LANDRON Pierre

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LANDRON Pierre
INSTITUT DE FORMATION EN MASSO-KINESITHÉRAPIE DE RENNES
Prise en charge d’un patient amputé bilatéral de membre inférieur en attente
d’un retour à l’appareillage
Intérêt du travail gymnique sur plan de Bobath dans la préparation à la marche
Pierre-Antoine LANDRON
Année scolaire 2009/2010
Selon le code de la propriété intellectuelle, toute reproduction intégrale ou partielle faite
sans le consentement de l'auteur est illicite.
Ministère de la Santé et des Sports
Région Bretagne
Institut de Formation en Masso-kinésithérapie de Rennes
Prise en charge d’un patient amputé bilatéral de membre inférieur en attente
d’un retour à l’appareillage
Intérêt du travail gymnique sur plan de Bobath dans la préparation à la marche
Travail Personnel présenté par :
Pierre-Antoine LANDRON
En vue de l’obtention du Diplôme d’État de Masseur-Kinésithérapeute
Année scolaire 2009/2010
Ce travail écrit de fin d’étude a été réalisé au Centre de Médecine Physique et Réadaptation
de Pen-Bron (44), durant le stage du 03 Août au 25 Septembre 2009.
Travail écrit de fin d’étude suivi par :
Madame Le Guen Martine, Cadre kinésithérapeute du CMPR de Pen-Bron
Monsieur Gain Hubert, CDSMK, Enseignant et Directeur de l’IFMKR
Résumé du dossier clinique :
Monsieur B., âgé de 42 ans, est admis au Centre de Rééducation et de Réadaptation Fonctionnelle
de Pen-Bron le 16 juillet 2007, pour une prise en charge rééducative postopératoire d’une double
amputation des membres inférieurs, datant du mois d’avril 2007.
L’origine de cette intervention chirurgicale est une complication d’une leucémie à mécanisme
septique, qui a évolué vers une nécrose sévère des extrémités des membres inférieurs.
Le suivi de ce patient s’est déroulé sur une durée de quatre semaines, à compter du 31 août 2009. A
cette date, Monsieur B. est en abstention prothétique, du fait de l’apparition d’une escarre de stade 3
au niveau de l’extrémité distale du moignon gauche.
Lors de cette période, l’objectif principal est de préparer au mieux le retour à l’appareillage et à la
marche. Les bilans initiaux ont révélé d’importants déficits articulaires au niveau des genoux, des
hanches et du rachis. Sur le plan musculaire, l’ensemble des muscles, des membres inférieurs et du
tronc, demeure déficitaire. Sur le plan psychologique, Monsieur B. présente un syndrome dépressif.
Des techniques d’assouplissements, de renforcement musculaire et de récupération de mobilité
articulaire ont été mises en place. Des exercices plus dynamiques, de type gymnique, sur plan de
Bobath, ont permis un travail sur le plan musculaire mais également, sur la mobilité de l’ensemble
du squelette.
Un bilan de fin de prise en charge vient objectiver l’évolution et l’efficacité du traitement de
rééducation de Monsieur B.. On constate une récupération partielle, mais réelle, de la mobilité des
articulations déficitaires et de la force musculaire. La plaie au niveau du moignon n’évoluant pas
positivement, un nouveau moulage a été réalisé afin de proposer à Monsieur B. une nouvelle
prothèse, basée sur une décharge distale et un appui sous rotulien.
