Infertilité et sexualité
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Infertilité et sexualité
Infertilité et sexualité Les questions que vous vous posez (et n’osez pas aborder avec votre médecin) www.unbebe pourdemain.fr Le site de la fertilité. Édito Vous êtes confrontés à l’infertilité dans votre couple. Cette brochure, qui vous a été remise par votre gynécologue, peut vous donner des réponses aux questions que vous vous posez sur : - le vécu de l’infertilité, - l’influence de l’infertilité sur votre vie sexuelle. Dans toutes les cultures, la femme stérile est vécue comme si elle était frappée de malédiction. Dans les histoires ou les légendes, quand l’issue est favorable, c’est-à-dire quand il y a une grossesse, il s’agit d’un acte quasi magique. Encore aujourd’hui, de nombreux patients n’hésitent pas à consulter le médecin presque comme un sorcier, voire un guérisseur… La haute technologie de la Procréation Médicalement Assistée (PMA) redonne à la médecine, au moins momentanément, une aura de magie. Tous les médecins savent qu’il n’est pas rare de voir une femme, stérile depuis des années, être enceinte dès la première consultation. C’est dire que la part psycho-émotionnelle de ces prises en charge est capitale. Parmi les nombreux problèmes médicaux et psychologiques, l’impact sur la sexualité est une des parties les plus consciemment visibles de « l’iceberg » des causes inconscientes. Il faut quand même rappeler que l’un des plus grands bouleversements de la 2ème moitié du XXième siècle dans l’histoire de l’humanité a été la séparation qui s’est produite entre fécondité et sexualité. Entre 1980 et 1990, la contraception s’est fortement banalisée et de nombreux problèmes de fertilité ont été résolus. Dans ce fascicule, nous avons voulu nous focaliser sur un certain nombre d’interactions qui peuvent exister entre l’infertilité et la sexualité. Ne perdons pas de vue cependant que chaque cas est particulier, c’est ce qui fait la richesse de la relation médecin-patient et qui donne du sel à la vie humaine. Dr. Sylvain Mimoun Gynécologue et psychiatre Infertilité et sexualité : la crise d’identité… Comment le couple vit-il l’épreuve de l’infertilité ? L’annonce de l’infertilité ne laisse généralement pas indifférent. Elle est fréquemment vécue comme une malédiction ou une malchance et elle modifie souvent l’aménagement initial du couple. L’infertilité est une des situations les plus stressantes qu’un couple puisse rencontrer dans sa vie de couple. Une étude portant sur 70 couples a montré que les couples infertiles sont plus stressés que les couples fertiles. En outre, on observe une élévation du niveau d’anxiété chez les couples confrontés à l’infertilité : ce stress peut engendrer lui-même une stérilité ou aggraver une infertilité. « Pourquoi moi ? » (Eva, 28 ans) Quelles sont les conséquences de l’infertilité sur la sexualité du couple ? Quand un couple apprend la nouvelle de sa stérilité, il y a toujours un moment de crise d’identité. L’annonce de cette nouvelle tombe souvent comme un couperet. Chacun réagit en fonction de sa personnalité et de ses mécanismes de défense. On assiste parfois à un désespoir dépressif ou à un activisme professionnel, sportif, associatif… Souvent, le couple stérile se retrouve seul face à cette crise d’identité, particulièrement dans les grandes villes. Dans ce cas, il peut avoir tendance à se replier sur lui-même et à se couper un peu plus des autres pour fuir les allusions sur cet enfant qui ne vient pas ou éviter la souffrance réveillée par les naissances dans l’entourage. Pour survivre en tant que couple, le couple stérile devra passer cette épreuve d’identité conjugale et trouver un nouveau but à sa vie. Infertilité et sexualité : la crise d’identité… Comment la personne infertile ressent-elle la situation ? Sentiment d’infériorité, de ne pas se sentir vraiment « femme » ou vraiment « homme », et sentiment de culpabilité sont très souvent mêlés. L’homme touché par l’infertilité peut rapidement percevoir un sentiment de castration, et ce d’autant plus si sa femme, blessée elle-même par l’absence de maternité, l’agresse plus ou moins ouvertement. Par ailleurs, il aura d’autant plus de mal à vivre sa propre stérilité s’il vit dans un milieu où la puissance et la virilité se mesurent au nombre d’enfants. La femme touchée par l’infertilité ne vivra pas sa stérilité de la même façon suivant le milieu culturel auquel elle appartient (par exemple si on y privilégie fondamentalement la maternité ou si on y apprécie les autres aspects de la féminité). « Je ne suis plus un homme, ce n’est pas étonnant avec le sperme que j’ai ! » (Gérard, 32 ans) Et le conjoint, comment réagit-il face à l’infertilité de son partenaire ? Le conjoint a parfois tendance à surprotéger la personne