les mineurs obtiendront-ils davantage en a u g m e n t a n t la production ?
Le P R E M I E R MINISTRE. —
Oui.
M. F I N N E Y . — Parlez-vous de la production globale ou parlez-vous de la production par localités ?
Le P R E M I E R M I N I S T R E . — Globale. C'est la suggestion que
nous avons formulée. Mais cela reste à examiner. Vous pourriez
faire une étude préliminaire dans une semaine ; vous sauriez si
la chose est faisable ou non. J e ne dis cependant pas que vous
pourriez achever le projet en une semaine. J e crois que M. Hodges
exagère lorsqu'il parle du t e m p s nécessaire, mais je suis d'accord
avec lui que cela prendra un certain temps.
— 38 —
M. H O D G E S . — J e ne parlais pas du projet, mais de la production.
Le P R E M I E R MINISTRE. — Je ne crois pas que cela prendrait
beaucoup de temps de rétablir la production d'une façon telle
que vous puissiez obtenir une augmentation pour le mineur et
même une augmentation sensible. Mais, de t o u t e façon, quel
mal y a-t-il à suspendre le préavis de grève pour une semaine
ou quinze jours par exemple ? Vous vous livrerez alors à une étude
préliminaire avec les propriétaires de mines et le contrôleur
du charbon, ou établirez un projet de ce genre. Vous ne vous
engagez à rien. Nous ne vous demandons pas de vous engager,
mais nous vous demandons de vous déclarer d'accord pour une
étude préliminaire, afin de voir si c'est faisable. Est-ce t r o p demander lorsqu'il s'agit de plonger la nation dans un désastre
aussi terrible ? J e ne le crois pas.
M. S M I L L I E . — Supposons que, la semaine prochaine, les employeurs et nous croyions pouvoir trouver un terrain d'entente
et que nous tombions effectivement d'accord sur un projet
donné, qu'arriverait-il ? Nos hommes toucheraient-ils les 2 sh. ?
Le P R E M I E R MINISTRE. — C'est une question qui dépend
entièrement du projet que vous établirez en relation avec la
production.
M. S M I L L I E . — M. Llyod George, nous demandons ces 2 sh.
dans les conditions actuelles et je crains fort que le gouvernem e n t ne m a n q u e la plus belle occasion qui se soit jamais présentée d'augmenter la production. J'ignore comment les mineurs envisageront la chose, mais, dans cette question, ils seraient disposés à nous prêter leur appui dans une large mesure ;
je crois qu'avec de la bonne volonté nous serions en mesure
d'augmenter la production, mais, dans les circonstances actuelles, il ne p e u t y avoir de bonne volonté.
Le P R E M I E R MINISTRE. — Je le sais, mais on peut toujours
trouver une excuse ou une autre. M. Hodges en a trouvé qui
lui ont suffi.
M.
HODGES.
— J'espère qu'elles vous ont suffi.
Le P R E M I E R MINISTRE. — Non, ce n'est pas le cas, pour des
raisons sur lesquelles je ne veux pas m'étendre, car, si nous commençons à parler de ces choses, cela nous éloignerait de la discussion. On peut cependant y donner une réponse complète.
Mais en t o u t cas, vous devenez alors juge et partie. Vous venez
nous dire : « Donnez-nous cette augmentation de salaires et
nous pensons pouvoir vous donner un accroissement de production ». Nous trouvons qu'elle baisse au lieu de monter.
Vous dites qu'il y avait des raisons. Il y aura toujours des raisons, il y en aura toujours. J'ai sous les yeux une liste des augmentations de salaires, elles ont été invariablement suivies
d'une diminution de production. Or, la nation, que nous représentons en l'occurrence, attendra de nous, je crois, que si nous ac-
— 39 —
cordons une augmentation de salaire, celle-ci devra avoir un
rapport avec le maintien de la production. J e crois que vous
pouvez m e t t r e sur pied un projet qui donne satisfaction aux
mineurs, mais le moins que nous puissions demander de vous,
c'est que vous l'examiniez non pas lorsque toute l'industrie
du pays, sera arrêtée, lorsque le conflit aura commencé, mais
m a i n t e n a n t que l'on travaille encore dans les mines. Il est possible q u ' a u cours d'une semaine vous puissiez décider si c'est
faisable. En une semaine vous pourriez le faire.
