Bricorama : la justice pince le bricoleur du dimanche

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Bricorama : la justice pince le bricoleur du dimanche
Le travail du dimanche
Bricorama : la justice pince le bricoleur du dimanche
Libération, 9 novembre 2012 à 22:16
L’enseigne risque de devoir payer une amende de 37 millions à FO pour être passée outre un jugement interdisant
l’ouverture dominicale de ses magasins.
Par LUC PEILLON
Retour de flamme pour Bricorama. Engagé dans un bras de fer avec le syndicat Force ouvrière (FO), l’enseigne de
bricolage, qui a délibérément décidé de ne pas respecter une décision de justice lui imposant de rester fermée le
dimanche, pourrait avoir à payer plusieurs dizaines de millions d’euros à la confédération. Fixé sur son sort le 17 décembre
par le juge de l’exécution, le groupe menace désormais ses salariés de baisser leurs rémunérations, voire de licencier
une partie d’entre eux. Un poker menteur entre direction et syndicat qui, au-delà de ce cas, illustre l’incongruité de la loi
Maillé de 2009 sur l’ouverture des commerces le dimanche dans certaines zones géographiques, dernière et énième
législation d’exception au repos dominical.
Astreinte. L’affaire remonte au début de l’année. Traînée devant les tribunaux par FO, la chaîne de bricolage est sommée
en janvier - décision confirmée le 30 octobre en appel - de tirer le rideau le dimanche, sous peine de 30 000 euros
d’astreinte par semaine et par magasin resté ouvert illégalement. Aucun des établissements de Bricorama ne relève en
effet d’une des nombreuses dérogations au repos dominical prévues par la loi. Mais le groupe passe outre. Résultat :
pour ses 31 magasins franciliens - seuls à être ouverts le dimanche au sein de l’enseigne - la note atteint aujourd’hui la
coquette somme de 37 millions d’euros. «La loi, c’est la loi. Ce n’est peut-être pas agréable pour eux, on compatit, mais
c’est ainsi», explique Françoise Nicoletta, responsable de la fédération FO du commerce. «Jean-Claude Bourrelier [le PDG
du groupe] a voulu jouer au plus fort, il a perdu, mais il s’est mis tout seul dans cette situation», confirme Aline Levron, de
la fédération CFDT des services, qui ne s’est pourtant pas associée à l’action en justice. Et les syndicats de souligner que
la direction «n’a pas voulu négocier sincèrement».
Car jusqu’à jeudi soir, et pendant quarante-huit heures, l’enseigne et FO ont tenté de trouver un accord. «On leur a
proposé de transformer cette somme en treizième mois pour les salariés, mais ils n’ont rien voulu savoir»,rapporte FO,
qui estime que la rémunération triple offerte le dimanche n’est possible que pour les salariés franciliens, alors que le
treizième mois profiterait à tous. «Nous n’avons pas réussi à nous entendre , reconnaît l’entourage de la direction, car FO, par
ses exigences, mettait la société en danger.»
Signe de la tension qui règne au sein de l’entreprise sur le sujet : le dernier jour de négociation s’est tenu sur fond de
manifestation, devant le siège de FO à Paris, de 300 salariés de Bricorama… favorables au travail du dimanche. Sans doute
organisé en partie par la direction (le slogan des manifestants - «tous ouverts ou tous fermés» - est la ligne officielle de la
chaîne dans ses campagnes de lobbying), le rassemblement gêne néanmoins les syndicats. «Nous comprenons que les
salariés doivent régler leurs factures, mais si Bricorama ne payait pas ses employés aussi mal, la chaîne ne trouverait
personne pour travailler le dimanche» , fait remarquer Françoise Nicoletta.
Puce. Du côté de la direction, on avance la «concurrence déloyale»pour justifier le non-respect de la loi : «D’autres
magasins de bricolage ouvrent aussi de façon illégale, mais n’ont pas été traînés en justice.»Après une dernière
rencontre la semaine prochaine avec les concurrents, Bricorama indique se réserver ainsi le droit de les attaquer. Quant
à ceux qui respectent la législation, «ils se trouvent dans des zones leur donnant le droit d’ouvrir, mais qui s’arrêtent
parfois à quelques kilomètres seulement de nos établissements».
Une différence de traitement due aux Périmètres urbains de consommation exceptionnelle (Puce) nés de la loi
Maillé de 2009, et contre lesquels s’érigent aussi les syndicats. «Cette loi, en rajoutant un dispositif différent aux
nombreuses exceptions déjà existantes, a créé plus de problèmes qu’elle n’en a résolus, estime Aline Levron de la
CFDT. Au sein d’une même chaîne, par exemple, si un salarié travaille dans un magasin situé dans un Puce, il sera
payé double, mais pas si le magasin est implanté en zone touristique, alors qu’ils font exactement le même travail». Et
de dénoncer, eux aussi, une distorsion de concurrence entre les enseignes, suivant que le magasin de l’une ou de l’autre
est situé en Puce ou non. Aucun des syndicats, par ailleurs, ne croit non plus au volontariat instauré par cette loi. «Il faut
abroger la loi Maillé», demande aujourd’hui FO. Certains sénateurs socialistes sont pour. Pas sûr, cependant, que le
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gouvernement se lance dans cette nouvelle bataille.
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