Obligation légale de s`équiper en défibrillateur

Transcription

Obligation légale de s`équiper en défibrillateur
NOTE SUR L’OBLIGATION LEGALE DE L’EQUIPEMENT DES
ENTREPRISES ET DES ERP EN DEFIBRILLATEURS CARDIAQUES.
Septembre 2015
Le défibrillateur automatique est à la disposition du grand public depuis que le
gouvernement français, par le décret du 4 mai 2007, autorise toute personne non
médecin à utiliser l’appareil sans encourir la moindre responsabilité en cas d’échec. Ce
décret est un des éléments qui répond à l’immense problème de santé publique que
représente le décès par arrêt cardiaque de quelques 50 à 60 000 personnes chaque
année.
Depuis cette date, d’autres textes ont été publiés : l’arrêté du 6 novembre 2009 du
Ministère de la Santé et des Sports qui prévoit une formation d’une heure maximum pour
le grand public, réitéré par l’arrêté du Ministère de l’Intérieur du 16 juillet 2010. Un mois
plus tard, le Ministère de la Santé fixait par l’Arrêté du 16 août 2010, les modalités de
signalisation des défibrillateurs cardiaques automatisés externes dans les lieux publics.
En ce qui concerne l’obligation de s’équiper, il n’existe pas à ce jour d’obligation légale
proprement dite.
En revanche, selon l’analyse effectuée par plusieurs cabinets d’avocats dont l’un des
principaux a équipé sa centaine de bureaux, la présence de l’enseignement de
l’utilisation du défibrillateur dans le programme officiel des Sauveteurs
Secouristes du Travail rend de fait la présence de l’équipement obligatoire dans
les établissements comptant des SST et surtout entre dans le cadre de l’obligation
générale du « chef d’établissement » à « prendre des mesures nécessaires pour
assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs... »
(Article L4121-1 du Code du Travail)
Le site travailler-mieux.gouv.fr fait expressément référence à l’article Article 121-3
du code pénal qui stipule : « les personnes physiques qui n'ont pas causé directement le
dommage, mais qui ont créé ou contribué à créer la situation qui a permis la réalisation du
dommage ou qui n'ont pas pris les mesures permettant de l'éviter, sont responsables
pénalement s'il est établi qu'elles ont, soit violé de façon manifestement délibérée une
obligation particulière de prudence ou de sécurité prévue par la loi ou le règlement, soit
commis une faute caractérisée et qui exposait autrui à un risque d'une particulière gravité
qu'elles ne pouvaient ignorer. »
La Cour de cassation, (Chambre sociale, n° 1593, 11 avril 2002) a statué que
l’employeur est tenu envers ses salariés par le contrat de travail à une obligation de « sécurité
de résultat ». Le manquement à cette obligation a le caractère d’une FAUTE INEXCUSABLE
lorsque l’employeur avait ou aurait dû avoir conscience du danger auquel était exposé le
salarié et qu’il n’a pas pris les mesures nécessaires pour l’en préserver.
Des éléments aggravants renforcent la responsabilité du chef d’établissement : la moyenne
d’âge, la fréquentation du lieu, l’état de santé des salariés, en particulier des antécédents
cardiaques connus, des demandes formelles du CE ou du CHSCT, ou encore une
recommandation formelle de la médecine du travail.
En ce qui concerne les ERP, l’obligation est presque officiellement
confirmée par une lettre du Ministère de l'intérieur, de la Jeunesse
et des Sports envoyée à la Fédération Nationale des Maîtres Nageurs
Sauveteurs qui la publie sur son site internet. Interrogé sur l’obligation de
s’équiper, le Ministère répond :
« La présence obligatoire ou non d’un DSA dans un poste de
secours ou une infirmerie relève de l’obligation de moyens à
laquelle est tenu le maire d’une part ou l’exploitant de l’ERP d’autre
part. Dès lors que les personnels sont formés à l’utilisation de ce
matériel, je crains sous réserve de l’appréciation souveraine des
juges de la juridiction compétente, qu’en cas de besoin, l’absence
d’un tel appareil puisse être considérée comme un défaut de
moyens ».
Et cela d’autant plus que l’investissement pour un défibrillateur est
ridiculement bas par rapport à l’enjeu de la survie d’une personne et très
souvent aux budgets gérés par les chefs d’établissement.
A ce jour, aucun procès consécutif à un arrêt cardiaque n’a encore fait
d’écho. Il semble que les ayants-droit des victimes acceptent les décès
comme des événements inéluctables. Avec l’augmentation du nombre
de campagnes en faveur de la généralisation des défibrillateurs, cette
tendance risque de se retourner.
En ce qui concerne la maintenance, la réponse du Ministère de
l’Intérieur à une question posée par le sénateur Hervé Maurey
(publiée dans le JO Sénat du 12/02/2015 - page 302)sur les
obligations des communes en la matière ou les recommandations qu'il
adresse en ce domaine aux élus locaux confirme cette obligation
(publiée dans le JO Sénat du 11/06/2015 - page 1394) :
« L'installation décidée par le maire de défibrillateurs cardiaques externes sur le territoire de
sa commune s'inscrit dans le cadre des pouvoirs de police administrative qu'il détient en
application de l'article L. 2212-2 du code général des collectivités territoriales. Le 5° de cet
article dispose que la police municipale a pour objet le soin « de pourvoir d'urgence à toutes
les mesures d'assistance et de secours ». L'utilisation de ces pouvoirs est susceptible d'engager
la responsabilité pénale du maire, conformément à l'article L. 121-3 du code pénal. Toutefois,
aux termes des dispositions de l'article L. 2123-34 du code général des collectivités
territoriales, le maire ne peut être condamné « pour des faits non intentionnels commis dans
l'exercice de ses fonctions que s'il est établi qu'il n'a pas accompli les diligences normales
compte tenu de ses compétences, du pouvoir et des moyens dont il disposait ainsi que des
difficultés propres aux missions que la loi lui confie ». Or, aucune loi n'impose au maire
l'installation de défibrillateurs. La responsabilité pénale d'un maire ne saurait éventuellement - être engagée que si le maire ayant de sa propre initiative fait installer
un défibrillateur n'avait pas suffisamment veillé à son bon fonctionnement, à son
entretien. Ainsi, dans le cas des défibrillateurs cardiaques, les conséquences d'une défaillance
imputable à l'appareil ne pourraient engager la responsabilité du maire que si celui-ci n'a
manifestement pas accompli les démarches nécessaires à son bon fonctionnement, comme
l'installation et l'entretien par un professionnel. »
Conclusion : Attaqué par un ayant-droit d’une victime d’arrêt
cardio-respiratoire,
un
chef
d’établissement
ne
pourra
vraisemblablement pas se dérober à la mise en cause de sa
responsabilité personnelle, civile et pénale, avec les coûts
matériels, sociaux, et moraux que cela peut impliquer pour son
entreprise. Sa responsabilité pénale pourra être mise en cause,
d’autant plus que pour une PME un défibrillateur représente un coût
modeste. Equipé d’un défibrillateur, le chef d’établissement ne
pourra voir sa responsabilité mise en cause que s’il a
volontairement empêché sa bonne maintenance.

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