les difficultés de recrutements de cadres en production industrielle

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les difficultés de recrutements de cadres en production industrielle
LES ÉTUDES DE L’EMPLOI CADRE
–Les difficultés de
recrutements de cadres
en production industrielle,
dans les industries
pharmaceutique et
chimique–
2016-39
N°
Août 2016
Monographie sectorielle des
industries pharmaceutique et
chimique
- Diagnostic des difficultés
- Quelles solutions
Enquête qualitative
Parmi les fonctions occupées par des cadres, les
fonctions de la production industrielle et, dans
une moindre mesure, des services techniques
sont identifiées sur la période récente comme des
fonctions pour lesquelles les recruteurs éprouvent
des difficultés à recruter. Une étude1 fait le point
sur la nature de ces difficultés, leurs causes et les
solutions que les entreprises et d’autres acteurs
des filières industrielles y apportent. L’étude
s’est focalisée sur quatre secteurs d’activité
qui représentent 60 % des recrutements de
cadres en production industrielle et en services
techniques : Mécanique-métallurgie, Automobileaéronautique, Industries pharmaceutique et
chimique, et Agroalimentaire. Ce document
présente la monographie des industries
pharmaceutique et chimique.
1.Les difficultés de recrutement de
cadres en production industrielle,
Apec, coll. Les études de l’emploi
cadre, n° 2016-35, août 2016
–éléments de contexte sectoriel–
Dans les secteurs industriels de haute technologie que sont la pharmacie et la chimie, la France
a conquis une position importante. Pour le LEEM2, la France dispose à la fois de structures de
recherche de pointe mais aussi d’infrastructures de production performantes. Secteurs d’innovation
par définition, la Pharmacie et la Chimie sont en pleine mutation.
–
Quelques chiffres
–
L’industrie pharmaceutique
2.Le LEEM regroupe les entreprises
du secteur de l’industrie
pharmaceutique en France. Il
compte aujourd’hui environ 270
entreprises adhérentes, qui
réalisent près de 98 % du chiffre
d’affaires total du médicament en
France.
3.Code Naf 2110Z : Fabrication de
produits pharmaceutiques de base
et Code Naf 2120Z : Fabrication
de préparations pharmaceutiques
4. Source Acoss 2015
5.Mais aussi Cancer-Bio-Santé à
Toulouse, Eurobiomed en PACA,
Atlanpole Biotherapies à Nantes
et Nutrition-Santé-Longévité dans
le Nord
6.On recense également environ
250 entreprises consacrées
strictement aux biotechnologies
(start-up) dans le domaine
pharmaceutique.
7.
Tableau de bord des emplois dans
les entreprises du médicament en
2014, Novembre 2015, LEEM
2
Au sens strict3, le secteur représente 80 214 emplois4 :
72 146 emplois pour la fabrication de préparations
pharmaceutiques et 8 068 pour celle de produits
pharmaceutiques de base. Selon le champ couvert par
le LEEM (Les entreprises du médicament), près de 100
000 personnes travaillent dans l’industrie
pharmaceutique en France. Ce chiffre est en baisse
constante depuis quelques années.
Ainsi, l’année 2013 a vu les effectifs passer sous la
barre symbolique des 100 000 salariés. Les chiffres
de 2014 montrent encore un recul mais qui semble
s’infléchir : -0,6 % en un an (vs -2 % pour l’ensemble
de l’industrie). En dix ans, les effectifs ont baissé de
5,8 % mais le nombre de recrutements reste
dynamique.
L’industrie du médicament a recruté en moyenne, sur
les dix dernières années, 10 000 personnes par an :
49 % des recrutements en 2013 ont été réalisés dans
la fonction production, en commercialisation, dans les
fonctions transverses et en R&D. Près de 6 emplois sur
10 de l’industrie du médicament se concentrent dans
quatre régions : plus d’un quart en Île-de-France, suivie
des régions Rhône-Alpes, Centre et Haute Normandie,
traduisant une vraie logique de filière dans les
territoires avec la présence de pôles de compétitivité
dédiés à la biotech-santé (Medicen en île-de-France,
Lyonbiopôle à Lyon…)5.
Au total, selon le LEEM, 246 sites étaient recensés en
France en 20146 contre 302 en 2000, et près de
1 000 dans les années 1950. Cette baisse du nombre
des unités de production résulte notamment de la
suppression de l’obligation légale qui était faite aux
entreprises de localiser la dernière étape de production
de leurs médicaments dans les pays où elles
souhaitaient les commercialiser.
La recherche de la taille critique et l’adaptation récente
de l’industrie aux coûts de R&D toujours plus importants,
aux normes internationales ainsi qu’aux grandes
mutations et innovations technologiques ont aussi
entraîné une modification du tissu pharmaceutique
industriel français qui explique la baisse continue du
nombre d’entreprises en raison de fusions/acquisitions
et de mouvements de concentration.
Dans ce secteur, la production industrielle joue un rôle
essentiel et mobilise des compétences très diverses. Elle
répond à des normes de qualité nationales et
internationales très strictes, et garantit le respect de
l’environnement et de la sécurité. La famille des métiers
de la production industrielle demeure ainsi la plus
importante avec 43 % des effectifs en 2014 (plus de
42 000 salariés)7. Par ailleurs, la part élevée des effectifs
dans la famille R&D (14 % en 2014, soit près de 14 000
salariés) constitue une des principales caractéristiques
du secteur.
La France est un acteur clé de la sous-traitance de
production pharmaceutique (autrement appelé
façonnage) dans le monde. La sous-traitance s’est
accentuée depuis les années 1990 et a, petit à petit,
révolutionné le secteur. En effet, en France, plus d’une
trentaine de sites ont déjà été cédés à des soustraitants par les grands laboratoires, les « Big
Pharma » qui, afin d’améliorer leur rentabilité, se
repositionnent sur l’innovation et la commercialisation.
L’industrie chimique
Au sein de ce secteur, les activités s’étendent des
produits de base minéraux et organiques aux
médicaments en passant par les engrais, les matières
plastiques, les arômes, les colles, les produits de
beauté, etc. L’industrie chimique française se situe au
6e rang mondial et se positionne comme le 2e
producteur européen. La France est aussi le 3e
exportateur mondial de produits chimiques et
pharmaceutiques, et la plupart des grands acteurs de
la chimie mondiale sont présents sur le territoire.
APEC – Les difficultés de recrutements de cadres en production industrielle, dans les industries pharmaceutique et chimique
Cette diversité d’activités, de produits et donc de
clients permet au secteur de rester assez dynamique.
Néanmoins, les industriels constituent majoritairement
leurs clients et le secteur n’échappe pas aux
soubresauts de la conjoncture. Selon l’UIC (Union des
industries chimiques)8, le secteur représente plus de
157 000 salariés, 50 % travaillant dans des
établissements de moins de 250 salariés. La
proportion de cadres s’élève à 31 %. Ce taux, qui a
plus que doublé en vingt ans, est un des plus élevé
dans l’industrie (+9 points par rapport à l’industrie).
Cette industrie à haute technicité est portée par un
tissu de PME/TPE très important (94 %). Au total, le
secteur représente plus de 3 300 entreprises réparties
sur l’ensemble du territoire, l’Ile-de-France représentant
23 % des salariés et Rhône-Alpes 13 %.
Dans un contexte de mondialisation accrue, ces
industries ont vu leurs effectifs baisser depuis quelques
années, en moyenne de -2 % par an ces dix dernières
années, principalement du fait de gains de productivité
et de réduction des capacités de production. Les
effectifs des industries chimiques se répartissent entre
huit grandes familles professionnelles9. Plus d’un tiers
des salariés travaillent dans le domaine de la
production et du conditionnement (principalement
des ouvriers qualifiés). L’emploi se développe dans les
domaines de la logistique/achats et de la maintenance
(avec des fortes difficultés), dans le domaine technique
(spécialistes en ingénierie des procédés) et ceux de la
propriété industrielle et des affaires réglementaires.
–
Les principaux enjeux
–
L’industrie pharmaceutique
Aujourd’hui, l’industrie pharmaceutique voit sa
croissance freinée. Elle est confrontée à trois éléments
clés : le changement profond du modèle économique
de l’innovation, l’émergence de nouveaux pays
producteurs et la complexité croissante des politiques
de régulation et des réglementations. Ainsi, la nécessité
de se réinventer, de s’adapter aux nouvelles technologies
(développement des biotechnologies, médecine
personnalisée) s’impose. Ces mutations conduisent les
entreprises à maîtriser les coûts de recherche et de
production, et donc à sous-traiter certaines fonctions
telles que la qualité, le suivi de la recherche clinique ou
la distribution.
Cela a principalement deux conséquences :
• L a pression à la baisse des coûts est forte, et les choix
se portent sur les pays émergents pour des produits
moins coûteux, et des produits génériques.
• L es volumes à destination des pays matures sont
décroissants, en raison du remplacement par des
thérapies innovantes ; par contre, les exportations
vers les pays émergents ont augmenté.
Ce positionnement a entraîné la mise en œuvre de
politiques de réduction des coûts sur les sites de
production : optimisation des lignes de production,
automatisation, mise en place de programme
d’amélioration continue (lean manufacturing :
réduction des opérations sans valeur ajoutée,
réduction des temps de cycle et des stocks…).
Un autre enjeu de l’industrie pharmaceutique concerne
la sous-traitance. Contrairement à d’autres secteurs
industriels (Automobile, Aéronautique…), l’industrie
pharmaceutique est longtemps restée dans une logique
d’internalisation de l’ensemble de la chaîne de valeur
(R&D, production, distribution). Aujourd’hui, plus du tiers
des usines sont contrôlées par des façonniers, les
laboratoires préférant se recentrer sur la recherche et la
fabrication de médicaments dont ils ont encore
l’exclusivité.
La logique de rentabilité est dorénavant le maître mot
dans le secteur, remplaçant la logique de volume qui
dominait précédemment. Cette nouvelle logique
implique que les cadres travaillant dans ce secteur
possèdent des compétences en management, animation
d’équipe, gestion de projet et financières.
In fine, une baisse des effectifs à l’horizon 2020, y
compris en production, est prévue. D’après les résultats
du Contrat d’étude Prospective des industries de santé
réalisé en 2012 avec l’État, le scénario volontariste
prévoit une baisse des effectifs de 4 000 salariés,
pouvant aller jusqu’à 34 000 salariés dans l’hypothèse
la plus mauvaise.
L’industrie chimique
Le regain d’activité observé en 2014, et qui devrait se
confirmer en 2015, s’explique par des facteurs
endogènes (bonne santé financière des acteurs,
dynamisme des marchés émergents…) et exogènes
(faible prix du pétrole, accès aux matières premières bon
marché, dépréciation de l’euro…). Le développement de
grandes plateformes permettant de mutualiser les coûts
constitue aussi un élément de compétitivité.
