Réunion d`experts sur le financement de projets culturels en Afrique

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Réunion d`experts sur le financement de projets culturels en Afrique
Réunion d’experts sur le financement de projets culturels en Afrique francophone
Compte-rendu et suivi des recommandations
Organisateur : Fédération internationale des coalitions pour la diversité culturelle
Soutien financier : Organisation internationale de la Francophonie
Soutien logistique : Programme ACPCultures+
Dates : 17-18 décembre 2013
Lieu : Bruxelles (Belgique)
Rapporteurs Marie Le Sourd (On the Move) et Valeria Marcolin (Association Culture et Développement)
a) Contexte
Cette rencontre s’inscrit dans la continuité du travail amorcé lors de la dernière rencontre des coalitions
francophones d’Afrique à Ouagadougou en décembre 2011, soutenue par l’OIF (voir les documents dans
le lien suivant : http://www.ficdc.org/cdc4015), de même que :
Le symposium « La gestion des risques dans le financement de la culture », Paris, 2010
Le guide des sources de financements de la culture dans les pays ACP réalisé par la FICDC
L’étude sur le développement d’une expertise dans la recherche de financement
b) Enjeu global
Le secteur culturel en Afrique francophone est encore confronté à la difficulté de pérenniser les initiatives
et les structures face à l’exigence de plus en plus forte, tant des bailleurs de fonds que des communautés
bénéficiaires, de produire et démontrer les effets structurants des projets coproduits ou cofinancés.
c)
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Objectifs
La mise en commun de l’expertise sur la recherche de financement ;
L’identification des points de résistance ;
Une meilleure compréhension :
o des contraintes (politiques, techniques, internes, externes) dont doivent tenir compte les
bailleurs de fonds dans la conception de programmes de soutien au secteur culturel
notamment en Afrique et
o réciproquement des incidences que ces programmes, tels que conçus, peuvent avoir
(positivement ou négativement) sur le développement des filières culturelles locales ;
L’identification de solutions qui pourraient renforcer la pérennisation des projets, les opérateurs, et
le cas échéant, produire des effets structurants quand ceux-ci sont recherchés.
d) Participants
La rencontre a rassemblé 9 bailleurs de fonds, 13 opérateurs culturels (sélectionnés sur appel de
candidatures) et 4 observateurs. La liste des participants et la présentation des organisations sont
disponibles en ligne : http://www.ficdc.org/cdc4015
e) Format du compte-rendu
Dans la mesure où l’ensemble des présentations des bailleurs de fonds et des opérateurs culturels étant
par accessibles via le lien précédemment mentionné, l’objectif de ce document est avant tout de :
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mettre en lumière et en parallèle les défis et opportunités rencontrés d’un côté par les opérateurs
culturels et d’un autre côté par les bailleurs de fonds / organisations-partenaires
(>
problématiques clefs développées dans le rapport) ;
dresser des pistes de réflexion pour le développement de stratégies concertées sur le long terme
entre des bailleurs de fonds aux niveaux international, national et local qui tiennent davantage
compte des besoins du terrain (inclus géographiques) et des objectifs ainsi que des agendas
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•
politiques que ces bailleurs se doivent de respecter (> recommandations de l’ensemble des
participants et suivi)
identifier des éléments de langage qui pourraient servir aux bailleurs pour proposer des révisions des
axes d’intervention, des cibles, etc. à un niveau plus politique.
Afin de servir d’outil pratique de travail à vocation exécutoire à plus ou moins long terme, le rapport est
enrichi d’une présentation schématisée des principaux enjeux et opportunités liés au financement des
projets culturels en Afrique.
La partie 1 se concentre sur une revue synthétique des enjeux du financement du secteur culturel en
Afrique francophone évoqués par les participants.
Les parties 2 et 3 abordent les problématiques clefs (les financements et les possibles stratégies de
partenariats pérennes) en mettant en lumière des amorces de solutions discutées par les participants.
La partie 4 traite du rôle clef des acteurs de la société civile dans la mise en place de ces solutions.
La conclusion propose finalement trois types d’orientations et d’idées concrètes qui mettent en valeur les
nécessaires synergies et lignes de coopération à identifier ou à renforcer entre les bailleurs de fonds, les
organisations-sources de financements, les opérateurs culturels, les secteurs privé et public.
