369 LES SANCTIONS FISCALES ADMINISTRATIVES Najla

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369 LES SANCTIONS FISCALES ADMINISTRATIVES Najla
Les sanctions fiscales administratives
LES SANCTIONS FISCALES ADMINISTRATIVES
Najla ABDEDDAIEM &
Sameh KOUBÂA
Enseignantes à la Faculté
de Droit de Sfax
Le système fiscal tunisien est pour l'essentiel un système
déclaratif. Or, le bon fonctionnement d'un tel système est subordonné
de façon étroite à la sincérité avec laquelle les contribuables
s'acquittent de leurs obligations déclaratives. Dans ces conditions, les
sanctions fiscales tiennent un rôle déterminant dans le système fiscal
dans la mesure où elles constituent une condition nécessaire à la pleine
efficacité du système de contrôle1. L'élaboration d'un arsenal de
sanctions est, en effet, « une condition nécessaire pour garantir
l'exécution des obligations mises à la charge du contribuable»2.
La question des sanctions fiscales est placée en première ligne
des problèmes les plus sensibles, mais aussi les plus passionnants,
concernant l'impôt. Ceci résulte du fait que le sujet est réputé «
austère, rébarbatif, rebutant par sa technicité et sa complexité »3.
Dans le vocabulaire juridique, la notion de sanction peut revêtir une
double définition. Selon une conception restrictive, les sanctions sont
réservées aux seules mesures répressives destinées à punir et à
réprimer. Dans une conception plus large, le terme de sanction désigne
toute mesure même réparatrice, justifiée par la violation d'une
obligation, tout moyen destiné à assurer le respect et l'exécution
effective d'un droit ou d'une obligation4. Le dispositif des sanctions
fiscales regroupe des sanctions pénales et des sanctions
1
2
3
4
J. PAULTRE DE LAMOTTE, " Les sanctions fiscales dans le système fiscal
français: présentation d'ensemble", RFFP n° 65/ 1999, p.9.
Guy GEST, "Non cumul et modulation, les limites de droit interne au processus
de pénalisation des sanctions administratives", RFFP 1999, n°65, p. 71.
Guy GEST, Avant propos de la RFFP: numéro spécial relatif aux sanctions
fiscales, n°65/ 1999.
G. CORNU, Vocabulaire juridique, Association Henri CAPITANT, 2ème éd.
PUF. 1990.
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Les sanctions fiscales administratives
administratives. En droit tunisien, ni la nature de l’infraction, ni la
nature de la sanction ne permet de les distinguer. Il nous paraît plus
indiqué de s’en tenir au critère organique pour distinguer les sanctions
pénales des sanctions administratives.
Par sanctions fiscales pénales, on entend les sanctions
infligées par le juge pénal dont la finalité est exclusivement répressive.
En effet, la répression pénale sanctionne la violation de l'ordre public
en ce qui constitue le fonctionnement de l'organisation de la société5.
Ainsi, les peines désignent "ce châtiment édicté par la loi pénale pour
prévenir et réprimer l'atteinte à l'ordre social"6 .
En revanche, la sanction administrative est une sanction
infligée par une autorité administrative7. Ce qui fait la différence entre
les deux types de sanctions, c’est l’organe habilité à conduire et à
mener à terme le processus répressif8.
Selon la doctrine, la sanction administrative est synonyme de
« pénalité » pour la distinguer de « la peine » qui est exclusivement
criminelle9. Elle a pour fonction, à côté de sa fonction répressive, une
fonction de réparation d'un préjudice subi par le Trésor public à cause
de l'inobservation des obligations fiscales. L'administration fiscale
sanctionne les atteintes portées aux finances publiques constituant un
domaine spécifique à protéger reposant sur une organisation
particulière10.
Néanmoins, la notion de sanction fiscale administrative doit
être distinguée de celle de pénalité. Cette dernière désigne "un terme
5
6
7
8
9
10
Conclusions du commissaire du gouvernement LOULOUM, DF, 1997, n° 24,
comm. 660, cité par B. PLAGNET, Réflexions sur les pénalités fiscales,
mélanges en l'honneur de H. AYADI, CPU, 2000, p 752.
G. CORNU, Vocabulaire juridique.
N. BACCOUCHE, "Les problèmes juridiques et pratiques posés par la
différence entre le droit criminel et le droit administratif pénal", Revue
internationale de Droit Pénal, 1988, p.437.
N. BACCOUCHE, article précité, p. 430.
JOĂO MARCELLO DE ARÚJO JÚNIOR, "Les problèmes juridiques et
pratiques posés par la différence entre le droit criminel et le droit administratif
pénal", Revue internationale de Droit Pénal, 1988, p 125.
Conclusions du commissaire du gouvernement LOULOUM, DF, 1997, n° 24,
comm. 660, cité par B. PLAGNET, article précité.
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Les sanctions fiscales administratives
générique sous lequel la législation et la jurisprudence désignent
toutes les sanctions pécuniaires édictées par les lois et prononcées par
toutes les autorités compétentes".11Le terme pénalité, qui désigne
uniquement les sanctions pécuniaires, ne rend suffisamment pas
compte de toute la réalité des sanctions fiscales administratives au
sens stricte de l'expression. En effet, ces dernières tendent à couvrir,
outre les sanctions désignées comme telles par la législation, une
multitude de mesures : le retrait des avantages fiscaux, l'exclusion des
marchés publics, le retrait du régime forfaitaire, la confiscation, la
saisie des marchandises et des moyens de transport et la vente des
objets saisis.
Toutefois, conférer à l'administration le pouvoir de prononcer
des sanctions n'a été admis, que pour répondre aux impératifs
d'efficacité. En effet, " l'universalité de l'impôt confère à la répression
un caractère de masse, rendant pratiquement impossible l'exercice de
la fonction répressive à titre principal par le juge"12.
Dès lors, les enjeux très divers se focalisent en premier lieu sur
la question évidemment primordiale des droits et garanties du
contribuable lors de l'application des sanctions administratives. En
effet, il ne faut pas oublier que la sanction administrative est
l'expression de cette tendance profonde vers le renforcement de
l'autorité de l'Etat, tendance qui entraîne une diminution des garanties
individuelles d'où, la méfiance envers l'autorité administrative en
matière de répression13. D'ailleurs, la législation antérieure à l'entrée
en vigueur du CDPF, avait prévu plusieurs sanctions administratives
manifestement excessives qui étaient assimilées, dans une large
mesure, à des sanctions pénales prononcées par le juge sans qu'un
minimum de garanties ne soit respecté14.
11
12
13
14
CHRETIEN cité par B. NEEL, "Les pénalités fiscales et douanières",
Economica 1992, p.7.
G. GEST, "Non cumul et modulation, les limites de droit interne au processus
de pénalisation des sanctions administratives", article précité, p.68.
M. DE JUGLART, "Les sanctions administratives dans la législation récente",
JCP 1942, n°7.
En effet, on ne peut pas méconnaître la complexité du dispositif en vigueur
jusqu'à l'année 2002 qui, bien qu'il avait pour objet de répondre à des
comportements particuliers différents, il n'en reste pas moins que la gestion d'un
tel dispositif était très complexe pour l'administration d'autant plus qu'il est pour
371
Les sanctions fiscales administratives
L'ancienne législation fiscale avait souvent recouru à des
techniques de renvoi allant du renvoi simple qui s'effectue entre les
articles des mêmes textes, au renvoi en cascade où le texte de
référence renvoi à d'autres textes. Cette situation a poussé les pouvoirs
publics à repenser le dispositif répressif en matière fiscale.
