iufm de bourgogne - www2.dijon.iufm.fr

Transcription

iufm de bourgogne - www2.dijon.iufm.fr
IUFM DE BOURGOGNE
Centre départemental d'Auxerre
Concours de recrutement des professeurs des écoles
UTILISER L’E.P.S.
POUR AIDER LES ÉLÈVES
EN DIFFICULTÉ SCOLAIRE
BARBÉ Pauline
Sous la direction de Didier GAUFILLET
Année 2006
N° de dossier : 05STA00687
Table des matières
INTRODUCTION.......................................................................................................................2
1ÈRE PARTIE : DIFFICULTÉS SCOLAIRES ET REPRÉSENTATIONS................... 4
I – La difficulté, l'échec scolaire, tentative de définition........................................................ 4
1 - Historique....................................................................................................................5
2 - Les mécanismes de l'échec scolaire............................................................................ 6
Quel rapport à l'école ? Quel sens donné au travail ? Quelle motivation ?........... 6
Quel rapport au savoir ?.........................................................................................7
Quelle image de soi ? ............................................................................................8
Et quel rôle de l'école dans l'échec ? .....................................................................9
3 - Comment repérer les difficultés et trouver des solutions didactiques garantissant
l'adaptation des contenus aux capacités de chaque élève. .......................................... 9
II – Le rôle des représentations dans les mécanismes de l’échec scolaire.............................. 13
2ÈME PARTIE : L'E.P.S. A L'ÉCOLE...................................................................................15
I - Histoire de l'E.P.S.............................................................................................................15
II - L’enseignement de l’E.P.S. de nos jours ; les Instructions Officielles de février 2002 :
des compétences spécifiques, transversales et des connaissances interdisciplinaires......17
III - Rôle de l'E.P.S. face à l'échec scolaire...........................................................................19
1 - Pourquoi l'E.P.S. ?.................................................................................................... 19
2 - E.P.S. et interdisciplinarité : les programmes........................................................... 20
3 - Quelles Activités Physiques Sportives et Artistiques choisir ?.................................20
3ÈME PARTIE : DISPOSITIF MIS EN PLACE ET ANALYSE................................. 22
I – Explication globale du projet...........................................................................................22
II – 1ère phase ; le recueil des représentations des élèves de la classe................................. 24
III – Le choix de l'A.P.S.A....................................................................................................32
IV – 2ème phase ; mise en place d'un projet précis : le cahier d'E.P.S.................................34
V – 3ème phase ; recueil des représentations finales et analyse des réponses des élèves.... 40
VI – Quels résultats ?............................................................................................................ 47
CONCLUSION.......................................................................................................................... 51
BIBLIOGRAPHIE....................................................................................................................53
ANNEXE..................................................................................................................................... 54
INTRODUCTION
Les résultats des évaluations de l’entrée en 6ème montrent qu’un nombre croissant d’élèves
en difficulté arrive chaque année dans l'enseignement secondaire. Ces élèves ont souvent des
problèmes dans plusieurs disciplines et il est difficile pour un enseignant de collège ou de lycée
d’avoir une vision d’ensemble des compétences de tous ses élèves dans toutes les matières. Il est
donc compliqué de proposer à ces élèves des aides basées sur l’interdisciplinarité.
A l’opposé des enseignants du secondaire, pour lesquels l’enseignement cloisonné des
matières peut être un handicap, le professeur des écoles bénéficie d’un avantage important : sa
polyvalence.
Le professeur des écoles peut, de ce fait, s’aider des matières qui présentent des entrées
plus motivantes pour les élèves pour enseigner celles qui sont perçues comme plus difficiles
d’accès et ainsi proposer une démarche pédagogique s’appuyant sur l’interdisciplinarité.
L’E.P.S. est une des matières qui peut déclencher un véritable enthousiasme chez
l’ensemble des élèves du primaire, et en particulier chez les élèves en difficulté.
Les élèves en difficulté dans les matières dites "fondamentales"(Projet de socle commun
de connaissances, Loi Fillon, 2005), conservent une véritable chance de réussir en E.P.S. dans la
mesure où l'E.P.S. se différencie des autres matières par les fonctions et les formes qu'elle
propose. En effet, c'est la seule discipline qui aborde les apprentissages moteurs et ce dans un
cadre très différent de celui de la classe.
Mais l’E.P.S. ne permet pas seulement le développement de l'enfant sur le plan moteur.
En effet, tout comme les autres matières de l’école primaire, elle permet un développement de
l’individu sur les plans cognitifs et socio affectifs. Il est ainsi possible de tisser des liens entre
l’E.P.S. et toutes les autres disciplines de l'école primaire.
Quelle définition peut-on donner de la difficulté et de l'échec scolaires ? Quel est le rôle
des représentations dans les mécanismes de cet échec ? Et quelles représentations de l’E.P.S.
chez les élèves en difficulté ? Comment se servir de ces représentations, quand elles sont
positives, pour faire évoluer celles des autres disciplines ? Quelle est la spécificité et le rôle de
l'E.P.S. face à l'échec scolaire ? Comment utiliser la réussite en E.P.S. pour aider les élèves en
difficulté ? Comment tisser des liens entre les disciplines ? A quelles conditions ? Comment
organiser un tel transfert ?
Nous défendrons l’idée selon laquelle une démarche pédagogique s’appuyant sur la
notion d’interdisciplinarité et impliquant l’E.P.S. est un moyen efficace pour permettre aux
élèves en difficulté de se mobiliser pour réussir.
Dans un premier temps, nous réfléchirons à ce que sont les notions de difficulté et
d’échec scolaires. Nous analyserons par ailleurs le lien entre la représentation des disciplines et
la réussite des élèves.
Puis, nous nous intéresserons aux démarches d’enseignement en E.P.S. à l’école et cela
en analysant les orientations données par les Instructions Officielles. Nous étudierons aussi le
rôle de l’E.P.S. face à l’échec scolaire dans l’histoire.
Ma problématique faisant écho à une pratique, nous verrons enfin les dispositifs mis en
place dans une des classes de stage. Ces derniers visent à montrer qu’une interdisciplinarité bien
comprise amène les élèves en difficulté à s’intéresser aux matières où ils sont plus faibles et ce
grâce à leur réussite en E.P.S.. Nous postulerons également que les représentations des élèves
constitueront le support de l’évaluation. En effet, si ces représentations évoluent positivement, on
peut supposer que c’est leur rapport à la matière jugée difficile qui a évolué, précédent en cela
une amélioration des résultats.
1ÈRE PARTIE : DIFFICULTÉS SCOLAIRES ET
REPRÉSENTATIONS
I – La difficulté, l'échec scolaire, tentative de définition
L’entrée à l’école est une situation nouvelle pour chaque enfant. Tous connaissent des
difficultés liées à ce changement. Leurs habitudes, leur quotidien sont bouleversés, leur rythme
de vie change, leurs repères doivent évoluer.
Tous les apprentissages, quels qu’ils soient, remettent en question ce que l’enfant sait au
préalable. En effet, lorsqu'un élève arrive à l'école, il n'est pas vierge de toute connaissance. Il a
déjà vécu une grande variété de situations qui lui ont permis de se forger des repères et des
connaissances pour appréhender le monde qui l'entoure. Tous les élèves se sont "construit" des
savoirs de façon empirique. En rencontrant l’école, ils découvrent de nouvelles choses. Ils
peuvent parfois s’appuyer sur ce qu’ils connaissent mais souvent les savoirs qu’ils possèdent
sont très éloignés de ceux de l’école. Peu importe le milieu d’où viennent les élèves, leurs
connaissances d'eux-mêmes, des autres, du monde seront remises en cause.
Pour qu'il y ait apprentissage, il est nécessaire de confronter l'enfant à une contrainte.
Cette contrainte perturbe le mode de raisonnement habituel de l'enfant, ce qui implique un
déséquilibre chez ce dernier. De ce déséquilibre découle une difficulté, mais celle-ci est
inhérente à l’apprentissage, on peut parler de difficulté ordinaire.
Alors à quel moment la difficulté n’est-elle plus ordinaire ? Quand doit-on s’inquiéter ? A
quel moment les difficultés de l’élève prennent-elles le pas sur le reste ? Quand ne parle-t-on
plus des difficultés de l’élève mais d’élève en difficulté ? Quand parler d’échec scolaire ?
La notion d'échec scolaire est difficile à définir car très complexe. Elle est liée à une
norme, définie et reconnue par la société et évoluant avec le temps et les différents contextes
socio-politiques. Elle correspond en outre à des mécanismes complexes, liés à de multiples
facteurs.
Alors qu'est-ce que la difficulté ? Et l'échec ? Comment ces notions ont-elles évoluées au
cours du temps ? Et aujourd'hui, existe-t-il une définition ?
Quels sont les problèmes liés à la difficulté scolaire ? Comment repérer difficultés et
échec scolaires ?
1 - Historique
La notion d'échec scolaire s'inscrit en effet en référence à une norme évoluant avec les
années, les contextes socio-politiques et les travaux de recherches.
Jusqu'à la seconde guerre mondiale, le bon élève est de la "cire vierge" sur laquelle
maîtres et professeurs impriment leur savoir3. Ainsi, on peut évaluer un bon élève à sa capacité à
s'approprier un mode de pensée qui n'est pas le sien. Ce rapport au savoir va évoluer au cours du
siècle et ainsi modifier les définitions du bon et du mauvais élèves.
Jusqu'à la fin des années 50, l'échec scolaire n'existe pas. Il existe seulement des élèves
inadaptés que l'on exclut plus ou moins de l'école. L'école est censée donner sa chance à chacun
mais en réalité, "les mauvais élèves" sont écartés du système d'après le test de quotient
intellectuel d'Alfred Binet. C'est la théorie du déterminisme génétique. Cependant, il sera
possible pour ces enfants de trouver un travail quel que soit leur parcours scolaire, et ce jusqu'au
début des années soixante-dix et la fin du plein emploi.
Après 1970, le bon élève reste celui qui obtient de bons résultats scolaires, et en
particulier dans les matières dites intellectuelles, mais il doit aussi faire preuve de diverses
qualités répondant aux exigences de la société.
Les enquêtes de l'INSEE, à la fin des années 1970, affirment qu'un enfant sur deux est en
échec scolaire. L'évaluation est basée sur une appréciation de la réussite aux examens et des
retards scolaires. L'échec est ici défini par rapport à un niveau minimum permettant d'obtenir un
diplôme à un âge donné. Tous les autres cas relèvent alors de l'échec.
Cet échec scolaire massif trouve un élément d'explication dans les études sociologiques.
Les sociologues montrent que les élèves en échec sont issus des milieux socioprofessionnels
défavorisés. Cette explication trouve son meilleur écho dans l'ouvrage de Pierre Bourdieu et
Jean-Claude Passeron4 dans lequel les auteurs montrent que "l'école ne fait que reproduire les
inégalités sociales". L'école comme ascenseur social ne serait donc qu'un leurre pour une partie
de la population.
3 Revue Sciences et Vie, "L'échec scolaire à l'école", numéro spécial, 1988
4 BOURDIEU Pierre & PASSERON Jean-Claude. "La Reproduction : éléments d'une théorie du système
d'enseignement". 1970
Les années 1970 marquent un changement dans les enjeux. La crise économique qui
précipite de plus en plus d'hommes et de femmes dans le chômage, la mise en évidence de fortes
corrélations entre le chômage et l'absence de capital scolaire, tout cela conduit à faire de la lutte
contre l'échec scolaire l'enjeu prioritaire des années 80 et 90.
Depuis le loi d'orientation du 10 juillet 1989, après avoir replacé l'élève au coeur du
processus éducatif, est clairement affichée l'intention de faire réussir non plus le plus grand
nombre mais tous les élèves. La finalité essentielle de l'école devient la réussite de tous. Le
budget de l'éducation augmente de manière significative et en 1984, l'objectif annoncé est
d'amener 80 % d'une classe d'âge au baccalauréat. Cependant, aucun changement ne sera mis en
place au sein du système éducatif dans le sens de cet objectif. De plus, le baccalauréat s'adresse
seulement aux élèves ayant réussi à atteindre la dernière année de lycée, la lutte contre l'échec
scolaire n'est donc pas réellement le propos de cette loi.
2 - Les mécanismes de l'échec scolaire
Il convient tout d'abord de différencier l'échec scolaire de l'exclusion. On peut en effet
être en échec scolaire sans être exclu des apprentissages et beaucoup de "mauvais élèves" ne
cessent de progresser, même si leur niveau demeure en deçà de la "norme" moyenne exigée. On
doit donc bien distinguer l’élève en échec scolaire de l’élève en rupture de scolarité.
Les problèmes liés à l'échec scolaire sont bien entendu très nombreux. J'ai choisi de
réfléchir plus particulièrement sur trois d'entre eux qui me semblent les plus significatifs (rapport
à l'école, rapport au savoir et image de soi). J'ai également porté mon attention sur le rôle de
l'école dans ces mécanismes d'échec.
Quel rapport à l'école ? Quel sens donné au travail ? Quelle motivation ?
Ces questions me semblent cruciales puisqu’elles se situent au début de la chaîne. En
effet, si un élève ne travaille pas, il ne peut pas progresser et réussir.