Problématiques clefs discutées entre experts
Les deux journées étaient articulées autour de présentations des bailleurs de fonds et des opérateurs
culturels. Quelques règles ont rapidement été mises en place de manière à maximiser les échanges
d’expériences et d’informations :
La raison d’être de cette rencontre étant de faciliter un échange d’informations entre bailleurs de
fonds (ou organisations de soutien / partenaires) et les opérateurs culturels, il a clairement été établi
qu’il ne s’agissait pas d’un marché de projets ou de promotion de projets en particulier ;
En lien avec l’esprit de la conférence, la règle de Chatham House fut adoptée par le groupe : elle
stipule que les participants à un débat sont libres d'utiliser l'information reçue, mais que ni l'identité
ni l'affiliation d'un quelconque participant ne doivent être révélées ;
Bien qu’un agenda avait été fixé, les temps de présentations ont parfois été rallongés de manière à
permettre des discussions plus approfondies sur des sujets clefs et/ou sensibles.
1.
Les besoins du secteur culturel francophone
1.1. Renforcement des capacités et structuration du secteur
« Nous avons le contenu, mais pas le format technique et administratif ». La plupart des présentations des
opérateurs culturels se sont fait l’écho d’un réel besoin de renforcement des capacités du secteur (au-delà
des programmes déjà mis en place), notamment aux niveaux :
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Des personnes et des organisations (management culturel) ;
Des artistes (par exemple pour les outiller avec des techniques précises, formes d’écriture) ;
Des techniciens et régisseurs sons et lumières (pour éviter le recours trop systématique à des
professionnels européens).
Au-delà de ce renforcement des capacités d’ordres humain et organisationnel, un plus grand nombre
d’études et d’analyses comparatives serait nécessaire notamment pour analyser les impacts humains,
sociaux et économiques des projets culturels afin d’en faire une force de plaidoyer auprès des pouvoirs
publics (nationaux / locaux). Suivant l’exemple du Burkina Faso, de telles analyses reposent sur
l’identification d’indicateurs clés adaptés au contexte en question.
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D’autres sujets d’importance pour structurer le secteur seraient de travailler et d’analyser la question du
développement des publics en Afrique (sensibilisation sur la place de la culture dans la société, la question
de la gratuité des événements culturels, les questions des droits d’auteur et de la rémunération des
artistes).
1.2. Structuration du secteur, aux niveaux nationaux et du continent
Eu égard aux distances et aux problèmes potentiels de communication sur le continent africain
(fragmentation du continent, problèmes financiers, visas, etc.), il apparaît plus que nécessaire de
renforcer la/les logique(s) de réseaux :
-
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Penser en terme de réseaux de réseaux, dans une volonté de transdisciplinarité et de
mutualisation ;
Renforcer les réseaux thématiques et/ou disciplinaires de manière à développer une expertise au
niveau du continent, mais également à l’échelle nationale et locale (exemples de thématiques
citées : liberté d’expression, art et espace public, statut de l’artiste, politiques culturelles et
intérêt général en Afrique, développement humain et social comme priorités pour le continent,
valorisation des liens entre patrimoine et création contemporaine, travail avec la jeunesse, etc.) ;
Améliorer la coordination entre des événements sur le continent africain de manière à renforcer
des synergies de coopération entre des festivals, des lieux et bien sûr de rentabiliser le coût des
tournées (calendrier des événements avec le réseau Afri Fest Net par exemple)
De manière transversale, les réseaux sont aussi compris et envisagés comme :
-
-
Une force de plaidoyer en permettant de développer un langage commun face aux bailleurs de
fonds et/ou organisations partenaires (en identifiant ses propres besoins et priorités de
financement pour négocier entre pairs tant sur les plans esthétiques, que sur des thématiques
liées aux questions de développement et de culture) ;
Des plateformes pour identifier et partager des bonnes pratiques de cofinancement,
gouvernance, modes de financement innovants, etc.
Risques évoqués
2.
que les bailleurs se concentrent sur le financement de ces structures sans avoir les moyens de
vérifier l’impact réel sur les organisations membres des réseaux ;
que les projets de terrain (création, production, diffusion), véritables porteurs de diversité, soient
délaissés au profit « des grosses machines », plus visibles.
