Discours de M. Marc Guillaume - Directeur des affaires civiles

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Discours de M. Marc Guillaume - Directeur des affaires civiles
Assemblée générale statutaire de l’Unca
-----Intervention de Marc GUILLAUME,
Directeur des affaires civiles et du Sceau
Madame le Président,
Mesdames et Messieurs les Bâtonniers,
Mesdames, Messieurs,
C’est avec un vif plaisir que je réponds à l’aimable
invitation de Madame le Président Wienhofer qui me donne
l’occasion d’assister à votre Assemblée Générale et de
participer pour la première fois aux travaux d’un organisme
technique de votre profession.
Je suis d’autant plus heureux que cette journée me permet de saluer la réussite des Carpa dont
chacun a pu mesurer les progrès au cours de ces dernières années et dont il convient de louer
la participation au renforcement du lien de confiance établi entre l’avocat et son client.
Chacun peut s’accorder à observer le chemin parcouru à travers divers indices, comme la
baisse significative du taux de sinistralité depuis une dizaine d’années, et dont la tendance
n’est pas infirmée cette année encore, ou l’exigence de rigueur et de transparence qui guide
votre action tout au long de l’année.
C’est donc sur ces bases, et bien légitimement que, indépendamment du maniement de fonds
détenus pour le compte des avocats, les Carpa se sont vues confiées la charge de la gestion de
l’aide juridictionnelle.
De manière générale, 7 ans après son entrée en vigueur, on peut ensemble se féliciter de la
réussite de la réforme intervenue en 1996, même si certains points peuvent appeler quelques
correctifs.
Ce constat vous conduit naturellement, Madame la Présidente, à souhaiter légitimement
asseoir dans l’esprit de nos concitoyens le concept Carpa par l’adoption d’une démarche
ambitieuse fondée sur une technique généralement peu utilisée dans votre profession, à savoir
la démarche marketing de l’image.
Selon vous, cette image doit faciliter, auprès du grand public, l'identification des Carpa et
conduire à leur reconnaissance.
Je ne citerai pour l'exemple que la création d'un logo unique par les 173 Carpa de France et
l'institution d'un chèque bien identifié, spécifique aux caisses.
Ce constat d’excellence, tous les observateurs le font. Et ce constat, je n'en doute pas, devrait
naturellement être partagé par la Cour des comptes qui conduit actuellement un travail auprès
de la profession d’avocat.
Après avoir procédé à ce légitime rappel, Madame le Président, je souhaiterais maintenant
aborder trois questions qui intéressent votre profession.
En premier lieu, la lutte contre le blanchiment pour lequel chacun ne saurait douter de la
pleine implication des caisses de règlements pécuniaires des avocats.
La lutte contre le blanchiment ne se limite pas à l'action préventive de la réglementation des
maniements de fonds. Les avocats le savent depuis longtemps, plus particulièrement depuis
les lois intervenues en matière immobilière. Et la directive du Parlement européen et du
Conseil du 4 décembre 2001 modifiant la directive relative à la prévention de l'utilisation du
système financier aux fins de blanchiment de capitaux constitue une nouvelle étape pour aller
encore plus loin.
A cet égard, je résumerai tous les travaux qui ont été menés, en totale concertation avec les
représentants de votre profession, pour dire que nous avons utilement progressé sur deux
points essentiels :
En premier lieu : le champ d'application de la déclaration de soupçon. Le premier travail
consiste à préciser les activités qui échappent à la déclaration de soupçon. De ce point de vue,
il convient de rappeler que le champ de la déclaration ne vise restrictivement que 6 secteurs
d’activités, que je peux ici reprendre :
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l’achat et la vente de biens immeubles ou de fonds de commerce ;
la gestion de fonds, titres ou autres actifs appartenant au client ;
l’ouverture de comptes bancaires, d’épargne ou de titres ;
l’organisation des apports nécessaires à la création de sociétés ;
la constitution, la gestion ou la direction des sociétés ;
la constitution, la gestion ou la direction de fiducies de droit étranger ou de tout autre
structure similaire.
Dans ce seul périmètre, la directive permet, en outre, de prévoir un certain nombre
d’exceptions.
Il y a l'exception qui est à la fois évidente, naturelle et indispensable, qui a trait à l’activité
juridictionnelle.
Tous les travaux que nous avons menés ensemble, visaient, en fait, à définir le champ de la
deuxième exception à la déclaration de soupçon. Je veux parler de celle qui concerne
« l’évaluation de la situation juridique du client ».
Tout naturellement, nous avons été conduits à rechercher les moyens de rendre applicable ces
dispositions dans le respect des concepts juridiques inhérents à notre droit interne.
A cet égard, il est résulté des discussions que nous avons pu avoir à la fois avec la profession
et avec les autres départements ministériels concernés, que les termes " évaluation de la
situation juridique du client " trouvent leur correspondance en droit interne dans la notion de
« consultation juridique ».
Cette interprétation procède très directement de la volonté du Garde des Sceaux de concilier
la lutte contre le blanchiment avec le plein respect du secret professionnel.
Sur ces bases, le régime de la déclaration de soupçon ne concerne en définitive que les 6
secteurs d’activité précédemment cités, et encore, pour les activités qui ne relèvent ni du
domaine juridictionnel ni du domaine de la « consultation juridique ».
Ainsi, seule reste visée par la directive la rédaction d’actes, et ce, nonobstant, bien sûr, le sort
qui devrait être réservé à l’acte volontaire de consultation juridique ayant pour objet de
favoriser toute opération de blanchiment des capitaux.