Ainsi, dans un souci de simplification des sanctions fiscales, le
législateur tunisien a promulgué le CDPF en 2000. Par la consécration
d'un chapitre entier relatif aux sanctions fiscales administratives, le
législateur a-t-il réussi à mettre fin à l’éparpillement et à la lourdeur de
ces sanctions? (I) En outre, le pouvoir reconnu à l'administration d'infliger des sanctions qui est de nature à contribuer à "la création et au
développement de ce qu'on peut appeler un pseudo-droit pénal"15 estil entouré des garanties nécessaires au profit des contribuables? (II).
I- DIVERSITE DES SANCTIONS FISCALES
ADMINISTRATIVES
Compte tenu de la diversité des obligations fiscales et de la
variété du préjudice qui peut en résulter pour le Trésor public, le
législateur a multiplié les sanctions administratives afin de disposer
d'un châtiment de sanctions de nature à prévenir les manquements16.
Néanmoins, l'effort d'unification de telles sanctions n'a été que
partiellement accompli lors de l’adoption du CDPF (A). En effet,
certaines sanctions administratives échappent encore au code et
demeurent éparpillées dans d'autres textes juridiques de différentes
valeurs (B). Certaines mesures sanctionatrices prévues par le CDPF et
d’autres textes, peuvent être en outre assimilées à des sanctions
administratives (C).
Un rapide inventaire des sanctions fiscales administratives
permet de constater que l'essentiel de ces sanctions vise le patrimoine
du contrevenant.
15
16
une large part ignoré des contribuables. Cette méconnaissance conduit à ce que
le rôle de dissuasion que doit avoir le dispositif de sanction ne joue pas
pleinement son rôle.
M. WALINE, Traité de droit administratif, 9ème édition ,1963.
J. PAULTRE DE LAMOTTE, article précité, p. 12.
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Les sanctions fiscales administratives
A- Les sanctions administratives prévues par le CDPF
L'administration fiscale est dotée de pouvoirs lui permettant de
contraindre le contribuable à exécuter ses obligations dans les délais et
selon les conditions prévues par les textes17. Pour atteindre ces
résultats, le législateur a réservé un chapitre pour les sanctions fiscales
administratives qui sont de nature pécuniaire.
Dans les articles 81 à 88 constituant le chapitre premier intitulé
« sanctions fiscales administratives » du titre trois du CDPF relatif
aux sanctions fiscales, le législateur se contente d'énumérer ces
sanctions sans toutefois donner un critère précis pour les définir. Selon
le CDPF, ces sanctions se traduisent exclusivement soit par des
« pénalités de retard » soit par « des pénalités ». Par ce terme
générique de pénalité, on entend toute sanction pécuniaire édictée par
les lois et prononcées directement par l’administration fiscale18. Il
s’agit d’une indemnité allouée au Trésor, en réparation d’un préjudice
financier en raison de l’inobservation des obligations fiscales.
Ces pénalités sont ainsi automatiques et exécutoires dans la
mesure où elles ne sont ni conditionnées par l’établissement de procès
verbaux19 ni subordonnées aux décisions judiciaires. La simple
constatation matérielle de l’infraction est suffisante pour entraîner
l’application des pénalités sans avoir à rechercher si le contribuable
est de bonne ou de mauvaise foi. Les pénalités sont constatées par
l’agent compétent qui exerce ses fonctions dans le service des impôts
où le contribuable devrait remplir ses obligations fiscales ou bien par
le vérificateur habilité à exercer le droit de contrôle dans la
circonscription territoriale visée.
Le CDPF a énuméré
suivantes:
17
18
six types de pénalités qui sont les
J-C. RICCI, Le pouvoir discrétionnaire de l'administration fiscale, Thèse de
doctorat Aix-Marseille, 1977, p.371.
CHRETIEN cité par B. NEEL, op.cit, p 7.
‫ " ان ﻣﺎ ﻳﺤﺪد ﻃﺒﻴﻌﺔ اﻟﻤﺨﺎﻟﻔﺎت هﻮ ﻃﺮق ﻣﻌﺎﻳﻨﺘﻬﺎ و ﺗﺘﺒﻌﻬﺎ و اﻟﻤﺤﺎآﻢ اﻟﻤﺘﻌﻬﺪة ﺑﻬﺎ ﻟﺬﻟﻚ ﺗﻢ ﺗﺨﺼﻴﺺ‬19
‫اﻟﺒﺎب اﻻول ﻟﻠﻌﻘﻮﺑﺎت اﻟﺠﺒﺎﺋﻴﺔ اﻻدارﻳﺔ اﻟﻤﺘﻤﺜﻠﺔ ﻓﻲ اﻟﺨﻄﺎﻳﺎ اﻻدارﻳﺔ اﻟﺘﻲ ﻻ ﺗﺴﺘﻮﺟﺐ ﺗﺤﺮﻳﺮ ﻣﺤﻀﺮ‬
‫ اﻣﺎ اﻟﻌﻘﻮﺑﺎت‬.‫ﺑﺸﺎﻧﻬﺎ واﻟﺘﻲ ﻳﺘﻢ ﻣﻌﺎﻳﻨﺘﻬﺎ و ﺗﺘﺒﻌﻬﺎ ﻃﺒﻖ اﺟﺮاءات اﻟﺘﻮﺿﻴﻒ اﻟﻤﺘﻌﻠﻘﺔ ﺑﺎﺳﺎس اﻻداء‬
‫ ﻣﺪاوﻻت ﻣﺠﻠﺲ‬."‫اﻟﻮاردة ﺑﺎﻟﺒﺎب اﻟﺜﺎﻧﻲ ﻓﻬﻲ ﺗﻌﺎﻳﻦ ﺑﻤﺤﻀﺮ و ﻳﺘﻢ ﺗﺘﺒﻌﻬﺎ ﻟﺪى اﻟﻤﺤﺎآﻢ اﻟﺠﺰاﺋﻴﺔ‬
.2000 ‫ ﺻﻔﺤﺔ‬2000 ‫ ﺟﻮﻳﻠﻴﺔ‬26 ‫ ﺟﻠﺴﺔ ﻳﻮم اﻻرﺑﻌﺎء‬39 ‫اﻟﻨﻮاب ﻋﺪد‬
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Les sanctions fiscales administratives
1-Les pénalités de retard exigibles en cas de paiement tardif et
spontané de l’impôt, liquidées aux taux de 0.5%20 du montant de
l'impôt par mois ou fraction de mois de retard21 au lieu de 3% en
matière de retenues à la source et de 1.25% pour les autres cas22. La
computation de la période de retard commence à partir du premier jour
qui suit l’expiration du délai légal imparti pour le paiement de l’impôt
et jusqu’à la fin du mois au cours duquel ce paiement est intervenu23.
Ces pénalités de retard se comptent donc par mois entier. Une fraction
de mois est considérée comme un mois entier.
Pour les droits d’enregistrement dus sur les jugements et arrêts,
on constate que le deuxième paragraphe de l'article 87 du CDPF a
réservé une autre méthode de computation du délai. En effet, le point
de départ pour le décompte de la période de retard est constitué par le
premier jour du deuxième mois suivant celui au cours duquel les
parties au procès ont reçu la notification par le receveur des finances,
du montant des droits exigibles sur la décision de justice en question.
Le montant de la pénalité de retard ne peut être selon l’article
86 du CDPF inférieur à 5 dinars par déclaration déposée en retard « au
titre de chaque impôt »24. On peut penser que le minimum de pénalité
est dû par déclaration et non par impôt25. En effet, l'article 86 du
CDPF précise que le minimum de cette pénalité est dû « même en
l'absence de montant d'impôt exigible».