8.Sources : Les chimistes, architectes
d’avenir. Rapport annuel 2014
– bilan chiffré, UIC (Union des
industries chimiques), Le tableau
de bord de l’emploi dans les
industries chimiques, 2015, OPIC
(Observatoire prospectif des
métiers, des qualifications et de la
diversité des industries chimiques)
et L’emploi dans les industries
chimiques, Édition 2015, OPIC.
9.Fabrication/conditionnement,
Administratif/informatique, R&D/
laboratoire, Logistique/achat,
Technique/maintenance,
Marketing/commercialisation/
ventes et QHSSE.
APEC – Les difficultés de recrutements de cadres en production industrielle, dans les industries pharmaceutique et chimique
3
Par ailleurs, la protection de la santé, de l’environnement10
ainsi que la maîtrise des risques11 font partie intégrante
de l’activité, et des métiers cadre en production plus
particulièrement.
Enfin, l’importance de l’innovation se renforce, sur des
produits de niche destinés à des domaines spécifiques
(chimie du végétal ou chimie verte12). Par exemple, les
matières biosourcées ont pesé pour 12 % des
approvisionnements dans la fabrication de produits
chimiques en France en 2014 ; une part qui devrait atteindre
15 % d’ici 2017 et 20 % en 2020 selon les engagements
de l’UIC13. Ces alternatives aux matières premières classiques
sont vectrices de progrès et offrent des opportunités
d’amélioration des procédés et de l’image du secteur.
–Diagnostic des difficultés de recrutement–
L’évolution des secteurs et des marchés observée précédemment a des impacts sur la gestion des
ressources humaines et le mode d’organisation des entreprises.
Dans un contexte global de baisse des effectifs, les recrutements se maintiennent. Les recrutements
de cadres dans les industries pharmaceutiques et chimiques sont légèrement en deçà de 3 000
sur les 3 dernières années (2 790 en 2013, 2 500 en 2015 avec 38 % dans la production industrielle
et les services techniques14). Pour 2016, les entreprises des secteurs chimie et pharmacie prévoient
de recruter entre 3 100 et 3 650 cadres15. Les profils de cadres disposant de 1 à 10 ans d’expérience
seraient privilégiés (62 %). Dans ce secteur, 19 % des recrutements concerneraient la production
industrielle et 21 %, les services techniques.
Ainsi, s’agissant des profils recherchés, les entreprises
expriment de fortes attentes en termes d’opérationnalité
des cadres et des jeunes diplômés, et des besoins en
compétences qualifiées.
10.Protocole de Kyoto sur la réduction
des émissions de C02, lois sur la
protection de l’eau et des sols,
réglementation en matière de
gestion de déchets industriels.
11.Directives européennes Seveso ;
Règlement, REACH, instituant une
nouvelle politique européenne en
matière de management des
substances chimiques, entré en
vigueur le 1er juin 2007.
12.Chimie du végétal et biotechnologies
industrielles : quels métiers stratégiques ?,
Apec (avec l’IAR et l’UIC), coll. Les
études de l’emploi cadre,
n°2014-55-octobre 2014
13.Source : Note sectorielle Sécafi,
avril 2015.
14. Maintenance, achats, sécurité,
qualité et logistique
15.Le marché de l’emploi cadre en
2016 et 2015, Apec, coll. Les
études de l’emploi cadre,
n°2016-23 - Mars 2016
4
« Le secteur reste relativement dynamique avec des
recrutements fréquents (…) mais les entreprises montent
de plus en plus leur niveau d’exigence des profils, soit pour
des questions de performance ou des questions
réglementaires (…). On forme de moins en moins sur le tas
et les entreprises recherchent des personnes qualifiées. »
(École, Industries chimique et pharmaceutique)
Il s’agit d’une part, de compétences en gestion de
la performance, amélioration continue en raison
des nouveaux modes d’organisation des entreprises,
mais également en matière de management, voire
de gestion de relations sociales.
« Le passage d’une logique de volume à une logique
de performance industrielle depuis quelques années
impacte les attentes des entreprises. (…). Aujourd’hui,
la logique de productivité prévaut. » (Ecole, Industries
chimique et pharmaceutique)
« Les compétences stratégiques des managers sont un
peu de gestion projet, un peu de technique, mais
beaucoup de management, d’empathie, de capacité à
prendre en compte les problématiques de chacun, les
risques psychosociaux (…). Nous axons fortement notre
plan de formation interne sur cela. » (Fabricant de
préparations pharmaceutiques, sous-traitants de
produits cosmétiques, pharmaceutiques et ménagers,
Industries chimique et pharmaceutique)
« La chimie est un secteur très costaud en relations
sociales, conflits sociaux, donc nous recherchons une
habitude à travailler dans ces environnements difficiles
(…). La gestion des relations sociales est un vecteur de
différenciation dans les recrutements… plus que la
technique. » (Fabrication d’autres produits chimiques
organiques de base, Industries chimique et
pharmaceutique)
Ainsi, lors de la phase de pré-recrutement, une
attention particulière est portée à l’évaluation de
tous ces aspects.
« Exercice de logique, de personnalité (…) comprendre
le fonctionnement de la personne et surtout les
mécanismes de performance en lien avec un
environnement difficile. Dans notre industrie,
l’absence de ces compétences serait un frein majeur. »
(Cabinet de recrutement)
APEC – Les difficultés de recrutements de cadres en production industrielle, dans les industries pharmaceutique et chimique
Et d’autre part, des compétences techniques de plus
en plus pointues. Les procédés de fabrication se
complexifient, tant dans la Chimie et la Pharmacie ,
les normes réglementaires deviennent essentielles,
les technologies évoluent très vite. Tous ces facteurs
pèsent sur les profils recherchés par les entreprises.
« L’avenir du secteur porte sur deux axes (...). Le niveau
de technicité des équipements est tel que nos besoins
en expertise sont de plus en plus importants (…) et la
partie règlementaire qui sera de plus en plus
déterminante implique un niveau d’exigence élevé. »
(Fabrication de préparations pharmaceutiques, soustraitant spécialisé dans la fabrication de formes
injectables stériles, Industries chimique et
pharmaceutique)
Ainsi, le fait de maîtriser le cadre réglementaire peut
être source de tensions sur certains métiers tels que
les experts en affaires règlementaires dans la
Pharmacie. Dans la Chimie, les difficultés de
recrutement portent sur des métiers à haute
technicité (concepteurs en génie des procédés
chimiques, chercheurs en chimie, toxicologues
industriels, spécialistes en cosmétovigilance,
spécialistes de la réglementation et des ingénieurs…).
Ces métiers de plus en plus pointus et techniques
requièrent un niveau de qualification plus élevé.
Lié à la règlementation forte dans la Pharmacie et
aux enjeux associés, le métier de pharmacien en
production industrielle est essentiel. Les pharmaciens
peuvent représenter près d’un quart des effectifs
cadres, selon les tailles des entreprises. Ils sont les
seuls habilités à libérer les lots de médicaments
fabriqués pour les envoyer aux clients et à garantir la
qualité des produits. Ils sont donc présents dans la
majorité des domaines d’activité des entreprises du
médicament (développement galénique et clinique,
affaires réglementaires, pharmacovigilance,
production, qualité, marketing voire comité de
direction…). Leur nombre est en progression constante
depuis plus de 20 ans, et aujourd’hui ils représentent
environ 8 000 cadres dans l’industrie. Ils sont
également très présents dans les activités qui
gravitent autour des entreprises du médicament : les
sous-traitants en recherche, en développement
clinique, les grossistes et dépositaires…
En outre, aussi bien dans l’industrie pharmaceutique
que chimique, la polycompétence est de plus en plus
recherchée tant au niveau de la chaîne de production
que pour des postes de manager ou des fonctions
transverses. Cette exigence de polycompétence est
liée à une diminution de l’encadrement intermédiaire,
et repose principalement sur des compétences
transversales. Ainsi les cadres doivent savoir gérer des
projets multiples, travailler en équipe et manager,
mais aussi assurer la réussite financière des projets,
et avoir une appétence de plus en forte pour le
pilotage économique. S’agissant des postes de
cadres, le savoir-être, la capacité à coordonner, à
diriger, la motivation et la capacité d’apprentissage
sont les maîtres mots.
« On ne donne pas la priorité aux compétences
techniques des personnes, qui peuvent s’ajuster par la
formation interne, mais plus à leur engagement, leur
motivation et à leur dynamique d’apprentissage, leur
capacité à mener des équipes. » (Fabrication de
préparations pharmaceutiques, sous-traitant
spécialisé dans la fabrication de formes injectables
stériles, Industries chimique et pharmaceutique)
Au-delà de la simple maîtrise des techniques de
procédés (pharmaceutique ou chimique), les attentes
en matière de sécurité, qualité et contrôle sont de plus
en plus importantes. L’élargissement des compétences
à un autre champ constitue également une plusvalue : par exemple des savoir-faire techniques
d’ingénieur élargis à des compétences en matière
d’environnement ou de sécurité au travail. De plus,
pour les métiers les plus qualifiés, les compétences
liées à l’international sont devenues incontournables :
maîtrise de langues étrangères, connaissance du droit
international, des réglementations, gestion des
relations interculturelles...
« L’ouverture vers les marchés européens et les pays
émergents nécessaire pour les entreprises du secteur,
implique une forte attente des entreprises en termes
de langues étrangères, notamment l’anglais. »
(Observatoire, Industries chimique et pharmaceutique)
Le contexte global du secteur (nouveaux champs de
recherche, exigences en matière de qualité et de
réglementation, mondialisation, concurrence)
implique donc une élévation globale du niveau de
qualification et des besoins en nouvelles compétences.
Et dans un contexte de baisse des effectifs, les
entreprises ont des difficultés de recrutement sur
certains métiers en production (et aussi en R&D).
APEC – Les difficultés de recrutements de cadres en production industrielle, dans les industries pharmaceutique et chimique
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Les cadres de la production industrielle (responsable
de production, manager de service) ou des services
techniques (qualité, affaires réglementaires) sont des
postes essentiels, sur lesquels se cristallisent de fortes
attentes en termes de compétences.
« Nous avons de nombreuses demandes d’entreprises
pour des formations sur les process industriels et la
qualité santé et qui sont à la limite du conseil (…), du
concept de formation/action, aujourd’hui il faut des
experts opérationnels. » (École, Industries chimique et
pharmaceutique)
Ainsi, les spécificités des procédés du secteur
Pharmacie et les évolutions technologiques
conduisent à d’importantes difficultés de recrutement
sur les profils expérimentés à responsabilité en
production ou pour des profils ingénieurs qui
participent aux process. Les attentes des entreprises
portent en effet sur des profils, qui ont à la fois une
compétence technique mais aussi managériale, avec
des expertises en qualité et de l’expérience. Pour ces
profils très complets et très recherchés, les tensions
sont avérées.