Mots-clés :
Amputation
Amputé bilatéral
Membre inférieur
Appareillage
Prothèse
Schéma de marche
Moignon
Escarre
Travail gymnique
Quadrupédie
Rachis
amputation
bilateral amputee
lower limb
fitting
prosthesis, artificial limb
pattern
stump
bedsore
gymnastic work
quadrupedie
rachis
SOMMAIRE
INTRODUCTION……………………………….…………………………………………..……...…… p.1
I- CAS CLINIQUE : BILANS INITIAUX……………………………………………………..…………p.3
I-1- Présentation du patient…………………………………………………………….……….. p.3
I-2- Bilan des déficiences structurales et fonctionnelles………………………................ p.5
I-3- Activités et participation…………………………………………………………………..... p.11
I-4- Facteurs contextuels et environnementaux…………………………………..……….. p.12
I-5- Projet et attentes…..………………………………………………………………………....... p.12
I-6- Synthèse des bilans.………………………………………………………….…........... p.13
II- DIAGNOSTIC KINÉSITHÉRAPIQUE…………………………….…………………………………p.13
III- PROBLÉMATIQUE….…………………………………………….………………………………….p.14
IV- RÉÉDUCATION…………………………………………………………………………………...... p.16
IV-1- Objectifs…………………….........................……………………………………………......p.16
IV-2- Principes…………………..………………………………………………………………….. p.16
IV-3- Moyens……………………………….………………………………………………………... p.17
V- BILANS DE FIN DE PRISE EN CHARGE….…………………………………………………...... p.19
V-1- Bilan des déficiences structurales et fonctionnelles……..……………………........ p.19
V-2- Activités et participation………….…………………………………………………..........p.21
V-3- Analyse des écarts par rapport aux bilans initiaux………..………………............ p.22
VI- DISCUSSION……………………………………………………………………………………...... p.22
VII- CONCLUSION……………...………………………………………………………………………p.26
Références bibliographiques
Annexes
INTRODUCTION
Ce mémoire retrace la prise en charge d’un patient amputé bilatéral des membres inférieurs,
conséquence de complications d’une Leucémie Aigüe Myéloblastique.
La Leucémie Aigue Myéloblastique [1] est une forme de cancer, atteignant les cellules de la moelle
osseuse, productives des éléments figurés du sang (globules rouges, globules blancs et plaquettes).
Elle est potentiellement curable par des cures de chimiothérapie intensives. Le but est d’obtenir la
disparition des blastes anormaux. Malgré les traitements de consolidation et d’intensification, les
risques de rechutes restent relativement élevés. Les chances de rémission varient en fonction de
l’âge et des anomalies du caryotype des cellules myéloblastiques. Sans traitement, elle est
rapidement fatale, en raison des complications infectieuses et hémorragiques.
L’amputation est l’ablation d’un membre ou d’une partie de membre. Elle concerne les membres
inférieurs dans plus de 85% des cas. En France, les données épidémiologiques sur le sujet sont
pauvres et anciennes. En effet, il n’y a aucune donnée récente relative à la prévalence des amputés
de membre inférieur. Mais à titre indicatif, en 1990, l’incidence est estimée à 8 300 nouveaux cas
par an et la prévalence à 90 000. L’incidence est sensiblement la même actuellement avec 8 203
nouveaux amputés comptabilisés en 2001 et 7 825 en 2005 [2].
Les causes des amputations sont multiples, mais restent majoritairement la séquelle d’une
pathologie vasculaire (artérite). Toutefois, elles peuvent aussi être d’origine traumatique (accident
de la voie publique, de travail, domestique ou de sport) et dans des cas plus rares, d’origines
infectieuses, tumorales ou issues de malformations congénitales. L’amputation, selon le Professeur
Louis Pierquin : « est réalisée dans le but essentiel de sauver la vie du blessé ou du malade.
Parfois, la raison est différente : le segment de membre est enlevé parce qu'il occasionne une gêne
importante (douleurs, encombrement). Cela reste exceptionnel » [3].
L’amputation du membre inférieur altérant les appuis, l’équilibre et la marche, se traduit non
seulement par un handicap définitif, mais également par une dégradation marquée de la qualité de
vie. Il est essentiel, dans la mesure du possible, de restaurer la locomotion bipédique de la personne
amputée, par le recours à l’appareillage.
L’espoir d’une récupération de la marche dépendra de la motivation du patient et de sa capacité à
utiliser la prothèse.
1
Dans le cas d’une amputation bilatérale, la reprise de la marche est compromise. Elle dépendra de
l’état général et de l’investissement du patient. Le niveau d’amputation et le choix de l’appareillage
influenceront directement sa qualité et son coût énergétique.