2-Les pénalités de retard pour défaut de déclaration des
revenus ou bénéfices exonérés ou soumis à une retenue à la source
libératoire de l’impôt, donne lieu à l'application d'une pénalité de
retard égale à 1% des revenus et bénéfices concernés26. L'application
de cette pénalité est soumise aux mêmes règles de décompte des
délais prévues par l'article 87 du CDPF. Il s’agit là d’une reconduction
d’une importante règle adoptée par l’article 69 de la loi de finances du
20
21
22
23
24
25
26
Le taux de 0,75% est remplacé par le taux de 0,5% en vertu de l'article 46 de la
loi de finances pour l'année 2007.
L'article 81 du CDPF.
L'ancien article 73 du CIR.
Article 87 du CDPF.
Note commune N° 4/ 2001 BODI p 65.
N. BACCOUCHE, Cours de droit fiscal, p.252.
L'article 85 du CDPF.
374
Les sanctions fiscales administratives
26 décembre 1994 et dont le but est de contrôler et de quantifier les
avantages fiscaux. Cette règle a le grand avantage d’entretenir chez le
contribuable le sens de l’obligation fiscale d’autant plus que les
avantages fiscaux sont en règle générale provisoires27.
Cette pénalité s'applique, pour les entreprises bénéficiant du
régime fiscal des entreprises totalement exportatrices, à compter du
premier jour du 4ème mois qui suit celui au cours duquel prend fin le
délai imparti pour la déclaration des dits revenus ou bénéfices28.
3- Les pénalités de retard exigibles par suite à l’intervention
des services de contrôle fiscal sont nettement alourdies par rapport à
celles exigées en cas de paiement spontané. Or, la question reste à
savoir ce qu’il faut entendre par intervention des services du contrôle
fiscal. Est-ce qu’un simple rappel par courrier du contribuable de ses
obligations l’invitant à régulariser sa situation avec le fisc constitue
une intervention des services fiscaux et entraîne l’augmentation des
taux des pénalités ou bien l’intervention des services fiscaux signifie
l’engagement d’un contrôle fiscal fut-il sommaire ?29
Il semble, d’après une doctrine administrative qui paraît
favorable au contribuable30, que l’intervention des services fiscaux est
matérialisée par la notification d’un arrêté de taxation d’office, par la
reconnaissance de dettes ainsi que par les contraintes rendues
obligatoires. Toutefois, cette doctrine est relative à l’application
anticipée des pénalités fiscales prévues par le CDPF à partir du 1er
janvier 2001 avec les particularités propres à cette transition.
Selon le professeur Néji BACCOUCHE, une simple invitation
du contribuable pour régulariser sa situation fiscale n’est pas une
intervention qui déclenche la majoration des pénalités. En revanche,
une vérification même préliminaire au sens de l’article 37 du CDPF
constitue une intervention des services du contrôle qui doit entraîner la
majoration des pénalités31.
27
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29
30
31
N. BACCOUCHE, Cours de droit fiscal (non encore publié).
L'article 85 alinéa n° 2 du CDPF.
N. BACCOUCHE, Cours de droit fiscal (non encore publié).
N. BACCOUCHE, Cours de droit fiscal (non encore publié).
N BACCOUCHE, Cours de droit fiscal (non encore publié).
375
Les sanctions fiscales administratives
Ces pénalités sont liquidées au taux de 0,75% 32 par mois ou
fraction du mois lorsque trois conditions sont remplies
cumulativement 33:
- le paiement de l’impôt s’effectue sur la base d’une reconnaissance de
dette
- la reconnaissance de dette intervient avant la fin de la phase de
conciliation judiciaire prévue par l’article 60 du code
- le paiement de l’impôt exigible s’effectue dans un délai de trente
jours de la date de reconnaissance de dette.
Ainsi, les rédacteurs du CDPF cherchent à inciter le contribuable mais aussi à le dissuader pour qu’il reconnaisse la dette fiscale34.
En revanche, ces mêmes pénalités de retard sont liquidées au taux de
1.25 % dans les autres cas, c'est-à-dire lorsque l’une des trois
conditions précitées n’est pas remplie. La période de retard est
décomptée à partir du 1er jour qui suit l’expiration du délai légal pour
le paiement de l’impôt et jusqu’à la fin du mois au cours duquel a eu
lieu soit la notification des résultats de vérification soit la souscription
d'une reconnaissance de dette suite à une vérification sommaire35.
4- Les pénalités pour défaut ou insuffisance de la RAS de
l’impôt conformément à la loi en vigueur. Elles sont encore plus
sévères que celles que nous venons d’énumérer puisqu'il s'agit selon
l’article 83 du CDPF d'une pénalité égale au montant des retenues non
effectuées ou insuffisamment effectuées. En cas de récidive la pénalité
est doublée.
5-Les pénalités pour défaut d’acquittement du droit de
timbre ou acquittement insuffisant diffèrent selon que le paiement du
droit de timbre s’effectue sur déclaration ou selon une autre modalité
de paiement36. Dans le cas où le paiement ne s’effectue pas sur
32
33
34
35
36
L'article 82 tel que modifié par la loi de finances pour l'année 2007.
Note commune n°4 – Texte DGI n° 2001/11.
N. BACCOUCHE, Cours de droit fiscal (non encore publié).
Note commune n°4 – Texte DGI n° 2001/11.
Selon l’article 121 du CDET : « Le paiement du droit de timbre s’effectue selon
l’un des procédés suivant : 1-par l’apposition de timbres mobiles ;
2-par l’utilisation de papier ayant une valeur déterminée ;
3-au moyen du visa du receveur des Finances ;
4-sur déclaration».
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Les sanctions fiscales administratives
déclaration, le défaut d’acquittement du droit au timbre ou son
acquittement d’une manière insuffisante donne lieu à l’application
d’une pénalité de 50% au lieu du double du montant du droit non
acquitté, et ce, en sus du paiement en principal37. Lorsque le paiement
du droit de timbre se fait sur déclaration, les pénalités de retard des
articles 81 et 82 sont applicables au défaut ou insuffisance
d’acquittement de ce droit exigible sur les factures, les billets de
transport international aérien et maritime de personnes et les certificats
de visite technique des moyens de transport et les cartes des opérations
de recharge du téléphone.
6- les pénalités de retard exigibles sur les créances fiscales
constatées dans les écritures du receveur des finances. Elles sont
liquidées, selon l'article 88 du CDPF, au taux de 0,75% par mois ou
fraction de mois de retard du montant de la créance en principal. Le
retard est calculé à partir du premier jour qui suit l’expiration d’un
délai de quatre vingt dix jours à compter de la date de la signature par
le contribuable de la reconnaissance de dette ou de la notification de
l’arrêté de taxation d’office ou d’un jugement ou d’un arrêt de justice
et jusqu'à la fin du mois au cours duquel est intervenu le paiement de
l’impôt. Cette pénalité ne peut intervenir qu'une fois la dette est
constatée auprès du comptable public.
Ces différentes pénalités s’appliquent selon l’article 1er du
CDPF à tous les impôts, droits, taxes, redevances et autres
prélèvements fiscaux au profit de l’Etat dont notamment :
- IR et IS ainsi que les retenues à la source, avances et acomptes au
titre des dits impôts.
- La TVA et la RAS y afférente, le droit de consommation et les
autres taxes sur le chiffre d’affaires,
- Les droits d’enregistrement
- La taxe unique sur les assurances,
- Les droits de timbre payables sur états,
- La taxe de formation professionnelle,
- La contribution au fonds de promotion du logement pour les
salariés,
37
L’article 49 de loi de finances pour l’année 2007 portant modification de
l’article 84 du CDPF.
377
Les sanctions fiscales administratives
- Les prélèvements au profit du fonds de développement de la
compétitivité dans le secteur de l’agriculture et de la pêche (la taxe
sur les produits de la pêche, la taxe sur le maïs et le soja, la taxe
sur les fruits et les légumes, les taxes sur les viandes).
