333 CHRONIQUE DES AVIS DU CONSEIL CONSTITUTIONNEL

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333 CHRONIQUE DES AVIS DU CONSEIL CONSTITUTIONNEL
Chronique des avis du Conseil Constitutionnel
CHRONIQUE DES AVIS DU CONSEIL CONSTITUTIONNEL
TUNISIEN EN MATIERE FISCALE ET FINANCIERE1
Mootez GARGOURI*
Maître-assistant à la faculté de
droit de Sfax
Pourquoi une chronique des avis du conseil constitutionnel
tunisien en matière fiscale et financière ?
D’abord, la publication au Journal Officiel des avis du conseil
constitutionnel2 rend ses avis accessibles au chercheur et facilite leur
exploitation pour l’enrichissement de la recherche en matière
juridique. Les décisions et avis du conseil constitutionnel présentent
désormais une source importante non seulement pour le droit
constitutionnel, mais aussi pour les autres branches de droit qui ne
cessent de se constitutionnaliser, dont notamment le droit fiscal et
financier.
Ensuite, suivant une interprétation exégétique des textes
applicables au conseil constitutionnel et notamment de l’article 72 de
la constitution qui détermine les domaines d’intervention du conseil
en matière d’examen de la constitutionnalité, il semble que la matière
financière et fiscale ne fait partie ni du domaine de la saisine
1
*
2
Publiés au Journal Officiel de la République Tunisienne durant l’année 2004 et
le premier semestre de 2005.
E-mail : [email protected]
Selon l’article 28 de la loi organique n° 2004 -52 du 12 Juillet 2004 relative au
conseil constitutionnel : « A l’exception du cas où l’avis du conseil concerne les
questions prévues au paragraphe 3 de l’article 72 de la constitution, les avis du
conseil constitutionnel et sa déclaration visée par l’article 25 de la présente loi
sont publiables au journal officiel de la République Tunisienne ». L’utilisation
du terme « publiable » peut a priori poser un problème concernant le caractère
obligatoire ou non de la publication. Toutefois, selon la version arabe du texte,
qui fait foi.
‫ ﻣﻦ اﻟﺪﺳﺘﻮر‬72 ‫" ﻣﺎ ﻋﺪا ﺣﺎﻟﺔ ﺻﺪور اﻟﺮأي ﻓﻲ اﻟﻤﺴﺎﺋﻞ اﻟﻤﻨﺼﻮص ﻋﻠﻴﻬﺎ ﺑﺎﻟﻔﻘﺮة اﻟﺜﺎﻟﺜﺔ ﻣﻦ اﻟﻔﺼﻞ‬
‫ ﻣﻦ هﺬا اﻟﻘﺎﻧﻮن ﺑﺎﻟﺮاﺋﺪ اﻟﺮﺳﻤﻲ‬25 ‫ﺗﻨﺸﺮ ﺁراء اﻟﻤﺠﻠﺲ اﻟﺪﺳﺘﻮري وﺗﺼﺮﻳﺤﻪ اﻟﻤﻨﺼﻮص ﻋﻠﻴﻪ ﺑﺎﻟﻔﺼﻞ‬
".‫ﻟﻠﺠﻤﻬﻮرﻳﺔ اﻟﺘﻮﻧﺴﻴﺔ‬
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Chronique des avis du Conseil Constitutionnel
obligatoire du conseil3, ni de celui de la saisine facultative4. La
matière fiscale et financière semble être immunisée contre tout
examen de constitutionnalité. Or, cette exclusion d’une matière aussi
importante du domaine d’intervention du conseil constitutionnel
tunisien est difficilement explicable non seulement d’un point de vue
purement juridique, mais aussi d’un point de vue politique5.