En second lieu, toute notre attention a été portée sur le rôle des instances ordinales. Dans le
cadre de la latitude laissée aux Etats membres pour la rédaction de la directive, il s'agissait de
définir la place et les missions dévolues à ces instances. En la matière, nous avons résolument
écarté le mécanisme applicable au secteur bancaire à savoir la déclaration directe à Tracfin.
Nous avons en effet opté pour la transmission de la déclaration à l'organisme régulateur de la
profession. Pour les avocats, nous avons retenu le mécanisme de transmission au bâtonnier, à
charge pour celui-ci de transmettre le cas échéant à Tracfin. Cette solution nous a semblé
répondre au rôle traditionnel du bâtonnier de pouvoir, auprès de ses confrères, concourir à la
bonne application de la loi.
Ceci conduira le bâtonnier dans certains cas à rendre à son confrère ce que celui-ci avait cru à
tort être une déclaration de soupçon, en lui expliquant pourquoi cette saisine n'est pas fondée.
Compte tenu des responsabilités qui sont les nôtres, il nous appartient de procéder à la
transposition qui implique nécessairement l'intervention du législateur.
A cet égard, une possibilité est de procéder par voie d'amendement dans le cadre de la loi sur
les professions judiciaires et juridiques, qui devrait reprendre avant la fin de l'année devant
l'Assemblée Nationale.
Voilà ce que je voulais dire sur ce premier thème qui est un thème majeur, et pour lequel,
soyez-en convaincus, nous nous sommes tous évertués à trouver les meilleurs équilibres
possibles.
Dans un tout autre domaine, vous avez, Madame le Président, évoqué les actions de
promotion des Carpa au sein de l'Union européenne.
A cet égard, soyez assuré du soutien actif de la Chancellerie et du souhait de vous
accompagner dans toute entreprise ayant vocation à faire connaître le concept Carpa et, plus
largement, étendre le domaine d'influence de notre ordre juridique.
Parallèlement à cette action de promotion externe, vous avez souhaité insuffler une
dynamique nouvelle destinée à conforter le rôle et l'efficacité des Carpa.
Vous avez évoqué plusieurs aspects de votre action en ce sens. Je n'en citerai que quelques
uns.
En premier lieu le colloque organisé par le Conseil National des barreaux et consacré aux
certifications m'a montré combien les efforts conduits en matière de certification Iso par votre
profession étaient soutenus.
A cet égard, l'expérience du barreau de Nantes me paraît riche d'engagement. Vous avez
sûrement de l'avance par rapport aux autres professions, à la fois dans le cadre de l'extrême
précision du règlement intérieur harmonisé qui fixe les règles qui doivent être les vôtres et que
nous soutenons. Cette demande de certification participera encore au renforcement de la
confiance des clients dans les mécanismes Carpa.
En second lieu, je sais pouvoir compter, Madame la Présidente, sur l’Unca qui, depuis trois
ans, a su mettre ses données en matière d’aide juridictionnelle au service de la profession et de
la chancellerie, dans un respect scrupuleux de leur confidentialité.
En offrant votre participation à la constitution, avec les autres organismes techniques, d’une
base de données statistique que vous qualifiez de « Tronc Commun », vous allez permettre à
la profession, sous l'égide du Conseil National des Barreaux, d'accéder à une meilleure
appréhension des contours de sa situation économique.
Je constate à travers ces deux exemples que les Carpa, entraînées par la pleine implication de
l’Unca, atteignent aujourd’hui leur pleine maturité et souhaitent aller au-delà de leur mission
initiale pour participer à la modernisation de la profession.
S'agissant de regroupements des Carpa, je puis à nouveau vous rappeler l'intérêt que la
Chancellerie porte à cette démarche volontaire. La démarche des barreaux bretons atteste en
la matière que toutes les réticences peuvent être levées. Le regroupement des Carpa favorise
l'intérêt bien compris des barreaux qui peuvent compter aussi sur des résultats financiers plus
performants et sur un fonctionnement plus rationalisé.
Parallèlement à ces engagements, il revient à la Chancellerie d’améliorer à son tour ce qui
relève de sa compétence.
A cet égard, vous avez souhaité appeler mon attention sur les conditions de versement des
fonds de l’aide juridictionnelle et d’amélioration des liaisons électroniques entre les Carpa et
les Bureaux d’aide juridictionnelle (BAJ). Soyez assurés que, sur ces deux points, la
Chancellerie n’a qu’un souhait : tendre vers de meilleures pratiques dans l’intérêt bien
compris de votre profession et à travers elle de l’usager du service public de la justice.
En 2003, il a été demandé aux Carpa de revoir la gestion des provisions, avec l’assistance
technique de l’Unca. Je les remercie ainsi que votre union de leur vigilance dans ce domaine.
Quant aux délais de versement de la première dotation d’aide juridictionnelle de l’exercice
2003, ils ont effectivement été longs du fait de circonstances exceptionnelles liées à la mise en
œuvre pour le Ministère de la Justice d’une nouvelle application informatique de comptabilité
publique dénommée ACCORD. En 2004, un envoi rapide, avant le 15 janvier 2004, de
l’ensemble des états de trésorerie au 31 décembre 2003 devrait contribuer à réduire les délais
de versement de la provision initiale.
En ce qui concerne la liaison BAJ - CARPA, une note circulaire aux chefs de juridictions a
été préparée par le Service de l'Accès au droit et à la Justice leur communiquant un projet de
convention, préparé avec votre Union pour la mise en œuvre du logiciel.
Ces engagements ainsi que votre détermination devraient permettre à l’Unca de se présenter
de la manière la plus flatteuse et la plus rigoureuse lors de la célébration du 50ème anniversaire
du décret autorisant les avocats à manier des fonds.
Avant de vous quitter, permettez-moi de vous souhaiter de très fructueux travaux. Je vous
remercie de votre attention.