« Il existe beaucoup de concurrence aujourd’hui sur le
marché entre les entreprises, peu de turn-over dans les
industries de santé, il est donc difficile de trouver ces
bons profils possédant une certaine expérience dans
le secteur. » (Observatoire, Industries chimique et
pharmaceutique)
Des tensions existent également sur des expertises
de niche et critiques pour le site.
« Malgré le gel des recrutements, on ne ferme pas la
porte à quelques recrutements externes mais très à la
marge et sur des expertises critiques pour le site. Si, par
exemple, on a besoin d’un expert en assurance de
stérilité (…). C’est une niche de compétences que l’on
ne trouve que dans l’industrie pharmaceutique. »
(Fabrication de préparations pharmaceutiques, soustraitant spécialisé dans la fabrication de formes
injectables stériles, Industries chimique et
pharmaceutique)
Aussi bien dans l’industrie pharmaceutique que
chimique, de réelles difficultés de recrutement sont
constatées dans la fonction maintenance. En effet,
les entreprises rencontrent des problèmes pour recruter
des responsables de maintenance ou des postes du
6
niveau Bac +3 ou plus en maintenance industrielle, et
ce malgré les nombreuses formations existantes.
Cette fonction attire moins et les besoins sont très
forts, dans un contexte de remplacement de départs
à la retraite en lien avec la pyramide des âges et
d’enrichissement des de compétences.
« Aujourd’hui, on procède à une ouverture de postes aux
jeunes diplômés, pour redynamiser la pyramide des âges
qui est vraiment en entonnoir (…), pour un rééquilibrage
notamment en ingénieur maintenance. » (Fabrication
d’autres produits chimiques organiques de base, chimie
de spécialité, Industries chimique et pharmaceutique)
« C’est globalement une fonction pénurique dans le
secteur et dans l’industrie en général (…). La nature
même du secteur très règlementé, au même titre que
l’Agroalimentaire, conduit à des difficultés à faire
cohabiter la maintenance et la production. Du coup,
il existe un fort besoin d’ajustement ou de formation
complémentaire à la maintenance, à l’environnement
de la santé qui est très spécifique. » (École, Industries
chimique et pharmaceutique)
« Notre groupe très connu, en forte croissance, attire,
nous avons peu de difficultés de recrutement [...] si ce
n’est dans la fonction maintenance sur les ingénieurs
maintenance ou responsables services techniques
maintenance, travaux neufs. » (Fabrication d’autres
produits chimiques organiques de base, Industries
chimique et pharmaceutique)
Les processus de plus en plus automatisés et les
avancées technologiques de plus en plus rapides
créent des besoins pointus en maintenance au sein
des entreprises.
« La maintenance d’hier n’est plus du tout la même
aujourd’hui et encore moins celle de demain, les
compétences en maintenance sont différentes et plus
importantes. Les besoins se situent plus sur
l’automatisme que sur la mécanique. » (Fabrication de
préparations pharmaceutiques, sous-traitant
spécialisé dans la fabrication de formes injectables
stériles, Industries chimique et pharmaceutique)
Les entreprises sont donc amenées à réfléchir à des
actions de formations à mener auprès de leurs
collaborateurs et à rechercher des organismes de
formation, lorsqu’elles veulent faire évoluer en
interne les salariés dans ces fonctions.
APEC – Les difficultés de recrutements de cadres en production industrielle, dans les industries pharmaceutique et chimique
Pour les entreprises de la Pharmacie, certaines
difficultés peuvent exister pour des expertises bien
précises et stratégiques : par exemple, en assurance
de stérilité où il n’existe pas de diplôme spécifique,
et en chimie analytique et des sucres…
« Il y a un autre métier très spécifique à la Pharmacie/
Chimie, docteur en chimie analytique et des sucres… Il
y a quelques années, nous recherchions un docteur en
chimie analytique et des sucres car nous fabriquons
nous-mêmes nos principes actifs. Nous avons eu de
réelles difficultés de recrutement et avons été obligés
de passer par un cabinet expert en recrutement dans
le secteur. Au final, nous avons été chercher notre
chimiste des sucres en Suisse. » (Fabrication de
préparations pharmaceutiques, sous-traitant
spécialisé dans la fabrication de formes injectables
stériles, Industries chimique et pharmaceutique)
Il s’agit encore des compétences en vision, caméra de
contrôle, vérification de la conformité des produits.
Pour ces postes il n’existe que deux écoles en France
qui forment ces ingénieurs, très demandés. Et la
localisation géographique de l’entreprise peut
accroître les difficultés en matière de recrutement.
« Ils sont déjà en poste avant la fin de la formation
(…) et ces écoles sont dans le Sud. Il est donc très
difficile pour une entreprise située plus dans la partie
Nord de la France de les attirer. » (Fabrication de
préparations pharmaceutiques, sous-traitant
spécialisé dans la fabrication de formes injectables
stériles, Industries chimique et pharmaceutique)
Les difficultés de recrutement peuvent également
être causées par d’autres facteurs :
• L’environnement du secteur, en mutation
perpétuelle, va trop vite par rapport au délai
d’ajustement nécessaire pour les organismes de
formation tant en formation initiale que continue.
Ces derniers ont donc du mal à répondre aux
besoins des entreprises.
« Le besoin des entreprises évolue très vite,
l’environnement évolue de plus en plus rapidement et
l’offre de formation n’évolue pas assez vite face à cette
demande. » (École, Industries chimique et
pharmaceutique)
« Les métiers sont en perpétuelle évolution et donc les
organismes de formation devraient l’être aussi, et ce
n’est pas le cas ou du moins pas assez et pas assez
vite. » (Ecole, Industries chimique et pharmaceutique)
• Des carences dans la formation en lien avec
l’évolution de la profession sont également mises
en avant, et plus particulièrement des attentes
parfois non satisfaites en termes de compétences
scientifiques.
« Les bio-médicaments, c’est 20 % des produits sur le
marché aujourd’hui mais 60 % des nouveaux (…). Ils
ne sont plus d’origine chimique mais de plus en plus
biologique, la recherche progresse très vite et les
procédés sont complétement différents, les équipements
sont différents (…), la matière première est non plus
chimique mais vivante (végétale, animale, humaine)
impliquant un socle de compétences plus importantes
notamment scientifiques, les métiers évoluent. » (École,
Industries chimique et pharmaceutique)
Ces difficultés de recrutement existent également du
côté du recrutement des étudiants dans les écoles. Ces
dernières évoquent des difficultés à recruter des
étudiants, vraisemblablement en raison d’une
méconnaissance des métiers industriels. Le secteur
souffrirait d’un manque d’attractivité auprès des jeunes.
« 30 % de nos contrats d’alternance ont été non
pourvus l’année dernière par exemple, j’avais les
entreprises mais pas les jeunes. » (École, Industries
chimique et pharmaceutique)
Le même constat est réalisé par les entreprises de
l’industrie chimique, le secteur ne serait pas attractif
pour les jeunes diplômés.
Entre les Big Pharma, grands laboratoires connus et
reconnus mondialement et les façonniers (soustraitants), il existe des tensions de nature différente.
Des difficultés de recrutements plus importantes
peuvent exister chez les sous-traitants ou les PME,
contrairement aux Big Pharma qui ont les moyens
d’avoir les bons candidats.
« Elles [les Big Pharma] ont des moyens financiers
pour attirer les bons profils. » (École, Industries
chimique et pharmaceutique)
« Elles [les Big Pharma] ont des avantages sociaux,
des acquis qui sont importants voire même un cadre
de travail plus incitatif, plus attractif que les PME. »
(Observatoire, Industries chimique et pharmaceutique)
APEC – Les difficultés de recrutements de cadres en production industrielle, dans les industries pharmaceutique et chimique
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« La concurrence des sites BigPharma est importante
notamment lorsqu’ils se trouvent à proximité
immédiates de nos sites. Si ce grand laboratoire mène
une campagne de recrutement dense sur les mêmes
activités que les nôtres et sur des compétences
spécifiques, nous sommes la cible idéale (…). Leur
politique de rémunération n’est pas concurrentielle et
la prise de risque pour les salariés est quasi nulle donc
c’est difficile pour nous d’y faire face. » (Fabrication de
préparations pharmaceutiques, sous-traitant
spécialisé dans la fabrication de formes injectables
stériles, Industries chimique et pharmaceutique)
Il existe donc une forte concurrence entre les grandes
entreprises et les PME souvent sous-traitantes, avec
toutefois un bémol : les entreprises de biotechnologies.
Ces dernières se développent de plus en plus sur de
nouveaux marchés, de nouvelles structures émergent
depuis quelques années et elles sont très attractives.
16.Les recrutements de cadres dans
les industries chimiques, Apec, coll.
Les études de l’emploi cadre,
n°2015-01, janvier 2015.
« C’est un incubateur d’activité et de compétences, qui
participe à améliorer l’attractivité en donnant un
nouveau souffle dans nos industries, un nouvel attrait,
de nouveaux cadres de travail. » (Observatoire,
Industries chimique et pharmaceutique)
Selon une étude, réalisée par l’Apec16 en partenariat avec
l’observatoire des industries chimiques auprès de 400
entreprises du secteur de la chimie, des difficultés de
recrutement concerneraient principalement la fonction
commerciale (technico/ingénieur commercial, responsable
commercial, commercial en export…) et la R&D (chercheur,
ingénieur génie des procédés, ingénieur de recherche en
chimie, responsable de laboratoire, formulateur). Néanmoins,
d’autres métiers plus spécifiques génèrent aussi des
difficultés significatives, notamment des métiers fortement
liés à la production : le management d’installations
industrielles (responsable d’atelier/usine, directeur de site,
responsable production biotechnologies), la maintenance
ou l’analyse qualité. Le manque d’accompagnement de
l’enseignement supérieur de jeunes diplômés vers ces
métiers pourrait en partie expliquer ces difficultés.
« Dans les écoles ou universités, on entend plus parler de
souhaits de travailler sur des projets, de la conception, du
dimensionnement que de travailler sur le terrain (…). Constat
que l’on fait également dans les écoles de procédés ou
fabrication, dans lesquelles les élèves s’orientent plus vers des
fonctions bureaux études, ils se dirigent moins vers des métiers
du terrain. » (Fabrication d’autres produits chimiques
organiques de base, Industries chimique et pharmaceutique)
–Causes et conséquences des difficultés
de recrutement –
Dans les secteurs de la pharmacie et de la chimie, plusieurs raisons peuvent expliquer les difficultés
de recrutement :
• la localisation géographique des sites industriels,
• un problème de représentation des métiers de production souvent négative,
• une offre de formation parfois en décalage avec la réalité,
• une concurrence entre les grands donneurs d’ordre, les BigPharma, et les sous-traitants ou les
plus petites structures,
• des secteurs très complexes, des métiers très qualifiés.