Toutefois, certains prélèvements fiscaux qui sont perçus au
profit de l’Etat, sont explicitement exclus par l’article premier du
champ d’application du CDPF. Il s’agit des droits de douane et autres
droits, impôts et taxes perçus à l’importation qui demeurent régis par
les sanctions prévues dans le code des douanes.
En outre, concernant les taxes
perçues au profit des
collectivités publiques locales ne sont pas passibles des sanctions
administratives prévues par le CDPF mais de celles prévues par le
CFL, à l’exception de celles relatives à la taxe hôtelière, à la TCL,
taxe sur les établissements à caractère industriel, commercial ou
professionnel et au droit de licence sur les débits de boissons, qui sont
rattachées en matière de sanctions à l’IR et à l’IS en vertu des
dispositions des articles 40, 45 et 63 du CFL.
B- La diversité des sanctions administratives en dehors du
CDPF
Le CDPF portant unification des sanctions fiscales n’a pas
réussi à mettre fin à la diversité et à l’éparpillement de ces sanctions.
Outre les sanctions fiscales administratives applicables en matière de
fiscalité locale (1), d’autres sanctions particulières prévues par le
décret n° 97/ 1368 du 24 juillet 199738 s’ajoutent au CDPF (2).
1- Les sanctions administratives prévues par le CFL
Le code de la fiscalité locale a prévu des sanctions fiscales
administratives de nature pécuniaire pour les taxes sur les immeubles
bâtis et non bâtis ainsi que la taxe sur les spectacles.
En matière de taxes sur les immeubles bâtis, l'article 19 du
code de la fiscalité locale prévoit deux types de pénalités: une pénalité
de recouvrement et une pénalité d'assiette.
38
Il s'agit du décret n° 97/1368 du 24 juillet 1997 relatif au régime fiscal des
produits relevant des numéros 22-03 à 22-08 du tarif des droits de douane.
378
Les sanctions fiscales administratives
Une pénalité de recouvrement au taux proportionnel égale à
1% par mois ou fraction de mois de retard liquidée sur la base des
sommes constatées auprès des receveurs des finances au titre de la
TIB. La computation des délais commence à partir du premier jour du
deuxième mois suivant celui au cours duquel un avis du receveur des
finances a été notifié au contribuable selon les formes légales pour le
paiement de la taxe à sa charge. La pénalité n’est pas exigible en cas
de paiement de la taxe durant l’année de sa constatation.
Une pénalité d'assiette au taux fixe de 25 dinars applicable à
tout contribuable qui n’a pas souscrit ou qui a souscrit de manière
insuffisante ou inexacte soit les déclarations exigées durant les trente
jours qui suivent le commencement des opérations du recensement
soit des déclarations des changements intervenus au niveau de la
composition ou de l'affectation de l'immeuble soit les déclarations de
transfert de propriété39.
La pénalité n’est pas appliquée lorsque le contribuable procède
à la régulation de sa situation dans un délai d’un mois à partir de la
date de l’avis qui lui a été notifié dans les formes légales.
Ces pénalités d'assiette et de recouvrement s’appliquent
également en matière de taxe sur les immeubles non bâtis en vertu de
l’article 33 du CFL qui fait renvoi à l’article 19 du même code.
S'agissant de la taxe sur les spectacles, le défaut de paiement
de cette taxe donne lieu, selon l'article 51 du CFL, à l’application
d’une pénalité égale au double du droit exigible.
2- Les sanctions particulières prévues par le décret du 24
juillet 1997
Le décret du 24 juillet 1997 a prévu plusieurs sanctions
particulières qui répriment les producteurs, les conditionneurs, les
commerçants de ces produits, les fabricants de la capsule fiscale sur
les vins et tout détenteur de ces produits. Ces sanctions peuvent
prendre différentes formes :
39
Articles 14, 15 et 17 du CFL.
379
Les sanctions fiscales administratives
- des amendes excessives de tarif fixe variant entre 0, 100
dinars et 50 dinars40 ou d'une amende au taux proportionnel qui peut
atteindre 200 % des droits et taxes dus sur les vins représentés par les
capsules falsifiées,
- la confiscation de la marchandise et du matériel de
fabrication. La confiscation est un type original de peine pécuniaire
inhérente au corps du délit, c'est-à-dire, à l'objet de fraude saisi qui
affecte moins le prévenu que la fraude elle-même41. Elle n'est édictée,
en général, que lorsqu'elle constitue en fait, une mesure d'ordre ou de
sécurité publique.
- la saisie de la marchandise et des moyens de transport ainsi
que la vente des objets saisis en cas de non paiement des droits et
taxes et de l’amende.
Toutefois, ledit décret n'a pas précisé si la confiscation ou la
saisie de la marchandise devrait porter sur toutes les marchandises ou
sur seulement ceux qui constituent le corps du délit.
Quoi qu'il en soit, la saisie et la confiscation sont des mesures
conservatoires prises par l'administration fiscale pour répondre aux
impératifs financiers de l'Etat. Néanmoins, le caractère répressif de ces
sanctions prédomine sur le caractère de réparation du préjudice subi
par le Trésor public. Ces sanctions administratives sont ressenties
comme de véritables peines par le condamné. D’où se pose le
problème de la nature juridique de ces sanctions.
En effet, ce décret suscite beaucoup d’ambiguïté et
d’incertitude quant à la nature des sanctions qu’il a prévues. On peut
penser que la nature de la sanction dépend de la volonté du
contrevenant. Si ce dernier procède au paiement des droits, taxes et de
l’amende42 dès la constatation de l’infraction par l’administration on
peut estimer dans cette hypothèse qu’il s’agit d’une sanction
administrative. Ces sanctions sont prononcées par «les agents de
l’administration fiscale dûment habilités» soit lors du contrôle
40
41
42
L'article 31 du décret.
S. LAVIGNE, "Le cas particulier des sanctions en matière de contributions
indirectes", RFFP n° 65/ 1999, p.128/129.
Article 8, 17, 31 du décret.
380
Les sanctions fiscales administratives
intermittent ou continu de la production des alcools, des boissons
alcoolisées, des vins et des bières et de la fabrication de la capsule
fiscale sur les vins, soit sur la voie publique et dans les établissements
ouverts au public et dans tous autres lieux auxquels lesdits agents
peuvent accéder légalement43.
En revanche, le défaut de paiement des droits, taxes et de
l’amende amène l’administration à dresser un procès verbal, dans ce
cas il revient logiquement au juge de prononcer la sanction appropriée.
C- Les mesures assimilées aux sanctions administratives
Les sanctions assimilées aux sanctions administratives
constituent en réalité des mesures administratives44 conçues « pour
améliorer le recouvrement de l’impôt »45. Tout comme les pénalités,
ces mesures administratives sanctionatrices ont un caractère dissuasif.
Mais, à la différence des pénalités qui sont de nature pécuniaire, ces
mesures se traduisent par des sanctions privatives de droit tels que
l’exclusion de la participation aux marchés publics (a) et le retrait des
régimes de faveur (b).
a- L’exclusion de la participation aux marchés publics
Selon l’article 110 du CDPF, la participation aux marchés de
l’Etat, des collectivités locales ainsi que des établissements et
entreprises publics et organismes soumis au contrôle de l’Etat est
subordonnée à la production d’une attestation délivrée par les services
de l’administration fiscale indiquant que l’intéressé a déposé toutes
ses déclarations fiscales échues et non prescrites. Cette mesure n’est
que la reconduction de l’article 18 de la loi de finances pour la gestion
1977 reproduit dans l’article 89 du CIR avant la promulgation du
CDPF. Lorsque l’intéressé n’a pas déposé toutes ses déclarations
fiscales qu’il soit des impôts directs ou indirects, il sera exclu de la
43
45
Les articles 38 et 39 et 41du décret.