D’après le docteur Doménico Ménager : « L’amputation d’un membre inférieur constitue pour la
personne qui la subit, une épreuve à la fois physique et psychologique majeure. L’évidence de la
déficience, associé à celle de la perte corporelle, est immédiate, et l’espoir d’une éventuelle
récupération de la fonction repose entièrement sur les vertus du futur appareillage » [4].
L'amputation est vécue comme un drame humain, quelqu’en soit son niveau. Elle touche
douloureusement le malade dans son intégrité physique et bouleverse sa manière de vivre.
Le rôle du kinésithérapeute est d’accompagner le patient amputé dans son nouveau schéma corporel
[5] et de le préparer à l’appareillage. Un retour à domicile appareillé est le témoin d’une évolution
favorable.
La difficulté réside dans le vécu psychologique du patient. Ce dernier voit son équilibre
psychologique bouleversé, par la perte d’une partie de soi et l’entrave de son autonomie. La
personne rentre alors dans un travail de deuil aboutissant à l’acceptation [6]. Néanmoins, la perte
d’une partie de membre et l’acceptation du handicap peuvent être perturbées par la présence de
sensations parasitaires appelées « douleurs de membre fantôme » [7]. Le cheminement des étapes du
deuil variera selon l’étiologie de l’amputation et le fait qu’elle soit préparée ou non.
Inéluctablement, chaque patient vivra ce traumatisme à sa façon et le travail de deuil se fera plus ou
moins rapidement.
Mon sujet de mémoire de fin d’étude s’est porté sur ce patient, Monsieur B., pris en charge au
centre de Pen-Bron, et plus particulièrement, sur l’histoire de sa maladie et des caractéristiques qui
en découlent. Des bilans initiaux et le diagnostic kinésithérapeute ont permis de dégager ma
problématique et d’axer mes recherches.
La prise en charge de ce patient a pris effet le 31 août jusqu’au 24 septembre 2009 (28 mois
postopératoire). Durant cette période, il me rencontre, tous les jours de la semaine, matin et aprèsmidi
en
séance
de
45
minutes,
sur
le
plateau
technique
du
Centre.
2
I- CAS CLINIQUE : BILANS INITIAUX
L’ensemble des bilans de début de prise en charge a pu être réalisé à partir : du recueil de données
du dossier médical (catamnèse), d’un interrogatoire (anamnèse), de l’observation, de la palpation et
de différentes mesures goniométriques et centimétriques.
Remarquons qu’il est relativement aisé de communiquer avec Monsieur B. car il ne souffre d’aucun
trouble cognitif, visuel et auditif.
I-1- Présentation du patient
Ancien responsable d’atelier, Monsieur B., âgé de 42 ans, est en arrêt maladie longue durée
(A.L.D.) depuis septembre 2007. Il est hospitalisé le 16 juillet 2007, au CMPR de Pen-Bron, pour
une prise en charge rééducative postopératoire en vue d’un appareillage, suite à une amputation
sous le genou des deux membres inférieurs (datant du 15 mai 2007).
Principaux antécédents médicaux :
En 1986 : une leucémie aigüe myéloblastique (LAM), traitée par poly-chimiothérapie.
Une péricardite et une aspergillose pulmonaire à la suite du traitement de la LAM.
En 2002 : une embolie pulmonaire. Depuis, on relève un tabagisme sevré (20 Paquets-année).
Histoire de la maladie :
Le diagnostic de récidive de Leucémie Aigüe Myéloblastique est posé en novembre 2006. Il en
découle la mise en place d’un traitement par poly-chimiothérapie. Celui-ci a permis une rémission
complète, évaluée par myélogramme en janvier 2007. Alors qu’il est en aplasie au mois de mars,
Monsieur B. va présenter un choc septique sur cholécystite (septicémie à point de départ biliaire).
Le patient sera transféré en service de réanimation pour subir très rapidement une cholécystectomie.
En avril 2007, ce sepsis aura pour complication majeure, une nécrose sévère des extrémités des
deux membres inférieurs. Une double amputation est alors programmée en urgence, d’une part, au
niveau du tiers moyen de la jambe droite et de l’autre, au niveau du ligament de Chopart sur le
membre inférieur gauche (amputation de Chopart) [8]. Par la suite, les deux moignons se sont
cicatrisés en l’espace de 7 semaines et sans complication.