M. BONAR L A W . — E n d'autres termes je dirai :... s'il y a une
certitude pratique que vous puissiez obtenir l'augmentation
de cette manière.
Le
P R E M I E R MINISTRE.
— Oui, c'est cela. C'est tout.
M. S M I L L I E . — Il y a un point : les mineurs ne peuvent augmenter la production sans l'appui des employeurs.
Le
P R E M I E R MINISTRE.
— J e suis t o u t à fait d'accord.
M. S M I L L I E . — Ils n'ont absolument aucun contrôle, sous
aucune forme quelconque. Ils doivent se borner à descendre
et à remplir les bennes pour obtenir du charbon.
Le P R E M I E R MINISTRE. — J e le sais et je le reconnais. C'est
la raison pour laquelle je vous suggère de vous rencontrer avec
les propriétaires de mines en présence du contrôle du charbon.
Vous exposeriez votre cause et diriez : « Nous ne pouvons vraim e n t augmenter la production, pour telle ou telle raison qui dépend des propriétaires des mines. » C'est là une question qui
pourrait faire l'objet d'une enquête.
M. SMILLIE? — Nous aurions pu prendre l'engagement définitif envers vous et nous l'aurions probablement pris, si
c'était en notre pouvoir, d'augmenter la production, mais cela
ne dépend pas de nous. J e vous ai demandé de nous accorder
cette augmentation de salaires m a i n t e n a n t et, s'il y a lieu,
de nous convoquer à nouveau pour nous dire : « Ecoutez bien :
je vous ai donné, bien à contre-cœur c'est vrai, ces 2 sh., mais
je vous les ai donnés dans la croyance que vous vous arrangeriez
avec les employeurs et augmenteriez la production. » Si nous
n'augmentions pas la production ou si nous ne nous efforcions
pas de l'augmenter, — si nous pouvions le faire sans l'appui
des employeurs, je prendrais cet engagement sans hésiter.
Mais nous pourrions prendre l'engagement d'augmenter le
rendement de l'extraction, alors qu'il pourrait surgir des obstacles qui entraîneraient non pas une augmentation, mais une
diminution. Avec toute la bonne volonté du monde, nous ne
saurions le faire.
U N D É L É G U É . — Très bien, très bien. Nous ne saurions prend r e un engagement de ce genre.
— 40 —
M. BoNAR L A W . — Mais vous avez la certitude pratique qu'à
moins de difficultés la production augmentera. Puis-je vous
demander de souligner ce point, Monsieur ?
Le P R E M I E R
sieur.
MINISTRE.
— Oui, faites-le, s'il vous plaît, Mon-
M. BONAR L A W . — D'après ce qu'a dit M. Hodges, en admett a n t que nous prenions une courbe de production qui soit considérablement au-dessous de la production maximum du premier trimestre, vous aurez la certitude d'une augmentation,
d'une augmentation considérable, même au cas où il n'y aurait
pas d'augmentation de production plus considérable que celle
qui aurait lieu normalement. Or, il me semble qu'en faisant cela
nous nous exposerions à l'accusation d'être des fumistes pour
avoir donné l'augmentation sous une forme t o u t en disant à la
nation que nous ne la donnons pas. Mais, en réalité, je crois que
nous sommes en droit de le faire parce que l'industrie se trouvera
placée sur la base de la dépendance entre l'augmentation des
salaires et celle de la production.