‫" و ﻳﻨﺠﺮ ﻋﻦ ارﺗﻜﺎب اﻟﻤﺨﺎﻟﻔﺎت اﻻدارﻳﺔ ﺗﻄﺒﻴﻖ ﺧﻄﺎﻳﺎ ﻣﺎﻟﻴﺔ او اﺟﺮاءات ادارﻳﺔ ﻣﺨﺘﻠﻔﺔ آﺎﻟﺤﺮﻣﺎن‬
‫ ﺟﻠﺴﺔ ﻳﻮم‬39 ‫ ﻣﺪاوﻻت ﻣﺠﻠﺲ اﻟﻨﻮاب ﻋﺪد‬."‫ﻣﻦ ﺧﺪﻣﺎت ادارﻳﺔ او ﻣﻦ اﻻﻧﺘﻔﺎع ﺑﺎﻣﺘﻴﻠﺰات ﺟﺒﺎﺋﻴﺔ‬
.1872 ‫ ﺻﻔﺤﺔ‬2000 ‫ ﺟﻮﻳﻠﻴﺔ‬26 ‫اﻻرﺑﻌﺎء‬
Le chapitre III du CDPF est intitulé « Mesures pour améliorer le
recouvrement de l’impôt ».
381
44
Les sanctions fiscales administratives
participation au marché46. L’exclusion peut être temporaire ou
définitive.
b- Le retrait des régimes de faveur
Le retrait est défini comme étant « l’opération d’annulation
d’un acte administratif créateur des droits »47. Il consiste en une
décision par laquelle une autorité administrative revient sur l’un des
actes pris antérieurement. Le retrait est automatique au cas où
l’intéressé cesse de remplir les conditions indispensables pour le
bénéfice d’un régime fiscal de faveur48. Il est notamment le cas du
retrait du régime forfaitaire et du retrait des avantages fiscaux.
-Le retrait du régime forfaitaire :
En cas de non respect de l’une des conditions visées au
paragraphe 1er de l’article 44 IV du CIR, le ministre des finances ou «
toute personne déléguée par le ministre des finances à cet effet ayant
la qualité de chef d'administration centrale ou régionale des impôts»
est en droit de retirer le régime forfaitaire par décision motivée.
-Le retrait des avantages fiscaux :
Selon l'article 111 du CDPF, les avantages fiscaux ne peuvent
être octroyés qu’aux personnes qui ont déposé toutes leurs
déclarations fiscales échues et non prescrites ou à celles qui sont
redevables de dettes fiscales au profit de l’Etat ayant fait l’objet
d’échéancier de recouvrement par le receveur des finances.
Le retrait de l’avantage aux personnes qui n’ont pas respecté
l’échéancier susvisé s’effectue par décision du ministre des finances
ou de la personne déléguée par le ministre des finances à cet effet.
Cette même mesure de retrait des avantages fiscaux a été déjà
prévue par l'article 65 du CII à l’encontre de l’investisseur suite à
l’inexécution de ses engagements. Le ministre des finances est
l’autorité chargée de retrait des avantages fiscaux par arrêté motivé
46
47
48
V. S. KOUBAA, Le contrat de droit privé et le droit fiscal, mémoire de DEA,
FDS, 2005, p 31.
Y. BEN ACHOUR, Droit administratif, Tunis, CPU, 2000, p 348.
N. JARBOUI, Les pouvoirs du ministre des finances, Mémoire de mastère,
FDS, 2006/2007.
382
Les sanctions fiscales administratives
après avis ou sur proposition des services concernés et ce après
l'audition des bénéficiaires par ces services.
II- L'EVOLUTION CONTRASTEE DES SANCTIONS
FISCALES ADMINISTRATIVES
Dans un souci de rationalisation du système fiscal tunisien, le
législateur a choisi d’introduire certains assouplissements et
allègements dans le dispositif des sanctions fiscales administratives
(A). Cette évolution vers la rationalisation a été accompagnée d'une
certaine affirmation des droits et garanties au profit du contribuable
inspirée essentiellement du droit pénal (B).
A- La tendance vers l’assouplissement des sanctions
administratives
Une simple comparaison entre les sanctions pécuniaires
prévues par le CDPF promulgué en 2000 et celles prévues par la
législation antérieure, permet de constater le choix des pouvoirs
publics d'alléger les sanctions fiscales administratives.
Le législateur a, d'une part, limité les sanctions administratives
aux pénalités de retard tout en supprimant leur cumul avec les
pénalités d’assiette exigibles sur intervention du contrôle fiscal. Jugées
très excessives, ces pénalités d’assiette étaient liquidées au taux de
10% des droits dus lorsque le contribuable est de bonne foi, de 20%
en cas de fraude et de 30 % en cas de fraude répétée49. Par la
promulgation du CDPF, les pénalités d’assiette ont été supprimées.
L'exclusion de l'administration du processus de la répression
en matière de pénalités d'assiette permet d'éviter l'arbitraire éventuel
puisque l’administration ne dispose plus du pouvoir discrétionnaire
pour l'appréciation de la bonne ou de la mauvaise foi du contribuable.
Néanmoins, l'appréciation de la mauvaise foi par le juge est,
désormais accompagnée d'une aggravation des amendes prononcées
par le juge. En effet, les pénalités de retard, qui ont un caractère
automatique et accessoire à l’imposition, pouvaient se cumuler avec
des sanctions pénales prononcées par le juge. L'objectif affiché par les
pouvoirs publics est celui de "l'efficacité" aussi bien au niveau de
49
L'article 74 du CIR abrogé à compter du 1er janvier 2001 en vertu des
dispositions des articles 46, 47 et 48 de la loi de finances du 25/ 12 /2000.
383
Les sanctions fiscales administratives
l'application de la loi fiscale qu'au niveau de l'amélioration des
ressources fiscales50.
Le CDPF a réduit, d'autre part, les taux des pénalités de retard
en vue de faciliter et de rendre spontané l’accomplissement par les
contribuables de leur devoir fiscal. Ces pénalités ont, dans certains
cas, un caractère raisonnable et sont même moins graves que celles
infligées par le juge pénal, lorsqu’elles sont proportionnelles aux
infractions commises. Ainsi, on a souvent constaté l’existence dans le
CDPF d’une échelle de pénalités prévoyant des taux différents selon la
qualification pouvant être donnée au comportement en cause (selon
qu’il y ait paiement ou non et selon que le paiement est spontané ou
suite à l’intervention des services fiscaux). En revanche, les pénalités
de retard calculées par mois ou fraction de mois peuvent être parfois
d'un montant plus important que les sanctions pécuniaires infligées par
les juridictions répressives.