Conséquences des types de financement pour le secteur culturel en Afrique francophone
La plupart des opérateurs culturels (y compris publics parfois) dépendent de fonds régionaux ou
internationaux ; la coopération est d’abord vue comme une « source de financement » avant même
d’être un désir de partager un projet avec d’autres partenaires (notamment du nord). Il en découle de fait
ce qui a été nommé comme un “détournement de fonds” et/ou une dénaturation régulière des
financements.
Des financements étrangers destinés à des projets servent à financer des besoins permanents, structurels
locaux/nationaux. Cette situation génère un effet pervers, car les opérateurs essaient de pallier au
manque de moyens, qui devraient découler de véritables politiques publiques par l’aide internationale
aux projets et donc sans garantie de pérennité.
Exemple : comme plusieurs financements facilitent la « mobilité » ou la « circulation des œuvres », ils
peuvent être utilisés à d’autres fins comme financer indirectement un festival auquel les artistes sont
invités. Les budgets de création/ de conception de projets sont rarement soutenus par des structures
publiques ou privées à un niveau local ou national.
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Un autre type de problèmes rencontrés est l’orientation accentuée de lignes de financements sur des
concepts « tendance » identifiés par les bailleurs (du type « l’art dans l’espace public », « culture et
participation »), etc. Au-delà de la pertinence de ces thématiques et de l’importance donnée à
l’investissement dans certaines filières identifiées comme prioritaires (comme certains secteurs
spécifiques des industries culturelles et créatives), cette situation tend à conduire à une certaine
uniformisation des projets et des acteurs soutenus.
Exemple : renforcer les capacités des acteurs du cinéma d’un pays ou de territoires par un « projet » de
festival autour des droits de l’homme. L’intérêt réel est de renforcer professionnellement la production
locale, travailler la thématique est secondaire, voire utilitaire, par les participants et les porteurs de
projet.
Aussi les critères de sélection sont parfois extrêmement contraignants et peu adaptés aux différents
contextes d’Afrique francophone (taille des équipes, garantie financière). Le type de vocabulaire utilisé
dans les appels est formaté sur une approche plus occidentale du soutien à la culture et peut être
également en porte à faux avec les différents contextes locaux.
Ceci finalement peut grandement affecter la diversité des projets et des acteurs soutenus notamment
dans leur durabilité : si les opérateurs les plus connus et reconnus peuvent espérer être soutenus (usual
suspects), qu’en est-il des plus petites organisations plus faibles structurellement et du point de vue de
leurs ressources humaines, mais développant des projets avec un impact vérifié sur le terrain ?
Conséquences
Au-delà d’un détournement de fonds, cette situation a également un impact sur la nature même des
créations africaines francophones conditionnée par les obligations de coproductions des partenaires
1
quand il s’agit de projet de coopération . Le financement du secteur culturel par la coopération risque
également de créer des inégalités de chances dans le développement du secteur sur le continent. En effet
les acteurs issus de pays bénéficiant d’accords bilatéraux privilégiés avec tel ou tel autre pays développé
(Burkina, Mali, Sénégal par exemple) auront davantage de moyens que les acteurs opérant dans des zones
d’influence et d’intérêt qualifiés de « non prioritaires » (Togo, Cameroun, Bénin par exemple).
>>>> Eu égard aux contraintes budgétaires auxquelles font face la plupart des bailleurs de fonds et des
besoins réels du terrain, où peuvent se dessiner des solutions ? Si la crise affecte les stratégies de
financements des bailleurs, n’est-ce pas également un contexte favorable pour soumettre des
propositions, en partant du cas de l’Afrique francophone ?
Propositions des participants
1. Promouvoir des réunions / échanges à intervalles réguliers entre opérateurs culturels (en tenant
compte de la diversité des interlocuteurs) et institutions/organisations finançant la coopération ;
2. Renforcer les capacités des porteurs de projet dans l’élaboration des dossiers, par de
l’accompagnement adapté, mais également en commençant par un plus grand effort de retours
de la part des bailleurs et/ou jurys sur les candidatures non retenues (un contact personnalisé est
ressenti comme un plus, par rapport à des courriers notifiant des points, n’expliquant pas ce qui
aurait pu être amélioré et comment);
3. Évaluer les besoins du secteur en prenant en compte les différents contextes et les évolutions du
secteur (inclus la gestion des risques) pour tenter une distribution équitable des ressources
venant de la coopération ;
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Cependant nous sommes dans de la « coopération » et non pas dans une logique de substitution de politique
publique nationale, ce qui peut expliquer ces « règles » dans les partenariats.