Alors, que signifie travailler à l’école ? Pourquoi un élève ne travaille-t-il pas ? Pourquoi
un enfant investit-il ou non le champ de l’école et plus généralement celui du savoir ? Qu’est-ce
qui le mobilise ?
On constate que le rapport à l’école des élèves en difficulté ou en échec et des "bons
élèves" est sensiblement différent.
Les premiers considèrent l’école comme une course d’obstacles : il faut s’acquitter des
obligations scolaires et aller le plus loin possible pour décrocher un métier - même si la référence
au métier et à l’avenir reste floue. Leur motivation fragile liée à des perspectives d’avenir aux
contours mal définis fait que ces élèves s’épuisent souvent très rapidement dans leur parcours du
combattant.
Les deuxièmes, eux, ont construit des raisons d’être à l’école beaucoup plus solides : ce
qui les intéresse, c’est en fait ce que l’on apprend ici et maintenant. Ils travaillent non seulement
pour leur avenir mais aussi parce que l'école leur procure le goût, le plaisir d’apprendre et les
mobilise entièrement.
Employer le terme de motivation d’un côté et celui de mobilisation de l’autre n’est pas
anodin et il convient de bien distinguer les deux.
La théorie de Deci, en 1975, distingue deux grandes catégories de motivation,
l’extrinsèque et l’intrinsèque. La "motivation extrinsèque" se définit ainsi : le sujet agit dans
l’intention d’obtenir une conséquence qui se trouve en dehors de l’activité même. Recevoir une
récompense, éviter de se sentir coupable, gagner l’approbation par exemple sont des motivations
extrinsèques. Dans le monde scolaire, les exemples de ce type de motivation ne manquent pas :
travailler pour obtenir de bonnes notes, pour éviter les mauvaises ou encore pour faire plaisir à
ses parents, à ses professeurs. Il faudrait donc que les enseignants se méfient des contrôles
excessifs et des contraintes qui tuent l’intérêt. Le but étant de développer une motivation
intrinsèque. Cela peut se faire en suscitant la curiosité, en félicitant et en encourageant.
La mobilisation est au contraire beaucoup plus durable car elle provient de l’intérieur :
seul l’individu lui-même décide de se mobiliser. Deci emploie le terme de "motivation
intrinsèque" pour traduire cette idée. Les comportements sont uniquement motivés par l’intérêt et
le plaisir que le sujet trouve dans la pratique de l’activité sans attendre de récompense extérieure
à l’activité ni chercher à éviter un quelconque sentiment de culpabilité.
Dès lors, comment faire basculer la motivation des élèves en échec scolaire vers la
mobilisation ?
Quel rapport au savoir ?
Un autre point qui différencie "bons élèves" et élèves en échec scolaire est la notion de
rapport au savoir. Mais qu’appelle-t-on "rapport au savoir" ?
Pour répondre à cette question, je m’appuierai sur la définition donnée par Bernard
Charlot en 1992 : "Le rapport au savoir est une relation de sens, et donc de valeur entre un
individu et les processus ou produits du savoir : l’individu valorise ce qui fait sens pour lui, ou
inversement, confère du sens à ce qui pour lui présente une valeur". On constate en effet que tous
les élèves ne s'approprient pas aussi facilement le sens des exercices scolaires. Plus
particulièrement, les élèves en difficulté restent centrés sur les aspects concrets de l'exercice, sur
la réussite de la tâche et non sur ces finalités.
Ainsi, en intégrant les apprentissages dans des projets ayant prises sur la vie des enfants,
en rappelant et en faisant réfléchir les élèves sur les objectifs de leur travail, on donne du sens
aux apprentissages et on donne aux élèves des raisons de se mobiliser, de s'investir et donc de
progresser.
Quelle image de soi ?
Beaucoup d’élèves en difficulté souffrent de solitude, d'isolement. Ils se mettent
volontairement à l’écart par leur comportement ou sont rejetés par leurs camarades. Le problème
est ici un problème d’intégration et d’adaptation par une prise de confiance en soi dans le groupe.
L'enfant souffre de son image de mauvais élève.
La mauvaise estime de soi va influer sur la mobilisation de l'élève ; un élève qui ne se
sent pas capable n'entre pas dans les apprentissages parce qu'il pense échouer. La perception qu'il
a de ses propres capacités est parasitée par le jugement affectif qu'il porte sur lui-même ou que
les autres portent sur lui..
Mais elle influe aussi et surtout sur le bien-être et la stabilité émotionnelle de l'enfant.
C'est en cela qu'elle est la plus grave. La vie de l'enfant est perturbée par sa difficulté à être un
élève.
Cette mauvaise image que ces élèves portent sur eux-mêmes leur est renvoyée par leurs
camarades mais aussi par leurs parents et par leurs enseignants.
Pourtant, pour qu'un enfant prenne confiance en lui, il est important que son
environnement proche soit dans une dynamique positive et bienveillante. Valoriser un élève,
valoriser son travail, l'encourager, mettre en avant ce qu'il sait et ce qu'il sait faire permet à cet
élève peu sûr de lui de se lancer dans les activités.
Ainsi, en restaurant l'image qu'ils ont d'eux, en valorisant les efforts de recherche et en
validant les erreurs comme progrès vers la solution, on peut permettre aux élèves en difficulté de
changer la vision qu'il porte sur eux-mêmes et ainsi de progresser.
Et quel rôle de l'école dans l'échec ?
Pour Philippe Perrenoud5, l'école serait à la base de l'échec scolaire, elle en serait
l'instigatrice. Il parle de "La triple fabrication de l'échec scolaire". Pour lui, l'école ne prend pas
en compte les différences entre les élèves et c'est en cela qu'elle crée de l'échec, selon lui par un
triple processus. Tout d'abord par l'évaluation : "en choisissant ses normes d'excellence et ses
niveaux d'exigence à chaque âge et dans chaque province du curriculum, l'école révèle ou laisse
dans l'ombre certaines inégalités plutôt que d'autres, minimise ou dramatise certaines différences
particulières". Il dénonce aussi les programmes, surchargés, qui en privilégiant certains contenus
et en imposant à tous certains apprentissages à un âge donné, "rendent l'échec probable et
modulent l'inégalité sociale devant l'enseignement". Il dénonce enfin la façon dont le système fait
face aux différences. "La fabrication des inégalités réelles dépend de la qualité de l'enseignement
et de l'organisation de l'école : les élèves vont à l'école de 4 à 16 ans ou davantage ; si, pendant
cette période, l'école est indifférente aux différences personnelles et culturelles entre élèves, elle
ne peut que les transformer en inégalités de développement et de capital culturel.".
Il rejoint dans ces deux derniers points les propos de Guy Vermeil6, chef de service
pédiatrie au Centre hospitalier d'Orsay, qui écrit qu' "il faut prendre conscience que les aptitudes
des enfants se situent dans un éventail de 4 ans, allant de 2 ans avant à 2 ans après les standards
actuellement adoptés". Ainsi, comparer tous les élèves de la même année ne serait qu'un moyen
artificiel de noter les difficultés dans la mesure où chaque enfant n'est pas au même stade de
développement cognitif au même âge. Il propose lui aussi d'adapter le système scolaire au
rythme de chaque élève.
3 - Comment repérer les difficultés et trouver des solutions
didactiques garantissant l'adaptation des contenus aux capacités de
chaque élève.
Il existe des outils pour repérer les difficultés, notamment les évaluations que peut
5 PERRENOUD Philippe. "La triple fabrication de l'échec scolaire". 1989. Revue Psychologie Française n°34-4.
6 VERMEIL Guy. "Deux conditions essentielles pour la réussite de l'école".
réaliser l'enseignant dans sa classe tout au long de l'année. Cependant ces évaluations sont
inhérentes aux apprentissages et aux élèves de la classe et sont en cela relativement subjectives.
Les évaluations nationales sont un autre indicateur. Elles se déroulent à l'entrée du CP, du
CE2 et de la 6ème. Ces évaluations permettent d'analyser les résultats scolaires des élèves de
toute une classe d'âge à l'échelle nationale. Elles permettent de comparer de manière objective et
très cadrée les résultats scolaires et de mettre à jour d'éventuels retards dans les apprentissages.
Ces retards sont le signe d'une difficulté. Cependant, au regard de ce qui a été dit plus haut,
rappelons que la notion de retard reste subjective.
Bien que l'enseignant se serve d’outils tels que les évaluations, qui lui permettront
d’analyser et de comprendre les difficultés de ses élèves, il ne doit pas en rester là pour
considérer qu’un élève a des difficultés.
En effet, un autre indicateur de difficultés est le comportement des élèves en classe.
Ainsi, un enfant turbulent, qui se fait remarquer, qui a des difficultés de concentration, qui a une
motivation non orientée vers la tâche, qui présente un comportement agressif, voire violent
envers ses camarades est souvent un enfant qui ne sait pas pourquoi il travaille, qui a perdu
confiance en lui et en sa capacité d'être un élève. Mais d’autres signes peuvent être révélateurs et
doivent alerter le maître. Les élèves en difficulté d’apprentissage ont souvent des problèmes de
motivation. Leurs difficultés à apprendre, leurs nombreux échecs et l’image qu’ils ont aux yeux
des autres élèves amènent bon nombre d’entre eux à se démotiver et à perdre tout intérêt à
apprendre en contexte scolaire. Un élève en difficulté peut alors se désintéresser de l’école parce
qu’il n’y arrive pas et ainsi manquer de motivation au point de ne plus vouloir venir à l’école. Il
faut faire très attention de ne pas en arriver là car la "phobie scolaire" est un trouble grave pour
un enfant. Le maître doit également être vigilant aux élèves trop silencieux, qui ne se font pas
remarquer, qui ne participent jamais en classe. Un élève en difficulté peut s’isoler du reste de la
classe, ne plus avoir envie de jouer avec ses camarades parce qu’il se sent "nul", différent des
autres.
Mais est -il vraiment possible de dresser un portrait de l'élève en difficulté ?
Le comportement d’un élève, son attitude, sa façon de communiquer, de se comporter
face au travail sont des moyens pour l’enseignant de repérer des difficultés. Cependant, ces
difficultés ne sont pas forcément scolaires. Tous ces indices sont à relever et à analyser pour
pouvoir réagir et mettre en place des situations adaptées pour aider les élèves quellles que soient
leurs difficultés.
Mais quels dispositifs mettre en place dans sa classe pour aider les élèves en difficulté ou
en échec scolaire ?
En premier lieu, c'est à l'enseignant d'agir pour favoriser la "réussite de tous". Dans cette
démarche, nous avons à notre disposition un certains nombres d'outils pédagogiques et
didactiques mais également des partenaires.
Plusieurs solutions peuvent être adoptées.
Une des transformations importantes de ces dernières années réside dans l'adoption du
concept d'évaluation formative. Cette évaluation se déroule au cours d'une période
d'enseignement et est au service des apprentissages. Elle indique à l'enseignant comment se
déroule son programme pédagogique et quels sont les besoins pour chaque élève. Elle permet à
ces derniers de mettre à jour les réussites et les difficultés qu'ils rencontrent afin de mieux
appréhender les étapes qu'il reste à franchir. Ainsi, cette évaluation sert de guide pour pouvoir
réguler, corriger les enseignements. Pour Pierre Therme7, il s'agit "d'une réhabilitation du sujet
dans sa singularité. D'une prise en compte partielle de ses caractéristiques, de ce qu'il est et de ce
qu'il peut". L'enseignant peut alors, à l'intérieur du cycle, mettre en place un programme
personnalisé pour l'élève en difficulté (PPAP) qui pourra entre autre se traduire par un
décloisonnement à l'intérieur de l'école.
En restant à l'intérieur de la classe, il peut mettre en place des enseignements différenciés,
adaptés à chaque élève et à chaque type de difficultés, mettre en place des groupes de besoins,
ponctuels, permettant de répondre à des difficultés liées à une notion ou à une discipline.
Quand les difficultés entraînent une démobilisation de l'élève, il faut trouver de nouveaux
angles pour aborder les apprentissages, insérer ces derniers dans un projet par exemple. Le projet
interdisciplinaire est l'un des projets qui me paraît le plus intéressant. En effet, il permet
d'impliquer des disciplines qui présentent de l'intérêt pour les élèves afin de les amener à
s'intéresser aux disciplines moins motivantes pour eux sous un angle nouveau. Michel Develay8
présente une définition intéressante de l'interdisciplinarité. Pour lui, il s'agit d'une démarche
fondée sur une synergie entre les disciplines. La simple juxtaposition est remplacée par un
échange réciproque tourné vers un objet commun, permettant à chaque discipline de conserver sa
spécificité, tout en bénéficiant d'un enrichissement mutuel. Les disciplines s'alimentent les unes
avec les autres en créant une nouvelle dynamique d'apprentissage. La polyvalence de
7 THERME Pierre. "Exclusion, intégration". "Contributions à une réflexion autour de ce qui s'apprend en E.P.S.".
p. 105
8 DEVELAY Michel. "Savoirs scolaires et didactiques des disciplines".
l'enseignant du primaire est sans nul doute un point d'appui essentiel pour mener ce type de
projet dans sa globalité.