infertile, considérée comme malade. Mais, d’autres fois, il y a conflit. La personne fertile se sent coincée entre son désir d’enfant et la culpabilité de ce projet devant l’impossibilité de le réaliser avec son conjoint. L’infertilité peut-elle mener à des tensions au sein du couple ? Des tensions conjugales existent avant tout diagnostic. Après, il n’est pas rare que l’un des deux partenaires blâme l’autre ou l’accuse de ne pas avoir le même engagement dans la prise en charge médicale, les traitements ou les examens. On observe également combien le non dit peut s’installer entre les deux partenaires, l’un croyant protéger, épargner l’autre en ne parlant pas. Traitement de l’infertilité et sexualité : la grossesse comme but ultime Chez la femme, difficile d’avoir du désir en fonction de la courbe de température Le plus souvent, il y a une inhibition du désir sexuel chez la femme, inhibition qu’elle dépasse pour atteindre son objectif d’avoir un enfant. La détérioration de la vie sexuelle chez les femmes infertiles est liée au fait qu’elles se sentent responsables de l’absence d’enfant. Ces dernières rattachent fertilité et féminité, d’une part, et sexualité et estime de soi, d’autre part. Chez l’homme, une sexualité en panne Souvent, l’homme ressent chez sa partenaire la « nécessité » d’avoir un enfant à tout prix, alors qu’il perçoit bien qu’elle « n’a pas envie » de lui et cela l’inhibe plus ou moins nettement. En outre, que ce soit dans le cadre d’une insémination artificielle ou d’une FIV, l’homme est confronté à la masturbation. Cette expérience peut être plus ou moins bien vécue vis-à-vis de lui-même, de sa femme ou du personnel soignant. « Nous étions obsédés par le jour de l’ovulation » (Marion, 29 ans) Pourquoi le désir d’enfant remplace-t-il le désir sexuel chez les couples infertiles ? Quand un couple est suivi pour stérilité, il effectue un véritable parcours du combattant. Le plus souvent, la recherche obsédante de l’enfant à venir amoindrit le désir. Cependant, cette inhibition est outrepassée pour atteindre l’objectif : avoir un enfant. Les rapports sexuels deviennent un « moyen » et uniquement un « moyen » utilisé « volontairement » pour avoir un enfant. Ceci aboutit à une perte de qualité, de plaisir puis même de désir. Quelle est l’influence des traitements et des examens sur la sexualité du couple ? La satisfaction sexuelle est souvent altérée dès l’étape des examens du bilan d’infertilité des deux conjoints. La diminution de la fréquence des rapports sexuels a été démontrée chez 93 % des couples infertiles en cours de traitement dans des études récentes : - selon une moitié des couples, l’infertilité serait responsable de cette diminution, - selon l’autre moitié, cette diminution résulterait de l’obligation d’avoir des rapports à dates fixes. PMA et sexualité : le désir retrouvé ? Au final, en dissociant procréation et sexualité, la PMA permet-elle de retrouver une intimité ? La PMA peut permettre de maintenir voire même de retrouver le désir sexuel. En effet, la programmation de PMA n’a lieu que 2 ou 3 fois par an. Les autres mois sont « libres ». Le couple peut s’aimer comme il l’entend, à son rythme, sans être obsédé par l’attente d’une grossesse à chaque rapport. En dehors des cycles programmés, le couple se sait stérile. Il est donc libre de toute attente. Mais, il sait aussi que la PMA va l’aider à avoir un enfant, ce qui le rassure et le rend confiant. Ainsi, peu à peu, les deux partenaires se retrouvent et redécouvrent la spontanéité. Ils sortent de leurs réflexes obsédants : « Est-ce le jour de l’ovulation ? Les règles vont-elles survenir ? etc...». Il n’est pas rare qu’une grossesse « naturelle » survienne. « La PMA est une épreuve de la vie qui nous a rapprochés » (Gérard, 32 ans) Les idées préconçues sur la place de la sexualité dans un parcours de PMA ont-elles toujours cours ? Certains psychanalystes ont pu penser qu’avec les techniques de procréation une étape supplémentaire dans la détérioration de la vie sexuelle du couple pouvait être franchie. Le couple avait déjà peu ou pas de rapports sexuels satisfaisants du fait de son obstination à lutter contre l’infertilité. À tort, on a cru qu’avec la PMA, le besoin de sexualité pouvait s’annuler complètement quand le désir d’enfant venait encore plus sur le devant de la scène. Dans la réalité, un couple averti peut dissocier la PMA, qui s’occupe de sa fertilité, de sa vie sexuelle, qui ne dépend que de lui. Ainsi, la PMA permet de mettre de côté le désir effréné d’enfant entre les tentatives… et cette pause peut être le moment où surgit une grossesse. Pour en savoir plus sur l’infertilité, rendez-vous sur le site - GYN-093-08/10 www.unbebepourdemain.fr Pour en savoir plus : Mimoun S. Des maux pour le dire. J’ai lu. 2003.