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4. Mettre en place des formations pour les opérateurs culturels, notamment métier (son, lumières,
etc.) et en management ; un soutien particulier devrait être pensé au niveau de la formation
initiale et continue diplômante.
5. Pour les autres formations souvent en lien avec des projets spécifiques, des enjeux dont il
faudrait tenir compte sont :
o assurer qu’un maximum de personnes puisse bénéficier de ce type de formation pour
encourager une plus grande diversité de types de projets soutenus ;
o réfléchir ensemble (bailleurs et opérateurs) en termes de complémentarité de l’offre (par
exemple tout au long des métiers d’une filière) pour éviter le phénomène criant du
« shopping des formations et des per diem » sans objectifs et résultats structurants ;
6. Valoriser les compétences techniques existantes sur le continent pour faciliter leur mobilité ;
7. Identifier des bonnes pratiques de collaboration avec le secteur privé en Afrique ;
8. Accompagner des projets plus que des « axes », car dès que ceux-ci sont abandonnés, des projets
porteurs de sens au niveau local disparaissent également ;
9. Renforcer les capacités des acteurs dans l’élaboration de cadres logiques et dans l’évaluation de
l’impact de leurs projets ;
10. Tenir compte de la concurrence à l’œuvre entre grands opérateurs privés qui investissent dans
les médias ou le spectacle vivant et les entrepreneurs culturels indépendants.
3.
Comment identifier des stratégies de financements pérennes ?
L’ensemble des discussions et échanges a permis de mettre en lumière l’enjeu principal du financement
de projets culturels en Afrique francophone : la substitution de financements structurels par des
financements de projets et donc la substitution de financements nationaux et locaux par des
financements internationaux et/ou interrégionaux.
Cet enjeu majeur a un double impact sur:
1.
2.
La pérennité et la diversité des initiatives/programmes soutenus et de façon parallèle sur les attentes
générées au sein du public et des professionnels (qui risquent d’être déçues pour la nonreconduction de financements);
La liberté d’expression artistique et de création dans la mesure où certains fonds travaillent en
partenariat avec les états qui tendent à verrouiller la sélection et à ne pas communiquer les
possibilités de soutien aux opérateurs et professionnels de la culture dudit pays.
Cette situation nécessite une structuration du secteur cultural africain et francophone aux niveaux
national et local de manière à diversifier les sources de soutien et à éviter cette substitution qui a des
impacts négatifs sur le moyen et le long terme.
>>> Où sont les solutions dans le cadre d’un dialogue continu avec les bailleurs de fonds/organisations
partenaires aux niveaux international, national et local?
1.
2.
3.
4.
Encourager un partage d’informations entre bailleurs de fonds pour éviter des doublons et éviter la
dispersion des moyens financiers,
Encourager des mappings exécutoires et échanges de bonnes pratiques de manière à diversifier les
financements, promouvoir la complémentarité par rapport aux typologies/taille d’acteurs, secteurs
couverts, niveau d’intervention sur la chaîne de valeur (production/diffusion), etc.
Favoriser une plus grande diversité d’initiatives répondant aux besoins identifiés du secteur : pour les
petits projets qui se veulent innovants > veiller à adapter les critères d’éligibilité, de garantie (souvent
difficile à obtenir) et les modalités des rapports (l’administratif dans la gestion des projets prenant de
plus en plus de place sur le temps de R&D et l’artistique).
Encourager des processus de sélection transparents et la fluidité des informations (éviter tout
verrouillage de l’information) ;
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5.
6.
7.
4.