–
La localisation géographique des
sites industriels
–
Réalité assez globale à l’industrie, les sites de
production se trouvent généralement assez éloignés
des grandes villes. Les sites pharmaceutiques
8
n’échappent pas, pour partie, à ce constat. Ces
localisations parfois très rurales (notamment pour les
PME) sont peu attractives pour les cadres formés dans
les grandes agglomérations ou ceux y vivant. Ces
derniers ainsi que leur famille sont peu enclins à partir
travailler sur un site industriel en pleine campagne.
APEC – Les difficultés de recrutements de cadres en production industrielle, dans les industries pharmaceutique et chimique
« Cette catégorie tend de plus en plus à donner une
priorité à l’équilibre vie privée/vie professionnelle et à
être de plus en plus exigeante sur ces aspects (…), car au
final cela touche leur emploi mais aussi l’emploi de la
compagne ou compagnon, les écoles des enfants. »
(Observatoire, Industries chimique et pharmaceutique)
Ce manque d’attractivité se ressent même dans des
régions assez proches de l’île-de-France, comme la
Normandie ou le Centre, par exemple. En effet, la
concurrence des entreprises de la région parisienne tant
en termes de salaires que d’emploi rend difficile la venue
des candidats intéressants sur ces territoires.
« Les bassins proches des grandes métropoles, par
exemple les entreprises d’Eure et Loir, n’attirent pas les
bons profils qui vont tous en région parisienne. »
(École, Industries chimique et pharmaceutique)
Par ailleurs, les implantations des entreprises sur des
territoires non pourvus d’établissements de l’enseignement
supérieur spécifiques (formation initiale et/ou continue)
également un facteur de tension. A l’exception de l’Île-deFrance et de la région Rhône-Alpes qui concentrent une
grande part de l’offre de formation sur ces secteurs, les
difficultés à attirer les candidats demeurent.
« Il y a peu de mobilité des salariés, pas d’offre de
formation ou peu (…). Délicat pour les entreprises
d’attirer des salariés même des jeunes. » (Observatoire,
Industries chimique et pharmaceutique)
–
Une image des métiers de
production même cadreS parfois
tronquée ou réductrice
–
Le secteur de la pharmacie pourrait souffrir d’un
déficit d’image. Le point de vue semble ne pas être le
même si l’on se positionne du côté des experts du
secteur ou du côté du grand public. Les différentes
affaires des médicaments relayées par les médias
(Médiator, effets secondaires de certains
médicaments…) ou les nombreux plans de
licenciements dans la pharmacie ne participent pas à
la bonne image du secteur auprès du grand public.
« On entend plus parler des choses négatives, il en
existe c’est vrai, que des choses positives sur les beaux
projets, les belles innovations que regorgent notre
secteur, les innovations thérapeutiques par exemple. ».
(École, Industries chimique et pharmaceutique)
Toutefois, selon les entreprises rencontrées, tout du
moins dans les plus grandes, le secteur serait un
secteur « noble » de l’industrie avec des enjeux
sociétaux et humains importants et vitaux.
« Sur notre bassin, le secteur de la pharmacie est très
présent avec une bonne image donc les ingénieurs se
tournent naturellement vers nous. » (Fabrication de
préparations pharmaceutiques, sous-traitant
spécialisé dans la fabrication de formes injectables
stériles, Industries chimique et pharmaceutique)
« Les problèmes d’image liés aux différentes actualités
sur les médicaments ne posent pas vraiment problème
dans les grandes entreprises, leur attrait va au-delà des
médias et surtout pour des experts du secteur, les
individus passent au-dessus de cela (…). La mauvaise
perception est plus du côté du grand public que des
personnes internes au secteur. (…) Les formations sont
bien remplies ce qui prouve que le secteur attire encore
et toujours. » (Ecole, Industries chimique et
pharmaceutique)
La difficulté ne se situe donc pas sur le secteur mais
plus sur la représentation de la fonction de
production et de ses métiers (ce qui est moins vrai
pour les services techniques), en particulier auprès
de la jeune génération. Celle-ci est davantage
attirée vers l’innovation et la recherche, qui sont
aussi beaucoup plus médiatisées et valorisées par
les acteurs.
« Dans l’industrie, le goût des jeunes va vers la qualité,
la formulation d’un produit, plus dans l’ingénierie au
départ. » (Fabricant de préparations pharmaceutiques,
sous-trait ants de produits cosmétiques,
pharmaceutiques et ménagers, Industries chimique
et pharmaceutique)
« [Le manque d’attrait de la production industrielle
s’explique] par des questions d’image (…), il y a peu
d’évolutions possibles, des salaires moindres. » (École,
Industries chimique et pharmaceutique)
« Sur les salons, 90 % des jeunes nous disent ’ je veux
être chercheur’, c’est symptomatique de la
méconnaissance des métiers (…). Même au niveau de
APEC – Les difficultés de recrutements de cadres en production industrielle, dans les industries pharmaceutique et chimique
9
l’enseignement supérieur, dans les formations
industries pharmaceutiques, 90 % pensent
« laboratoire de contrôle, tube à essai, pipette », mais
la réalité ce n’est pas cela, la réalité c’est les machines
à comprimés 350 000/heure. (…) La représentation
est en total décalage et cela fait 15 ans que c’est le
cas, rien ne change ou peu, même si petit à petit les
jeunes prennent conscience qu’ils ont peut-être un
avenir dans l’industrie. » (École, Industries chimique
et pharmaceutique)
Pour le secteur de la chimie, la problématique est
assez proche avec des préjugés et des stéréotypes :
un secteur polluant, toxique, dangereux pour le
grand public.
Toutefois, les tensions générées par les questions
d’image sont moins perceptibles en production
industrielle ou en maintenance que sur les fonctions
support.
« Ceux qui sont en production n’ont pas ces préjugés
car ils connaissent et sont intéressés par le secteur et
ses objectifs. » (Fabrication d’autres produits
chimiques organiques de base, Industries chimique
et pharmaceutique)
Bien que le secteur souffre d’un déficit d’image, il est
dans sa globalité plutôt bien loti par rapport à d’autres
secteurs industriels en termes de salaires, d’évolution
professionnelle ou encore de conditions de travail.
« Les salaires demeurent d’un assez bon niveau en
comparaison avec d’autres secteurs industriels (…).
Même si par rapport au passé, les niveaux de salaires
proposés aux nouveaux entrants peuvent être moindres
du fait de la réduction des marges de manœuvre
financières des entreprises hors Big Phama ou grandes
entreprises de la chimie. » (Observatoire, Industries
chimique et pharmaceutique)
« L’évolution professionnelle n’est pas un problème
dans le secteur, de même que les conditions de travail
(…). Même si aujourd’hui les entreprises recherchent
beaucoup la polyvalence, il y a quand même une
diversité de métiers qui permet des évolutions en
interne mais aussi en externe. » (Observatoire,
Industries chimique et pharmaceutique)
Le secteur étant en perpétuel mouvement et très
innovant, il y a toujours des nouveaux marchés qui
permettent d’évoluer.
10
« C’est un secteur non figé structurellement car en
constant progrès/innovation. Nous parlons
aujourd’hui de la santé 2.0 qui pointe son nez et qui
renouvellera encore la filière. » (Observatoire,
Industries chimique et pharmaceutique)
–
Une offre de formation
pertinente mais une adéquation
avec les besoins réels des
entreprises à parfaire
–
Les entreprises et les acteurs de branches considèrent
que l’offre de formation est assez dense et d’un bon
niveau. Ils en sont pleinement satisfaits.
« La formation initiale est très développée en France,
ce n’est pas un réel souci. » (Fabricant de préparations
pharmaceutiques, sous-traitants de produits
cosmétiques, pharmaceutiques et ménagers,
Industries chimique et pharmaceutique)
« Globalement, l’offre de formation est assez pertinente
pour nos besoins tant sur le volume que le contenu [...].
Il y a le choix et les formations sont de bonne qualité. »
(Fabrication d’autres produits chimiques organiques
de base, Industries chimique et pharmaceutique)
Cependant, cette offre de formation reste à parfaire
car les métiers sont en perpétuelle évolution et les
compétences associées également. Ainsi, il peut y
avoir des décalages, les formations ne s’alignant pas
assez rapidement par rapport aux besoins. Cela est
particulièrement vrai pour les compétences
transversales. Selon les responsables interrogés,
certains aspects ne sont pas assez pris en compte
dans les formations : amélioration continue, gestion
de projet, pilotage économique, capacités
rédactionnelles…
« Les formations ne sont pas assez axées sur ces notions. »
(École, Industries chimique et pharmaceutique)
« Les jeunes diplômés sur des postes d’encadrement
intermédiaire sont parfois dépassés sur ces aspects. »
(Fabrication de préparations pharmaceutiques, soustraitant spécialisé dans la fabrication de formes
injectables stériles, Industries chimique et
pharmaceutique)
APEC – Les difficultés de recrutements de cadres en production industrielle, dans les industries pharmaceutique et chimique
Du côté de l’offre de formation technique, les
manques sont moins prégnants même si les acteurs
identifient un risque pour les nouvelles générations
des produits de santé, les biotechnologies.
« Elles [les biotechnologies] ne sont pas forcément très
ancrées dans les programmes. » (Observatoire,
Industries chimique et pharmaceutique)
« Dans certaines universités, pas 1h de cours sur les
biotechnologies encore aujourd’hui alors que c’est
l’avenir. » (École, Industries chimique et
pharmaceutique)
Les organismes de formation devraient renforcer les
modules de formation sur ces compétences
transversales mais aussi mettre au cœur des
formations, l’opérationnalité, la mise en pratique des
connaissances…. L’apprentissage et l’alternance y
participent fortement. Dans cette perspective,
certaines écoles possèdent au sein de leur structure
des plateaux de mise en situation qu’elles mettent à
disposition des universités (françaises voire
étrangères) pour parfaire l’enseignement dispensé à
leurs étudiants sur un plan technique.
–
Une concurrence des
donneurs d’ordre
–
Les entreprises du secteur de la pharmacie ne
bénéficient pas toutes de la même attractivité :
donneurs d’ordre versus sous-traitants ou BigPharma
versus façonniers. Les cadres de la production, les
ingénieurs spécialisés ou généralistes (et surtout les
jeunes) se tournent plus souvent vers les « gros »
laboratoires mondialement connus que vers les soustraitants (pour grande partie à taille humaine). Le
pouvoir d’attraction n’est pas le même tant sur le
plan de la notoriété de l’entreprise que sur les salaires
proposés.