Cependant, si les difficultés sont présentes dans toutes les disciplines ou qu'elles sont
systématiques, il existe d'autres solutions. Notamment l'intervention du R.A.S.E.D. qui pourra
agir sur des problèmes de types différents grâce aux interventions d'enseignants spécialisés. Dans
toutes ces situations, l’enfant n’a pas besoin d’une prise en charge totale mais d’un soutien en
continuité avec le travail effectué en classe. Cela lui permet ainsi d'atténuer, sinon de résoudre
ses difficultés par une recherche collective de moyens pédagogiques et ré-éducatifs, entre
l’enseignant de l’élève, l’enseignant spécialisé, la famille et l’enfant lui-même, dans le but
d’ouvrir une voie de la réussite là où tout a échoué. C’est un véritable partenariat qui se crée à
l’intérieur de l’école et autour de l’enfant dans un objectif commun de réussite et d’adaptation
scolaires.
II – Le rôle des représentations dans les mécanismes de l’échec
scolaire
Dans Le Petit Robert, le terme de "représentation" renvoie au verbe "se représenter" qui
signifie : "Former dans son esprit l’image de, concevoir". Une représentation serait donc une idée
intériorisée, qui serait propre à chaque individu. A partir de cette définition générale, on peut
s’intéresser aux diverses précisions qu’apportent certains auteurs à propos de cette notion.
Pour André Giordan9, "la compréhension d’un savoir nouveau est le résultat d’une
transformation – souvent radicale – de la représentation mentale de l’apprenant".
Marielle Cadopi lie aussi les représentations aux connaissances. Dans l’introduction de
"Des représentations… partout ?", elle affirme : "Toute conduite est un échange avec
l’environnement. Cet échange s’instaure parce que nous disposons de connaissances sur
lesquelles nous pouvons nous appuyer et il nous permettra, dans certains cas, d’en construire de
nouvelles. Ce sont certaines de ces connaissances que l’on appelle généralement des
représentations". Ainsi, les représentations seraient des connaissances qui évoluent : une
nouvelle connaissance vient effacer une représentation pour laisser place à une autre.
Dans une perspective constructiviste, l'apprentissage suppose que le sujet apprenant soit
confronté à une situation complexe. Cette affirmation revient à dire que pour apprendre, le sujet
doit accepter de se confronter à une situation qu'il ne maîtrise pas encore. Il doit oser se lancer
dans l'inconnu. Pour franchir ce pas, il est nécessaire d'avoir le sentiment que l'on est un peu
capable. Pour s'essayer à rédiger un compte-rendu d'expérience par exemple, il est indispensable
de s'en penser capable.
Ainsi, pour apprendre, il faut que l'image qu'on a de soi soit assez bonne pour oser se
confronter aux apprentissages et aux autres. Il faut aussi que la représentation qu'on a de la
discipline soit assez positive pour qu'on ait envie de s'y lancer.
Les représentations qu'on se fait d'une discipline peuvent se scinder en deux parties : les
représentations axées sur le plan cognitif de l'activité et celles plus axées sur l'affectif.
Cependant, ces deux aspects sont intimement liés, voire indissociables. Lequel implique l'autre ?
Y en a t-il un qui précède l'autre ? Par exemple, un enfant peut trouver une discipline ennuyeuse
9 GIORDAN André. "Apprendre". 1998. p. 16.
et pourtant réussir dans cette matière. Inversement, un enfant peut être en difficulté dans une
matière et la trouver intéressante. Peut-on dire que ces enfants vont finir par échouer dans ces
disciplines ou par ne plus les apprécier ? Malgré tout, ce qui se passe le plus souvent, est qu'un
enfant en grande difficulté dans une discipline ne pourra pas l'apprécier. Mais si son jugement
affectif de la discipline évolue, peut-être pouvons nous penser que l'élève entrera plus volontiers
dans l'apprentissage et que cette mobilisation entraînera réussite et progrès.
C'est sur cette idée que je me propose de baser mon expérimentation.
2ÈME PARTIE : L'E.P.S. A L'ÉCOLE
Pourquoi enseigne-t-on l’E.P.S. à l’école ? Quel rôle pour l'E.P.S. à l'école primaire ?
I - Histoire de l'E.P.S.
La réponse se construit peu à peu dans l’histoire de l’E.P.S. à l’école élémentaire au sein
d’un environnement en constante évolution politique, économique et sociale.
L’idée d’une gymnastique scolaire apparaît à la fin du 18ème siècle chez certains
pédagogues et médecins pour développer force et santé afin de former de solides travailleurs.
Cependant, c’est seulement en 1940 que l’éducation physique prend sa place dans
l’éducation générale des enfants des classes élémentaires, et ce par une volonté
gouvernementale. L’Éducation Physique devient Éducation générale et sportive.
Durant la 4ème République (1944-1958), l’éducation physique commence à prendre une
place effective dans les classes élémentaires même si elle reste minoritaire, les enseignants ne se
sentant pas assez formés pour l’enseigner.
C’est vers la fin des années cinquante, c’est à dire au début de la 5ème République,
qu’apparaît une évolution majeure quant aux conceptions des finalités de l’enseignement de
l’éducation physique à l’école élémentaire. L’éducation physique devient éducation physique et
sportive. Dans la préface d’une brochure éditée en 1960 par le Ministère de l’Éducation
Nationale, Monsieur Herzog, Haut commissaire à la Jeunesse et aux Sports précise que "l’E.P.S.
est le complément indispensable de la formation intellectuelle, morale et civique de l’enfant".
La période 1958-1969 va constituer une étape importante dans le développement de
l’E.P.S. et du sport. Le gouvernement promeut le sport sous tous ses aspects (compétition,
loisirs,…) et ceci aura tout naturellement une incidence sur l’E.P.S. à l’école qui prendra une
orientation sportive10.
C’est en 1969 que l’E.P.S. est enfin reconnue comme un élément principal de l’éducation
10 T. TERRET. " Éducation physique et santé". 2002. Revue E.P.S. n°297. p.33
globale de l’enfant puisqu’il est dit dans une circulaire11 que : "les buts de l’enseignement de
l’E.P.S. ne sont pas fondamentalement distincts de ceux des autres disciplines."
Les nouvelles instructions relatives à l’E.P.S. à l’école datées du 22 juillet 1977
confirment que l’E.P.S. est partie intégrante du cadre général de l’éducation.
Les Instructions Officielles sur l’E.P.S. de 1980 correspondent à un nouveau tournant de
l’enseignement de la discipline. Les trois objectifs sont l’amélioration et l’entretien de la santé de
l’enfant, le développement de la disponibilité motrice et la contribution à l’éducation morale et
sociale.
En même temps, les Français, qui s’étaient lancés à corps perdu dans le sport de
compétition, se tournent vers une pratique plus personnelle, recherchant distraction et plaisir. Le
sport-spectacle se développe de plus en plus par le biais des médias. Quel que soit le sport
pratiqué, le plaisir et la santé sont les principales motivations mentionnées par les pratiquants.
En 1981, "l'E.P.S. accède au statut de véritable discipline d'enseignement et intègre le
Ministère de l'Éducation Nationale"12. Les années 1980-1990 correspondent à une époque où
l’ensemble de l’école, E.P.S. comprise, place l’élève au centre de l’apprentissage, et non plus les
savoirs, et où la lutte contre l’échec scolaire est une préoccupation majeure du gouvernement qui
voit alors dans l’E.P.S. un recours possible à cet échec. Ainsi, le 16 juillet 1984, la "loi relative à
l’organisation et à la promotion des activités physiques et sportives" présente l’E.P.S. comme
"contribuant à la rénovation du système éducatif, à la lutte contre l’échec scolaire et à la
réduction des inégalités sociales et culturelles". La loi d’orientation sur l’éducation du 10 juillet
1989 est fondée, d’après l’article 1, sur le principe essentiel selon lequel "le service public de
l’Éducation est conçu et organisé en fonction des élèves et des étudiants et contribue à l’égalité
des chances" et précise d’après le même article que "l’Éducation Physique et Sportive concourt
directement à la formation de tous les élèves."
Ainsi, l’enseignement de l’éducation physique à l’école, dans son contenu et ses objectifs,
évolue en fonction des attentes du système éducatif et donc des attentes politiques et sociales.
L’E.P.S., au fil de ses transformations, s'est intégrée dans les apprentissages considérés comme
fondamentaux13 pour devenir une discipline à part entière exerçant un rôle primordial dans le
développement de l’enfant et dans la lutte contre l’échec scolaire.
11 Ciculaire n° IV 69-371 du 2 septembre 1969
12 Jean FURET. "Un siècle de relations entre E.P.S. et santé", 2003, Revue E.P.S. 1 n°111, p.3
13 Instructions relatives à l'E.P.S. du 22 juillet 1977
II - L’enseignement de l’E.P.S. de nos jours ; les Instructions
Officielles de février 2002 : des compétences spécifiques,
transversales et des connaissances interdisciplinaires.
En même temps que le corps devient un enjeu majeur dans notre civilisation, l’éducation
physique occupe désormais une place reconnue au sein du système éducatif. L. Jospin, en 1989,
affirme que l’E.P.S. concourt à la formation de tous les élèves et qu'elle joue même un rôle
capital à l’école primaire car le développement de l’intelligence sensori-motrice est lié au
développement de l’intelligence formelle.
L’E.P.S. est devenue une discipline à part entière. Elle est donc soucieuse de pédagogie,
d’éducation. Au même titre que les autres disciplines, elle suit les transformations du système
éducatif dont la préoccupation majeure est désormais la lutte contre l’échec scolaire, la réussite
de tous, la place centrale de l'élève au coeur des apprentissages.
Jack Lang, dans la préface des programmes de 2002, réaffirme les objectifs de réussite
pour tous et de lutte contre l’échec scolaire. Il insiste sur le souci de viser l’épanouissement de
l’enfant dans sa globalité et précise à ce propos que " l’épanouissement d’un enfant forme un
tout : l’école a pour objectif de développer les aptitudes et les talents". Un élève qui s’épanouit
dans chacune de ses facultés se sent mieux avec lui-même et avec les autres. "Dans cet esprit,
l’épanouissement du corps est un objectif majeur de l’enseignement primaire. L’éducation
physique trouve dans ces nouveaux programmes la noble place qu’elle aurait dû occuper depuis
toujours."
Gilles de Robien, dans la préface 2005 des programmes, aborde rapidement la question
de l'E.P.S. mais réaffirme toutefois sa place centrale dans les apprentissages : "À côté du
raisonnement et de la réflexion intellectuelle, à côté de l’éducation civique, l’école primaire
développe aussi le sens de l’observation, le goût de l’expérimentation – autre manière de
développer le sens et les attitudes de rigueur [...]. L’éducation physique, l’éducation scientifique
et technique sont ainsi des aspects irremplaçables de la formation scolaire. Les programmes leur
accordent une place significative en leur assignant des contenus précis et des objectifs
évaluables."
L’E.P.S. se conforte donc en tant que discipline d’enseignement majeure d’autant que les
nouveaux programmes font la part belle aux apprentissages transversaux. Ainsi lit-on dans ces
programmes "que l’éducation physique et sportive est une des disciplines les plus favorables à la
construction de ces compétences, qui caractérisent le volet méthodologique des contenus
d’apprentissage et qui peuvent également être acquis au travers d’autres disciplines."
Ces compétences ne sont pas construites pour elles-mêmes. Il s’agit pour l’enseignant
"d’aider l’élève à acquérir des attitudes, des méthodes, des démarches favorables aux
apprentissages, dans la pratique de l’activité mais aussi dans la vie sociale". Ou encore que "De
façon plus spécifique, elle (l’E.P.S.) participe à l’éducation à la santé et à la sécurité. Tout en
répondant au "besoin de bouger" et au "plaisir d’agir", elle donne aux élèves le sens de l’effort et
de la persévérance. Elle est également l’occasion d’acquérir des notions et de construire des
compétences utiles dans la vie de tous les jours".
Les compétences disciplinaires aussi bien que les compétences transversales développées
grâce à l’enseignement de l’E.P.S. à l’école sont donc clairement établies.
Mais la richesse de cette discipline ne s’arrête pas là. Une autre dimension apparaît
lorsqu’il est dit, dans ces mêmes programmes, que "l’éducation physique aide également à
concrétiser certaines connaissances et notions plus abstraites, elle en facilite la compréhension et
l’acquisition, en relation avec les activités scientifiques, les mathématiques, l’histoire et la
géographie…". Ceci rejoint ce qui est dit également dans un autre passage : "Aucun de ces
domaines (les quatre grands domaines des enseignements du cycle 3) n’est fermé sur lui-même.
Il faut constamment apprendre aux élèves à réutiliser les compétences et les connaissances qu’ils
ont acquises hors du champ particulier dans lequel elles ont été construites". Il est aussi dit que
l'enseignant peut profiter de sa polyvalence pour "multiplier les liaisons et les renvois d’un
domaine à l’autre. Il évite ainsi l’empilement désordonné des exercices… C’est à ce prix que
l’école permet à chaque élève d’acquérir ce socle culturel sans lequel les connaissances déjà
rencontrées ou à venir ne seraient que des savoirs éclatés."
Au cycle 2, l’un des objectifs définis est bien d’assurer un lien avec l’apprentissage de la
langue française : "Par les situations riches en sensations et émotions qu’elle fait vivre, l’E.P.S.
est un support privilégié pour permettre aux élèves de parler de leur pratique (nommer, exprimer,
communiquer…). En outre, l’intérêt des enfants de cette tranche d’âge pour l’activité physique
est une source de motivation supplémentaire pour donner envie de lire et d’écrire des textes
divers (fiches, règles de jeu, récit…)".