Enfin, même avec cette exclusion supposée des lois fiscales et
financières du domaine d’intervention du conseil constitutionnel, cela
n’empêche qu’en consultant les avis émis par le conseil
constitutionnel et publiés au JORT depuis 2004, l’on constate que
plusieurs avis se rapportent directement ou indirectement à la matière
fiscale et financière. Certains de ces avis se rapportent aux
conventions et accords internationaux ayant un contenu fiscal ou
financier. Certains avis concernent les projets de loi de finances alors
que d’autres avis concernent des projets de lois ayant un contenu
fiscal ou financier, mais qui ont fait l’objet d’une saisine du conseil
puisqu’ils comportent des dispositions ayant une relation avec des
matières couvertes par le domaine de la saisine obligatoire du conseil
comme les obligations, la procédure devant les différents ordres de
juridictions, les engagements financiers de l’Etat ou la détermination
des crimes et délits et les peines qui leur sont applicables.
1-2-046 / Avis n° 2004 – 42 du conseil constitutionnel,
concernant le projet de loi organique complétant la loi organique
3
4
5
6
Le domaine de la saisine obligatoire du conseil constitutionnel est déterminé par
l’article 72 de la constitution dans ses paragraphes 1 et 2.
Le domaine de la saisine facultative du conseil est déterminé par l’article 72 de
la constitution dans son paragraphe 3.
Selon une certaine opinion, « L’exclusion supposée des lois de finances ainsi
que des lois fiscales du domaine de la saisine obligatoire du conseil
constitutionnel est difficilement explicable compte tenu, non seulement de
l’importance de ces lois et de leur incidence directe sur le citoyen contribuable,
mais aussi de la volonté affirmée d’élargir le domaine de la saisine obligatoire
du conseil » N. BACCOUCHE, M. GARGOURI, « Observations sous l’avis
du conseil constitutionnel (LF. N°2004-43) concernant certaines dispositions du
projet de loi de finances pour l’année 2005 », Revue Tunisienne de Fiscalité,
N°3, 2005, p129.
Le premier numéro renvoie au numéro de l’avis, le second renvoie au semestre
de l’année au cours de laquelle l’avis a été publié au JORT, le dernier numéro
renvoie à l’année de publication de l’avis au JORT.
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Chronique des avis du Conseil Constitutionnel
n° 95-11 du 16 février 1995, relative aux structures sportives ;
JORT n° 98 du 7 décembre 2004, p 3337.
Dans cet avis, le conseil constitutionnel, après avoir reconnu le
principe de sa compétence, a précisé que considérant que l’article
unique du projet de loi organique, objet de la saisine du conseil, vise à
ajouter un article 7 bis à la loi organique n°11 de l’année 1995 dont
la teneur est la suivante : « Les structures sportives doivent
obligatoirement tenir leur comptabilité conformément à la législation
comptable en vigueur y compris les règles de traitement comptable y
afférentes ». Le conseil a considéré que ces dispositions ne sont pas
contraires à la constitution et donc compatibles avec le texte
constitutionnel.
2-2-04/ Avis LF. n° 2004-43 du conseil constitutionnel,
concernant certaines dispositions du projet de loi de finances pour
l’année 2005 ; JORT n° 105 du 31 décembre 2004, p 3555.
Après avoir admis le principe de la saisine partielle d’un projet
de loi, le conseil constitutionnel a déclaré que les dispositions du
projet de loi de finances, objet de la saisine du conseil, ne posent pas
de problèmes de constitutionnalité sauf l’insertion des articles 28 ; 29
et 30 concernant la détermination des procédures de constitution de
sociétés en ligne et de l’article 89 permettant aux comptables de
bénéficier d’un nouveau délai, sous conditions complémentaires, pour
régulariser leur situation au regard de la loi portant organisation de la
profession des comptables, qui ne sont pas conformes avec les articles
28 et 36 de la constitution. De même, les dispositions de l’article 62
ter qui seront ajoutées au code de la comptabilité publique, en vertu de
l’article 80 du projet de loi de finances, ont été déclarées par le conseil
constitutionnel incompatibles avec l’article 14 de la constitution.