M. H A R T S H O R N E . — A combien au-dessous du maximum proposez-vous d'aller, M. Law ?
M. B O N A R L A W . — C'est ce que je dis, M. Hartshorne. Vous
savez qu'il est exact que, si ce principe était adopté, vous
auriez automatiquement une augmentation et nous serions en
droit de vous l'accorder, car c'est la première fois que l'on subordonnerait les dépenses à la production et ceci v a u t la peine de
faire une concession.
M. H A R T S H O R N E . — Mais pourquoi ne donnez-vous
réponse définitive à la question que MM. Hodges et
vous ont posée ? Supposons que nous arrivions -à une
Obtiendrions-nous les 2 sh. d'augmentation que nous
dons ?
pas une
Smillie
entente.
deman-
M. BONAR L A W . — Cela dépendra de la production. Cela doit
dépendre de la production.
M. H A R T S H O R N E . — Voulez-vous dire que les 2 sh. ne seront
pas payés ?
M. B O N A R L A W . — Sir Robert H o m e a expliqué qu'il est t o u t
à fait disposé à donner un effet rétroactif à cette augmentation,
à partir du 1 er octobre... (Le reste est incompréhensible,
les
délégués parlant entre eux).
M.
SMILLIE.
— Pourrais-je l'interpréter de la façon suivante...
U N DÉLÉGUÉ.
— Voilà un terrain t o u t à fait nouveau.
M. R O B E R T H O R N E . — J e crois avoir soumis, peut-être d'une
façon défectueuse, une proposition de ce genre.
L E P R E M I E R MINISTRE.
— Mais il s'agit d'un terrain sur lequel
-
41 —
il y a quelque chance d'arriver à une entente, peu importe que
ce soit un terrain nouveau ou ancien.
M. S M I L L I E . — M. R o b e r t croit, et je pense que le départem e n t croit, que s'il y avait une entente en vertu de laquelle la
production pourrait être augmentée, les salaires profiteraient
dans une certaine mesure de cette augmentation de la production. Il pense que ceci contribuerait à encourager l'extraction,
car il y aurait alors une récompense pour la production, c'està-dire une récompense nationale pour tous. Supposons que
l'on vous suggère d'accorder cette augmentation de salaires
et que nous causions avec les employeurs, en présence de Sir
Robert Horne, et fixions la courbe de production à un point
quelconque, jugé raisonnable et j u s t e ; vous suggéreriez alors
que t o u t e augmentation de la production au delà de cette courbe
devrait servir à la création d'un fonds où l'on commencerait à
puiser pour accorder une certaine augmentation. Supposons
que nous disions : «Si vous nous accordez aujourd'hui l'augmentation de salaire, nous collaborerons avec les employeurs et,
une fois la courbe de production fixée, nous ne demanderons pas
d'augmentation basée sur l'accroissement de la production
jusqu'à ce que la valeur de cet accroissement soit réalisée.
M. R O N A R
vous savez.
Le
LAW.
— C'est un principe t o u t à fait différent,
P R E M I E R MINISTRE.
— Oui, c'est un principe différent.
M. T H O M A S . — Sûrement, M. Lloyd George, cela démontre
que les mineurs vous disent...
Le P R E M I E R M I N I S T R E . — Qu'est-ce que c'est ? Cela signifie
simplement : « Si vous nous donnez 2 sh. maintenant, nous vous
proposons de demander plus tard une augmentation, mais
nous ne le ferons pas, à moins d'un accroissement de la production. » Mais, d'autre part, nous disons que cette augmentation
doit être subordonnée à la production.
M. T H O M A S . — J e vous demande pardon, mais vous avez été
plus loin et vous avez dit ceci : « Nous voulons donner un encouragement a u x mineurs pour qu'ils produisent davantage. »
Le P R E M I E R M I N I S T R E . — Pourquoi, quel encouragement ?
D'après vous, si la production reste exactement au bas chiffre
actuel de 230,000,000, les 2 sh. seront payés quand même.
M. R R A C E . — Pardonnez-moi, mais M. Smillie a dit ceci. Si
vous donnez les 2 sh., cela représenterait une courbe extérieure
de production, car notre augmentation était ordinairement
représentée par un chiffre.