Il apparaît donc que la richesse de l’E.P.S. va plus loin que l’acquisition de compétences
spécifiques et qu’elle s’étend aux liens qu’elle établit avec les autres disciplines.
III - Rôle de l'E.P.S. face à l'échec scolaire
Comme je l'ai dit précédemment, je suis convaincue qu'un projet interdisciplinaire
impliquant une ou des disciplines qui présentent de l'intérêt pour les élèves permet de faire en
sorte qu'ils s'intéressent aux matières qui sont pour eux les plus difficiles et les moins motivantes.
Mais quelles disciplines choisir ?
1 - Pourquoi l'E.P.S. ?
L'E.P.S., de par ses spécificités, me paraît être une discipline tout à fait appropriée pour
ce genre de projet. En effet, elle est souvent, pour les élèves en grande démobilisation scolaire, la
seule discipline qui présente encore du sens pour eux. Comment l'expliquer ?
L'E.P.S. est la seule discipline qui prend en compte l'élève dans sa globalité. Elle
contribue au développement de l’élève sous tous ses aspects : moteur, cognitif, affectif et
relationnel et est en cela une nouvelle chance pour certains car elle permet de se montrer aux
autres avec une valeur que l'on n’a pas forcément dans les autres domaines.
C'est aussi une discipline où le caractère ludique des apprentissages conduit l'élève à
apprendre avec plaisir.
De plus, les Activités Physiques, Sportives et Artistiques (A.P.S.A.) peuvent permettre de
changer cette logique binaire qu’entretiennent les élèves en difficulté avec le savoir en montrant
par le goût de l’effort, par la maîtrise de ses émotions, par le fait de tout simplement se mettre en
jeu personnellement, qu’entre savoir et ne pas savoir, il y a apprendre.
Discipline axée sur le corps et ses mouvements, l’E.P.S. n’a pas la même connotation
purement scolaire que les autres disciplines. Elle est un écho des pratiques corporelles de loisir
largement prisées à l’extérieur de l’école. Elle est un autre moyen d’expression, de
communication. Elle est une autre reconnaissance de soi. Ce qui va dans le sens de J. Lang 14
lorsqu’il dit que les disciplines sportives "interviennent efficacement dans la lutte contre l’échec
scolaire, peuvent aider à l’insertion sociale et professionnelle des jeunes, contribuent de façon
déterminante à leur épanouissement.".
En guise de conclusion, on peut remarquer que les A.P.S.A. peuvent être une bonne
motivation pour mobiliser (motivation intrinsèque) les élèves dans les autres disciplines. Les
14 Discours de J. LANG, ministre de l'Éducation Nationale. "L'éducation physique et sportive à l'école".7 mai 2001.
élèves aiment l’E.P.S., ils s'y impliquent volontiers : découvrir que je peux être efficace en E.P.S.
voire efficace dans d’autres disciplines à travers l’E.P.S. peut me permettre à moi, élève en
difficulté ou en échec scolaire, de reconsidérer mon projet d’élève.
2 - E.P.S. et interdisciplinarité : les programmes
Deux axes se dessinent à travers la définition de l'interdisciplinarité : la transversalité de
la matière et la notion d'enrichissement mutuel.
Que disent les programmes au sujet de l'E.P.S. et de ces deux notions ?
D’une part, on distingue le développement des domaines et des compétences
transversales. Il en est largement traité dans les programmes de 2002 (un chapitre entier leur est
consacré), et l’E.P.S. y est reconnue comme une discipline majeure participant pleinement à leur
développement puisqu’on peut lire "Comme à l’école maternelle, l’E.P.S. au cycle des
apprentissages fondamentaux se donne pour objectif de permettre à chaque élève de construire
des compétences de deux sortes : spécifiques, mais également transversales ".
D’autre part, apparaît la notion d’enrichissement mutuel des disciplines dans un projet
commun. Sur ce deuxième point, je retiendrai ces quelques lignes qui apparaissent dans les
programmes de 2002 : "L’E.P.S. aide également à concrétiser certaines connaissances et notions
abstraites, elle en facilite la compréhension et l’acquisition, en relation avec les activités
scientifiques, les mathématiques, l’histoire et la géographie…". Peu de documents abordent les
disciplines sous l'angle de l’interdisciplinarité. Mais c’est là que je vois la réponse à mon
questionnement.
3 - Quelles Activités Physiques Sportives et Artistiques choisir ?
Chaque Activité Physique Sportive et Artistique (A.P.S.A.) possède sa spécificité. Ainsi,
le choix de l'A.P.S.A. doit être fait en fonction des caractéristiques des élèves, des ressources
dont ils disposent et des objectifs de l'enseignant.
Ces activités seront utilisées en fonction des objectifs du projet mis en place par
l'enseignant. Prenons l'exemple des jeux collectifs. Un des objectifs développés par ces activités
est l’intégration. En effet, par activités collectives sont sous-entendus le jeu à plusieurs, le
regroupement, à l’opposé des jeux individuels et de l’isolement. L’isolement, c’est pourtant ce
dont souffrent bon nombre d’élèves en difficulté qui de par leur comportement se mettent à
l’écart ou sont rejetés par leurs camarades. Nous mettons ici le doigt sur un problème
d’intégration et d’adaptation par une prise de confiance en soi dans le groupe et l’acceptation des
règles du groupe.
Le choix de l'A.P.S.A. est donc une phase importante de la conception d'un projet
interdisciplinaire, quel qu'il soit.
3ÈME PARTIE : DISPOSITIF MIS EN PLACE ET ANALYSE
I – Explication globale du projet
L'E.P.S. peut, par ses spécificités, être un atout majeur dans la lutte contre l'échec
scolaire. Partant de ce fait, j'ai tenté de mettre en place un projet interdisciplinaire incluant
l'E.P.S. dans l'objectif d'aider les élèves en difficulté à réussir dans les autres matières. J'ai
travaillé sur ce projet avec une classe de CE1 à l'école Rive Droite d'Auxerre. Cette école est
placée en ZEP ; elle se situe au coeur d'un quartier défavorisé tant d'un point de vue socioculturel que d'un point de vue économique.
A partir des différents outils à ma disposition, il s'agissait tout d'abord d'évaluer le niveau
des élèves assez rapidement pour pouvoir leur proposer un projet adapté et applicable sur une
période de trois semaines. Pour cela, j'ai eu accès à leurs résultats scolaires, commentés par
l'enseignante de la classe. Il est alors apparu que le problème qui revenait le plus souvent pour
une majorité des élèves de la classe était la production d'écrits. Elle m'a précisé les problèmes qui
se posaient lors des séances de productions d'écrits. Les élèves ne s'engagent pas dans l'activité,
ils sont pour la plupart peu motivés. Dès la visite en classe, j'ai donc pu réfléchir à un projet
incluant la production d'écrits.
En trois semaines, il est impossible de mesurer une évolution des résultats par rapport aux
notes. J'ai donc mis en place un dispositif permettant de relever les représentations d'élèves sur
les différentes disciplines, en partant du postulat que l'évolution des représentations soit un signe
avant-coureur d'apprentissage et de réussite, comme j'ai tenté de le montrer dans la deuxième
partie de ce mémoire.
Dès les premiers jours du stage, j'ai donc relevé de différentes manières les
représentations des élèves. J'ai ensuite analysé les résultats obtenus. Ces derniers ont confirmé le
fait que les élèves n'aimaient pas "écrire" - dans le sens de s'exprimer à l'écrit. J'ai donc décidé de
travailler dans cette direction en proposant aux élèves de travailler à l'élaboration d'un cahier
d'E.P.S..
Afin d’évaluer les résultats du travail mis en place, j’ai de nouveau, en fin de stage,
proposé aux élèves des questionnaires visant à mesurer l’évolution de leurs représentations dans
la matière travaillée.
Dans la classe, quatre élèves sont en grande difficulté. Je les nommerai par leur prénom
dans la suite : Ouafae, Mélina, Farid et Sulaymän. C'est sur le travail de ces quatre élèves que
j'observerai et analyserai davantage les effets du projet mis en place.
Ouafae est une enfant qui est arrivée en France depuis seulement un an. Elle a de grosses
difficultés en lecture et en écriture, ce qui la pénalise beaucoup dans les autres disciplines. Mais
dès que les consignes écrites sont déchiffrées et comprises, elle n'a pas de difficulté dans les
autres matières.
Mélina manque de confiance en elle, souvent, avant même de commencer l'activité, elle
demande de l'aide, dit qu'elle n'a pas compris. Simplement lui faire reformuler la consigne, faire
les liens avec ce qu'elle sait faire et lui dire qu'elle est capable de réussir lui permet de se lancer
dans l'exercice. Mais du fait de son manque de confiance en elle, elle manque de motivation et
renonce parfois à entrer dans les apprentissages.
Farid et Sulaymän présentent tous les deux de gros troubles de la concentration. Ils ont
parfois un comportement violent. Ils ne semblent pas donner de sens à leur travail autre que celui
des notes. Ainsi, leurs progrès ne leur apparaissent pas et ils sont tous les deux dans une
dynamique d'échec. Redonner du sens à leur travail et leur rendre le goût d'apprendre est un
enjeu primordial pour ces deux élèves.
Ouafae, Mélina et Farid sont suivis par le R.A.S.E.D. depuis le CP. Sulaymän ne
bénéficie d'aucune aide extérieure.
II – 1ère phase ; le recueil des représentations des élèves de la classe
Recueil des représentations
Un dispositif de recueil des représentations des élèves dans les différentes disciplines a dû
être mis en place, et ce avant la mise en route du projet. En effet, de ce dispositif allaient
découler les pistes de travail nécessaire à l'élaboration du projet, il devait donc permettre de
cibler précisément les points qui devaient être étudiés.
J’ai travaillé à l’aide de questionnaires utilisant deux entrées différentes - l’écrit et l’oral et plusieurs modalités : des questionnements ouverts ou plus fermés.
Au tout début des trois semaines de stage, j'ai proposé aux élèves un questionnaire écrit
(Annexe 3) dont l'analyse m'a permis de dresser un premier bilan des besoins des élèves. A l'aide
de cette première analyse, j'ai interrogé oralement chaque élève afin de préciser les points
difficiles.
Analyse du questionnaire écrit relevant les représentations initiales des élèves (Annexe 4)
Question 1
1 - Donne 5 mots qui correspondent pour toi aux matières que je vais te citer.
Matière
Mots qui te font penser à cette matière
Cet exercice s'est avéré beaucoup trop difficile pour les élèves. Ils manquent de lexique
pour exprimer leurs ressentis face à une matière et il est difficile pour eux de trouver plusieurs
mots exprimant des sentiments proches. L'exercice a donc été abandonné.
Question 2
2 - Colorie en vert les matières qui sont pour toi les plus faciles.
Colorie en rouge les matières qui sont pour toi les moins faciles.
► Maths
► Sport (E.P.S.)
► Musique
► Art (dessin, peinture)
► Écriture de texte
► Lecture
► Sciences
► Calcul mental
La consigne a été posée en terme de "facilité" et "difficulté" pour ne pas penser les
activités en terme de jugement de valeur (matière préférée, matière que tu aimes le plus, le
moins...).
Les enfants pouvaient colorier autant de disciplines qu'ils voulaient. Les consignes ont été
posées de manière succincte pour ne pas orienter le jugement des élèves. Un bref rappel de ce
que contient chaque discipline a néanmoins été fait. En effet, en CE1, les enfants ne mettent pas
forcément les bons contenus sous le nom d'une discipline.
A cet exercice, les élèves ont répondu de la manière suivante :
Facile
Difficile
Pas de réponse
► Maths
11
11
3
► Sport (E.P.S.)
17
3
5
► Musique
8
12
5
► Art (dessin, peinture)
11
6
8
► Écriture de texte
9
13
3
► Lecture
10
8
7
► Sciences
9
13
3
► Calcul mental
11
10
4
La musique, la production d'écrits et les sciences paraissent être les difficultés les plus
récurrentes dans la classe. Cependant, au regard des évaluations, aucun élève ne semble en
difficulté en sciences. Les élèves ne font que très peu de musique, on peut donc penser que c'est
par méconnaissance qu'ils trouvent en majorité que c'est une matière difficile.
Concernant l'écriture de textes, les résultats de cet exercice recoupent les propos de
l'enseignante titulaire. La production d'écrits est une difficulté pour bon nombre d'élèves de la
classe au regard des résultats des évaluations de l'enseignante. Presque la moitié d'entre eux
présente la production d'écrits comme une discipline difficile.
Pour les quatre élèves les plus en difficulté, les réponses ont été les suivantes :
Matières faciles
Matières difficiles
Ouafae
E.P.S., art, musique, calcul mental
Lecture, maths, écriture, sciences
Mélina
Lecture, E.P.S., écriture, sciences
Art, maths, musique, calcul mental
Farid
E.P.S., écriture, art, sciences,
Lecture, maths, musique,calcul mental
Sulaymän
Lecture, E.P.S., art, maths, musique,
calcul mental
Ecriture, sciences
Ces résultats correspondent à ceux de la classe. On note néanmoins que pour ces élèves
les mathématiques semblent être une matière qui pose problème. L'E.P.S. est une matière
considérée comme "facile". La production d'écrit est une activité difficile seulement pour deux
de ces quatre élèves. Ces points sont à vérifier à l'aide des questions suivantes.
