émission huis-clos échanges et discussions évaluation de la

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émission huis-clos échanges et discussions évaluation de la
ÉMISSION HUIS-CLOS
ÉCHANGES ET DISCUSSIONS
La question posée lors de l’émission huis-clos est : Doit-on poursuivre le parent
qui ferme les yeux?
Ma vis-à-vis sera : Me Hélène Carle, procureur aux poursuites pénales et criminelles
(PPCP).
ÉVALUATION DE LA QUESTION POSÉE :
o La question ne dit pas que :
Le parent non-abuseur…c’est la mère …dans la grande majorité des cas.
Le parent abuseur est le père
o La question repose sur une prémisse erronée :
Les mères ferment « volontairement » les yeux.
o En somme : la question aurait eu avantage à être formulée autrement de
manière à tenir compte que le parent non-abuseur (la mère) qui ferme les
yeux est impliquée « en apparence seulement ».
POSITION DE BASE SUR LE DÉBAT/RÉPONSES POSSIBLES :
o Chaque situation est un cas d’espèce qui suppose une évaluation
rigoureuse de la situation et des circonstances. Il ne faut certes
pas promouvoir la poursuite automatique.
o La démarche thérapeutique avec le parent non impliqué est à
privilégier.
o Quand les mères dénoncent…est-ce qu’il y a toujours une oreille?
La DPJ croit-elle toujours les mères qui dénoncent? La DPJ
considère t-elle plutôt que le désir d’avoir la garde exclusive est ce
qui amène les mères à dénoncer « faussement » le père
(aliénation parentale)?
o La responsabilité p.r à la protection des enfants/ado est sociale.
Elle n’appartient pas qu’aux mères. La prévention, la sensibilisation
sont à privilégier.
IL EST VRAI QUE :

L’attitude du parent non abuseur face aux abus est cruciale pour l’enfant/ado.

Au moment du dévoilement, les réactions du parent non abuseur peuvent être
adéquates ou préjudiciables. Le parent peut aussi osciller sur ce pôle.
ADÉQUATES
PRÉJUDICIABLES
Croire, prendre au sérieux
Nier, rejeter ce qui est dit, rejeter l’enfant
Encourager au dévoilement
Faire pression à la rétractation
Soutenir et identifier les
conséquences sur l’enfant/ado
Accuser quelqu’un d’autre d’avoir influencé
l’enfant
Le protéger de l’abuseur
Montrer une hyper compréhension ou de
l’empathie p.r. à l’auteur des gestes
S’ouvrir vers l’extérieur,
chercher de l’aide pour l’enfant
avant tout et pour soi.
Responsabiliser l’enfant des abus et/ou des
conséquences
Rendre explicite ce qui a été
gardé secret
Rester centrer sur soi au détriment de l’enfant
lui-même

Le soutien du parent non abuseur est le premier moyen de récupérer
l’enfant/ado abusé;

Notre rôle comme société est de tout mettre en œuvre pour favoriser un
contexte soutenant et reconstructeur pour l’enfant/ado.

L’accompagnement du parent non abuseur (le plus souvent la mère) apparaît
incontournable lorsque le but est la reprise d’un développement harmonieux
chez l’enfant/ado et la prévention de la récidive;

Le défaut d’écoute et de compétence aura pour conséquence de laisser se
perpétuer la situation d’abus.

La mauvaise communication peut conduire à un blocage chez la victime,
réduira sa confiance et, par le fait même, la révélation des gestes subis
(l’enfant vit une trahison de plus);

La situation la plus critique pour la victime, est celle où la mère ne s’implique
pas en rejetant les dires de l’enfant, en ne faisant rien, en minimisant les
gestes posés. Cette attitude peut parfois laisser entendre que la mère prend
activement parti pour l’abuseur …mais est-ce toujours le cas? Est-ce plutôt un
problème de compétence parentale? De déni ?
LE DÉNI

L’impact du dévoilement sur le parent non abuseur est souvent le déni. Ce
déni est souvent rattaché à :
o La résonance d’un traumatisme personnel de même nature. (Les effets
pathogènes des abus vécus par la femme ont pour effet d’estomper la
conscience de devoir mettre des frontières). Ça fait trop mal de se
souvenir!
o Au fait que l’abuseur est une figure d’attachement ou de peur;
o Volonté de défendre l’intégrité de la réputation familiale;
o Ouvre la porte sur un grand secret : l’intimité sexuelle du couple;
o Peur d’être accusée s’il y a eu un délai entre la plainte et le 1er abus;
o Manque d’information sur le système judiciaire (si je parle et
j’enclenche la machine judiciaire…est-ce qu’il y aura des gros frais?)

Beaucoup des abus sont marqués par le sceau du déni et de l’aveuglement;

Le déni face à l’abus est une réaction dont les visées vont au-delà de
l’évitement de la sanction (traitement judiciaire, accusation criminelle,
possibilité d’un emprisonnement). C’est beaucoup plus complexe que ça…

En tombant dans le déni, la personne ne fait pas l’aveu qu’elle est en accord
avec l’abuseur. Au contraire, elle est en désaccord avec ce qui se passe..
mais c’est trop douloureux pour elle et elle finit par se convaincre que le
problème n’existe pas;

Par le déni/aveuglement, la mère peut donner l’impression qu’elle conspire
« intentionnellement » avec l’abuseur mais il faut aller plus loin que cette
première impression. Le déni comme mécanisme de défense peut tout aussi
bien correspondre à des motivations inconscientes pour protéger sa survie
psychique (éviter la pression, l’isolement, etc)