Sous le régime des chambres de conciliation nous avions cout u m e de fixer les salaires ; un certain salaire avait comme équivalent un certain prix et ce que M. Smillie v e u t dire c'est que,
si nous obtenons les 2 sh., cela r e p r é s e n t e r a , — i l ne l'a pas dit
dans ce sens spécial, mais recherchons en somme les moyens
— 42 —
de trouver une base — cela représentera une courbe de production équivalente, puisque notre ancien prix équivalent représentait habituellement un certain salaire.
Le P R E M I E R MINISTRE. — Voilà justement la question,
M. Brace. J e ne dis pas cela pour discuter, mais pour éclaircir
le débat. Supposons que la production soit moindre que la courbe,
les mineurs toucheraient-ils les 2 sh. supplémentaires ?
M.
BRACE.
— Moindre que la courbe de production ?
Le P R E M I E R MINISTRE. —
M.
BRACE.
Oui.
— E h bien, donnez-leur les 2 sh. pour commencer.
Le P R E M I E R MINISTRE. — Donc, même si vous êtes au-dessous
de la courbe, vous obtenez les 2 sh. quand même ?
M.
BRACE.
— Oui, mais ne voyez-vous pas, Monsieur...
Le P R E M I E R MINISTRE. — Alors je ne vois pas où il y a un
encouragement. La nation reste en dehors.
M. B R A C E . — Mais vous faites l'acquisition d'une entreprise.
Le P R E M I E R MINISTRE. — E h bien, voyez-vous, je n'ai pas
le moindre doute qu'il y a lieu d'accepter la chose en t o u t e
sincérité. M. Hodges l'a offert ici en t o u t e sincérité, quand il
a été accordé la dernière fois une augmentation de plus de 2 sh.,
— je crois que ce furent 12 sh. par semaine qui furent accordés.
L'augmentation ne s'est pas réalisée pour des raisons qui sont
de la compétence de M. Hodges, mais qui sont très décevantes
pour la nation.
M.
BRACE.
— Voilà un terrain plutôt nouveau pour nous.
Le P R E M I E R MINISTRE. — E n tous cas, je vous suggère de
peser ce qui a été dit.
M. H O D G E S . — J e ne pense vraiment pas que la nature des
propositions que vous avez avancées — vous me pardonnerez de
dire cela avec toute la déférence qui vous est due, — bien que
je m e sois efforcé de les comprendre de mon mieux, puisse les
faire ressembler à une suite de propositions claires et définies
qui aboutiraient à une amélioration de la production et à une
amélioration de nos conditions de salaire. Cela devrait être établi avec une beaucoup plus grande précision et d'une façon
beaucoup plus détaillée, a v a n t que nous puissions juger si cette
façon de procéder peut être applicable dans notre industrie
d'une façon à peu près permanente. Nous voulons quelque
chose qui soit applicable à notre industrie et qui nous p e r m e t t e
de continuer notre travail d'année en année.
Le P R E M I E R MINISTRE. — Très bien, vous pouvez vous poser
la question lorsque vous l'aurez discutée entre vous. Si vous
aviez quelque question à me poser sur un point de détai± qui
vous rendît la chose plus claire, je ne voudrais pas y répondre surle-champ. Car il est naturel que des réponses soient données
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par ceux qui ont les compétences techniques nécessaires pour
avoir une opinion ; mais en t o u t cas, vos questions, nous les "
examinerons de notre mieux et nous donnerons ensuite la réponse.
M. R O B E R T H O R N E . — Il y a une chose que je voudrais dire.
Commençons toujours sur ces bases. P e n d a n t longtemps il
ne sera pas possible de réorganiser l'industrie houillère dans son
ensemble. Donc, commençons par cela. J e ne doute pas le moins
du monde que si j'étais un propriétaire de mines ou un mineur,
et que si actuellement j'étudiais ce problème, je trouverais
certainement un moyen pour fixer un t a u x d'extraction qui
assurât certaines augmentations et d'autres t a u x p o u v a n t
assurer des augmentations ultérieures. Je ne doute pas le moins
du monde qu'un projet de ce genre puisse être fait actuellement
et qu'il trouve l'approbation et des vôtres et des propriétaires
de mines.