Pour les articles 28, 29, 30 et 89 du projet de loi de finances
pour l’année 2005, ils ont été déclarés par le conseil non conformes
avec la constitution non pas à raison de leur contenu, mais du fait
même de leur insertion dans le projet de loi de finances qui ne doit, en
principe, contenir que des dispositions financières. Or, les articles 28,
29, 30 et 89 n’ont pas un caractère financier et ne peuvent, à ce titre,
être adoptés selon les procédures et les délais spécifiques pour
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Chronique des avis du Conseil Constitutionnel
l’adoption des lois de finances prévus par les articles 28 et 36 de la
constitution.
Pour l’article 80 du projet de loi de finances pour l’année
2005, il a été déclaré par le conseil incompatible avec la constitution
parce que d’une part, si le transfert automatique au profit de l’Etat de
la propriété des bijoux déposés comme garantie d’un prêt peut être
justifié par l’expiration d’une longue période et le non paiement des
prêts et de leurs intérêts. Toutefois, ces justifications ne sont pas
suffisantes pour priver les bénéficiaires d’un prêt sur gage des
garanties nécessaires pour éviter ce transfert et pour leur permettre de
payer ce que leur doit le trésor.
L’incompatibilité de cet article 80 avec la constitution découle,
d’autre part de la délégation faite au Ministre des finances pour
déterminer les procédures d’application de l’article 62 ter par arrêté
alors même que les garanties que nécessite la limitation du droit de
propriété font partie de la substance même de ce droit et relèvent, par
conséquent, de la compétence exclusive du pouvoir législatif.
3-2-04/ Avis LF. n° 2004-46 du conseil constitutionnel,
concernant certaines dispositions du projet de loi de finances pour
l’année 2005 ; JORT n° 105 du 31 décembre 2004, p 3555.
Dans cet avis, le conseil constitutionnel a été saisi des
dispositions qui ont été déclarées non conformes ou incompatibles
avec la constitution en vertu de son avis LF.n° 2004-43. Le conseil
constitutionnel a constaté que l’article 80 du projet de loi de finances
n’est plus incompatible avec l’article 14 de la constitution puisque
l’obligation d’information et de publicité consacrée par le législateur
constitue une garantie suffisante du droit de propriété des bénéficiaires
de prêts sur gage. Par conséquent, les dispositions de l’article 62 ter du
code de la comptabilité publique, ajoutées par l’article 80 du projet de
loi de finances, sont devenues désormais compatibles avec l’article 14
de la constitution.
Le conseil a constaté aussi que toutes les dispositions, objet de
la saisine, concernent les ressources et les dépenses publiques ainsi
que les opérations financières de l’Etat, d’où la conformité de
leur insertion dans le projet de loi de finances avec les articles 28 et 36
de la constitution.
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Chronique des avis du Conseil Constitutionnel
4-2-04/ Avis n° 2004-48 du conseil constitutionnel,
concernant le projet de loi relatif aux procédures de constitution
de sociétés en ligne ; JORT n° 105 du 31 décembre 2004, p 3555.
Cet avis du conseil constitutionnel concerne des dispositions qui
ont été disjointes du projet de loi de finances pour la gestion de 2005.
Elles ont fait l’objet d’une loi ordinaire qui a été soumise au conseil
constitutionnel dès lors qu’elles concernent les obligations qui font
partie du domaine de la saisine obligatoire du conseil en vertu de
l’article 72 paragraphe 1 de la constitution.
Dans cet avis, le conseil a considéré que l’ensemble des
conditions de constitution des sociétés en ligne ainsi que les
obligations qui pèsent sur ce type de sociétés ne sont pas contraires
avec la constitution et donc compatibles avec ses dispositions.
1-1-05/ Avis n° 2004-44 du conseil constitutionnel,
concernant le projet de loi portant approbation de l’accord conclu
le 26 juillet 2004 entre le gouvernement de la République
Tunisienne et la banque européenne d’investissement relatif à
l’établissement du siège de la représentation de la banque
européenne d’investissement en Tunisie ; JORT n° 6 du 21 janvier
2005, p.197.
