: LOC NICE : NIC

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: LOC NICE : NIC
NiceNice
Quartiers
(Photos Michel Courboulex)
Les jardins cachés de l’Ariane
    Les noms des avenues rappellent la vocation ancienne du quartier
Tous les mercredis, notre chroniqueur
Michel Courboulex vous invite à découvrir
un quartier « côté jardin ». Essences rares,
arbres uniques : tout ce qu’il faut savoir
pour ne plus y voir que du vert…
S
i le fleuve Var joue clairement le rôle de
garde frontière de la commune de Nice,
le Paillon en est le sculpteur.
C’est lui qui a façonné notre large plaine alluviale si fertile. En fait, ce sont eux, car on
dénombre cinq paillons qui confluent pour
profiter d’un étroit passage entre les falaises de Bon-Voyage.
L’Ariane se situe en aval de cette cluse.
Avant les travaux d’endiguement réalisés
au XIXe siècle, la vallée se transformait en
marécages difficiles à cultiver car il suffisait d’un caprice du fleuve pour tout emporter.
C’est sans doute la raison pour laquelle
l’Ariane ne comptait dans les années quarante que quelques centaines d’habitants
et plusieurs moulins à huile mûs par l’eau
du Paillon ou de la Laoueta.
Nice a eu très faim pendant la guerre et
c’est en 1941 que les jardins ouvriers de la
ST2N ont été créés sur les pentes abruptes
qui dominent l’incinérateur. En contrebas,
les poireaux, cardons et topinambours de
la plaine de l’Ariane ainsi que les restanques complantées de fèves et de pois chiches ont sauvé les Niçois de la famine.
L’âge d’or du jardinage à l’Ariane s’est prolongé quelques années avant qu’un torrent de béton n’inonde durablement la
plaine. Nice a d’abord eu besoin de place
pour reloger les habitants de la vieille ville
expulsés de l’Îlot des Serruriers.
Puis l’Ariane est devenue terre d’accueil
pour les gens du voyage, pour les rapatriés
et pour les vagues d’immigration successives.
Respiration
Fort heureusement l’immobilier d’urgence
n’a pas tout englouti, les noms des minuscules avenues (Bleuets, Pâquerettes, Eglantines, Aubépines) typiques des lotissements niçois nous rappellent que de nombreux jardins privatifs sont toujours
cultivés à des fins ornementales ou potagères. L’avenue des Aubépines est
d’ailleurs bordée par un bel alignement
d’arbres de Judée qui terminent tout juste
leur splendide floraison. Mais la grande
respiration du quartier, c’est le Jardin Lecuyer. Sur un hectare et demi, ce site est un
véritable lieu de convivialité qui grouille de
monde lorsqu’il fait beau et pendant les vacances scolaires.
Les hommes s’adonnent aux plaisirs de la
pétanque, les mamans trouvent de l’ombre
sous les caroubiers et les gamins rivalisent d’audace pour se hisser tout en haut
d’une toile d’araignée rouge fluo.
Notez que c’est un jardin où l’on vous dit
bonjour même si vous n’êtes pas du quartier – ces signes de politesse sont si rares
de nos jours qu’ils méritent d’être signalés.
L’ex-chemin du vallon de l’Ariane est devenu une allée piétonne bordée de palmiers qui poussent à très grande vitesse.
Seul petit bémol, de l’autre côté de l’avenue
Emile-Ripert, de laids lés de plastique vert
façon plantations d’autoroute recouvrent
la terre du square.
On rêverait d’y voir pousser quelques engrais verts comme la phacélie, la luzerne
ou, mieux, des fèves qui rappelleraient le
temps où l’Ariane nourrissait les ventres affamés des quartiers huppés.
MICHEL COURBOULEX
Solutions locales pour un désordre global
L
e parc du Tripode qui domine
l’Ariane est un vaste espace de six
hectares trop peu connu des Niçois et
des Arianencs. On peut y pratiquer l’activité physique, botaniser ou simplement pique-niquer en profitant du voisinage on ne peut plus paisible du cimetière de l’Est.
L’originalité de ce parc réside dans sa
partie basse que la commune met à
disposition de deux associations.
Les jardins familiaux de l’AJFSA sont
gérés de manière classique : les parcelles sont attribuées contre un loyer
modéré et les heureux jardiniers culti-
vent en bio leur petit coin de paradis.
La terre, très marneuse, manque cruellement de matière organique mais retient bien l’eau quand on arrose avec
art.
Notez qu’une parcelle solidaire est cultivée en commun, sa production est
donnée à l’épicerie solidaire du quartier.
L’an dernier plus de 300 kg d’excellentissimes légumes bio ont été ainsi distribués.
L’APPESE joue la carte de la pédagogie
dans son jardin des Mamans et initie la
jeunesse de l’école primaire René-Cassin et du collège Maurice-Jaubert de
l’Ariane, et aussi celle du collège JeanGiono de Saint-Roch, aux contraintes et
aux plaisirs du jardinage.
La solidarité n’est décidément pas un
vain mot dans le quartier, Madame Anfossi, qui est quasiment née dans le vallon de l’Ariane, met gracieusement à
disposition de l’association une partie
de son terrain. Ce type de geste qui ne
coûte rien mais rapporte beaucoup de
chaleur humaine pourrait sans doute figurer dans le film Solutions locales pour
un désordre global que présentera demain Coline Serreau au Rialto.
M.C.

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