Il y a des moments-clés pour prévenir l’instauration du déni (dès le
dévoilement, en optant pour un suivi relationnel avec la mère dès le début,
rejoindre ce parent dans ce qu’elle vit de bouleversement, l’aider à trouver une
contenance, à se pencher elle-même sur le vécu de son enfant/ado et
répondre à ses besoins);
LA DÉMARCHE THÉRAPEUTIQUE AVEC LE PARENT NON IMPLIQUÉ EST À
PRIVILÉGIER.
L’OBJECTIF :RECONSTRUIRE LE LIEN
o L’amener à croire son enfant et l’amener à développer de l’empathie
pour lui/elle. Le parent doit comprendre les raisons qui expliquent sa
difficulté à croire son enfant (reconnecter le parent sur ses souffrances
d’enfant facilite l’empathie : blessures et carences passées, dynamique
familiale et de couple, abus dans l’enfance, etc).
o Restaurer la relation de confiance entre le parent non abuseur et
l’enfant/ado.
o Aider le parent à prendre conscience de l’influence de ses
comportements sur son enfant : voir tableau sur les réactions
adéquates et préjudiciables.
o Comprendre comment un tel drame est survenu dans la famille :
soutenir la mère dans ses tentatives de compréhension de sa propre
histoire afin de mieux comprendre les épreuves de sa trajectoire;
o Ouvrir un dialogue sur la question délicate de la responsabilité;
o L’aider à comprendre l’enfant/ado et à réagir adéquatement : connaître
les conséquences normales de l’abus sur un enfant et des
conséquences spécifiques sur son enfant (quels sont ses symptômes à
lui/elle);
SI LA RECONSTRUCTION DU LIEN EST IMPOSSIBLE
L’objectif est de permettre à l’enfant à grandir, au-delà des abus subis et de
leurs conséquences.

Si la reconstruction du lien est impossible, il faut poser la question du maintien
de cette relation. Est-il préférable de rompre tout contact? D’aider l’enfant à
vivre avec cette réalité?

La protection de l’enfant ne dépend pas que de la mère ni de la famille
immédiate. Continuer une stratégie basée sur la sensibilisation et la
prévention est une piste de solution aussi.

Il y a une nécessaire coopération multilatérale entre les divers pôles
d’intervention : thérapeutique, judiciaire (DPJ notamment) et social;

Il existe des protocoles socio-juridique (entente multisectorielle)

Une solution de rechange valable à l’accusation criminelle est la
reconnaissance de la responsabilité et l’engagement de la mère à prendre des
mesures correctrices convenues avec la DPJ?
(Extrait de la préparation de Carole Tremblay- CALACS la Maison ISA)
Notes CALACS
CETTE DÉMARCHE THÉRAPEUTIQUE AUPRÈS DE LA MÈRE DOIT AVOIR POUR
PREMIER OBJECTIF DE REDONNER UNE MÈRE PROTECTRICE À L’ENFANT, DE
FAIRE OU REFAIRE LES LIENS AVEC L’ENFANT/ADO. COMMENT?
o Accueillir la mère, reconnaître sa souffrance à elle aussi
(victime secondaire). Ne pas la pointer comme responsable du
drame. Avoir une attitude non jugeante et non culpabilisante;
o Entendre la mère dans ses difficultés et ses questions. Lui
permettre d’exprimer et accueillir ces mouvements émotionnels
parfois contradictoires contribue à l’aider à trouver ou à
retrouver une disponibilité pour son enfant (aide la mère à
pouvoir se centrer sur le vécu de son enfant). Voici les
sentiments ambivalents qui habitent souvent la mère :
 Culpabilité (pas avoir su protéger);
 Colère (bouleversement de la vie familiale, conjugale);
 Rage face à l’agresseur et attachement face à lui;
 Insécurité ($);
o Le travail autour de la victimisation est une étape nécessaire et
préalable au travail de responsabilisation. Ne pas reconnaître la
victimisation secondaire de la mère risquerait de nous faire
perdre la clé d’aide à l’enfant/ado qu’elle est;
o Explorer l’aspect de l’attachement actuel de la femme à ce
conjoint abuseur (besoins de toute personne : affection,
attachement, loyauté) et déterminer des attitudes claires à
adopter face à lui maintenant;
o Évaluer sa capacité de parentage comme mère

L’admission claire que l’enfant/ado n’est pas à blâmer pour les
sévices qu’il/elle a subis ni pour les conséquences du
dévoilement;

L’admission claire de sa responsabilité comme parent
insuffisamment protecteur (déficit au niveau de la protection)
ou

l’expression des regrets de ne pas avoir su instaurer une relation
et une communication suffisamment bonne avec lui/elle pour lui
permettre de se confier;
LES MULTIPLES DÉFIS DU PARENT NON ABUSEUR :
o Se retrouve pris, du jour au lendemain, dans un état
émotionnel chaotique (l’image d’un cyclone n’est pas trop
forte ici). Un équilibre établi, même malsain, est rompu.
o Faire face aux réactions de sa propre famille à elle;
o Dépasser la résistance qui l’amène à nier les faits;
o Se préparer à regarder en face la problématique d’inceste :
 Sa propre relation avec son enfant/ado : sa difficulté à
être proche de l’enfant était-elle présente avant l’abus?
Ses préjugés face aux besoins des garçons et des filles
qui grandissent?
 Regarder sa responsabilité dans l’établissement du
phénomène et comme parent insuffisamment
protecteur (le fait qu’elle n’ait pas su le protéger des
agissements de l’abuseur);
 Revisiter son passé
o Reconnaître ses manquements comme mère protectrice et
exprimer des regrets de ne pas l’avoir fait;
o S’habituer à substituer au vocable « victime » celui de
« survivante »