Dans cet avis, le conseil constitutionnel a retenu le principe de
sa compétence en le fondant sur le fait que la convention, objet de la
saisine du conseil, accorde des immunités juridictionnelles pour
certaines personnes. Le conseil considère que les immunités ont une
relation avec la procédure devant les différents ordres de juridiction,
elles doivent revêtir, selon l’article 34 de la constitution, la forme de
loi. Le conseil constitutionnel ajoute, toujours en relation avec la
recherche d’un fondement pour la reconnaissance de sa compétence,
qu’il ressort de l’article 72 de la constitution que la procédure devant
les différents ordres de juridictions fait partie du domaine de la saisine
obligatoire du conseil.
Sur le fond, le conseil constitutionnel s’est affronté au
problème de l’attribution, par la convention objet de la saisine, au
profit de la représentation de la banque européenne d’investissement
en Tunisie, à son président et à ses membres ainsi qu’aux membres de
leurs familles qui sont sous leur autorité des immunités
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Chronique des avis du Conseil Constitutionnel
juridictionnelles et des avantages fiscaux sur le territoire tunisien. Or,
l’article 16 de la constitution tunisienne dispose que le paiement de
l’impôt et la contribution aux charges publiques, sur la base de
l’équité, constituent un devoir pour chaque personne.
Pour résoudre ce problème, le conseil constitutionnel a
considéré qu’il est possible pour l’Etat souverain, dans le cadre de
l’exercice de ses relations internationales, d’accepter, en vertu d’une
convention, d’accorder des avantages, comme des exemptions fiscales
ou autres, pour les étrangers qui sont sur le territoire national pour
l’exercice d’une mission diplomatique ou pour travailler au sein d’une
organisation internationale.
Le conseil a ajouté, dans un autre considérant, non moins
important, que la souveraineté de l’Etat, consacrée notamment par
l’article premier de la constitution, suppose que l’Etat exerce son
pouvoir juridictionnel à l’égard de toute personne qui réside sur son
territoire. Toutefois, cet exercice n’empêche pas l’Etat d’accorder une
immunité juridictionnelle pour certains fonctionnaires d’organisations
internationales et des personnes sous leur autorité dans le but de
faciliter leur tâche dans le cadre de l’exercice, par l’Etat tunisien
souverain, de ses relations internationales.
2-1-05/ Avis n° 2004-45 du conseil constitutionnel,
concernant le projet de loi portant approbation d’un accord
relatif à l’encouragement de l’investissement conclu le 17 février
2004, entre le gouvernement de la République Tunisienne et le
gouvernement des Etats-Unis d’Amérique ; JORT n° 6 du 21
janvier 2005, p 197.
Après avoir retenu sa compétence, le conseil constitutionnel a
précisé que l’accord en question comporte des dispositions accordant
à une partie étrangère contractante des droits, exemptions et garanties
pour encourager l’investissement.
Le conseil ajoute que même si l’accord, objet de la saisine,
permet au contractant étranger de se prévaloir, dans le cadre de
l’exercice de sa souveraineté, de ses droits qui découlent de l’accord,
il n’en demeure pas moins que cela n’est pas en contradiction avec la
souveraineté de l’Etat tunisien consacrée par l’article premier de la
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Chronique des avis du Conseil Constitutionnel
constitution dès lors que l’exercice de ses droits se situent dans les
bornes et limites du droit international.
3-1-05/ Avis n° 2004-49 du conseil constitutionnel,
concernant le projet de loi portant modification de quelques
dispositions du code des sociétés commerciales ; JORT n°9 du 1er
février 2005, p 262.