Question 3
3 - Associe les matières suivantes aux mots qui t'y font penser.
◘ passionnant
Lecture ◘
◘ intéressant
Sport (E.P.S.) ◘
◘ bien
Écriture de texte ◘
◘ facile
Art (dessin, peinture) ◘
◘ moyen
Sciences ◘
◘ fatiguant
Maths ◘
◘ ennuyeux
Musique ◘
◘ inintéressant
Calcul mental ◘
◘ difficile
◘ compliqué
Cet exercice a simplement nécessité une explication du vocabulaire de la colonne de
droite.
L'objectif est de déterminer si les élèves ont une représentation plutôt positive ou plutôt
négative des disciplines de l'école. Ainsi, les termes de vocabulaire sont regroupés selon qu'ils
ont une connotation plutôt positive ou négative. Dans chacune des deux catégories, les adjectifs
visent plutôt l'aspect cognitif (facile, compliqué, difficile) ou affectif (passionnant, bien,
ennuyeux) de la matière.
Le tableau suivant récapitule les réponses des élèves.
Lecture E.P.S. Écriture de texte Art visuel Sciences Maths Musique Calcul mental
passionnant
1
intéressant
5
3
1
3
1
1
1
2
2
bien
10
1
2
2
1
1
2
5
facile
8
10
2
6
6
6
3
4
moyen
2
1
5
4
2
3
2
fatiguant
2
4
3
3
1
1
2
1
ennuyeux
1
3
1
1
3
6
3
inintéressant
1
2
3
2
1
difficile
5
compliqué
2
1
pas de réponse
1
1
5
4
1
3
1
2
5
2
3
2
3
2
4
1
Bilan :
Lecture E.P.S. Écriture de texte Art visuel Sciences Maths Musique Calcul mental

19
19
5
12
8
7
6
13
"Moyen" ou pas
de réponse
3
2
6
6
5
5
6
1
—
3
4
14
7
12
13
13
11
Ainsi, dans la classe, 76% des élèves emploient un vocabulaire à connotation positive
pour parler de l'E.P.S.. En ciblant l'étude sur l'écriture de texte, on s'aperçoit que seulement 20%
des élèves emploient un vocabulaire à connotation positive pour en parler. Plus de la moitié des
élèves associe la production d'écrits aux termes d'ennui et de difficulté. La production d'écrits est
donc perçue négativement par beaucoup d'élèves de la classe.
Les représentations des élèves semblent recouper à la fois les résultats scolaires des
élèves et les résultats de la question 2.
Les disciplines plus scientifiques semblent aussi poser des problèmes aux élèves de la
classe. Ils ont en effet une vision assez négative des sciences et des mathématiques. Cependant,
au regard des résultats des évaluations nationales et des bilans, ces matières ne posent pas de
problèmes à autant d'élèves. Ainsi, il faudrait sans doute penser à modifier les modes d'entrées et
les formes de travail de ces activités pour y impliquer davantage les élèves. J'ai tenté, pendant les
trois semaines de stage, de proposer aux élèves des entrées et des supports différents de ceux
qu'ils utilisaient couramment en insistant sur la manipulation en mathématiques et en sciences.
Concernant la musique, il est très intéressant de voir que treize des élèves de la classe
l'associent à un vocabulaire à connotation négative, alors que cette classe ne fait que très peu de
musique et de chant. Il est donc curieux de voir que des enfants qui ne connaissent que très peu
une discipline peuvent a priori en avoir une vision négative. On peut penser que le fait d'accorder
plus de temps à cette discipline conduirait à modifier cette représentation.
Pour les quatre élèves en difficulté, les réponses ont été les suivantes :
Lecture E.P.S. Écriture de texte Art visuel Sciences Maths
passionnant
Musique Calcul mental
M
intéressant
F
bien
F/O
facile
S
M
moyen
M
S
fatiguant
O
M /O
O
S
M
F
O
ennuyeux
M
F
F
inintéressant
difficile
M
compliqué
F
S
F
M
O/S
F
Ouafae (O), Mélina (M), Sulaymän (S), Farid (F)
Analyse de ce tableau de réponse :
Les réponses de ces quatre élèves sont assez similaires à celles de la classe.
Les mathématiques semblent dépréciées ou difficiles pour ces élèves, comme pour le
reste des élèves de la classe. Par contre, le calcul mental, discipline appréciée par la majorité des
élèves de la classe, est considérée comme "difficile" pour Ouafae et déplaisante par les trois
autres enfants. C'est donc une discipline où il faudra penser à modifier les formes de travail pour
motiver les élèves afin qu'ils modifient leurs représentations et
qu'ils s'impliquent et se
mobilisent davantage.
Concernant la lecture, Sulaymän, qui a de grosses difficultés, l'associe pourtant à
l'adjectif "facile". Cette réponse est intéressante dans la mesure où elle apporte des
renseignements sur la capacité d'auto-évaluation et d'analyse de Sulaymän. Quant à Ouafae et
Farid, qui présentent eux aussi des difficultés de lecture, ils l'associent à l'adjectif "bien", ce qui
est très positif ; malgré leurs difficultés ils gardent une image positive de la discipline.
On note que l'E.P.S. est la seule discipline qui n'ait pas de connotation négative chez
aucun des élèves en difficulté. Concernant la production d'écrits, trois des quatre élèves
présentent une représentation négative de cette activité.
Question 4
4 - Pour toi, qu'est-ce qu'une matière difficile ? __________________________________
Les questions ouvertes posent de réelles difficultés aux élèves dans la mesure où ils
doivent écrire des phrases pour répondre. Ainsi, seuls cinq élèves ont pu répondre à cette
quatrième question, ce qui est en soit une indication des difficultés de la classe. Aucun des quatre
élèves en difficulté n'a proposé de réponses.
Le questionnaire oral
J'ai alors tenté de comprendre ce qui posait plus particulièrement problème dans la
production d'écrits.
J'ai préparé une liste de questions que j'ai posées aux élèves en demi groupe.
Des questions...
1 - Pourquoi trouvez-vous que l'écriture de texte est une activité difficile ?
2 - Quel type de texte connaissez-vous ?
3 - Que préférez-vous écrire comme type de texte ?
4 - Qu'est-ce qui est le plus difficile dans l'écriture ? (même question que la 1, laisser un
temps la question ouverte)
- Trouver les idées ?
- Écrire avec la bonne orthographe ?
- Faire des phrases ?
5 - Qu'est-ce qui pourrait vous aider à écrire ?
Les élèves ont eu une fois encore beaucoup de mal à répondre à la question ouverte du
départ. Mais la question 4 était la même question. Comme la discussion était déjà engagée, les
réponses pour la question 4 sont venues avec moins de difficultés, sans avoir besoin d'amener
des exemples. Trouver les idées d'écriture n'est pas une difficulté. Par contre, le manque de
maîtrise pour la construction de phrases, pour l'orthographe et le vocabulaire fait que l'écriture
devient une tâche trop compliquée.
Les élèves n'avaient jamais travaillé sur les types de texte, les questions 2 et 3 ont donc
nécessité des exemples et un travail sur le tri de textes.
Pour la question 5, les élèves ont proposé d'écrire sans se préoccuper de la grammaire ou
de l'orthographe. D'autres ont proposé d'abandonner complètement la production d'écrits. J'ai
décidé de travailler plutôt d'après la première proposition.
En projet d'écriture, j'ai proposé aux élèves de travailler à l'élaboration d'un recueil
d'acrostiches. Il s'agissait alors de travailler davantage sur la recherche de vocabulaire et sur le
type de texte que sur la grammaire. Les élèves ont du choisir deux thèmes pour leur recueil
d'acrostiches. Les thèmes choisis ont été le sport et les animaux. Cela confirme que le sport est
un sujet que les enfants apprécient même quand il ne s'agit pas de pratiquer.
En conclusion
Les élèves ont de bonnes représentations et de bons résultats en E.P.S.. Ils semblent
réussir dans ce domaine et y prendre plaisir.
En revanche, ils présentent de mauvaises représentations de plusieurs autres matières : la
production d'écrits, les mathématiques, les sciences et la musique.
Les matières scientifiques sont principalement considérées comme "difficiles" et
"compliquées" alors que du point de vue des résultats des bilans que m'a présentés l'enseignante,
ces matières ne semblent pas poser problème. L'éducation musicale semble être une matière qui
ne présente pas d'intérêt pour les enfants. Cependant on peut penser que c'est le manque de
connaissance de ce qu'est vraiment cette activité qui implique cette représentation.
Les représentations négatives de la production d'écrits que présentent les élèves sont
autant d'ordres cognitifs ("compliqué", "difficile") que d'ordres affectifs ("ennuyeux",
"fatiguant", "inintéressant"). Les résultats des bilans confirment que cette discipline est une
difficulté pour beaucoup d'enfants de la classe.
J'ai donc choisi de travailler sur la production d'écrits parce que le lien entre E.P.S. et
écriture me semblait pertinent. De plus, cette discipline semble être la difficulté majeure d'une
grande partie des élèves.
Les limites de la méthode
Ce questionnaire entier est basé sur l'idée que les élèves sont capables d'évaluer ce qu'ils
ressentent face à une discipline scolaire et qu'ils puissent l'exprimer. Cet exercice présente une
double difficulté pour les élèves. L'interprétation de ce questionnaire est donc parasitée par la
forme même du dispositif. Cet exercice est d'autant plus difficile pour un élève en difficulté car
le regard qu'il porte sur les disciplines de l'école et sur son travail est souvent faussé par la
mauvaise image qu'il a de lui-même.
Néanmoins, le portrait global de la classe que l'on dégage à partir de ce relevé de
représentations correspond à celui fait par les évaluations. De plus, même si les représentations
sont basées sur une auto-évaluation qui ne correspond pas à la réalité, elles n'en sont pas moins
intéressantes à étudier car elles sont le reflet de ce que pense l'enfant. On peut donc considérer
que ce dispositif est un point de départ valable pour le projet visé.
III – Le choix de l'A.P.S.A.
Au delà des apprentissages moteurs qu'il implique, le choix de l'A.P.S.A. est essentiel
puisqu'il influera avec force sur les contenus du travail d'écriture.
J'ai choisi de travailler la course de longue durée. En effet, celle-ci permet de faire repérer
et évaluer ses performances, de faire émettre des hypothèses pour être plus efficace tout en
développant une certaine motivation amenant l’élève à réfléchir sur ses résultats, les différents
dispositifs mis en place et les procédures qu’il utilise.
Les travaux d'écriture possibles sont variés. Les élèves pourront non seulement parler de
leur corps, de ce qu'ils ressentent quand ils courent mais aussi des stratégies qu'ils emploient
pour progresser.
L'endurance est une activité sportive qui souffre d'un a priori négatif de la part des élèves.
Cependant, dans cette classe, les élèves ne connaissaient pas cette activité et la perspective de
courir apparaissait plutôt attrayante.
Quelles sont les spécificités de la course de longue durée ? Quel support offre-t-elle pour
construire un environnement propice à l'adaptation scolaire ?
Sur le plan moteur, les activités de type athlétique demandent aux élèves une mobilisation
importante de leurs capacités motrices et cardio-pulmonaires.
Au niveau socio-affectif, plusieurs paramètres entrent en compte dans le développement
de l’enfant tant dans sa relation avec les autres qu’avec lui-même. En effet, une attitude positive
de l’enseignant concernant la notion de performance est une aide pour l’élève ayant peu
confiance en lui. D'un point de vue social, même si l'athlétisme est une activité individuelle, il est
possible, par certaine forme de travail, de jouer sur les relations entre élèves.
Cette activité permet à l’enseignant d’orienter son intervention pour les élèves en
difficulté dans deux directions. Tout d'abord vers la prise de confiance en soi, par la réalisation
de tâches permettant de se surpasser et par la découverte de ses aptitudes. Ensuite vers la prise de
confiance dans l’autre, c’est à dire courir en toute confiance devant ou avec les autres sachant
que nul n’est là pour se moquer mais pour un projet commun de recherche de performances.
Dans le même registre, il s’agira également de faire émerger des rivalités positives, c’est-à-dire
se mesurer aux autres par une recherche d’optimisation de ses capacités afin augmenter ses
performances pour se dépasser (émulation) et dépasser les autres tout en acceptant de ne pas être
forcément le premier. Ceci est très important pour les élèves en difficulté à propos desquels j’ai
souvent remarqué une tendance à l’abandon ou à réagir par l’agressivité dans les situations de
concurrence.
Pour pallier le fait que la course de longue durée est une activité individuelle, j'ai proposé
aux élèves des activités de course en équipe. Un des objectifs essentiels développé par cette
activité devient l’intégration. En effet, par l'activité collective, le regroupement, les élèves
apprennent à s'écouter mutuellement, à se respecter et à respecter le rythme des autres. C'est
aussi un moyen de remédier à l'isolement que l'on peut observer dans les jeux ou les sports
individuels. Le point abordé ici est celui de l’intégration et de l’adaptation par une prise de
confiance en soi dans le groupe.
IV – 2ème phase ; mise en place d'un projet précis : le cahier d'E.P.S.