Cette configuration est comparable à celle observée
dans le secteur de l’automobile entre un constructeur
et un équipementier par exemple. Le cœur de métier
est similaire mais les modes de fonctionnement, les
conditions de travail, les avantages… peuvent être
très différents.
« [les salaires sont] parfois 20 % à 30 % au-dessus ce
que nous pouvons proposer. » (Fabrication de
préparations pharmaceutiques, sous-traitant
spécialisé dans la fabrication de formes injectables
stériles, Industries chimique et pharmaceutique)
« Dans notre entreprise de sous-traitance, la plupart des
salariés étaient là avant quand nous étions sous la
bannière d’une BigPharma (…). Lors du rachat, le
changement de culture, le passage à une gestion par
les coûts, la limitation… n’étaient pas du tout dans la
culture. Au final, beaucoup de cadres ne s’y sont pas
retrouvés et cela a donné lieu à des démissions
notamment pour aller chez le laboratoire qui se situe à
quelques kilomètres et qui est donc un concurrent de
poids pour attirer et garder nos cadres. » (Fabrication
de préparations pharmaceutiques, sous-traitant
spécialisé dans la fabrication de formes injectables
stériles, Industries chimique et pharmaceutique)
« Ancien site industriel d’une Big Pharma, nous avons
encore aujourd’hui la dynamique et la notoriété de la
marque, une très bonne image (…). Mais, plus tard, il
est fort possible qu’il y ait plus de difficultés car les
sous-traitants ne sont pas connus du grand public (…).
On vit sur nos acquis. » (Fabricant de préparations
pharmaceutiques, sous-traitants de produits
cosmétiques, pharmaceutiques et ménagers,
Industries chimique et pharmaceutique)
–
Des secteurs très complexes,
des métiers très qualifiés
–
Les industries pharmaceutique et chimique sont des
industries de process, qui se caractérisent par une très
forte technicité au sein des différents métiers, cadre
notamment, sur les aspects règlementations, contrôle
qualité et de normes. Pour pouvoir exercer dans ces
secteurs, les cadres doivent avoir une connaissance ou
une expérience sectorielle significative. En effet, il est
difficile de travailler dans ces secteurs sans avoir une
connaissance précise des procédés, des machines, de la
réglementation… Les passerelles avec d’autres secteurs
d’activité sont donc peu nombreuses. Elles se résument
aux passerelles entre la pharmacie et la chimie, ou
encore avec l’agroalimentaire ou la raffinerie.
APEC – Les difficultés de recrutements de cadres en production industrielle, dans les industries pharmaceutique et chimique
11
« Les sites sont des sites SEVESO avec des procédés de
fabrication très techniques et complexes, et donc on a
besoin de cette expertise sectorielle, que les salariés soient
performants. » (Fabrication d’autres produits chimiques
organiques de base, Industries chimique et pharmaceutique)
Cette complexité des techniques et des processus
explique que les entreprises n’arrivent pas à trouver
les bons profils malgré de multiples candidatures.
« [Nous avons des difficultés pour le] recrutement
d’ingénieurs maintenance/services techniques (…).
Nous avons reçu beaucoup de candidatures mais trop
teintées secteur automobile par exemple et trop
éloignées des industries de process. » (Fabrication
d’autres produits chimiques organiques de base,
Industries chimique et pharmaceutique)
« La qualité est trop importante, la règlementation
tellement présente et la qualité en sortie de produits
primordiale avec des enjeux forts, que des tensions en
matière de recrutement peuvent naître de cette complexité. »
(Fabrication de préparations pharmaceutiques, soustraitant spécialisé dans la fabrication de formes injectables
stériles, Industries chimique et pharmaceutique)
Les profils spécialisés en affaires réglementaires
constituent un très bon exemple de métier en tension.
Ces cadres sont garants de la qualité des médicaments.
Il s’agit de postes très techniques et d’une fonction
transverse à toute la chaîne de valeur.
« Les compétences requises sont très élevées, la fonction
demande des connaissances et des compétences liées à
l’environnement et au secteur des industries de process. »
(Fabrication de préparations pharmaceutiques, soustraitant spécialisé dans la fabrication de formes
injectables stériles, Industries chimique et
pharmaceutique)
Faute de trouver les bons candidats, les entreprises
mettent à ces postes stratégiques des salariés très
expérimentés en interne, des techniciens qui ont une
bonne connaissance du secteur ou des personnes
venant de la qualité.
12
–
LES Conséquences des difficultés
de recrutement dans la fonction
production industrielle et LES
services techniques
–
Ces difficultés de recrutement peuvent avoir
différentes conséquences au sein des entreprises.
• Cela peut générer une désorganisation dans les
services, un surplus de charge sur les salariés et
donc une organisation non optimale.
« Ces difficultés occasionnent des surcharges de
travail pour le reste des équipes. Surcroît de travail,
ou sujets moins approfondis. (…). Soit ce n’est pas
urgent, et la surcharge peut être relativement bien
encaissée par les équipes, dans ce cas on continue de
rechercher et on continue les annonces, approche
direct, cvthèque… soit c’est un contexte d’urgence, et
on fait appel à de la chasse pour du sur-mesure. »
(Fabrication d’autres produits chimiques organiques
de base, Industries chimique et pharmaceutique)
• Ces tensions peuvent avoir un impact immédiat sur
les performances de l’entreprise. Cependant, à
moyen terme, les entreprises réagissent très bien
car elles sont structurées et savent se tourner vers
des solutions de repli pour remédier à cette
pénurie.
« Elles ont de nombreux réseaux, ont une gestion des
mobilités interne via des plans de succession très
précis. » (Observatoire, Industries chimique et
pharmaceutique)
• Les entreprises peuvent souvent faire appel à des
sociétés d’ingénierie, en dernier recours même si
cette pratique n’est pas généralisée dans le secteur.
« Ces sociétés peuvent être de vrais viviers car elles sont
souvent sur des niches de compétences. » (Fabrication
de préparations pharmaceutiques, sous-traitant
spécialisé dans la fabrication de formes injectables
stériles, Industries chimique et pharmaceutique)
APEC – Les difficultés de recrutements de cadres en production industrielle, dans les industries pharmaceutique et chimique
« On peut prendre de la prestation avec des sociétés
d’ingénierie comme pansement ponctuel. » (Fabricant
de préparations pharmaceutiques, sous-traitants de
produits cosmétiques, pharmaceutiques et ménagers,
Industries chimique et pharmaceutique)
• L’anticipation des besoins des entreprises devient
un enjeu majeur pour les organisations RH de ces
structures. Cela se traduit par l’élaboration d’une
GPEC structurée, d’un plan de succession, d’une
politique de gestion des talents de plus en plus
structurés et très en amont.
–Solutions mises en œuvre–
–
La mobilité interne comme
vecteur de recrutement privilégié
dans le secteur
–
Dans les secteurs de l’industrie pharmaceutique et
chimique, les entreprises recourent à la mobilité interne
en cas de difficultés de recrutement. Ce moyen semble
être la solution première en cas de besoin.
« Nous donnons la priorité aux recrutements internes
s’il y a un recrutement à prévoir à l’avenir. » (Fabrication
de préparations pharmaceutiques, sous-traitant spécialisé
dans la fabrication de formes injectables stériles,
Industries chimique et pharmaceutique)
Cette priorité aux ressources internes s’explique en
grande partie par la situation du secteur : des difficultés
qui apparaissent pour les sous-traitants, des tensions
générées par la situation économique et conjoncturelle
des activités (pression sur les prix, logique de rentabilité,
diversification produits...). Dans certaines entreprises, le
recours à l’externe peut être envisagé et possible si la
voie en interne n’a pas abouti, et lorsque les compétences
requises sont trop spécifiques.
« Les perspectives d’embauche sont moindres (…). On a
l’autorisation de recruter que si l’on justifie que l’on ne
peut pas se débrouiller en interne. » (Fabricant de
préparations pharmaceutiques, sous-traitants de produits
cosmétiques, pharmaceutiques et ménagers, Industries
chimique et pharmaceutique)
Par ailleurs, il est important de relever que, même en cas
de possibilité de recrutement à l’externe, les recrutements
internes semblent être largement prioritaires.
En conséquence, l’évolution professionnelle est très
présente dans ces secteurs. C’est un critère d’attractivité du
secteur, de savoir que l’on peut évoluer sur des postes à
responsabilité (mobilité ascendante) ou sur des postes de
même niveau mais dans des services/fonctions connexes
(mobilité horizontale). La pharmacie et la chimie sont des
secteurs industriels porteurs de projets et d’innovation qui
facilitent l’évolution professionnelle. Il n’est ainsi par rare
de faire monter en compétences des techniciens pour qu’ils
prennent en charge la gestion de projets qualité ou qu’ils
évoluent comme responsable de service par exemple (grâce
à la VAE, ou un parcours de professionnalisation). Il y a une
véritable volonté de dynamiser la gestion des carrières dans
ces secteurs, de garder les compétences formées, de gérer
les talents de demain.
« On fait monter en compétences par la formation sur
des postes bien précis.» (Fabrication de préparations
pharmaceutiques, sous-traitant spécialisé dans la
fabrication de formes injectables stériles, Industries
chimique et pharmaceutique)
« Possibilité de progression, notamment de profils
techniques vers des postes à responsabilité (…) pour les
profils assimilant très vite les compétences transverses
(…) car elles font défaut à beaucoup de monde même
à certains cadres expérimentés. » (École, Industries
chimique et pharmaceutique)
Ces mobilités internes sont possibles quand les cadres
possèdent les compétences et les traits de personnalité
attendus : comportements/personnalité, motivations,
compétences managériales, c’est-à-dire plus des soft
skills que des hard skills17. Et pour réussir ces
recrutements internes, les entreprises ont un processus
d’accompagnement des parcours professionnels très
structuré. Ainsi, sur les compétences techniques à
17.Contrairement aux softs skills qui
sont des qualités humaines et
relationnelles (écoute, pédagogie,
empathie, adaptabilité,
créativité…), les hard skills sont des
compétences techniques
mesurables et démontrables,
issues d’un apprentissage
technique.
APEC – Les difficultés de recrutements de cadres en production industrielle, dans les industries pharmaceutique et chimique
13
acquérir, des plans de formation sont mis en place
pour faire monter en compétences les salariés identifiés
ou remettre certains à niveau.
« On recherche des organismes de formation spécifiques
et on garantit à ces salariés plusieurs formations
annuelles pour les aider à développer ces expertises. »
(Fabrication de préparations pharmaceutiques, soustraitant spécialisé dans la fabrication de formes
injectables stériles, Industries chimique et
pharmaceutique)
D’une manière globale, des plans de succession et de
veille sur les postes critiques sont établis régulièrement
par les services RH afin d’avoir une visibilité à court/
moyen/long termes des besoins de l’entreprise.
