It Takes Two to Tango. La fusion : exercice de deux options réelles

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It Takes Two to Tango. La fusion : exercice de deux options réelles
It Takes Two to Tango. La fusion :
exercice de deux options réelles
Moez Souissi(*)
Pierre Lasserre(**)
Les contrôles préventifs des fusions, qui ont pour objectif d’évaluer ex-ante les conséquences
des fusions en matière de création de pouvoir de marché, ont également pour effet de retarder la
réalisation des fusions, qu’elles soient bénéfiques et créatrices de gains d’efficacité productive
ou non. Or, comme pour tout investissement, le choix de la date fait partie des décisions
endogènes susceptibles de distorsions.
Dans cette recherche, nous étudions cette dimension des fusions et montrons que ces dernières
interviennent de façon trop tardive en régime décentralisé, du point de vue des firmes
fusionnées. Indépendamment des coûts inhérents à toute intervention, une politique de la
concurrence qui retarderait les fusions alourdirait inévitablement les pertes de bien-être des
firmes fusionnées. Ce résultat provient du fait que la fusion est la décision simultanée de deux
firmes et que sa date résulte donc de considérations stratégiques de leur part.
Nous modélisons la fusion comme l’exercice simultané de deux options réelles et introduisons
deux mécanismes de négociation du partage de la rente de fusion: le jeu de Stackelberg et le jeu
de Rubinstein. Dans le premier, qui correspond aux fusions hostiles, une des firmes a la totalité
du pouvoir de négociation. Dans le second, qui correspond plutôt à des fusions amicales,
aucune des firmes n’a un avantage en termes de pouvoir de négociation.
Nous trouvons que, dans les deux cas, la négociation implique une distorsion de la rente totale
de la fusion par rapport à l’optimum de Pareto. Les fusions interviennent à des dates trop
tardives. Ce phénomène est plus marqué dans le cas de la fusion à la Stackelberg que dans le cas
de la fusion à la Rubinstein : toutes choses égales par ailleurs, les fusions hostiles interviennent
plus tard que les fusions amicales.
(*) Banque du Canada.
(**) Département des sciences économiques, UQAM ; CIREQ et CIRANO.
Les auteurs remercient l’Institut de finance mathématique de Montréal et le Conseil de recherches en sciences humaines du Canada
pour leur assistance financière. Moez Souissi remercie également l’Université de Toulouse de lui avoir fourni un cadre stimulant pour
une partie de cette recherche. L’article a bénéficié des commentaires des participants à divers séminaires, à la conférence de la Société
canadienne de science économique et à la Conférence Économie industrielle et politiques sectorielles (Paris, nov. 2004). Nous
remercions particulièrement les deux rapporteurs pour leurs suggestions.
Économie et Prévision
n°178-179 2007/2-3
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