Le projet interdisciplinaire mis en place consiste à élaborer à partir des séances d'E.P.S.
une série d'écrits où chacun pourra s'exprimer sur ce qu'il a fait et ressenti, et ce dans le but de
progresser dans l'expression écrite.
Ce travail a pris forme dans un cahier d'E.P.S..
Dans un premier temps, j'ai proposé aux élèves le cahier d'E.P.S. et leur ai demandé ce
qu'ils pensaient en faire. Ils ont alors proposé l'écriture - à cause du support - mais sans avoir
d'idée quant aux contenus du travail d'écriture. Puis nous avons réfléchi au lien qu'on pouvait
faire entre sport et écriture ; les élèves ont dégagé les types d'écrits suivants : la règle du jeu,
l'explication de ce qu'on fait et de ce qu'on pense.
Je leur ai alors exposé les objectifs de ce projet d'écriture et j'ai fait le lien avec les
questionnaires qu'ils avaient remplis plus tôt : l'objet de leur travail allait être de poursuivre en
production d'écrits les activités physiques qu'ils allaient faire et ce dans le but de pallier leurs
difficultés en écriture.
Cahier d'E.P.S
Chaque enfant dispose d'un cahier.
A chaque séance d'athlétisme, trois écrits différents sont notés dans le cahier (Annexe 1) :
•
un schéma du dispositif de jeu
•
la règle du jeu qui est construite collectivement
•
un écrit plus libre sur ce qu'on a ressenti, ce qu'on a fait, ce qu'on a pensé
Il s'agit donc de travailler la représentation spatiale par le schéma, le travail sur un type de
texte (la règle du jeu), et l'écrit libre sur ce qu'on ressent, sur son corps. Par ailleurs, j'ai proposé
aux élèves d'écrire leur stratégies : comment avaient-ils fait pour progresser, pour être moins
fatigués ?
Séance 1 : course de 7 minutes (Annexe 2)
Les élèves courent, individuellement, pendant 7 minutes sur une piste en boucle avec
départ et arrivée confondus. A chaque tour, les élèves prennent un élastique. A la fin des 7
minutes de course, on compte le nombre de bracelets.
Le schéma de la piste et la règle du jeu ont été expliqués et notés au tableau avant la
séance. Les élèves n'ont rien écrit à ce moment mais ce sont eux qui ont construit les règles du
jeu.
A partir de cette première séance, les élèves connaissent la distance qu'ils peuvent
parcourir sur 7 minutes de course et ont une première approche de l'endurance.
Au retour en classe, une discussion a eu lieu, chacun a pu expliquer ses sensations après
la course. Dans un deuxième temps, le schéma et la règle du jeu ont été recopiés dans le cahier.
L'après-midi, s'en est suivi le travail d'écriture sur les sensations des élèves, le titre du
travail était : " Ce que j'ai ressenti ". Les élèves ont noté ce qu'il avait ressenti personnellement
mais ils ont aussi pu utiliser ce qui avait été dit lors de la discussion du matin.
Cette exercice a été très difficile pour la plupart des élèves puisque la question était très
large et que c'était la première fois qu'on leur demandait d'écrire à partir de ce qu'ils venaient de
faire en E.P.S.. Il a donc été nécessaire que je précise la question. Je l'ai donc détaillé en quatre
parties : " comment je me sentais au début ", "comment je me sentais pendant l'activité", "
comment je me sentais à la fin ", " ce que j'ai pensé de l'activité ". Les élèves ont réfléchi
collectivement à des exemples de réponses, ce qui a permis de débloquer l'activité.
Certains élèves ne se lançaient pas dans l'écriture par peur de faire des "fautes". J'ai donc
interrompu l'activité pour préciser à tous que l'orthographe n'était pas importante et que
l'essentiel était de s'exprimer, d'écrire ce qu'on avait ressenti. Chacun pouvait se faire aider par
un camarade s'il en avait besoin. Ce travail sur l'aide et le tutorat permet de mettre en place des
échanges verbaux entre les élèves et permet aussi aux élèves les plus en difficulté, qui n'osent pas
se lancer dans les activités, de s'investir parce qu'ils se sentent soutenus par leurs camarades.
Savoir qu'on pouvait écrire les phrases comme on les pensait a permis à chacun d'écrire
au moins une phrase. Ainsi de simples régulations du dispositif en cours d'activité ont permis à
chacun de s'exprimer dès la première séance. Un travail rapide de correction a eu lieu le
lendemain, chacun a pu relire son texte et poser des questions sur les corrections qu'il ne
comprenait pas.
Séances 2 et 3 : course aux 3 vitesses (Annexe 2)
Dans cette séance, l'objectif est de courir à trois allures différentes sur trois portions de
piste pendant 7 minutes. Le but est de déterminer l'allure à laquelle il faut courir pour pouvoir
courir longtemps.
Pendant l'activité, peu d'élèves ont réussi à courir de façon à ce qu'on puisse voir
vraiment la différence entre leurs allures sur les trois portions de terrain, ce qui était pourtant le
critère de réussite de l'exercice. En effet, les élèves ont eu tendance à courir très vite sur toutes
les portions de piste pendant les trois premières minutes. Un rappel de la consigne après la
première course et l'essoufflement provoqué par l'effort ont permis à plus d'élèves de réaliser
l'exercice avec succès.
Cette fois, la consigne a été passée au pied de la piste, il n'y a pas eu d'explication
préalable en classe. L'objectif était que les élèves réussissent à schématiser la piste et à
réexpliquer la règle après l'activité.
Ainsi, les élèves ont eu à faire la différence entre consigne, règle du jeu et sensations.
Cet exercice a été difficile pour quelques élèves et a été la situation déclenchante d'un
travail de tri de textes (entre règles du jeu et autres documents).
Le second travail d'écriture consistait à répondre individuellement à la question : " Quelle
vitesse choisir pour pouvoir courir longtemps ? ". Il s'agissait donc ici de verbaliser sa stratégie
pour pouvoir progresser en endurance. Ensuite, quatre élèves ayant des théories différentes sont
venus lire et argumenter leurs réponses au tableau. J'ai choisi de faire venir prioritairement les
quatre élèves les plus en difficulté dans la mesure où ils avaient tous écrit une réponse ; ils
avaient donc d'ores et déjà atteint l'objectif de départ : se mobiliser et s'investir dans l'activité
d'écriture.
Le fait de venir au tableau pour présenter son travail est très valorisant. A part pour
Sulaymän qui a de grosses difficultés d'expression et qui n'a pas osé venir au tableau, Mélina,
Ouafae et Farid sont venus avec fierté faire leur exposé. Cette prise de confiance en eux a
déclenché une vraie mobilisation pour ces trois enfants. Pour Sulaymän, cet exposé s'est fait
individuellement.
Puis nous avons réfléchi collectivement aux arguments de chacun, pour enfin conclure
que pour courir longtemps, il faut courir à une vitesse moyenne ou lentement, mais surtout ne
pas courir vite dès le départ. Durant les dernières secondes d'une course d'endurance, on peut
courir très vite pour pouvoir faire le meilleur temps possible. Les enfants ont pu corriger ou
compléter ce qu'ils avaient noté dans leurs cahiers.
Cette même séance a été réalisée une seconde fois au début de la deuxième semaine. S'en
est suivi un temps libre où chacun a pu compléter ses réponses ou écrire ce qu'il pensait de
l'activité. Certains n'ont pas voulu écrire parce qu'ils pensaient avoir tout dit lors de la première
séance. Cet argument était pour moi valable. Ils ont donc simplement eu à vérifier l'orthographe
de ce qu'ils avaient écrit, par groupe de deux, en s'aidant mutuellement.
Cette situation de différenciation a été difficile à gérer parce que chacun avait une activité
différente et sollicitait mon aide. Le travail de tutorat entre élèves mis en place dès le début des
trois semaines a donc été utile pour cette activité.
Séances 4 et 5 : la maison-relais (Annexe 2)
Cette séance consiste en un travail de groupe. La classe est divisée en 5 groupes de 5
élèves, chaque groupe étant associé à une couleur par un dossard. Chaque groupe doit courir
pendant 15 minutes. Tous les membres d'un même groupe doivent courir ensemble, en paquet. A
chaque tour, un seul membre de chaque équipe peut s'arrêter dans la maison-relais. Il peut s'y
arrêter le temps qu'il veut mais doit partir si un des membres de son groupe veut se reposer à son
tour.
Les groupes ont été fabriqués de manière à ce qu'ils soient hétérogènes au niveau des
résultats en E.P.S., pour cela, j'ai utilisé les résultats de la séance 1. Chacun des quatre élèves en
difficulté a ensuite été placé dans une équipe différente pour anticiper le travail de production
d'écrits.
D’un point de vue moteur, cognitif et social, cette activité de coopération permet de
mettre en place un dispositif qui amène l’élève à courir dans un espace limité en tenant compte
de la position des autres. Il s’agit pour lui de choisir ses actions en fonction des informations
qu'il prend dans son environnement, c’est à dire régler ses propres actions en fonction de celle
des autres. Ce choix d'action est pris en fonction des connaissances et des compétences qu'il
maîtrise.
La consigne étant relativement complexe, elle a été préalablement donnée en classe en
s'appuyant sur le schéma du dispositif. Comme pour la première séance, les élèves n'ont rien noté
avant l'activité. Nous avons aussi relu ce qui avait été écrit après la deuxième séance pour
rappeler à chacun que pour courir longtemps, il ne faut pas partir trop vite.
Au départ de la course, la consigne stipulant que tous les élèves du même groupe
devaient courir ensemble n'a pas du tout été respectée. Mais au bout de 8 minutes de course, la
fatigue de chacun a permis aux élèves qui couraient trop vite, sans attendre leurs camarades, de
réguler leur allure et ainsi de répondre à la consigne.
Deux mêmes membres de la même équipe ne peuvent pas se reposer ensemble dans la
maison relais. La réalisation de cette consigne est facile à vérifier puisque les élèves portent des
dossards de couleur. Un simple rappel de la consigne et une argumentation entre élèves leur a
permis de réguler eux-mêmes l'activité.
De retour en classe, les élèves ont simplement recopié le schéma et la règle du jeu que
nous avions déterminés avant la course.
Cette séance a elle aussi été réalisée deux fois. La deuxième fois, les problèmes ont été
les mêmes et se sont réglés de la même façon.
Après la seconde séance sur cette activité, les élèves ont réalisé une affiche par équipe
présentant le schéma du dispositif, la règle du jeu et les sensations de l'équipe.
Ce travail a été effectué en début de troisième semaine, les élèves avaient donc une plus
grande habitude du travail de groupe et des modalités de ce travail. Ainsi les règles du travail en
groupe ont été respectées. Ce sont les quatre élèves les plus en difficulté qui devaient écrire et
présenter l'affiche, ils ont été beaucoup aidés par leurs camarades pour l'orthographe et la mise
en page. Le travail d'écriture a été facilité par le fait que le début de l'affiche (schéma et règles)
avait été établi collectivement avant la séance. La réflexion sur les démarches et les techniques
utilisées pour courir longtemps et répondre à la consigne a été facilitée par le travail en groupe.
Les affiches ont ensuite été décorées et affichées.
Séance 6 : course de 7 minutes (Annexe 2)
Cette séance, sur la forme, est exactement la même que la séance 1. Il s'agissait de mettre
en avant la progression des élèves en endurance, c'est donc d'une séance d'évaluation.
Sur 22 élèves (trois élèves de la classe ayant été absents à l'une des deux courses), 11 ont
progressé et 8 ont réalisé la même performance. Seulement 4 élèves ont fait une performance
inférieure à celle de départ.
En seulement six séances, la moitié des élèves ont progressé de manière significative.
C'est donc un bilan positif ( voir tableau récapitulatif des résultats, annexe 5).
De retour en classe, les élèves ont comparé le nombre de tours qu'ils avaient fait lors de la
première séance à celui qu'ils venaient de faire. Chacun a alors noté dans son cahier s'il avait
progressé ou non. S'en est suivi une discussion en classe sur les raisons qui pourraient expliquer
les résultats obtenus. Chacun a alors noté dans son cahier l'explication qu'il donnait à ses
résultats. Comme cet écrit faisait suite à une discussion collective, les explications des élèves se
ressemblent. Pour la plupart des élèves, ils ont noté qu'ils avaient progressé parce qu'ils avaient
appris que pour pouvoir courir longtemps, il ne faut pas partir trop vite pour ne pas être
essoufflé. Les élèves ayant réalisé autant ou moins de tours que durant la première séance ont
donné des explications plus diverses : "mal à la gorge", "couru trop vite", "mal à la nuque",
"respiration coupée". Chaque enfant a écrit quelque chose sur ce qu'il avait ressenti, sur sa
progression et sa démarche.
V – 3ème phase ; recueil des représentations finales et analyse des
réponses des élèves
Afin de pouvoir apprécier les effets du travail effectué par les enfants, je leur ai proposé
un questionnaire afin de relever, de nouveau, leurs représentations des disciplines scolaires. Ce
questionnaire est composé de deux parties : une partie écrite et une partie orale. Les questions
sont pour certaines quasiment identiques à celles posées en début de stage afin de pouvoir
comparer les réponses et mettre à jour les évolutions des représentations. Cependant, ce
questionnement de fin de stage est essentiellement ciblé sur l'E.P.S. et la production d'écrits.