Conscient de cette situation, le législateur a réduit davantage,
par la loi de finances pour la gestion 200751, les pénalités de retard de
0.25 % afin d’inciter le contribuable à déclarer ses impôts et de
régulariser sa situation fiscale52. Désormais, les pénalités de retard
sont de 0.5% au lieu de 0.75% en cas de paiement tardif et spontané
de l'impôt53 ; de 0.75% au lieu de 1% lorsque le paiement de l'impôt
est constaté suite à l'intervention des services du contrôle fiscal dans
un délai maximum de trente jours à compter de la date de la
reconnaissance de dette et à condition que la reconnaissance de dette
intervienne avant l'achèvement de la phase de la conciliation
51
52
53
‫" ﺑﺎﻋﺘﺒﺎر ان اﻟﺘﺠﺮﺑﺔ ﻗﺪ اﺛﺒﺘﺖ ﻣﺤﺪودﻳﺔ اﻟﻌﻘﻮﺑﺎت اﻟﺠﺒﺎﺋﻴﺔ اﻹدارﻳﺔ ﻓﻲ إﺛﻨﺎء اﻟﻤﻄﺎﻟﺐ ﺑﺎﻷداء ﻋﻦ‬
‫ارﺗﻜﺎب اﻟﻤﺨﺎﻟﻔﺎت اﻟﺠﺒﺎﺋﻴﺔ و ﻻدﺧﺎل ﻣﺰﻳﺪ ﻣﻦ اﻟﻨﺠﺎﻋﺔ ﻋﻠﻰ اﻟﻌﻘﻮﺑﺎت اﻟﻤﻨﻄﺒﻘﺔ ﻋﻠﻴﻬﺎ اﺿﻔﻰ‬
‫اﻟﻤﺸﺮوع اﻟﺼﺒﻐﺔ اﻟﺠﺰاﺋﻴﺔ ﻋﻠﻰ ﺟﻞ اﻟﻤﺨﺎﻟﻔﺎت اﻟﺠﺒﺎﺋﻴﺔ و اﺧﻀﻊ ﺗﺘﺒﻌﻬﺎ ﻻﺣﻜﺎم ﻣﺠﻠﺔ اﻻﺟﺮاءات‬
.1872 ‫ ﺻﻔﺤﺔ‬2000 ‫ ﺟﻮﻳﻠﻴﺔ‬26 ‫ ﺟﻠﺴﺔ ﻳﻮم اﻻرﺑﻌﺎء‬39 ‫ ﻣﺪاوﻻت ﻣﺠﻠﺲ اﻟﻨﻮاب ﻋﺪد‬."‫اﻟﺠﺰاﺋﻴﺔ‬
Loi n° 2006-85 du 25 décembre 2006, portant loi de finances pour l’année
2007, JORT, n° 103 du 26 décembre 2006, p 4380 et s.
L’exposé de motifs du projet de la loi de finances pour l’année 2007.
Article 46 de la loi de finances pour l’année 2007 portant modification de
l’article 81 du CDPF.
384
50
Les sanctions fiscales administratives
judiciaire54 et de 0.75 % au lieu de 1% pour les créances constatées
dans les écritures du receveur des finances55.
S’agissant du droit de timbre, la pénalité au double, appliquée
quelle que soit les modalités de paiement, même si elle a été excusable
compte tenu du montant relativement modéré du droit de timbre56,
n'était pas à l'abri des réductions apportées par la loi de finances pour
l'année 2007.57
En dehors de ces cas, la nouvelle loi de finances n’a pas
apporté des modulations pour les autres pénalités qui nous paraissent
excessives et disproportionnées. Il en est notamment le cas du défaut
ou de l’insuffisance de retenue à la source qui est passible d'une
pénalité égale au montant des retenues non effectuées ou
insuffisamment effectuées. En effet, le doute est parfois permis sur
l’existence ou non d’une retenue à la source. Partant d’une
interprétation possible des textes, le contribuable pourrait
légitimement penser que la retenue n’est pas légalement due auquel
cas, le défaut ou l’insuffisance n’est pas de mauvaise foi58. Le
législateur aurait dû modérer la pénalité et la moduler en fonction de
l’existence ou non d’une volonté délibérée du contribuable. Le
doublement du montant de la pénalité en cas de récidive paraît, selon
le professeur BACCOUCHE, non appropriée d’autant plus que le
recours à la notion pénale de récidive accrédite le caractère « pénal »
et répressif de cette sanction prononcée par l’administration59.
Par ailleurs, si l'application du dispositif des sanctions fiscales
a pour objectif d'assurer le respect de la législation fiscale, la
renonciation au recouvrement de certaines créances fiscales s'avère
parfois nécessaire pour introduire certaine souplesse à un tel système.
Ainsi, le législateur a recouru à l'amnistie fiscale en 1987 et
récemment en 2006. L'amnistie fiscale est une technique qui enlève
54
55
56
57
58
59
Article 48 de la loi de finances pour l’année 2007 portant modification de
l’article 82 du CDPF.
Article 51 de la loi de finances pour l’année 2007 portant modification de
l’article 88 du CDPF.
N. BACCOUCHE, Cours de droit fiscal (non encore publié).
Voir le paragraphe: "A- Les sanctions administratives prévues par le CDPF".
N. BACCOUCHE, Cours de droit fiscal (non encore publié).
N. BACCOUCHE, Cours de droit fiscal (non encore publié)..
385
Les sanctions fiscales administratives
pour l'avenir, tout caractère délictueux aux infractions fiscales en
interdisant à leur propos toute poursuite aussi bien pénale que
fiscale60. Elle accorde ainsi à ceux qui n'avaient pas honoré leurs
obligations fiscales l'opportunité pour se mettre en règle avec la loi
fiscale sans se voir infliger des sanctions.61
B- La rationalisation insuffisante des garanties inspirées du
droit pénal
Les sanctions administratives doivent être entourées de
garanties inspirées du droit pénal surtout lorsque la sanction revêt le
caractère d’une punition et non pas d'une simple réparation du
préjudice subi par le Trésor public. La jurisprudence européenne et le
conseil constitutionnel français avaient admis que les sanctions
fiscales administratives pouvaient avoir une « coloration pénale »
lorsque leur application implique l'appréciation du comportement du
contribuable62. Il faut distinguer dès lors les pénalités automatiques et
celles qui comportent une appréciation du comportement du
contribuable; entre les pénalités fiscales qui poursuivent un but
répressif et visent à empêcher l’amplification des agissements
concernés et celles qui ont pour objet la seule réparation pécuniaire
d'un préjudice63.
Le caractère « quasi-pénal » de ces sanctions administratives a
été fondé, soit sur les dispositions de l’article 6 de la Convention
Européenne des Droits de l’Homme, soit sur les dispositions de
l’article 8 de la Déclaration des droits de l’Homme de 178964.
Récemment, l’ordonnance française n° 2005-1512 du 7 décembre
200565 a posé une séparation claire entre les intérêts de retard, simple
60
61
62
63
64
65
G. KLEIN, La répression de la fraude fiscale: Etude sur le particularisme du
droit pénal des impôts, thèse Nancy, 1975, p.262.
N. ABDEDDEYEM, L'amnistie fiscale de 2006, RTF n°6.
B. PLAGNET, article précité, p 747.
F. SUDRE et Ch. JEAN-MONNET, L'onde de choc de l'article 6 de la CEDH
en matière de sanctions fiscales, La semaine Juridique édition n° 43, 22 octobre
1997, II comm. 22935.
B. PLAGNET, article précité, p 747.
L'ordonnance n° 2005-1512 du 7 décembre 2005 (Journal Officiel 8 décembre
2005), relative à des mesures de simplification en matière fiscale et à
l'harmonisation du régime des pénalités.
386
Les sanctions fiscales administratives
prix du temps, et les sanctions fiscales qui s'appliquent en cas
d'infraction66. L’évolution actuelle du droit français conduit à
l’application, de plus en plus, aux sanctions administratives ayant une
coloration pénale, des principes qui relèvent du droit pénal67. Selon le
conseil constitutionnel français, ces principes « ne concernent pas
seulement les peines prononcées par les juridictions répressives mais
s'étendent à toute sanction ayant le caractère d'une punition même si
le législateur a laissé le soin de la prononcer à une autorité de nature
non judiciaire »68.