Sur le plan de la compétence, le conseil constitutionnel s’est
déclaré compétent puisque le projet de loi qui lui est soumis concerne
les obligations, plus précisément les procédures de constitution des
sociétés et les obligations qui pèsent sur leurs fondateurs. Or, les
projets de lois relatifs aux obligations font partie de la saisine
obligatoire du conseil en vertu de l’article 72 de la constitution.
Sur le fond, et après avoir examiné l’ensemble des dispositions
du projet de loi objet de la saisine, qui concernent les procédures de
constitution des sociétés ainsi que les obligations qui pèsent sur leurs
fondateurs, le conseil a conclu à leur compatibilité avec le texte
constitutionnel.
4-1-05/ Avis n° 2004-51 du conseil constitutionnel,
concernant le projet de loi portant approbation d’une convention
entre le gouvernement de la République Tunisienne et le
gouvernement de l’Etat du Koweït relative à la promotion et à la
protection réciproques des investissements ; JORT n°9 du 1er
février 2005, p 262.
Dans cet avis, le conseil constitutionnel s’est reconnu
compétent pour examiner la convention dès lors qu’elle comporte des
dispositions relatives aux obligations ainsi qu’à la procédure devant
les différents ordres de juridictions, deux matières qui relèvent du
domaine de la saisine obligatoire du conseil constitutionnel en vertu
de l’article 72 de la constitution.
Sur le fond, le conseil constitutionnel n’a constaté aucune
inconstitutionnalité. Il a déclaré que toutes les dispositions de la
convention, qui ont déjà fait l’objet d’une approbation parlementaire,
ne sont pas contraires avec la constitution et donc compatibles avec le
dispositif constitutionnel.
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Chronique des avis du Conseil Constitutionnel
5-1-05/ Avis n° 2005-05 du conseil constitutionnel,
concernant le projet de loi portant approbation d’une convention
sur le transport routier de personnes et de marchandises et sur le
transit conclue le 27 mars 2004, entre le gouvernement de la
République Tunisienne et le gouvernement de la République
Arabe Syrienne ; JORT n° 19 du 8 mars 2005, p 614.
Selon le conseil constitutionnel, la convention, objet de la
saisine, comporte des dispositions relatives aux engagements
financiers de l’Etat qui sont des obligations et font partie ainsi du
domaine de la saisine obligatoire du conseil en vertu de l’article 72 de
la constitution. La convention ne pose aucun problème de
constitutionnalité sur le fond.
6-1-05/ Avis n° 2005 – 07 du conseil constitutionnel,
concernant le projet de loi portant approbation d’un accord sur le
transport routier de personnes et de marchandises et sur le transit
conclu, le 21 janvier 2004, entre le gouvernement de la République
Tunisienne et le gouvernement de la République du Mali ; JORT
n°19 du 8 mars 2005, p 614.
Pour le conseil constitutionnel, comportant des dispositions
relatives aux engagements financiers de l’Etat ainsi que certaines
dispositions à caractère législatif, il ne fait pas de doute que cet
accord concerne les obligations qui sont du domaine de la saisine
obligatoire en vertu de l’article 72 de la constitution. Il ne pose, sur le
fond, aucun problème de constitutionnalité.
7-1-05/ Avis n° 2005- 08 du conseil constitutionnel,
concernant le projet de loi portant approbation d’un accord
conclu, le 7 octobre 2003, entre le gouvernement de la République
Tunisienne et le gouvernement de la République Hellénique dans
le domaine des transports routiers de personnes et de
marchandises et de transit ; JORT n° 19 du 8 mars 2005, p 614.
Toujours suivant le même raisonnement, le conseil
constitutionnel a constaté que les dispositions de l’accord comportent
des règles relatives aux engagements financiers de l’Etat ainsi que
certaines règles à caractère législatif. Ces règles ont une relation avec
les obligations qui font partie du domaine de la saisine obligatoire du
conseil constitutionnel en vertu de l’article 72 de la constitution. Les
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Chronique des avis du Conseil Constitutionnel
dispositions de
constitutionnalité.
l’accord
ne
posent
aucun
problème
de
8-1-05/ Avis n° 2005–09 du conseil constitutionnel,
concernant le projet de loi portant approbation de la convention
entre le gouvernement de la République Tunisienne et le
gouvernement de la République du Soudan tendant à éviter la
double imposition et à prévenir l’évasion fiscale en matière
d’impôt sur le revenu ; JORT n° 19 du 8 mars 2005, p 614.