En juin 2007, le patient signale des douleurs du rachis. Une IRM est prescrite et révèle des
anomalies diffuses des corps vertébraux au niveau dorsolombaire. Dès juillet 2007, un corset
thermoformé est réalisé à partir d’un moulage plâtré. En septembre 2007, l’apparition de douleurs,
suppléée par la limitation articulaire dans tous les secteurs de mobilité de la hanche gauche, vont
3
révéler une arthrite infectieuse sévère, appuyée par des examens complémentaires mentionnant une
ostéonécrose de la tête fémorale et un enraidissement des parties molles. Un lavage propre septique,
ainsi qu’une résection de la tête et du col fémoral seront opérés en février 2008. De retour au centre,
un traitement anti-biothérapique adapté est mis en place et une traction quotidienne au lit est
réalisée au niveau de la hanche opérée. En novembre 2008, s’effectue l’arthroplastie totale de
hanche à gauche. La rééducation, au Centre de Pen-Bron, de la hanche opérée, s’est poursuivie par
le début de l’appareillage en février 2009. Depuis cette date et jusqu'au mois de juin, l’évolution de
la phase de prothétisation fut favorable. Pour commencer, Monsieur B. est passé de la position
debout avec prothèses, jusqu'à la marche dans les barres parallèles. Il a ensuite utilisé un
déambulateur, puis deux cannes anglaises. Au mois de juin 2009, son périmètre de marche s’évalue
à 70 mètres, correspondant à la distance entre sa chambre et le plateau technique. Sur le versant de
l’autonomie dans le chaussage et le déchaussage des prothèses, Monsieur B. met seul sa prothèse
droite, depuis le mois de mars, mais manque de flexion du tronc pour sa prothèse du membre
inférieur gauche. Le choix du type de prothèse s’est tourné vers une emboîture classique par
accroche distale (type plongeur) pour la jambe droite, mais pour la gauche, le type d’amputation et
la forme du moignon ne permettent pas un appareillage classique, le choix s’est porté sur un
appareillage associant une chaussure orthopédique et une orthèse de cheville et de jambe (ANNEXE 1).
Sur le plan radiologique, on retrouve en avril 2009, un pincement articulaire significatif d’une
chondropathie évolutive au niveau de la hanche droite. A l’avenir, en fonction de la clinique, il sera
question d’une arthroplastie totale de hanche. Le patient se plaignant de douleurs aigües, localisées
au niveau de l’épaule droite, des clichés radiologiques sont réalisés début juin 2009. Le compterendu fait part de nombreuses anomalies, notamment, un remaniement complexe de l’extrémité
supérieure de l’humérus et une nécrose antérieure de la tête humérale. L’équipe médicale décide
donc de ne pas sur-solliciter les épaules, par un travail de renforcement musculaire en séance de
kinésithérapie et prescrit l’acquisition d’un fauteuil roulant électrique.
Suite à une agressivité verbale à répétition de la part de Monsieur B., accompagnée d’une baisse de
volonté dans le travail en kinésithérapie, l’équipe de soins lui permet, dans un but thérapeutique, un
retour à domicile en juillet, pour une durée de deux semaines. Le séjour fut écourté par l’apparition
d’une escarre de stade 3, localisée au niveau de l’extrémité distale du membre inférieur gauche.
Cette plaie est survenue, suite à une dernière modification avant la sortie, des points d’appui de
l’appareillage gauche. De retour au centre, sont entrepris la reprise des soins du moignon (protocole
pansement escarre, avec suivi de l’évolution de la plaie) et les arrêts provisoires de l’appareillage et
de tout appui, le temps de la cicatrisation. Cependant, il reste possible pour Monsieur B. de
retourner à son domicile les week-ends, tout comme il le faisait depuis le mois de mai.
4
I-2- Bilan des déficiences structurales et fonctionnelles
Monsieur B. est un homme droitier, pesant 73 kg.
Avant ses amputations, il mesurait 1m86 pour 76 kg → IMC = 21.97
Bilan des déficiences posturales :
- En position assise : de profil, on remarque une statique dorsale en rectitude et sur le plan frontal,
on observe une épaule gauche ascensionnée.