A l’instar du droit français, la doctrine tunisienne a estimé
nécessaire de rendre « la répression administrative une matière
attractive aspirant vers elle des règles suivies et appliquées devant le
juge répressif ».69 En effet, la limitation de l’arbitraire administratif
devrait être affirmée à travers l'intégration des principes fondamentaux
régnant dans le droit pénal, tels que : le principe de l’application
immédiate de la loi la plus douce, le principe de non cumul des peines
de même nature, le principe de la légalité des délits et des peines, le
principe de nécessité et de la proportionnalité des peines aux
infractions commises, ainsi que le principe du respect des droits de la
défense. Or, ces grands principes ne trouvent pas leur pleine
expression en droit fiscal.
1- Le principe de l’application immédiate de la loi la plus
douce
Les dispositions des articles 46, 47 et 48 de la loi n° 2000
portant loi de finances pour la gestion 2001 ont prévu l’application
anticipée, à compter du premier janvier 2001, des dispositions du
CDPF relatives aux pénalités de retard dans le paiement de l’impôt et
ce, «nonobstant les dispositions contraires prévues». En réalité,
l’application anticipée de ces pénalités n'est que l'expression du
66
67
68
69
Simplifications diverses et aménagement du régime des pénalités, La Semaine
Juridique Entreprises et Affaires n° 50, 15 décembre 2005, act. 373.
B. PLAGNET, article précité, p 755.
CC français, 29 décembre 1989, n° 89-268 DC : Droit fiscal, 1990, n° 2-3,
comm. 57. Le conseil a repris ces principes dans une décision en date du 28
décembre 1990, n°90-285 DC : Droit Fiscal, 1991, n° 2-3, comm. 48.
M-S. BEN AISSA, "La répression administrative", communication au colloque
de droit pénal des affaires, Tunis le 5, 6, 7 mai 1994.
387
Les sanctions fiscales administratives
principe de l’application immédiate de la loi la plus douce, principe
essentiel du droit pénal qui est prévu par l'article premier du code
pénal70.
2- Le principe de non cumul des peines de même nature
Avec la suppression des pénalités d'assiette depuis 2001, le
législateur tunisien a rompu définitivement avec une situation très
gênante pour les contribuables qui ont été souvent obligés d'assumer le
cumul entre les pénalités d'assiette et les pénalités de retard.
La suppression du cumul entre les pénalités d'assiette et celles
de retard traduit la transposition du principe de non cumul des peines
de même nature appliqué en matière pénale. Selon ce principe de
« non bis in idem », une même personne ne peut être punie deux fois
pour le même fait. Néanmoins, cette transposition n'est que partielle
dans la mesure où le législateur a maintenu l'application des pénalités
de retard lors de l’établissement ainsi que lors du recouvrement de
l’impôt.
Par ailleurs, on peut soulever la question du cumul des
sanctions du décret 1997 qui ont une coloration pénale (amendes,
confiscations, saisies) avec non seulement les sanctions pénales
prévues de l’article 180 et 181 du code pénal mais encore avec les
sanctions fiscales prévues par l’article 104 du CDPF. Ainsi, on peut
remarquer la multiplicité des textes incriminant la même infraction et
qui donne lieu à l’application de plusieurs sanctions.
En droit fiscal français, le problème du cumul des sanctions
administratives ayant le caractère « quasi-pénal » avec les sanctions
pénales s’est posé71. La jurisprudence française a indiqué clairement
que la règle de « non bis in idem » ne pouvaient concerner les
pénalités fiscales qui ont un caractère « quasi-pénal »72, mais le
70
71
72
" Nul ne peut être puni qu’en vertu d’une disposition d’une loi antérieure. Si
après le fait, mais avant le jugement définitif, il intervient une loi plus favorable
à l'inculpé, cette loi est seule appliquée."
B. PLAGNET, article précité, p.747.
CE du 31 mars 1995, n° 164008, Section, SARL Auto-industrie Méric : RJF
5/1995, p. 375, n° 623, concl. ARRIGHI DE CASANOVA, p. 326.
388
Les sanctions fiscales administratives
conseil constitutionnel a rappelé que le montant total des sanctions ne
pouvait être disproportionné par rapport à la gravité de l’infraction73.
3- Le principe de légalité des délits et des peines
Certes l’article 34 de la constitution n’a pas réservé le
monopole de l’édiction des sanctions au pouvoir législatif dans la
mesure où l'alinéa 5 permet au chef de l’Etat d’intervenir en matière
de contraventions qui ne sont pas sanctionnées par des peines
privatives de libertés. Ainsi, le président de la République s’est
intervenu pour édicter des sanctions en matière fiscale sur la base
d’une délégation fiscale accordée par la loi de finances pour la gestion
de 198974. Sur la base de cette délégation, le Président de la
République a édicté le décret du 11 octobre 1993 qui a été modifié par
la suite par le décret du 1997. Outre les problèmes de
constitutionnalité et de légalité, le décret de 1997 a posé un problème
en matière répressive dans la mesure où il n’a pas pris le soin de
déterminer la nature des infractions (contraventions ou délits)
sanctionnées par des amendes, confiscation et saisie en sus des
sanctions d’emprisonnement et d’amendes prévues par le code pénal.
En effet, ces mêmes sanctions du décret 1997 figurent dans l’échelle
des peines prévue par l’article 5 du code pénal. Néanmoins, est-ce
que ces infractions sont suffisantes à elles seules pour appeler la
compétence du législateur ?
Par ailleurs, peut-on accepter que le pouvoir exécutif soit doté
du triple pouvoir de réglementation, de contrôle et de répression ce qui
porte atteinte à un grand principe celui de la séparation des pouvoirs.
Cette confusion des autorités est étrangère au droit pénal judiciaire qui
73
74
CC 30 décembre 1997, n° 97-395 DC : RJF 2/1998, p. 116, n° 182 :
« Considérant que, toutefois, lorsqu’une sanction administrative est susceptible
de se cumuler avec une sanction pénale, le principe de proportionnalité
implique qu’en tout état de cause le montant global des sanctions
éventuellement prononcées ne dépasse pas le montant le plus élevé de l’une des
sanctions encourues ; qu’il appartiendra donc aux autorités administratives et
judiciaires compétentes de veiller au respect de cette exigence ».
L'article 86 de la loi de finances pour l’année 1989 a accordé au profit du
Président de la République, le pouvoir de déterminer les taux et les modalités de
perception des impôts, droits et taxes relatifs aux secteurs de loterie, de paris et
activités similaires et aux produits repris au tarif douanier sous les rubriques n°
22-03 22-05 à 22-09.
389
Les sanctions fiscales administratives
repose sur la séparation des trois fonctions et leur attribution à des
autorités distinctes afin de protéger la personne réprimée et lui
constituer une garantie fondamentale75.
4 - Le principe du respect des droits de la défense76
La personne exposée à une sanction administrative doit avoir
la faculté de faire valoir ses moyens de défense oralement ou par écrit
avant le prononcé de la sanction77. Le droit de la défense est l'une des
garanties fondamentales pour le contribuable. L'application d'un tel
principe en droit fiscal tunisien, exige la motivation des sanctions
infligées par l'administration fiscale d'une part (a) ainsi que le droit du
contribuable de contester les sanctions administratives devant le juge
d'autre part (b).
a- La motivation des sanctions fiscales
Le principe général étant que l’administration n’est pas tenue
de motiver ses actes78, le législateur tunisien a pris le soin d'exiger que
certaines sanctions fiscales administratives, même réparatrices,
doivent être motivées. Contrairement à la jurisprudence française qui
considère que les intérêts de retard ne nécessitent pas d’être motivés,
l’obligation de motivation des pénalités de retard exigibles par suite à
75
76
77
78
N. BACCOUCHE, "Les problèmes juridiques et pratiques posés par la
différence entre le droit criminel et le droit administratif pénal", article précité,
p. 429.