Dans cet avis, le conseil constitutionnel s’est reconnu
compétent en se référant à trois articles de la constitution à savoir les
articles 32, 34 et 72.
L’article 32 dispose que les traités portant engagement
financier de l’Etat et les traités contenant des dispositions à caractère
législatif ne peuvent être ratifiés qu’après leur approbation par la
chambre des députés.
L’article 34 précise que sont pris sous forme de lois, les textes
relatifs aux emprunts et engagements financiers de l’Etat ainsi qu’à
l’assiette, aux taux et aux procédures de recouvrement des impôts,
sauf délégation accordée au Président de la République par les lois de
finances et les lois fiscales.
L’article 72 stipule, dans son paragraphe premier, que le
conseil constitutionnel examine les projets de loi qui lui sont soumis
par le président de la république quant à leur conformité ou leur
compatibilité avec la constitution.
Toutefois, en se référant à ces trois articles, le conseil
constitutionnel a peut être omis de préciser à quel titre il a reconnu sa
compétence pour examiner les dispositions de cette convention. En
effet, il ne suffit pas de se référer à ces trois articles de la constitution
pour fonder la compétence du conseil. Le conseil constitutionnel
aurait dû préciser, au moins, que les dispositions relatives aux
engagements financiers de l’Etat ainsi qu’à la détermination de
l’assiette, des taux et des procédures de recouvrement des impôts
relèvent de la catégorie des projets de loi relatifs aux obligations et
font partie, à ce titre, du domaine de la saisine obligatoire du conseil
constitutionnel en vertu de l’article 72 de la constitution. Cette
solution pourrait neutraliser l’immunité « apparente » dont bénéficient
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Chronique des avis du Conseil Constitutionnel
les lois fiscales et financières contre tout examen de constitutionnalité
par le conseil constitutionnel.
Sur le fond, le conseil n’a relevé aucune inconstitutionnalité
dans les dispositions de la convention.
9-1-05/ Avis n° 2005-04 du conseil constitutionnel,
concernant le projet de loi portant approbation d’un accord
relatif à la promotion et à la protection des investissements entre
le gouvernement de la République Tunisienne et le gouvernement
de la République du Soudan ; JORT n° 21 du 15 mars 2005,
p. 741.
Dans cet avis, le conseil constitutionnel s’est déclaré
compétent pour examiner la convention puisque ses dispositions
concernent le domaine des obligations et la procédure devant les
différents ordres de juridictions qui font partie de la saisine obligatoire
du conseil en vertu de l’article 72 de la constitution. Sur le fond, le
conseil a conclu que les dispositions de la convention ne posent aucun
problème de constitutionnalité.
10-1-05/ Avis n° 2005 - 06 du conseil constitutionnel,
concernant le projet de loi portant approbation d’un accord et
d’un protocole conclu le 28 février 2002, entre la République
Tunisienne et la République d’Afrique du sud, relatifs à la
promotion et à la protection réciproques des investissements ;
JORT n° 21 du 15 mars 2005, p 741.
En se déclarant compétent, le conseil constitutionnel s’est
fondé essentiellement sur le contenu de l’accord et du protocole ayant
une relation avec les obligations et la procédure devant les différents
ordres de juridictions qui relèvent du domaine de la saisine obligatoire
du conseil en vertu de l’article 72 de la constitution. Concernant le
fond, le conseil n’a constaté aucune inconstitutionnalité dans les
dispositions de l’accord et du protocole, objet de la saisine.