- En position allongée : on remarque un flessum important de hanche et de genou, ainsi qu’un équin
au niveau de la talo-crurale gauche.
Une mesure centimétrique, à l’aide d’un mètre ruban, n’a pas révélée une inégalité de longueur des
segments fémoraux :
EIAS Sus patella = 53 cm
Grand Trochanter Sus patella = 42 cm
pour les deux membres
Déficience liée à la douleur :
- Évolution depuis son entrée au Centre de Pen-Bron : Le traitement de la douleur éprouvée par
Monsieur B., durant sa prise en charge au Centre et jusque fin juillet 2009, a progressivement
diminué. Les douleurs articulaires dorsolombaires intenses et difficilement contrôlables à l’origine,
restent présentes, mais de façon plus modérée. Un sevrage du corset thermoformé demeure
concluant, relayé par un corset souple de maintien dorsolombaire. Aujourd’hui, il est utilisé
uniquement pour les déplacements automobiles. Depuis la mise au repos relative de l’épaule droite,
celle-ci devient modérément algique. Le traitement antalgique tend à diminuer après la double
amputation. Sous morphiniques à fort dosage et en continu en PCA au début du séjour, les
antalgiques de palier 3 sont désormais prescrits par voie per-os.
- Évaluation au début de la prise en charge : Spontanément, le patient ressent une douleur de repos
en position assise, au niveau lombaire, qu’il décrit comme chronique depuis son hospitalisation au
Centre, mais qui tend à diminuer. Sa douleur est évaluée à 3 sur l’Echelle Visuelle Analogique
(EVA). Selon lui, les douleurs restent modérées (EVA à 2) mais diffuses sur l’ensemble du rachis
thoraco-lombaire, lors de mobilisations actives de type transferts, et associées à une sensation de
raideur importante.
5
À l’interrogatoire, on retrouve des douleurs mixtes (mécanique et inflammatoire) de l’épaule droite,
cotées à 3 sur 10. Depuis l’acquisition d’un fauteuil roulant électrique, la douleur s’est vue
diminuer.
Au niveau de son escarre du moignon gauche, la douleur est évaluée à 3 sur 10 et au niveau du
moignon du membre inférieur droit, aucune douleur à la palpation n’est remarquée.
Aussi, le patient ne ressent aucune douleur de type membre fantôme.
De façon générale, Monsieur B. se dit soulagé par le traitement médicamenteux antalgique en place:
- Doliprane 1000mg (antalgique de palier I)
- Oxycontin LP 5mg (antalgique de palier III)
- Topalgic 50mg (antalgique de palier II)
Déficiences cutanées-trophiques-vasculaires :
- Sur le plan cutané : Au niveau du moignon droit, on observe une cicatrice distale transversale, non
inflammatoire. Au niveau du moignon gauche, une escarre de stade 3 (4x3cm) est présente sur le
talon. Un pansement, réalisé 3 fois/semaine, la recouvre (réfection du pansement selon le protocole
escarre du Centre). D’autre part, la cicatrice de la hanche gauche reste fine, non inflammatoire, non
douloureuse et non adhérente (voie d’abord postéro-latérale). Du côté des points d’appuis,
notamment du sacrum et des ischions, la peau ne présente pas de lésions ou de rougeurs cutanées.
- Sur le plan trophique : L’extrémité distale du moignon gauche est oedématiée (signe positif du
godet au niveau de la talo-crurale) et inflammatoire. Il s’avère plus chaud, comparativement au
membre inférieur controlatéral. Monsieur B. porte quotidiennement son manchon siliconé droit, afin
de maintenir le volume de son moignon.
Mesures périmètriques (en cm) =
Localisation de la mesure :
+5:
Sus-patella :
Sous-patella :
-5:
- 10 :
- 35 :
- 40 :
- 45 :
- 50 :
Membre inf. droit
Membre inf. gauche
38.5
39
37
35
33
38.5
40
38.5
36
34
23.5
27
34.5
32.5
6
- Sur le plan vasculaire : Au niveau du risque thrombo-embolique, l’examen clinique n’a pas révélé
d’élément en faveur d’une thrombose veineuse profonde (phlébite).