Par ailleurs, les réseaux professionnels locaux (groupement
employeurs, associations RH, club RH…) semblent être très
utilisés par les fonctions RH des entreprises. Parfois ces
réseaux sont activés avant la publication d’offres
publiques (coûts moindres, recherche très ciblée).
« Je sais où aller chercher mes candidats. » (Fabricant
de préparations pharmaceutiques, sous-traitants de
produits cosmétiques, pharmaceutiques et ménagers,
Industries chimique et pharmaceutique)
« Nous savons s’il y a en interne un salarié prêt de suite
ou pas. » (Fabrication de préparations pharmaceutiques,
sous-traitant spécialisé dans la fabrication de formes
injectables stériles, Industries chimique et
pharmaceutique)
Enfin, l’utilisation des réseaux sociaux (Viadeo,
LinkedIn) peut se faire plus dans une logique de
communication (pour montrer la représentativité des
métiers) que de sourcing.
–
LA DIVERSITÉ DES canaux
de recrutement
–
–
Un travail sur l’image et de
communication
–
Lorsque les recrutements en externe sont possibles
ou lorsque les compétences recherchées sont très
spécifiques et non identifiables en interne, les
entreprises s’orientent dans un premier temps vers les
canaux de prospection traditionnels : elles diffusent
une offre sur des bourses d’emploi spécialisées cadres
ou sectorielles qui permettent d’attirer des fonctions
très spécifiques voire rares. Elles travaillent également
en étroite collaboration avec le LEEM pour la
diffusion de leurs offres afin d’avoir une visibilité
optimale.
L’image du secteur mais surtout le manque d’attractivité
de la fonction production industrielle peuvent être
source de tension. Pour agir contre ces représentations,
diverses actions sont menées par les entreprises, les
organismes de formation ou encore au niveau de la
branche pour communiquer le plus possible sur les
métiers, leurs objectifs, leurs intérêts et leurs perspectives.
« Tous les pharmaciens et autres ingénieurs qui sortent
de formation ou qui sont en recherche d’emploi postent
leur CV sur le site et cela fonctionne très bien. »
(Fabricant de préparations pharmaceutiques, soustraitants de produits cosmétiques, pharmaceutiques
et ménagers, Industries chimique et pharmaceutique)
Le cas échéant, si des difficultés de recrutement
apparaissent, les entreprises font appel à des cabinets
experts.
14
« On fait du recrutement par annonce pour des métiers
classiques ou du recrutement sur des compétences très
spécifiques via des cabinets de chasse. » (Fabrication
de préparations pharmaceutiques, sous-traitant
spécialisé dans la fabrication de formes injectables
stériles, Industries chimique et pharmaceutique)
« Il y a un manque d’attractivité, il faut avoir une
stratégie de développement et de promotion des
métiers notamment de production. » (Observatoire,
Industries chimique et pharmaceutique)
Cela peut prendre la forme de vidéos métiers, de
brochures métiers à disposition sur les sites Internet
mais surtout de contacts auprès des étudiants sur des
salons, des forums... Il faut également mieux mettre en
avant l’aspect innovant du secteur, en constant
mouvement, avec les différentes accélérations de
découvertes en termes thérapeutiques par exemple, ou
encore communiquer sur le nombre de recrutements
chaque année de la branche.
APEC – Les difficultés de recrutements de cadres en production industrielle, dans les industries pharmaceutique et chimique
Ainsi, une politique active en termes de
communication est utile pour valoriser les métiers de
production : mettre en avant les parcours, les valeurs
des métiers de production, communiquer sur les
réussites, notamment par la branche, pour mieux
informer les jeunes, les inciter et faire émerger des
vocations. Les enjeux ne se trouvent pas uniquement
du côté des entreprises ou au niveau de la branche
mais aussi dans les écoles.
–
L’ANTICIPATION DES besoins
par une meilleure connaissance
des métiers et des compétences
–
« Les entreprises doivent se déplacer sur les salons pour
être visibles et attirer notamment les jeunes, présenter
l’entreprise, les parcours, les projets (…) pour avoir des
candidatures de qualité. » (École, Industries chimique
et pharmaceutique)
« Un des leviers des entreprises pour faciliter les
recrutements est d’anticiper leurs futurs besoins. »
(Observatoire, Industries chimique et pharmaceutique)
« Sur les salons, les jeunes parlent de chef de projet, de
R&D (…). C’est un effet de mode car quand on sort de
l’école, on n’est pas chef de projet, on ne manage pas
des gens directement. » (Fabrication d’autres produits
chimiques organiques de base, Industries chimique
et pharmaceutique)
Dans certains territoires difficiles, mêmes les grands
groupes ont des difficultés dans la production pour
attirer les cadres et notamment les jeunes diplômés.
Malgré la renommée et une image de marque forte,
des difficultés peuvent exister.
« L’entreprise, malgré la renommée, est obligée d’aller
au-devant des jeunes, de faire du marketing. » (École,
Industries chimique et pharmaceutique)
« Il faut améliorer l’image du secteur et des métiers (…).
Faire plus de vidéos métiers et les diffuser sur le site
carrières et auprès des jeunes diplômés. » (Fabrication
d’autres produits chimiques organiques de base,
Industries chimique et pharmaceutique)
Par ailleurs, il peut être pertinent d’aller à la rencontre des
jeunes lycéens qui sont encore en découverte des métiers.
« Il faut communiquer très en amont de l’orientation
(…) pour faire émerger des parcours, les talents de
demain. Ainsi, nous travaillons en étroite
collaboration avec les académies, les conseillers
d’orientation. » (Observatoire, Industries chimique
et pharmaceutique)
Au niveau de la branche, des outils sont mis en place
pour mieux comprendre les métiers et les compétences
attendues par les entreprises.
Ainsi, un ADEC18 (Action de Développement Emploi
et Compétences) a été construit en partenariat avec
l’État et les branches à la suite du Contrat d’Etude
Prospective des industries de santé (CEP) conduit par
les partenaires sociaux et les pouvoirs publics en
2011 et 2012. L’objectif est de faire émerger des
pistes d’actions RH, en développant, par exemple, des
actions d’anticipation de l’évolution des métiers et
de l’emploi, notamment auprès des PME/TPE. Il
s’agit aussi de réaliser l’inventaire des compétences
stratégiques, mener des actions de formation des
salariés afin de développer leurs compétences et leur
employabilité pour sécuriser leur parcours
professionnel, et de valoriser les métiers dans une
logique de filière. Par ailleurs, l’observatoire travaille
également sur une cartographie des métiers
notamment dans l’optique de faire émerger des
passerelles entre les métiers.
« L’idée est de pouvoir affiner le contenu des métiers à un
niveau emploi par un travail en commun avec les entreprises,
les ressources documentaires existantes mais aussi avec les
autres branches proches comme la chimie sur des métiers
en commun notamment sur les profils techniques. »
(Observatoire, Industries chimique et pharmaceutique)
Cette cartographie doit permettre d’avoir une visibilité,
d’anticiper les évolutions des métiers et d’engager une
adaptation des formations en étroite collaboration
avec les régions et les organismes de formation. De
façon spécifique, l’Observatoire des métiers, de
l’emploi et de la formation des entreprises du
médicament entreprend des travaux sur les métiers et
leur évolution.
18.L’ADEC concerne l’ensemble de la
filière des industries de santé
(médicaments humains,
médicaments vétérinaires,
diagnostics in vitro, technologies
et dispositifs médicaux, dentaire,
optique, biotechnologies santé,
e-santé).
APEC – Les difficultés de recrutements de cadres en production industrielle, dans les industries pharmaceutique et chimique
15
–
LE RENFORCEMENT DE PARTENARIATS
ENTRE LES ENTREPRISES ET LES ÉCOLES,
ET LE RECOURS À L’APPRENTISSAGE
–
Le développement des partenariats écoles/
entreprises et de l’apprentissage semble constituer
des réponses aux difficultés de recrutement. Ces
partenariats, qui peuvent prendre différentes
formes (actions de proximité, rencontres avec des
salariés, accueil de stagiaires/apprentis,
parrainage de promotion…), sont avant tout des
vecteurs de pré-recrutement et permettent aux
entreprises de se constituer un vivier important de
jeunes diplômés.
« L’apprentissage et l’alternance, c’est aussi une voie
de pré-recrutement pour nous. Nous avons un vivier
existant que l’on utilise (…). 46 % des recrutements de
jeunes diplômés sont des conversions de stagiaires/
alternants en CDD ou CDI. » (Fabrication d’autres
produits chimiques organiques de base, Industries
chimique et pharmaceutique)
« Nous avons une politique forte sur le site d’accueil de
stagiaires et d’alternants car cela constitue le vivier de
compétences de demain. » (Fabrication de préparations
pharmaceutiques, sous-traitant spécialisé dans la
fabrication de formes injectables stériles, Industries
chimique et pharmaceutique)
Les partenariats participent au pré-recrutement de
futurs collaborateurs mais représentent aussi un
levier d’amélioration des cursus. Les industriels
locaux participent activement aux réflexions sur
l’ajustement des formations proposées par les écoles
aux besoins des entreprises.
« Les industriels font partie des comités de formation
des écoles (…). Les ajustements se passent donc assez
bien via leur influence et leur regard terrain. »
(Fabrication d’autres produits chimiques organiques
de base, Industries chimique et pharmaceutique)
Si les plus grandes entreprises nouent des
partenariats solides avec les plus grandes écoles
d’ingénieurs (généralistes ou spécialisées), elles
développent également des relations avec les écoles
locales. Cela semble plus difficile pour les plus
petites structures. Ces dernières pourraient
16
structurer leurs besoins, réfléchir à leur
communication et aux actions de partenariat via le
recours à l’apprentissage par exemple. Ces
partenariats sont déterminants pour constituer « la
main d’œuvre de demain », et pour faire évoluer les
formations, afin de préparer les jeunes de façon
adéquate aux besoins en compétences des
entreprises dans les prochaines années.
L’apprentissage est quant à lui fondamental pour
développer chez les jeunes l’opérationnalité et la
connaissance des « rouages » de l’entreprise. Il
permet de placer les jeunes en situation de travail
(tâches, environnement, normes, règles…), afin
d’améliorer leur pratique.
« Il faut faire évoluer les formations avec des temps
terrain beaucoup plus importants, jouer sur
l’opérationnalité (…). C’est presque le fil rouge de la
formation (…). Que les universités soient plus proches
du terrain, il faut faire venir des industriels pour
échanger avec les étudiants. » (École, Industries
chimique et pharmaceutique)
–
L’ÉLABORATION D’outils RH
et gestion des talents
–
Comme vu précédemment, dans les secteurs de la
pharmacie et chimie, les entreprises mobilisent en
priorité la mobilité interne pour les recrutements.