Questionnaire écrit (annexes 6 et 7)
Question 1
➔ Qu'est-ce qui était le plus difficile à écrire dans le cahier d'E.P.S. ?
O

le schéma

la règle du jeu

O
ce qu'on ressent O
Pourquoi ? __________________________________________________
Trois élèves ont répondu "le schéma", huit ont répondu "la règle du jeu". Les quatorze
autres élèves ont répondu : "ce qu'on ressent".
Par cette question, je voulais vérifier si les élèves avaient conscience de leurs difficultés.
Ce sont bien les sensations qui étaient les plus difficiles à écrire puisque le reste était
établi collectivement.
A la question pourquoi, de nombreux élèves n'ont pas su répondre. Ceux qui ont écrit
quelque chose ont pour la plupart noté que c'était "long" et "dur" à écrire.
Les élèves sont donc conscients, pour la plupart, des difficultés qu'ils rencontrent mais ne
peuvent pas encore leur donner d'explication.
Concernant les quatre élèves en grandes difficultés, trois d'entre eux ont noté que c'est ce
qu'on ressent qui est le plus difficile à écrire. Je les ai interrogés oralement pour qu'ils me
donnent leurs arguments. Seule Ouafae a pu me dire que c'était difficile d'écrire ce qu'on ressent
parce qu'il faut trouver des mots pour dire ce qu'on pense.
Question 2
➔
As-tu remarqué une différence de difficultés entre le début et la fin ?
Cette question s'est avérée beaucoup trop difficile. J'attendais que les enfants répondent
que l'utilisation du cahier d'E.P.S. était plus facile à la fin parce qu'on avait appris ce qu'il fallait
écrire. En effet, pour tous les élèves, sans exception, l'utilisation du cahier d'E.P.S. est devenue
plus aisée au fur et à mesure de ses utilisations.
Cependant, ma question était très mal posée et même une explication orale n'a pas permis
aux élèves de mieux comprendre.
Cette question n'était pas adaptée à des élèves de CE1 qui ont bien-sûr du mal à autoévaluer leur progrès. C'est d'ailleurs un exercice encore difficile à l'âge adulte.
Question 3
Pour toi, à quoi sert un cahier d'E.P.S. ? _________________________________
19 des 25 élèves ont répondu que leur cahier d'E.P.S. servait à écrire. Quatre ont précisé
que ce cahier servait à écrire des textes, "à écrire ce qu'on fait en sport" et même à "progresser en
écriture de textes".
Ces réponses ont été très surprenantes. Presque tous les élèves ont donc compris l'objectif
de ce cahier.
J'avais présenté le projet incluant E.P.S. et écriture en début de stage en donnant aux
élèves les raisons et les objectifs. En effet, il était important pour moi que les élèves
s'investissent dans ce projet en ayant à l'esprit les enjeux de celui-ci. Je me suis rendue compte
que les objectifs étaient finalement clairs pour eux.
Mélina, Ouafae, Farid et Sulaymän ont tous les quatre répondu que leur cahier d'E.P.S.
leur sert à apprendre à écrire, à apprendre des mots. Sulaymän a même précisé qu'il apprenait à
lire avec son cahier. Pour deux de ces élèves, les réponses ont été notées en dictée à l'adulte
parce que la question étant ouverte, il fallait faire une phrase de réponse, ce qui est très difficile.
Question 4
➔
Pour toi, écrire dans le cahier d'E.P.S. te permet de progresser dans quelles matières ?
Cette question est assez similaire à la question précédente à la différence que la réponse
attendue n'est pas une phrase. Les réponses ont néanmoins été identiques à celle de la question 3.
Une réponse très intéressante a néanmoins été ajoutée, 14 élèves, dont Ouafae et Sulaymän, ont
noté que ce cahier leur permettait aussi de progresser en E.P.S..
Ce questionnaire écrit m'a permis de me rendre compte que les élèves avaient compris le
sens de l'activité que je leur ai proposé. C'est sans doute une des raisons pour lesquelles ils se
sont investis avec engouement dans la réalisation de ce projet.
Questionnement oral
1 - Notez sur votre papier les deux matières que vous avez préféré travailler pendant ces
trois semaines ?
Cette question est axée principalement sur un plan affectif et elle est volontairement très
large.
Disciplines
(noms donnés par les élèves)
Nombres d'élèves ayant nommés cette
discipline parmi leurs 2 favories
E.P.S., sport
19
Écriture de l'E.P.S., cahier d'E.P.S.
9
Musique
6
Peinture, pâte à sel, coloriage
4
Sciences, expériences, air
4
Calcul mental
3
Écriture cahier du jour
1
23 élèves étaient présents le jour du questionnaire
Dans la mesure où la liste des disciplines n'était pas à disposition des élèves, ils ont noté
les deux activités auxquelles ils pensaient en premier lieu.
Les activités autour de l'E.P.S. semblent donc porteuses de motivation. Les trois activités
préférées par les enfants sont celles qu'ils n'ont pas l'habitude de pratiquer. Peut être est-ce donc
l'effet de nouveauté qui motive les enfants.
2 - Notez deux disciplines que vous avez trouvé difficiles ?
La liste des disciplines a alors été notée au tableau. Les élèves ont répondu de la manière
suivantes :
Disciplines
Nombres d'élèves ayant trouvé ces matières difficiles
Lecture
5
Sport (E.P.S.)
2
Écriture de texte (cahier
8
d'E.P.S., acrostiches)
Art (dessin, peinture)
5
Sciences
7
Maths
10
Musique
3
Calcul mental
6
Cette question est la même que celle que j'ai posée dans le questionnaire écrit donné en
début de stage (question2). Ainsi, on peut comparer les réponses pour essayer de dégager une
progression dans les représentations.
La différence dans les deux questions est que dans la question écrite, les élèves pouvaient
donner le nombre de disciplines qu'ils voulaient. J'ai limité ces réponses à deux disciplines pour
la question orale.
Le tableau suivant récapitule les réponses des quatre élèves les plus en difficulté :
Élèves qui trouvent les disciplines suivantes difficiles :
En début de stage
En fin de stage
Farid, Ouafae
Ouafae
Écriture de texte
Sulaymän, Ouafae
Sulaymän
Art (dessin, peinture)
Mélina
Mélina
Sciences
Sulaymän
Sulaymän
Maths
Farid, Ouafae, Mélina
Farid, Ouafae, Mélina
Musique
Farid, Mélina
Calcul mental
Farid, Mélina
Lecture
Sport (E.P.S.)
Farid
Il est difficile de trouver une interprétation à ce tableau du fait que les consignes des deux
exercices soient sensiblement différentes. C'est une erreur de réflexion et de conception de ma
part. J'aurais dû présenter les mêmes consignes (même si j'utilisais l'entrée de l'oral pour le
second questionnaire).
On peut simplement dire que concernant les mathématiques et l'E.P.S., les élèves ne
semblent pas avoir changé leurs représentations. Les représentations négatives de la musique que
présentaient ces quatre élèves ont vraisemblablement disparues. Les élèves de la classe, qui ne
faisaient d'ordinaire que très peu de musique ont peut-être changer leurs représentations
simplement par le fait de découvrir l'éducation musicale sous un autre angle.
3 - Avec le tableau suivant, choisir des mots parmi la liste suivante pour exprimer ce que
vous pensez des disciplines de l'école.
Les élèves disposaient chacun d'un tableau A4 vide et d'une feuille A5 avec une liste
d'adjectifs. Cette liste était la même que celle de l'exercice 3 du questionnaire de début de stage.
Nous avons ensemble rempli la colonne de gauche avec le nom des disciplines que nous avions
déjà vu. Puis chaque élève a pu choisir des adjectifs de la liste à noter en face des disciplines.
Cette exercice est donc en tout point le même que celui du questionnaire écrit sur le fond,
seule la forme change.
Matières
◘ passionnant
Lecture
◘ intéressant
E.P.S. (sport)
◘ bien
Écriture de texte
◘ facile
Art
◘ moyen
Sciences
◘ fatiguant
Maths
◘ ennuyeux
Musique
◘ inintéressant
Calcul mental
◘ difficile
◘ compliqué
L'exercice est présenté sous une autre forme que celle de départ pour éviter que les élèves
ne se rappellent de leurs réponses. Ainsi, ils ont pu réfléchir de manière plus objective.
Le bilan des réponses pour la classe est le suivant :
Lecture
E.P.S.
Écriture
de Art visuel Sciences Maths Musique Calcul mental
texte

17
22
9
15
10
10
14
15
"Moyen" ou pas
de réponse
4
1
7
8
5
6
3
5
—
4
2
9
2
10
9
8
5
Si on fixe notre attention simplement sur L'E.P.S. et la production d'écrits et qu'on
compare avec le tableau obtenu en début de projet, on obtient les résultats suivants :
Sport (E.P.S.)
Écriture de texte
Au début du stage
En fin de stage
Au début du stage En fin de stage

19
22
5
9
"Moyen" ou pas de réponse
2
1
6
7
—
4
2
14
9
Les résultats pour la classe entière sont donc positifs puisque tant en E.P.S. qu'en
production d'écrits, les représentations des élèves semblent avoir évoluées dans le sens positif.
Malgré tout, la production d'écrits reste une des disciplines les moins appréciées et les
plus difficiles pour une grande partie de la classe.
Pour les 4 élèves en difficulté, les réponses ont été les suivantes :
Lecture
E.P.S. Écriture de texte Art visuel
Sciences
Maths
Musique Calcul
mental
passionnant
S
intéressant
O/F
bien
facile
moyen
M
O/F
O
M/S
M
O
F
M
S
O
M/O
S
O
S
M
O
M/S
fatiguant
ennuyeux
F
inintéressant
S
difficile
compliqué
F
F
M
S
F
F
En comparant les questionnaires de début et de fin de stage de ces quatre élèves, on note
les résultats suivants concernant l'E.P.S. et la production d'écrits :
Sport (E.P.S.)
Au début du stage
passionnant
O
intéressant
F
bien
O/F
Au début du stage
O
M/S
facile
M
moyen
S
fatiguant
En fin de stage
Écriture de texte
En fin de stage
O
M
S
S
ennuyeux
inintéressant
difficile
M
compliqué
F
F
VI – Quels résultats ?
D'après l'analyse des travaux des élèves de la classe et en particulier de ceux des quatre
élèves en difficulté, je peux dégager un bilan de ce travail sur trois semaines et des pistes de
recherche pour l'avenir.
Dans la classe
La classe dans laquelle j'ai travaillé est une classe remuante, avec un effectif important et
située au coeur d'un quartier défavorisé. Cependant, malgré les difficultés que ces enfants
rencontrent, ils restent des enfants actifs, participant avec plaisir aux activités scolaires dès lors
qu'ils en comprennent les objectifs et qu'ils y trouvent du sens.
Ils ont participé avec engouement à ce projet, se sont investis avec plaisir non seulement
pendant les séances d'E.P.S. mais aussi pendant les activités d'écriture.
Je peux expliquer en partie cet enthousiasme par la forme du dispositif. En effet le fait
que les élèves sachent que le projet que je leur proposais était issu de leurs représentations, et
qu'ils aient conscience de l'objectif a sans doute influé sur leur travail ; les enfants savaient
pourquoi ils travaillaient et sans doute est-ce cela qui a permis cet investissement.
Le fait que le projet s'appuie sur l'E.P.S. a contribué à la mobilisation des élèves. En effet,
cette discipline est appréciée par quasiment tous les élèves et aucun n'a présenté de difficulté
durant la séquence de course longue. Ainsi, les activités d'écriture ont pu s'appuyer sur les
réussites de chacun et encourager les élèves à prendre confiance en eux.
Du point de vue de la production d'écrits, le résultat est positif pour plusieurs raisons. Les
représentations des élèves ont changé pour cinq des élèves de la classe. C'est un point positif
même s'il faut garder à l'esprit que le dispositif de relevé des représentations n'a mis en lumière
qu'une des facettes des représentations des enfants.
Au fur et à mesure des séances d'écriture, j'ai pu observer pour la majorité des élèves un
progrès tant sur le fond que sur la forme des écrits. Les enfants ont pour la plupart osé écrire de
plus en plus malgré des consignes d'écriture de plus en plus larges. Le fait de devoir écrire ce
qu'on ressent est une activité difficile - d'une part car il faut apprendre à connaître son corps et
d'autre part parce que le vocabulaire est assez spécifique ("essoufflé", "respiration"...).
Cependant au fur et à mesure des séances, le vocabulaire a été demandé, expliqué et donc
réutilisé par les élèves. Ils ont donc eu de plus en plus de facilité à trouver leurs mots et à
expliquer leurs sensations. Le fait de diversifier les formes du travail d'écriture a permis de
motiver les enfants et de leur montrer qu'ils pouvaient écrire un texte et y prendre plaisir.
Pour les quatre élèves les plus en difficulté
Concernant l'E.P.S., les représentations des élèves sont restées très positives.
Concernant l'écriture de texte, on note une évolution sensible chez une seule élève.
En effet, Mélina a modifié ses représentations de manière significative. Au début, elle
n'osait pas se lancer dans le travail d'écriture de peur de ne pas réussir et parce qu'elle avait des
difficultés à comprendre ce qu'il fallait faire. Mais dès que l'activité a été réalisée une première
fois, alors elle a pu utiliser l'exemple pour mieux comprendre la consigne. Surtout, elle a compris
l'objectif de ce travail. Au fur et à mesure des séances d'écriture, elle a osé écrire de plus en plus.