11-1-05/ Avis n° 2005-19 du conseil constitutionnel
concernant le projet de loi portant approbation d’une convention
d’association portant sur l’établissement d’une zone de libre
échange conclue le 25 novembre 2004, entre la République
Tunisienne et la République de Turquie ; JORT n° 38 du 13 mai
2005, p 1063.
342
Chronique des avis du Conseil Constitutionnel
Le conseil constitutionnel s’est reconnu compétent pour
examiner cette convention du moment qu’elle comporte des
dispositions relatives aux obligations ainsi qu’à la procédure devant
les différents ordres de juridictions. Ces deux matières font partie du
domaine de la saisine obligatoire du conseil constitutionnel en vertu
de l’article 72 de la constitution.
Sur le fond, le conseil constitutionnel a constaté que le contenu
de la convention et de ses trois protocoles additionnels, faisant partie
intégrante de la convention, font référence dans plusieurs domaines à
l’accord général sur les tarifs douaniers et le commerce ainsi qu’aux
accords de l’organisation mondiale du commerce notamment en ce qui
concerne l’institution des droits de douane et des restrictions
quantitatives à l’importation, la normalisation, les monopoles d’Etat à
caractère commercial ainsi qu’à la lutte contre le dumping.
Le conseil a constaté que la République Tunisienne a déjà
ratifié ces traités suivant la procédure relative à la ratification des
traités internationaux d’où le caractère constitutionnel de toute
référence ultérieure à ces traités.
Le conseil a enfin conclu à la conformité de la convention,
objet de la saisine, et de ses protocoles additionnels avec les
dispositions constitutionnelles.
12-1-05/ Avis n° 2005-20 du conseil constitutionnel,
concernant le projet de loi portant approbation d’un accord de
libre échange entre la République Tunisienne et les Etats de la
Communauté Européenne de libre échange ; JORT n° 38 du 13
mai 2005, p 1063.
Le conseil constitutionnel a constaté que la convention, objet
de la saisine, fait partie du domaine de la saisine obligatoire du conseil
du moment que certaines de ses dispositions concernent les
obligations, la procédure devant les différents ordres de juridictions et
les principes généraux de la santé publique.
Sur le fond, deux questions ont attiré l’attention du conseil
constitutionnel. La première est relative à la commission mixte prévue
par l’article 40 de l’accord qui est investie du pouvoir de modifier les
annexes et les protocoles de l’accord. Le conseil a constaté que
l’accord a fixé les compétences ainsi que les procédures devant cette
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Chronique des avis du Conseil Constitutionnel
commission, il a ajouté que même si l’accord a accordé à cette
commission le pouvoir de modifier ou de réviser les annexes et
protocoles de l’accord, il n’a pas négligé de préciser, dans l’article 41,
que ces modifications doivent être soumises aux parties pour
approbation ou acceptation.
Le conseil constitutionnel précise enfin que : « Considérant
que la soumission aux règles prévues par l’accord concernant la
révision des dispositions contenues dans les annexes et protocoles est
précédé par la volonté souveraine de la partie tunisienne qui a ratifié
l’accord initial ».
La deuxième question qui a attiré l’attention du conseil
constitutionnel et qui a influencé son avis favorable est que l’accord,
objet de la saisine, renvoi dans certains domaines à l’accord général
sur les tarifs douaniers et le commerce ainsi qu’aux accords de
l’organisation mondiale du commerce tels que l’institution des droits
de douane et des restrictions quantitatives à l’importation, la
normalisation, les monopoles d’Etat à caractère commercial et la lutte
contre le dumping. Or, la Tunisie a déjà ratifié ces traités suivant la
procédure relative à la ratification des traités internationaux.
13-1-05/ Avis n° 2005-14 du conseil constitutionnel,
concernant le projet de loi portant approbation d’une convention
entre le gouvernement de la République Tunisienne et le
gouvernement du Burkina Faso en vue d’éviter les doubles
impositions en matière d’impôts sur le revenu ; JORT n° 43 du 31
mai 2005, p 1237.