Ainsi, les outils de GPEC (repérage et gestion des
talents, plans de succession) apparaissent
fondamentaux dans les process RH des entreprises
rencontrées, notamment les grands groupes.
« On peut largement prévoir les mobilités à l’avance
avec nos systèmes de plan de succession et de veille
des postes critiques. » (Fabrication de préparations
pharmaceutiques, sous-traitant spécialisé dans la
fabrication de formes injectables stériles, Industries
chimique et pharmaceutique)
Ces outils permettent notamment de mettre en place
une cartographie des postes dits critiques, ceux à
expertises très pointues ou les postes de management
stratégique. Cela permet d’avoir une visibilité à long
terme des besoins de l’entreprise en termes de
compétences et de faire monter en compétences les
salariés ciblés.
APEC – Les difficultés de recrutements de cadres en production industrielle, dans les industries pharmaceutique et chimique
« Nous identifions les salariés prêts tout de suite à
prendre un nouveau poste, ceux prêts à 2/4 ans et
ceux à 3/5 ans (…). Nous savons s’il y a en interne un
salarié prêt tout de suite ou pas ou s’il y a un manque
et qu’il faut recruter à l’extérieur. » (Fabrication de
préparations pharmaceutiques, sous-traitant
spécialisé dans la fabrication de formes injectables
stériles, Industries chimique et pharmaceutique)
Les outils de GPEC participent aussi à la politique
d’attractivité des entreprises, en permettant des
opportunités d’évolutions professionnelles et de
salaires afin d’attirer et de garder les talents.
« Nous avons un important budget pour faire monter
en compétences nos talents. » (Fabrication de
préparations pharmaceutiques, sous-traitant
spécialisé dans la fabrication de formes injectables
stériles, Industries chimique et pharmaceutique)
Les salaires proposés sont souvent très compétitifs
par rapport à d’autres secteurs et ne constituent pas
un problème d’attractivité. Néanmoins, il y a une
dichotomie prégnante entre les Big pharma et les
PME. Les sous-traitants et les PME se doivent d’être
ingénieux pour compenser cet écart et attirer des
talents, comme les ingénieurs spécialisés. Ainsi, les
entreprises les moins attractives (salaires, marque
employeur, territoire…) pourraient davantage
valoriser leurs projets innovants et mieux valoriser les
candidats dès les recrutements, en créant par
exemple une histoire professionnelle commune.
« Les entreprises qui sont moins attractives, il faut
qu’elles aient quelque chose à mettre en avant pour
lutter (…). Il faut donner la sensation au candidat qu’il
va être pris en charge, qu’il est important, que vous
avez un avenir radieux avec des projets très
intéressants. » (École, Industries chimique et
pharmaceutique)
Par ailleurs, les entreprises pourraient mettre l’accent
sur les transferts de compétences et de savoirs des
cadres expérimentés vers les plus jeunes et ainsi
former des formateurs en interne (habilitation
interne, formation process et produits notamment à
travers la qualité).
« Les entreprises ont tout intérêt à garder et confirmer
leurs salariés âgés pour permettre le transfert de
savoirs et de compétences (…). Le tutorat est très
développé dans la branche et c’est primordial dans
notre secteur. » (Observatoire, Industries chimique et
pharmaceutique)
Enfin les certificats de qualification professionnelle
(CQP) permettent de faire monter en compétences
des salariés sur des postes de responsable ou
d’animateur d’équipe (1er niveau d’encadrement) ou
en contrôle qualité. Ces CQP sont très prisés par les
entreprises.
« Les CQP sont bien ancrés dans le paysage de l’offre
de formation et adaptés aux besoins des entreprises et
leur environnement (…). Ils sont une solution clé en
main pour les entreprises. » (Observatoire, Industries
chimique et pharmaceutique)
APEC – Les difficultés de recrutements de cadres en production industrielle, dans les industries pharmaceutique et chimique
17
–Parcours professionnels de cadres de la
Production : exemples de trajectoires et
perceptions sur les difficultés de recrutement–
–
Lucie, 37 ans, Manager Opérationnel, Packaging
–
Lucie, est manager opérationnel dans la branche conditionnement d’un sous-traitant
pharmaceutique depuis 2 ans et demi. Elle manage une équipe d’une cinquantaine de personnes
dont 6 responsables d’équipe sur 8 lignes de conditionnement en 3*8.
Formation
Son cursus n’a que très peu de lien avec son
poste actuel. De formation scientifique en
microbiologie, elle a eu un parcours en 3 étapes :
après un DUT en sciences techniques (« très
pratique avec un stage »), elle a réalisé une
maîtrise dans le même domaine (« très
théorique ») avant de se spécialiser en
microbiologie (DESS). Cette formation très
pratique avec un stage de fin d’études de 6 mois
a été « un bon tremplin pour la vie professionnelle ».
Son parcours montre une réelle volonté d’intégrer
le domaine pharmaceutique. Son recrutement
s’est fait grâce à ses expériences de stage
pendant ses études. « J’ai recontacté ma manager
par hasard et elle cherchait quelqu’un en CDD de
6 mois puis CDI. »
Trajectoire professionnelle
Cela fait 11 ans que Lucie travaille dans ce
groupe pharmaceutique. Le parcours qu’elle a
vécu montre les réelles possibilités d’évolution
que peut offrir ce secteur. Ainsi, après un début
de carrière très en lien avec sa formation, dans
le domaine de la qualité et des laboratoires, elle
évolue assez vite avec une opportunité d’intégrer
la production en tant que manager compliance,
poste intermédiaire entre la qualité et la
production. Cette évolution est un réel choix
personnel avec une « forte envie de découvrir
18
autre chose tout en conservant la partie
managériale ».
Elle décide, avec son employeur, il y a 4 ans, de
partir en mission en Angleterre dans un site de
l’entreprise dans le domaine de la qualité en
microbiologie. Lucie qualifie cette année,
« d’année clé » pour son l’évolution professionnelle
mais aussi d’une manière globale dans un
parcours professionnel. Cette volonté de
développer la compétence linguistique (l’anglais)
est très forte car pour Lucie, c’est aujourd’hui
« indispensable dans la ligne managériale » et
cela met en avant également « l’image d’une
personne qui se met en zone d’inconfort, démontre
une certaine motivation et capacité
d’apprentissage ».
Pour son retour en France, après plusieurs
entretiens de suivi et de préparation au retour,
elle souhaitait revenir dans la production. Deux
opportunités s’offraient à elle, la première dans
le conditionnement et la seconde dans le
remplissage. Ayant l’esprit de découverte et
attirée par de nouvelles perspectives, « j’ai choisi
le conditionnement car c’était une réelle
découverte en termes d’activité, d’environnement
et de collaborateurs alors que le remplissage,
j’étais déjà beaucoup en interaction avec ». Ses
missions aujourd’hui dans le conditionnement
consistent principalement au suivi et à la gestion
de la performance en atelier de production et au
management des équipes, à la gestion de cas
difficiles. In fine, les compétences qu’elle juge
APEC – Les difficultés de recrutements de cadres en production industrielle, dans les industries pharmaceutique et chimique
primordiales sont « la gestion de projet, la facilité
de communication, la fibre d’aller vers les autres,
de donner du sens au travail, de répéter, d’être
persuasive et d’avoir un niveau d’exigence envers
les collaborateurs tant en restant dans
l’empathie. ».
Ce qu’apprécie tout particulièrement Lucie, ce
sont les possibilités d’évolution dans l’entreprise,
« le turn-over interne est important, depuis 10 ans
j’ai fait 5/6 postes, c’est très appréciable ». Cette
mobilité est renforcée par les mesures mises en
place par l’entreprise : plan de succession,
détection des talents… Grâce à ces différentes
expériences, elle a une vision du site industriel
très large, elle connaît le fonctionnement et les
contraintes de tous les services. Elle s’enrichit de
cela, c’est son leitmotiv « le travail avec des
profils, des compétences… différents, au final on
s’enrichit de cela ».
Perception sur les difficultés
de recrutement
Les embauches étant mises de côté pour le
moment sur le site, il est difficile pour Lucie d’avoir
une vision sur les difficultés de recrutement.
Néanmoins, sa vision actuelle du secteur est plutôt
positive : « le marché est dynamique dans la région,
il y beaucoup d’offres d’emploi, plusieurs personnes
postulent autour de moi et ont des entretiens (…).
Cela bouge beaucoup au niveau de l’encadrement
». En l’interne, elle n’a pas l’impression qu’il y ait
des difficultés à recruter dans la fonction de
production. À l’inverse, certaines fonctions dans les
services techniques comme le conditionnement
peuvent manquer d’attractivité, avec une image «
archaïque de mise en carton » alors que ces métiers
(ingénieurs maintenance…) demandent des
compétences très techniques, très qualifiées, et «
qu’il est parfois très difficile de recruter en interne ».
Par ailleurs, Lucie met l’accent sur le fait qu’il est
« facile » d’aller de la qualité à la production, par
exemple, mais beaucoup moins l’inverse, « car
quand on est en production on voit la qualité
comme une contrainte ».
In fine, si un point devait être mis en avant sur
les difficultés de recrutement, il porterait sur
l’écart existant entre les jeunes formés et les
attentes opérationnelles. Pour Lucie, « on les met
en difficulté, car on attend d’eux une connaissance
du site et du secteur rapide, avec des prises de
décisions rapides ». De son point de vue,
l’accompagnement des nouveaux arrivants
cadres devrait être plus important, « il y a moins
de formalisme pour ce public et cela manque ».
Sur le même sujet, Lucie pense que l’apprentissage/
alternance est primordial pour commencer dans
la vie active. Outre se former sur des cas concrets,
cela permet aussi de se tisser un premier réseau
professionnel de plus en plus important par la
suite.
Enfin, elle accorde une place toute particulière
aux compétences transversales et aux
compétences comportementales dans les
recrutements en interne (voire externe en cas
d’ouverture de poste). « La technique, je n’y
accorde pas une grande importance cela
s’apprend (…) mais la partie posture managériale,
autonomie, motivation, c’est des fibres de base/
naturelles ».
Perspectives d’évolution professionnelle
Lucie commence à réfléchir à la suite après 2 ans
et demi à ce poste. « Au bout de 2 ans et demi
dans le conditionnement, je commence à vouloir
découvrir autre chose ». Sans plan de carrière
prédéfini, elle aimerait reprendre la voie
scientifique. Elle s’est ainsi positionnée
récemment sur un poste interne en qualité de
laboratoire : « Quand j’ai vu l’offre, je me suis dit,
c’est une opportunité à prendre de par mon profil
et cela reste un métier de management plutôt
qu’expert ». Pour l’avenir à moyen terme, elle ne
sait pas, et se questionne même « (…) pourquoi
pas faire autre chose et sortir de l’industrie ». En
termes de formation, ce qu’elle voudrait avant
tout, c’est pouvoir reprendre la pratique de
l’anglais dans son métier : « Dans mon futur, c’est
quelque chose que je voudrais voir plus présent ».