Diffuser et s’appuyer sur la valeur ajoutée de la culture et encourager une coordination des études et
des analyses sur les impacts multiples des investissements dans le secteur culturel ;
Penser en termes de partenariat (‘co-‘ création/production/diffusion) et d’échanges sud-sud et
intracontinental ;
Afin de lutter contre le phénomène ressenti de « raréfaction de la ressource », dans un continent où
paradoxalement la liquidité ne manque pas :
o coconstruire l’argumentaire entre opérateurs de la société civile et les bailleurs internationaux
pour renforcer l’inclusion du secteur culturel dans les stratégies nationales de croissance et de
lutte contre la pauvreté, ainsi que dans toutes les politiques de développement et les
programmes sous régionaux (notamment pour la prise en charge du structurel). Il s’agirait de
s’appuyer sur l’exemple des pays africains ayant déjà entamé ces processus (parmi les
témoignages : Burkina, Niger). Les modalités de cette coopération pour un plaidoyer efficace
restent à approfondir ;
o Les opérateurs pourraient agir auprès de leur gouvernement avec les bailleurs pour s’assurer que
la culture soit parmi les secteurs éligibles dans le cadre des programmes nationaux financés par
le 11e FED (Fonds européen de développement) ;
o Travailler avec le secteur bancaire pour valoriser l’intérêt de prêts souverains dans le secteur
culturel, travailler sur la notion de rentabilité (macroéconomique) sur le long terme du secteur
par l’investissement des politiques publiques plus que sur les questions de rentabilité par projet ;
o S’appuyer sur les exemples existants pour inciter les partenariats public-privé et état-banque afin
de favoriser l’investissement et les prêts aux entrepreneurs culturels.
Le rôle pivot des acteurs de la société civile: quelles responsabilités pour quels partenariats ? Quels
types de coopérations stratégiques et à quels niveaux d’action ?
Le rôle et le type d’implication de la société civile furent une thématique sous-jacente aux discussions des
deux journées. Quelques idées clefs peuvent être mises en avant dont la nécessité pour le secteur culturel
en Afrique francophone de:
-
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-
Se structurer pour participer à la définition des politiques culturelles aux niveaux national et
local (suivant les besoins des artistes et des professionnels) aussi dans un souci constant d’éviter
que les organisations internationales ne se substituent aux responsabilités de politiques
nationales,
Réinterroger le sens de son engagement dans des actions de coopération : obligation - besoin
matériel - ou choix ? Quels sont alors les impacts sur les projets, les relations, les personnes, de
part et d’autre ?
Définir des stratégies de dialogue dans les pays où le secteur culturel subit les lois de la censure
et n’est uniquement soutenu que dans ses manifestations les plus officielles ;
Dialoguer et définir des cadres de collaborations avec les organisations internationales pour
éviter un trust de certains états sur des lignes de financements dont pourraient bénéficier les
secteurs culturels locaux ;
Débattre et décider du type de soutien urgent à mettre en place (formations par ex. au Burkina
des entrepreneurs culturels; développement des publics, etc.) ;
Associer d’autres secteurs aux débats (privés, autres secteurs tels que sociaux,
environnementaux, etc.)
Définir des règles de coopération et de communication entre les institutions culturelles
centrales et structures relais/petites structures pour une visibilité équitable de chacune d’entre
elles ;
D’autres enjeux transversaux sont à rappeler et des réflexions à nourrir :
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« Concurrence » accrue entre états/communautés territoriales et société civile pour attirer les
fonds des partenaires techniques et financiers mais aussi « concurrence » sur entre bailleurs de
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-
5.
fonds eux-mêmes, à leur tour porteurs de projets, et les organisations de la société civile
(exemples : EUNIC, British Council, Institut français, UNESCO, porteurs de projets auprès de la
Commission européenne au même titre que des ONG ou acteurs locaux en réseaux).
« Concurrence » dans les pays entre institutions culturelles centrales, structures relais et
petites structures (une mutualisation est-elle souhaitable et pour quelle visibilité de chaque
partenaire ?)
Recommandations et suivi
Le tour de table des recommandations qui a conclu ces deux jours de rencontres reprend des points clefs
présentés dans ce rapport. Ces suggestions peuvent être résumées en trois grandes catégories :
Plaidoyer « culture comme vecteur de développement »
Réseautage stratégique entre bailleurs de fonds / organisations-partenaires (sources de financements)
Partage d’informations (sélection - coordination- production)
PLAIDOYER – La culture comme vecteur de développement
Les initiatives de sensibilisation sur l’apport de la culture aux stratégies et aux politiques de
développement se multiplient à tous les niveaux et via tous types d’acteurs (ONG, réseaux, organisations
internationales, bailleurs, etc.). Mais ce plaidoyer reste plutôt général. Outre une meilleure concertation
et synergie à rechercher entre les différentes initiatives (par qui ? comment ?), le plaidoyer gagnerait à
être nourri avec des exemples de bonnes pratiques et en intégrant des besoins spécifiques de soutien
identifiés par le secteur lui même (cf. souligner et argumenter l’importance de la prise en compte de la
diversité de la taille des projets et des disciplines nécessitant un appui ; rappeler que ces besoins de
soutien peuvent être différents en fonction des pays - ex. : la pratique du théâtre mise à mal au Togo,
mais bien représentée au Burkina - au niveau de la structuration locale des professionnels, etc.).