L'investissement dont elle a fait preuve a donc fait suite à une prise de confiance en elle. Mélina
a besoin d'encouragements, elle a besoin de se sentir valorisée dans ses efforts pour se lancer
pleinement dans les activités. Elle abandonne assez vite si elle n'est pas soutenue et stimulée. J'ai
tenté de mettre en place des situations de tutorat dans ce sens. En effet, une nouvelle
configuration de classe a permis de placer à côté de Mélina une élève en qui elle avait confiance
et qui a pu l'aider. Pour cela, nous avons établi avec les élèves des questions à poser et des
phrases à utiliser pour s'aider et se motiver mutuellement. Ce travail, en lien avec celui sur le
cahier d'E.P.S. a permis à Mélina de modifier sa représentation de la production d'écrit et de
progresser de manière significative.
Farid et Sulaymän présentent quant à eux des difficultés très importantes. Le premier
texte qu'ils ont écrit à l'issue de la première séance d'E.P.S. a montré une très grande difficulté
d'expression. Les textes suivants ont été écrit en partie en dictée à l'adulte.
Pour Farid, un travail en lien avec le RASED a débuté sur l'écrit car c'est une très grande
difficulté pour lui. Il a du fait beaucoup de mal à s'investir même si les écrits sont en lien avec
une discipline où il est en réussite. Farid, même s'il a compris le sens de ce travail, a du mal à se
mobiliser pour cette tâche qui n'est pas adaptée à ses compétences. Cependant, par le biais de
l'oral, Farid a écrit quelques lignes à chaque séance. Les réflexions et les remarques qu'il a pu
avoir pendant les séances d'E.P.S. ont été verbalisées et notées. Lors de la réalisation des
affiches, il s'est investi avec plaisir et efficacité dans le travail en groupe. Ainsi, la combinaison
d'une forme de travail peu ordinaire et d'un sujet motivant a permis à Farid de s'investir. C'est un
progrès important à noter et sans doute une piste de travail à approfondir.
Sulaymän ne bénéficie pas d'une prise en charge du Réseau, je me suis donc trouvée très
démunie face aux difficultés de cet enfant. Il présente des difficultés de langage, de
compréhension de l'oral. Il présente aussi des difficultés de lecture. Il a donc du mal à
communiquer avec ses camarades et utilise souvent la violence pour s'exprimer. La mobilisation
dont il fait preuve en E.P.S. a été très difficile à utiliser pour trouver une motivation en
production d'écrits. Le travail mis en place sur trois semaines n'a pas permis de mettre à jour une
progression dans le domaine de la production d'écrits. Peut-être a-t-il simplement permis à
Sulaymän de s'apercevoir qu'il y a une discipline de l'école dans laquelle il est en réussite, dans
laquelle il peut progresser.
Ouafae, même si elle présente des difficultés de langage dues au fait qu'elle soit en
France depuis peu de temps, s'investit avec enthousiasme dans les activités. Pour Ouafae, qui
s'investit déjà volontiers pour tous les apprentissages, l'entrée dans l'écrit par le biais d'un projet
n'est pas essentielle. En revanche, ce projet lui a permis de gagner en assurance. Valorisée par sa
réussite en E.P.S., elle a pris confiance en elle. Elle a osé prendre la parole devant la classe
entière alors que c'est un exercice très difficile pour elle. Ses camarades ont su l'encourager et la
valoriser dans son effort. Le travail sur l'estime de soi est indispensable pour que Ouafae puisse
continuer de s'investir et de progresser. En effet, les efforts et le travail qu'elle doit fournir
chaque jour pour s'exprimer, pour lire, pour apprendre sont extrêmement difficiles et fatiguants.
Elle doit donc garder confiance en elle et en l'école. Cependant, le travail sur la langue - lecture
et écriture - est nécessaire et ne peut être mis en place seulement sous l'angle de ce projet. Pour
cela, j'ai tenté d'inscrire mon travail dans celui mené par les enseignants spécialisés du RASED.
Mélina, Ouafae, Sulaymän et Farid ont une représentation positive de l'E.P.S. et ont de
bons résultats dans cette discipline. Cette réussite leur procure un rôle au sein du groupe et une
confiance de la part des autres élèves. Celle-ci leur permet de prendre confiance en eux, d'être
fiers de leur travail et leur donne envie de s'investir en E.P.S. pour continuer de réussir. Ainsi,
quand on leur demande de parler ou d'écrire à propos de ce qu'ils font et donc de ce qu'ils
réussissent en E.P.S., ils osent le faire et même, pour certains, avec plaisir et engouement. Ainsi,
par le biais d'un projet interdisciplinaire adapté, la mobilisation peut se transférer d'une discipline
à une autre et permettre à un élève de s'investir pour progresser.
Malgré le peu de temps dont je disposais pour mettre en place ce projet avec les élèves,
quelques effets à court terme sont apparus et laissent présager de plus grandes améliorations à
long terme. Concernant la production d'écrits en particulier, qui est une discipline difficile pour
ces enfants, l'E.P.S. leur a permis d'aborder l'écrit sous un autre angle et pour certains de modifier
le regard qu'ils portaient sur cette discipline. En trois semaines, les enfants ont pour certains
modifié leurs représentations ce qui laissent penser qu'ils vont s'investir avec davantage de plaisir
et progresser.
Cependant, il est nécessaire d'apporter une nuance quant au choix de la discipline d'appui
de ce projet. En effet, même si aucun enfant n'a été sujet à ce problème, les difficultés motrices et
cognitives peuvent être liées. Dans ce cas, le fait de partir de la réussite en E.P.S. pour travailler
dans d'autres disciplines perd son sens. En revanche, un projet interdisciplinaire, partant par
exemple des sciences, pourrait être mis en place pour aider les élèves à progresser en E.P.S..
CONCLUSION
L’E.P.S. a parcouru un long chemin depuis le début de son enseignement à des fins
militaires et médicales. En même temps que notre société devenait une grande consommatrice de
sport - pour la compétition, pour le loisir, pour la santé ou pour le spectacle, cette discipline
prenait une place à part entière dans le système éducatif.
Echo de l’engouement pour le sport extra-scolaire, riche de ses multiples A.P.S.A. parmi
lesquelles on trouve toujours celle qui nous plaît, l’E.P.S. bénéficie auprès d'une majorité
d'élèves de tous niveaux scolaires d’une image positive. Impliquant le corps, elle interpelle la
personne dans sa globalité et de ce fait constitue un excellent outil pour développer des
compétences transversales (autonomie, socialisation, prise d’informations…). Mais il existe une
autre voie pour l’E.P.S., pour son enrichissement et celui des autres disciplines, c’est
l’interdisciplinarité. L’E.P.S. me paraît particulièrement porteuse pour une telle démarche
pédagogique pour toutes les raisons que j'ai évoquées.
Durant la mise en place de ce projet, les élèves se sont fortement impliqués, motivés par
les activités elles-mêmes et par le sens qu’ils ont pu leur donner. Sur seulement trois semaines de
stage, les résultats sont très difficiles à mettre en lumière. Mais l'investissement dont les élèves
ont fait preuve et l'analyse que j'ai pu faire de leurs représentations me font penser que ce projet,
s'il avait pu être mis en place sur le moyen ou long terme, aurait pu permettre une progression de
tous les élèves, et plus particulièrement des élèves en difficulté, tant en E.P.S. qu'en production
d'écrits.
N’ayant sans doute pas assez d’éléments pour l'affirmer, je n’en reste pas moins
convaincue que les projets interdisciplinaires sont porteurs de sens, ce qui permet de conjuguer
intérêt et motivation, même si pour les élèves ayant d’importantes difficultés scolaires, la
pratique impliquante dans des activités qui leur plaisent n'est évidemment pas suffisante pour
répondre à tous leurs besoins. Mais l'accent mis sur la réussite et sur la possibilité de prendre
plaisir dans les activités de l'école est primordial pour permettre aux élèves les plus faibles de
garder l'envie d'apprendre.
Le plaisir qu'on prend à faire une chose dans laquelle on réussit, permet aux élèves de
prendre confiance en eux, de se voir et d'être vus sous un angle différent de celui de l'échec et de
la difficulté. Cela leur permet de s'engager plus volontiers dans d'autres travaux, à conditions de
percevoir en eux une chance de réussite. C'est ce que permet le projet interdisciplinaire.
Ma réflexion sur l’enseignement interdisciplinaire n’est que partielle, mais en me
permettant de réfléchir à la manière de concevoir des situations d’apprentissage, elle a
assurément contribué à ma formation initiale.
Il est certain qu’afin de conforter mon sentiment, je renouvellerai cette expérience où les
disciplines ne sont plus accolées les unes aux autres mais largement imbriquées, comme la vie
qui interpelle à tout moment des savoirs de tous ordres, des compétences très diverses et où la
linéarité n’existe pour ainsi dire jamais.
BIBLIOGRAPHIE
–
Bulletin officiel de l'Éducation Nationale, Hors série n°1 du 14 février 2002
–
ANDRÉ GIORDAN. "Apprendre". Belin. Paris. 2000. 254 p.
–
ELISABETH LÊ-GERMAIN, "Échec scolaire, place et fonction de l'E.P.S. à travers
l'histoire", Revue E.P.S. n°289, mai 2001
–
TERRET.Thierry. "Éducation physique et santé". 2002. Revue E.P.S. n°297. p.33
–
FURET.Jean. "Un siècle de relations entre E.P.S. et santé", 2003, Revue E.P.S. 1 n°111
–
Loi n°84-610 du 16 juillet 1984, loi relative à l'organisation et à la promotion des activités
physiques et sportives, dite "Loi AVICE"
–
SENERS Patrick. "L'E.P.S., son histoire, sa genèse". 1998. Éditions VIGOT. Paris.
–
DEVELAY Michel. "Savoirs scolaires et didactiques des disciplines". ESF éditeur. Paris.
355 p.
–
VERMEIL Guy. "Deux conditions essentielles pour la réussite de l'école". Septembre
1982. Animation et éducation n°50.
–
BOURDIEU Pierre & PASSERON Jean-Claude."La Reproduction : éléments d'une
théorie du système d'enseignement". Editions de Minuit. 1970. 284 p.
–
THERME Pierre. "Exclusion, intégration". "Contributions à une réflexion autour de ce qui
s'apprend en E.P.S.". Actes du colloque du SNEP-FSU. 30/31 mai 1996. 231 p.
ANNEXE
ANNEXE 3 : FICHE DE RELEVÉ DES REPRÉSENTATIONS INITIALES
DES ÉLÈVES
Questionnaire
1 - Donne 5 mots qui correspondent pour toi aux matières que je vais te citer.
Matière
Mots qui te font penser à cette matière
2 - Colorie en vert les matières qui sont pour toi les plus faciles.
Colorie en rouge les matières qui sont pour toi les moins faciles..
► Maths
► Sport (E.P.S.)
► Musique
► Art (dessin, peinture)
► Écriture de texte
► Lecture
► Sciences
► Calcul mental
3 - Associe les matières suivantes aux mots qui t'y font penser.
◘ passionnant
Lecture ◘
Sport (E.P.S.) ◘
Écriture de texte ◘
Art (dessin, peinture) ◘
Sciences ◘
Maths ◘
Musique ◘
Calcul mental ◘
◘ intéressant
◘ bien
◘ facile
◘ moyen
◘ fatiguant
◘ ennuyeux
◘ inintéressant
◘ difficile
◘ compliqué
4 - Pour toi, qu'est-ce-qu'une matière difficile ?
________________________________________________________
______________________________________________________
ANNEXE 6 : QUESTIONNAIRE PROPOSÉ AUX ÉLÈVES EN FIN DE
STAGE
Questionnaire
➔
Qu'est-ce qui était le plus difficile à écrire dans le cahier d'EPS ?
O

le schéma

la règle du jeu

O
ce qu'on ressent O
Pourquoi ? __________________________________________________
_________________________________________________________________
_________________________________________________________________
➔ As tu remarqué une différence de difficultés entre le début et la fin ?
________________________________________________________________
_________________________________________________________________
➔
Pour toi, à quoi sert un cahier d'EPS ? ____________________________
_________________________________________________________________
_________________________________________________________________
➔
Pour toi, écrire dans le cahier d'EPS te permet de progresser dans quelles
matières ? _______________________________________________________
_______________________________________________________________
UTILISER L’E.P.S. POUR AIDER
LES ÉLÈVES EN DIFFICULTÉ SCOLAIRE
Résumé :
L'E.P.S., de par ses spécificités, est parfois une des seules disciplines où les élèves
en difficulté dans les matières dites "fondamentales" conservent une véritable chance de
réussir. J'ai tenté de proposer un projet interdisciplinaire s'appuyant sur cette réussite pour
aider les élèves en difficulté à progresser. Le projet mis en place consiste à élaborer à
partir des séances d'E.P.S. une série d'écrits où chacun pourra s'exprimer sur ce qu'il a fait
et ressenti, et ce dans le but de progresser dans l'expression écrite. Ce travail a pris forme
dans un "Cahier d'E.P.S.".
Mots clefs : difficulté / échec / représentation / projet / interdisciplinarité