APEC – Les difficultés de recrutements de cadres en production industrielle, dans les industries pharmaceutique et chimique
19
–
Nathalie, 44 ans, Manager Opérationnel, Métrologie
–
Nathalie est manager opérationnel à la direction des services techniques d’un sous-traitant
pharmaceutique, dans le département métrologie depuis 2012. Elle a sous sa responsabilité
7 personnes. Ce service contrôle les instruments de production du site et leur validation
périodique.
Formation
Son parcours de formation est atypique dans le
sens où il s’est réalisé en deux temps. Tout
d’abord, une première formation en BTS
maintenance industrielle en 1997. Milieu plutôt
masculin, cette orientation est un vrai choix
personnel, adorant la technique et le travail
manuel. Après une première longue expérience
professionnelle, Nathalie fait le choix en 2008
de reprendre ses études « pour pourvoir évoluer,
pour m’ouvrir les portes, avoir plus de choix ». En
effet, après près de 10 ans dans l’entreprise et 8
ans sur le même poste (responsable d’équipe
conditionnement), elle se projette dans la suite
de sa carrière, souhaite changer de métier mais
avec son seul BTS et son expérience, elle sait que
c’est insuffisant pour accéder à d’autres postes.
Elle se lance ainsi, en accord avec son entreprise,
dans des études d’ingénieur généraliste sur une
période de 18 mois.
Trajectoire professionnelle
Titulaire d’un BTS en maintenance industrielle,
Nathalie, via son réseau postule dans une
entreprise locale de l’industrie pharmaceutique
alors en plein recrutement. Elle n’a donc aucune
difficulté à s’insérer sur le marché du travail. Elle
occupe un poste de technicienne de maintenance
au bloc seringue de l’entreprise. En 2001, elle
intègre le service conditionnement en tant que
responsable d’équipe. Après sa formation
d’ingénieur, en 2008/2009, elle intègre le
service méthodes maintenance pour intégrer en
2012 le poste de responsable opérationnel en
métrologie. Aujourd’hui, elle travaille en étroite
20
collaboration avec les services qualité et
production notamment avec un objectif de
simplification des procédures. Ses points forts
sont sa connaissance de l’entreprise et son
expérience de plusieurs niveaux hiérarchiques et
plusieurs services. Pour ce nouveau poste à
responsabilité, Nathalie a suivi deux formations
internes de certification car elle n’avait pas de
formation en métrologie à la base. In fine, ce fut
un challenge personnel : « le poste me semblait
intéressant, avec beaucoup de choses à améliorer,
à reconstruire et avec une partie technique et de
relations régulières avec la production mais aussi
l’assurance qualité ». Dans la métrologie,
l’approche est sensiblement différente des autres
services, avec un langage et des objectifs qui
différent : « il faut un discours qui fasse consensus,
être souple, avoir un relationnel aisé, une bonne
capacité d’adaptation et un bon mode de
communication ». Les compétences clés sont
pour elle, les compétences managériales et
organisationnelles (fixer des objectifs cohérents)
et avoir une certaine souplesse/adaptabilité.
Perception sur les difficultés de
recrutement
Aujourd’hui, il n’y a que très peu de postes
ouverts à l’extérieur car le site est en pleine
mutation organisationnelle. Néanmoins,
Nathalie évoque une expérience assez récente de
recrutement en CDD : « nous avons tenté il y a
un an de prendre un CDD mais nous n’avons pas
trouvé le bon profil. Par manque de candidatures,
ils sont tous en postes ». Au final, Nathalie
recourt, de temps en temps, à de la prestation.
Elle trouve ainsi les ressources, les compétences
APEC – Les difficultés de recrutements de cadres en production industrielle, dans les industries pharmaceutique et chimique
et les expériences adéquates malgré un surcoût
au final. Elle va même encore plus loin : « je peux
facilement trouver chez des prestataires des
compétences particulières et très opérationnelles
qui peuvent faire défaut dans mon équipe ». Son
regard sur les métiers est également très
intéressant et met en lumière la hausse de
qualification attendue par les entreprises.
Prenant l’exemple de la maintenance, elle
explique : « avant c’était plutôt des régleurs, en
première intervention, pas de gestion, de support
data, de planification ou gestion de projet. Mais
aujourd’hui c’est différent, on demande tout cela
avec en plus la compétence organisationnelle qui
va avec et la qualité ». Par ailleurs, elle met en
avant le changement de mode de fonctionnement
du secteur des industries pharmaceutiques ou du
moins de son site : « la pharmacie d’il y a 10/15
ans c’est fini ». Aujourd’hui la ligne à suivre c’est
le pilotage de la performance, la gestion par les
coûts, la maîtrise des processus et l’exigence des
résultats. Au final, cette mutation du secteur et
des organisations ne convient pas à tous : « Dans
l’état d’esprit, cela ne convient pas à tout le
monde. Donc nous avons beaucoup de turn-over
ces derniers temps dans tous les services et surtout
dans la ligne managériale ».
Concernant le renouvellement de la main
d’œuvre, l’apprentissage est, pour elle, le meilleur
moyen aujourd’hui pour se former quel que soit
le profil. L’accès aux écoles et aux étudiants ne
posent pas de difficultés majeures notamment
en apprentissage. Néanmoins, elle pointe du
doigt le relatif manque d’autonomie de ces
jeunes : « ils ont du mal à se positionner et à
prendre des initiatives ». Pour Nathalie, certains
modules de formation ne sont pas assez
dispensés ou du moins pas assez tôt dans le
parcours : « les jeunes mettent beaucoup de temps
à accepter les mises en situation assez rapidement
sur des projets, avoir des objectifs, présenter un
plan d’actions, un planning, les difficultés et
solutions envisagées… ». Ainsi, elle a par exemple
demandé à une école avec laquelle elle travaille
régulièrement d’avancer le module de gestion de
projet dans le parcours de formation. Une des
causes des difficultés de recrutement est donc
l’évolution technologique et la complexité des
processus qui va avec. Si l’on prend l’exemple de
la maintenance, « aujourd’hui les mécaniciens,
électromécaniciens sont dépassés par
l’automatisme et la complexité des process ». Il y
a une augmentation du niveau de qualification
attendu tant sur le plan technique que sur les
aspects comportementaux. Ce dernier aspect est
par ailleurs un point clé : « c’est très fortement
demandé en termes de changement pour nous en
CDI mais aussi dans les entretiens en recrutement
et avec les prestataires (…) C’est un facteur
déterminant pour évoluer ».
In fine, pour réduire les tensions dans l’entreprise,
Nathalie pense qu’il faut améliorer la partie
formation en interne et mieux accompagner les
nouveaux arrivants cadres notamment les jeunes.
Le développement de l’apprentissage, oui (« La
maturité n’est pas la même pour ceux passant par
l’apprentissage. Les jeunes en ressortent
grandis. »), mais aussi la montée en compétences
des personnes en position de formateur : « (…)
cela manque de remise en question avec un
niveau d’approche pédagogique qui n’est pas
forcément le bon. Un bon technicien ne fait pas
forcément un bon formateur ».
Perspectives d’évolution professionnelle
Suite à des mouvements de réorganisation dans
son service, Nathalie regarde un peu les
opportunités qui pourraient s’offrir à elle en
interne. Elle vient notamment de se positionner
sur un poste en maintenance, qui lui fera
néanmoins perdre la prédominance assurance
qualité/process dans son activité. Elle n’a pas de
plan de carrière prédéfini et est consciente que
cela peut nuire à son évolution en tant que
manager. Ce qui l’attire, c’est la diversité des
missions à faire au quotidien et elle n’est pas
fermée à d’autres industries dont les passerelles
avec l’industrie pharmaceutique sont proches
telles que l’agroalimentaire ou la chimie,
fortement présentes dans la région.
APEC – Les difficultés de recrutements de cadres en production industrielle, dans les industries pharmaceutique et chimique
21
–Méthodologie–
La méthodologie retenue est celle de l’enquête qualitative. Les entretiens
semi-directifs (33) ont été réalisés en face à face ou par téléphone auprès
d’acteurs concernés par des difficultés de recrutement sur les métiers en
production industrielle ou services techniques.
L’étude s’est focalisée sur quatre secteurs d’activité distincts, diversement
touchés par des problèmes de recrutement : Mécanique-métallurgie,
Automobile-aéronautique, Industries pharmaceutique et chimique, et
Agroalimentaire. Le choix de ces secteurs a été réalisé afin de rendre compte
de la diversité des industries et de leur spécificité (secteur traditionnel, de
pointe, emblématique, secteur avec implantation régionale…). L’approche
sectorielle permet d’appréhender les particularités des tensions et les
problématiques propres à chaque secteur.
Les entretiens ont principalement été réalisés auprès d’entreprises, de
structures ou d’organismes, présents ou spécifiques à chaque secteur à
investiguer : des entreprises (choisies de façon à répondre au mieux à la
diversité des activités présentes dans un seul et même secteur, selon les critères
de taille et de localisation), des branches professionnelles/observatoires de
branche, des écoles d’ingénieurs, des sociétés d’ingénierie et des cabinets de
recrutement.
Afin de compléter l’analyse, et dans un second temps, des entretiens ont été
conduits auprès de cadres travaillant ou ayant travaillé dans les secteurs
d’activité traités et d’étudiants, en écoles d’ingénieurs, spécialisés dans les
domaines étudiés.
Le terrain d’enquête a été mené par Sodie et le Centre Études & Prospective
du groupe Alpha, de janvier à mai 2016.
ISBN 978-2-7336-0946-0
L’étude a été réalisée par le département
études et recherche de l’Apec :
Pilotage de l’étude : Laurence Bonnevaux
Analyse et rédaction : May Cha, France Lhermitte
Direction du département : Pierre Lamblin
Toutes les études de l’Apec sont disponibles
gratuitement sur le site www.cadres.apec.fr
> rubrique observatoire de l’emploi.
© Apec, 2016
Cet ouvrage a été créé à l’initiative de l’Apec, Association pour
l’emploi des cadres, régie par la loi du 1er juillet 1901 et publié
sous sa direction et en son nom. Il s’agit d’une œuvre collective,
l’Apec en a la qualité d’auteur.
Association pour l’emploi des cadres
51 boulevard brune – 75689 Paris cedex 14
Centre de relations clients
L’Apec a été créée en 1966 et est administrée par les
partenaires sociaux (MEDEF, CGPME, UPA, CFDT Cadres, CFECGC, FO-Cadres, CFTC-Cadres, UGICT-CGT).
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