-
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-
-
Identifier et promouvoir les « success stories » en Afrique ; elles existent et peuvent faciliter et
inciter le travail Sud-Sud (objectif : renforcer la création d’emplois en se basant sur le patrimoine
et les savoir-faire locaux) ;
Travailler sur la notion d’intérêt général et de compréhension mutuelle sur le continent (défi en
soi, car le continent est non homogène et il est difficile de parler d’une seule voix) ;
Le développement social et humain semble être l’objectif prioritaire de l’investissement culturel,
or c’est autour de l’apport économique de la culture que s’organise actuellement le plaidoyer en
Afrique et ailleurs ;
Valoriser l’interdépendance des disciplines pour que les politiques comprennent l’importance de
travailler de façon concomitante sur le patrimoine, les secteurs traditionnels comme le spectacle
vivant (le théâtre semble plus fragile que la musique dans certains pays par exemple), et les
industries culturelles et créatives ;
Quelles actions vis-à-vis des publics, garants et bénéficiaires du soutien aux pratiques
culturelles ? Comment inciter la « consommation payante » ?
Inciter le cofinancement sous régional d’initiatives (établissements, instituts de formation, etc.)
qui peuvent profiter à plusieurs pays et à leurs opérateurs.
Adoption par l’ONU d’une 3e résolution sur la culture et le développement durable (décembre 2013) : les
acteurs se mobilisent de part et d’autre pour une meilleure inclusion de la culture dans les Objectifs du
Millénaire post 2015 (cf. documents existants de l’UNESCO et de la société civile
IFACCA/CGLU/CAE/FICDC). ARTerial prépare également une position. Que peuvent faire les autres
porteurs de projets et les états/collectivités territoriales en Afrique ?
RÉSEAUTAGE STRATÉGIQUE ENTRE BAILLEURS ET ORGANISATIONS PARTENAIRES
Besoin de synergies, d’échange de bonnes pratiques, d’orientations communes entre bailleurs de
fonds : réunions internes entre organisations partenaires pour répondre aux besoins les plus urgents
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tout en s’inscrivant dans une stratégie de long terme et dans un contexte d’échanges culturels
internationaux.
Comment inciter le secteur privé à investir de façon plus systématique dans le secteur culturel audelà des questions de développement et de grands projets phares et à forte visibilité?
Dans quelle mesure créer des passerelles (information, formation, bonnes pratiques) entre les
opérateurs culturels et les bailleurs de fonds, en favorisant la diversité des points de vue, en
s’appuyant sur les partenaires de confiance, tout en veillant à aller au-delà des usual suspects ?
Comment faciliter une meilleure compréhension par les opérateurs des objectifs des différents
programmes de financements et assurer une veille des appels à projets ? Faut-il penser à un portail
conjoint d’annonce des appels à projets ou relier des plateformes déjà opérationnelles ?
Idées/ références
Travail sur les stratégies de financement de la mobilité via On the Move (première réunion à Prague
avec des bailleurs de fonds européens et asiatiques) et rencontres entre bailleurs de fonds au niveau
international (favoriser des dispositifs d’échanges sud-sud et intra-Afrique) ;
Éviter la « mise en concurrence » des bailleurs, faciliter la transparence pour un appui stratégique au
secteur culturel : besoin de dialogues/moments d’échanges réguliers entre bailleurs de fonds sur des
zones de coopérations stratégiques Europe-Afrique / Sud-Sud / Chine-Afrique, etc. ;
Mise en place de formations ciblées pour des opérateurs culturels sur les stratégies de financement
des projets culturels mettant en lumière la problématique clef « financements structurels //
stratégies de soutien de projets ».