Dans cet avis, le conseil constitutionnel s’est reconnu
compétent pour examiner la constitutionnalité de la convention dès
lors que certaines de ses dispositions concernent les engagements
financiers de l’Etat ainsi que la détermination de l’assiette, des taux et
des modalités de recouvrement de l’impôt. Selon le conseil, ce
contenu de la convention suffit pour déclarer le conseil constitutionnel
compétent sur la base du paragraphe premier de l’article 72 de la
constitution, c’est-à-dire comme si les engagements financiers de
l’Etat ainsi que la détermination de l’assiette, des taux et des modalités
de recouvrement de l’impôt font partie du domaine de la saisine
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Chronique des avis du Conseil Constitutionnel
obligatoire du conseil constitutionnel. Le conseil n’a constaté aucune
inconstitutionnalité dans les dispositions de la convention.
14-1-05/ Avis n°2005-25 du conseil constitutionnel,
concernant le projet de loi relatif au transfert électronique de
fonds ; JORT n° 51 du 28 juin 2005, p 1430.
Dans cet avis, le conseil constitutionnel a admis le principe de
sa compétence pour examiner le projet de loi relatif au transfert
électronique de fonds en se fondant sur le contenu de ce projet qui
comporte des dispositions relatives aux obligations, à la procédure
devant les différents ordres de juridictions ainsi qu’à la détermination
des crimes et délits et aux peines qui leur sont applicables. Or, toutes
ces matières font partie du domaine de la saisine obligatoire du conseil
constitutionnel en vertu de l’article 72 de la constitution.
Sur le fond, le conseil a constaté que le projet de loi, objet de la
saisine, comprend des dispositions relatives :
- à la définition de l’instrument de transfert électronique,
- aux obligations qui pèsent sur l’émetteur à l’égard du
bénéficiaire,
- aux obligations qui pèsent sur le bénéficiaire de l’instrument
de transfert électronique, aux codes donnés au bénéficiaires ainsi
qu’aux délais d’information,
- aux modalités de rupture du contrat de transfert électronique
pour protéger les droits des deux parties,
-à la protection nécessaire pour les instruments de transfert
électronique de fonds.
Le conseil a constaté que les mécanismes utilisés pour le
transfert électronique de fonds nécessitent un traitement électronique
qui peut entraîner, dans certaines situations, l’infiltration de certaines
données économiques à caractère personnel du bénéficiaire de
l’instrument de transfert électronique. Le conseil constitutionnel a
considéré que ces mécanismes ne peuvent être qualifiés de données à
caractère personnel sensibles qui supposent des procédures spéciales
et renforcées pour leur traitement conformément à la loi organique n°
63 pour l’année 2004 du 27 juillet 2004, portant sur la protection des
données à caractère personnel.
345
Chronique des avis du Conseil Constitutionnel
Dans le même ordre d’idées, le conseil a ajouté que le projet de
loi relatif au transfert électronique de fonds ne comporte pas de
dispositions qui peuvent constituer des exceptions au principe de la
protection des données personnelles prévu par l’article 9 de la
constitution qui suppose que toute exception à ce principe doit faire
l’objet d’une loi organique.
Concernant l’article 19 du projet de loi objet de la saisine, le
conseil a constaté que cet article a accordé la qualité d’agents de la
police judiciaire aux agents sermentés relevant du ministère des
finances et aux agents sermentés relevant du ministère chargé des
technologies de communication pour constater les infractions aux
dispositions de la loi objet de la saisine. Selon le conseil, cette
compétence accordée à certains agents de l’administration pour
exercer les missions de la police judiciaire est fondée du moment que
ces agents tirent leur compétence d’une habilitation législative.
Au bout de son raisonnement, le conseil constitutionnel a
déclaré constitutionnelles les dispositions du projet de loi relatif au
transfert électronique de fonds.
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