En effet, aux termes de l’article 8 de la déclaration des droits de l’homme et du
citoyen, «une peine ne peut être infligée qu'à la condition que soient respectés
le principe de légalité des délits et des peines, le principe de nécessité des
peines, le principe de non-rétroactivité de la loi pénale d'incrimination plus
sévère ainsi que le principe du respect des droits de la défense». Ce même
article précise que «ces exigences ne concernent pas seulement les peines
prononcées par les juridictions répressives mais s'étendent à toute sanction
ayant le caractère d'une punition, même si le législateur a laissé le soin de la
prononcer à une autorité de nature non-juridictionnelle». Décision n° 90/285
DC du 28 décembre 1990.
J. GAUTIER, Les problèmes juridiques et pratiques posés par la différence
entre le droit criminel et le droit administratif pénal, Revue Internationale de
Droit Pénal, vol 59, 1988, p 411.
TA, REP, 31 déc. 1984, Ben Salah / Ministre du transport, R. p. 502
‫"و ﺣﻴﺚ اﻧﻪ ﻣﻦ اﻟﻤﺴﻠﻤﺎت ﻓﻲ ﻓﻘﻪ اﻟﻘﻀﺎء اﻹداري إن اﻹدارة ﻏﻴﺮ ﻣﻠﺰﻣﺔ ﺑﺘﻌﻠﻴﻞ ﻗﺮاراﺗﻬﺎ إﻻ إذا آﺎن‬
"‫اﻟﻘﺎﻧﻮن ﻳﻮﺟﺐ ﻋﻠﻴﻬﺎ ﺑﻴﺎن أﺳﺒﺎب ﺗﻠﻚ اﻟﻘﺮارات ﻓﻴﻜﻮن ﻓﻘﺪان اﻟﺘﻌﻠﻴﻞ ﻋﻴﺒﺎ ﻳﺸﻮب اﻟﻘﺮار‬
390
Les sanctions fiscales administratives
l’intervention des services fiscaux découle en droit tunisien de l’article
50 du CDPF. En effet, l’arrêté de taxation d’office qui doit être motivé
enveloppe déjà les pénalités et par conséquent la motivation de cet
arrêté engendre la motivation des pénalités79.
Pour le retrait des avantages fiscaux, le législateur exige dans
l’article 65 du CII la motivation de l’arrêté du ministre des finances
après avis ou sur proposition des services concernés et ce après
l’audition des bénéficiaires par ces services. Cette exigence de
motivation, répond au souci du législateur d'offrir au contribuable la
possibilité de faire valoir ses droits.
En dehors de ces deux cas, l’exclusion de l’obligation de
motivation des actes administratifs, notamment lorsque la sanction
administrative ait le caractère d’une punition et non pas de réparation,
n'est pas justifiable dans un Etat de droit qui exige la transparence et
la sincérité des actes qui émanent de l'administration.
Par ailleurs, une décision administrative est motivée
« lorsqu’elle énonce elle-même les raisons de droit et de fait sur
lesquelles son auteur la considère comme justifiée et donc ce qui l’a
déterminé »80. L’administration doit exposer clairement les
considérations de fait et de droit qui constituent le fondement de sa
décision. Toutefois, même lorsque le législateur impose la motivation
des actes administratifs, cette obligation se trouve déformée par la
pratique administrative. En se référant à la pratique de l’administration
fiscale tunisienne, on constate que les arrêtés de taxation d’office ne
comportent pas en eux-mêmes de motivation81 et ne précisent pas dans
la plupart des cas la nature des pénalités infligées.
Il revient donc au juge de vérifier l’existence et la perfection
des motifs qui seront de nature à justifier le choix de l’administration.
A défaut d’une telle motivation, le juge de l’impôt pouvait prononcer
la décharge intégrale des pénalités. Toutefois, le juge fiscal n’a pas
censuré, selon une voie autorisée « cette pratique administrative qui
79
80
81
Voir les articles 53 et 54 du CDPF.
B. PACTEAU, Le juge de l’excès de pouvoir et les motifs de l’acte
administratif, thèse Clermont-Fernand, 1977, p. 46.
N.BACCOUCHE, Le problème de la motivation de l’arrêté de taxation d’office,
RTF, 2005, n° 2, p 35 et s.
391
Les sanctions fiscales administratives
met en échec la tentative législative de rationaliser le pouvoir de la
taxation d’office »82.
b- Le droit de contestation des sanctions administratives
devant le juge
Le recours du contribuable au juge afin de contester le bien
fondé et l'application de la sanction administrative constitue une
garantie fondamentale du droit de la défense. Lors du contrôle des
sanctions fiscales, le juge vérifie, outre la motivation, les règles de
compétence, les procédures et les formalités exigées par la loi, la base
légale et le taux appliqué pour chaque infraction83. L’inobservation de
certaines obligations à la charge de l’administration constitue un vice
qui permet au contribuable d’obtenir décharge (annulation) des
sanctions prononcées à son encontre.
L'annulation des sanctions administratives par le juge fiscal ne
semble pas poser de problèmes, néanmoins, est ce que le juge peut
substituer à l'administration sa propre décision? Le principe de la
séparation des autorités administratives et judicaires peut-il empêcher
le juge de procéder à cette opération de substitution ?
Dans le cas où le législateur a déterminé une échelle des
peines, le juge a le pouvoir de substituer à une pénalité prononcée par
l'administration une autre jugée plus proportionnelle à l'infraction
commise.84 En effet, l’application des pénalités nécessite une
qualification préalable des agissements du contribuable. Cette
qualification établie par l’administration doit être contrôlée par le juge
pour vérifier si la pénalité appliquée est proportionnelle au
comportement du contribuable. Or, quel est le juge compétent pour
exercer un tel contrôle?
Le législateur n'a pas prévu un régime propre aux sanctions
administratives. Toutefois, le caractère accessoire de ces dernières par
82
83
84
N.BACCOUCHE, Le problème de la motivation de l’arrêté de taxation d’office,
article précité, p 48.
Voir H. DJEBBI, Les sanctions fiscales en Tunisie, Mémoire de DEA, Faculté
des Sciences Juridiques, Politiques et Sociales, 1999/2000.
Selon certaines décisions de l'ancienne CSTO: affaire n°40/94 du 16
janvier19997/ affaire n° 14/95 du 22 avril 1998 / décision du 6 juin 1959 /
décision du 19 juillet 1960.
392
Les sanctions fiscales administratives
rapport aux droits dus en principal a pour conséquence essentielle
l'assimilation de leur régime contentieux à celui des impositions
principales85.
Par ailleurs, l'extrême hétérogénéité du régime du contentieux
limite sérieusement le droit du contribuable de contester ses sanctions.
Le partage du contentieux des sanctions administratives entre le
tribunal de première instance86, le tribunal cantonal87 et la cour
d’appel88 est une source de complexité pour les justiciables d’autant
plus que le critère de partage des compétences entre ces différents
tribunaux est dans certains cas loin d’être précis89. L’absence d'un
régime contentieux simple, clair et unique entraîne l’insécurité
juridique du contribuable.
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N. BRIGITTE et B. MARTINE, Juge pénal et juge fiscal, in. Le juge fiscal,
Economica, 1990, p 85.
Le tribunal de première instance est compétent pour le contentieux d’assiette
des pénalités prévues par le CDPF et qui sont relatives aux impôts relevant du
champ d’application du même code.
Le contentieux de l’assiette des pénalités en matière de fiscalité locale relève de
la compétence du juge cantonal.
Les pénalités de recouvrement, incluant celles prévues par le CDPF, relève de la
compétence de la cour d’appel en premier et en dernier ressort et ce
conformément à l’article 27 du CCP.
La détermination du juge compétent dans le contentieux des pénalités en
matière de TCL est fonction du montant de ladite taxe.
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