PARTAGE D’INFORMATIONS
Soutien nécessaire à des plateformes d’informations (bureaux et/ou sites Internet de référence type
portail) tout en tenant compte du fait que l’accès aux outils de l’Internet n’est pas une condition
suffisante pour la diffusion de l’information compte tenu du niveau d’équipement inégal sur le
continent ;
Coordination entre ces outils d’information pour éviter tout type de duplication. Mutualisation des
expertises ;
Actualisation de recherches sur les sources de financements et mapping des nouvelles orientations et
stratégies futures des bailleurs de fonds en Afrique francophone et en Afrique en général ;
Production d’études affinées sur la contribution de la culture à l’économie et au développement
sociétal. Mise en place de regroupements de ressources sur cette thématique notamment dans les
pays africains francophones et anglophones. Ces données pourront être utilisées dans les actions de
plaidoyer et nourrir leur cadre logique/objectifs :
o Entre acteurs /opérateurs : favoriser les logiques de mutualisation (par exemple fédérer
plusieurs festivals sur un territoire autour de certains services partagés) ;
o Apprentissage par la pratique : revoir les retours négatifs aux appels à projets pour
affiner les explications du rejet de la demande. Informer sur les insuffisances permet de
s’améliorer.
o Promouvoir l’importance de la production de statistiques selon les standards
internationaux pour faciliter l’étude et la comparaison des données, notamment sur le
continent. Connaître c’est aider à savoir où agir et pourquoi.
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Quelques phrases qui ont marqué le tempo de la rencontre :
« Souvent il est plus facile de collaborer avec des Européens par souci d’argent, le coopérant peut se trouver des
moyens et même les amener »
« Pourquoi certains pays africains ont plus de bailleurs que d’autres ? Comment alimenter un fonds national pour
les arts ? Qui a des exemples ? »
« On crée des fonds (dans les pays, ndr), mais ensuite il faut les alimenter… »
« On travaille 1 mois à temps plein pour rédiger un dossier de candidature ; c’est beaucoup pour des petites
structures. On aurait envie d’avoir un retour plus détaillé sur le dossier qui a été déposé »
« Nous avons des festivals, mais les directeurs et les techniciens viennent de l’étranger… »
« Il existe peu de mécanismes de mobilité en Afrique »
« Comment travailler avec les bailleurs internationaux pour sensibiliser états et instances sous-régionales à prendre
en charge les besoins structurels du secteur, des besoins qui sont différents des projets de coopération, pour des
projets d’action locaux… Le problème des fonds internationaux est qu’ils sont souvent fléchés… »
« Manque d’outil pour élaborer un business plan… dans le cadre du théâtre les recettes de la billetterie ne sont pas
suffisantes…. »
« Pour soutenir la création, il faudrait une stratégie sur le plan national… »
« Il y a un problème de relève artistique et de public, surtout au théâtre… »
« Au niveau de la formation, on demande à des compétences de la sous-région de se mobiliser … »
« Tirer vers le haut les jeunes… »
« De plus en plus d’acteurs sont outillés dans la technique d’élaboration de projets… la question qui revient de plus
en plus est celle du financement… »
« Les résultats attendus par les bailleurs de fonds sont-ils réalistes par rapport au contexte ? »
« Chaque bailleur fait ce qu’il croit utile et cela pollue les activités en Afrique, sans coordination… »
« Les banques demandent une garantie souvent de 20% à un secteur (ou des acteurs) qui souvent n’a rien…
comment trouver des mécanismes pour assurer le financement ? »
« Le problème c’est la construction d’un espace pour la demande du terrain… »
« Beaucoup d’effets d’annonce, cela reste au niveau des institutions, la société civile n’a pas vraiment été associée
à l’étude… »
« Autres actions pour développer un public payant ? Est-ce qu’on sera toujours dans une logique de la gratuité ? »
« On n’a pas la culture de la culture »
« Valoriser ce que nous avons… »
« Voir ce que chacun devrait faire pour l’éducation scolaire et artistique… »
« Les acteurs culturels sont souvent vecteurs de changements donc cela embête les états… »
« Aider à sortir des stéréotypes, transmettre des compétences de vie, compétences sur l’imaginaire… »
« Sortir de la spectacularisation et du court terme par le sur-projet, appui au travail souterrain… »
« Le montant des appels à projets définit l’opérateur qui peut postuler.. »
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« Réfléchir pour que la capacité opérationnelle ne soit pas « excluante » … »
« Important de s’aligner si un pays à une politique culturelle… »
« Baisse constante des moyens avec mandat qui restent les mêmes »
« Vis-à-vis des banques, continuer à travailler sur le plaidoyer autour de la contribution de la culture au
développement »
« Faciliter la compréhension des mécanismes des bailleurs de fonds… »
« Approcher les états pour aborder les ministères des Finances »
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