Le
P R E M I E R MINISTRE.
M.
ROBERT HORNE.
Le
P R E M I E R MINISTRE.
— ...et de la nation.
— ...et de là nation et du monde entier.
— Oui, le monde entier en profiterait.
M. R O B E R T H O R N E . — Cela est certain. J e n'ai pas le moindre
doute que ce b u t pourrait être atteint. Pour cela il suffit, me
semble-t-il, de vous asseoir à la table des propriétaires de mines
dans l'esprit dont vous avez fait preuve au cours des diverses _
conférences que j ' a i tenues dans le b u t d'atteindre ce résultat
désirable.
M. H O D G E S . — L a production n'est naturellement pas la
seule question. T o u t compte fait, la production doit être en
rapport avec les prix. (Très bien, très bien.) Nous pourrions augmenter la production de 10,000,000 de tonnes, mais si nous ne
sommes pas protégés en ce qui concerne les prix, comment
cela améliorerait-il notre situation ?
Le P R E M I E R MINISTRE. — C'est une des questions qui pourraient être examinées.
M.
HODGES.
— Mais elles sont capitales.
Le P R E M I E R ' M I N I S T R E . — J e suis d'accord. Posez t o u t e s
vos questions et alors nous les examinerons au mieux.
M. H O D G E S . — J e voulais simplement dire, Monsieur le Premier ministre, que, pour a u t a n t que je puisse en juger, la proposition, comme elle se présente actuellement, est une proposition qui ne peut pas remplacer notre demande d'augmentation, basée sur des chiffres acceptés de p a r t et d'autre, mais,
qui arriverait si cette question était liquidée, — et t a n t qu'elle
ne le sera pas, je ne vois pas comment nous pourrons avoir
la paix (très bien, très bien), — que vous nous croyiez sincères
ou non.
— 44 —
Le
P R E M I E R MINISTRE.
— Personne n'en doute.
t
M. H O D G E S . — J e veux dire : -si vous croyez sincèrement
que nos assertions sont basées sur des faits ou non.
Le
P R E M I E R MINISTRE.
— Voilà autre chose.
M. H O D G E S . — Alors il nous semble qu'à partir du m o m e n t
où nous en aurons fini avec cette affaire, dans notre propre
intérêt, — dans l'intérêt de la grande agglomération d'hommes
et de femmes que nous représentons, — nous devons nous mett r e ^ l'œuvre ! Quels que soient les obstacles qui se t r o u v e n t sur
le chemin de la réorganisation de l'industrie, nous devons nous
efforcer de les surmonter. C'est une obligation que nous devons
remplir, mais la condition préalable est la suppression de l'anomalie existante, à savoir que nos salaires sont inférieurs au
renchérissement de la vie.
M. G. B A R K E R . — Restons-en là, je crois que nous avons
assez causé pour aujourd'hui.
Le
P R E M I E R MINISTRE.
— Très bien.
M. T H O M A S . — J e n'ai q u ' u n m o t à dire. Sir R o b e r t Horne
a dit quelque chose que j ' a i retenu. Lorsque j ' a i dit que vous
aviez toutes les données, il répondit comme suit : « Oui, en ce
qui nous concerne, nous sommes prêts à continuer. » Or, je
désire être renseigné d'une façon précise s'il voulait dire : de
continuer à discuter les 2 sh.
M. R O B E R T H O R N E . — J'ai dit que j'écouterais toujours les
autres arguments qui pourraient être avancés sur t o u t ce qui
concerne les revendications et je suis toujours prêt à les entendre.
Le premier ministre et «es collègues se retirèrent alors et les
délégués continuèrent à délibérer à titre privé.