Signalons la mise en place d’un traitement anticoagulant préventif (HBPM).
Déficience de sensibilité :
Monsieur B. signale une sensation de membre fantôme, sans pour autant qu’il la ressente comme
désagréable, ni douloureuse. Cette sensation ayant évolué favorablement depuis l’intervention
d’amputation.
- Sur le plan superficiel : Mise en évidence d’une perte de sensibilité extéroceptive (épicritique et
thermo-algique) en-dessous des malléoles du membre inférieur gauche et sur les pourtours de la
cicatrice du moignon droit (évaluation au test du pique-touche et au test du chaud-froid).
- Sur le plan de la sensibilité profonde (kinesthésique et statesthésique) : Pas d’altération constatée
(évaluation aux tests de la position articulaire et de reproductibilité du mouvement yeux fermés).
Déficience de mobilité articulaire :
Déficience de la
mobilité articulaire passive
Une mobilisation passive des patellas a permis au préalable de s’assurer de leurs mobilités
transversales et longitudinales.
Grâce à des mesures de précautions minutieuses, les mouvements à risque luxant* de la hanche
opérée (arthroplastie de la hanche gauche) ont pu être évalués.
Membre inf. droit
Membre inf. gauche
Norme
100°
-15°
25°
25°
15°
100°
-15°
25°
15°
25°
140°
15°
45°
50°
30°
105°
90°
-5°
115°
95°
-5°
160°
HANCHE :
Flexion (genou fléchi) *
Extension (genou tendu)
Abduction
Rotation latérale
Rotation médiale *
GENOU :
Flexion (hanche fléchie)
Flexion (hanche tendue)
Extension
0°
7
Les mesures goniométriques, réalisées au niveau des deux membres inférieurs du sujet, mettent en
évidence des déficits globaux de mobilité articulaire, avec notamment des flessums bilatéraux de
hanche (15°) et de genoux (5°).
Le type d’arrêt ressenti est ferme et douloureux pour l’ensemble des limitations articulaires, avec
entre autres, des douleurs plus importantes exprimées au niveau de la hanche droite.
L’articulation de la talo-crurale gauche est fixée en extension de 25°. La mobilisation passive est
non douloureuse et ne permet pas de réduire cet équin. Relevons la réalisation d’une traction antiéquin au lit, sur une période de deux mois (septembre et octobre 2007) qui s’est avérée vaine.
Les mesures goniométriques de flexion des genoux, hanche fléchie et tendue, révèlent une hypoextensibilité des droits antérieurs.
Déficience de la
mobilité articulaire active
- Au niveau des membres inférieurs :
Membre inf. droit
Membre inf. gauche
Flexion (genou fléchi) *
95°
90°
Extension (genou tendu)
Abduction
Rotation latérale
Rotation médiale *
-15°
20°
20°
10°
-15°
20°
15°
25°
100°
-7°
110°
-7°
HANCHE :
GENOU :
Flexion (hanche fléchie)
Extension
Les déficits d’amplitudes articulaires sont sensiblement les mêmes que les passifs.
Les mobilisations actives de la hanche droite sont douloureuses en fin d’amplitude.
- Au niveau des membres supérieurs :
Les membres supérieurs sont évalués subjectivement, de façon fonctionnelle.
On demande au patient: de lever les bras en flexion, puis en abduction maximales.
de porter sa main gauche, puis la droite à la bouche, sur la tête, sur
l’épaule controlatérale, derrière la tête et au niveau lombaire.
On ne constate pas de limitation significative pouvant réduire la fonctionnalité des membres
supérieurs. La douleur tend à augmenter lors de mouvements d’amplitudes extrêmes.
8
- Au niveau du tronc :
Au vue d’une raideur rachidienne visible lors des transferts, il semblait judicieux d’évaluer la
mobilité vertébrale.
La position debout n’étant pas possible, les tests de Schöber étagé et Schöber étagé inversé furent
réalisés en position quadrupédique.
Mobilité du rachis en flexion/extension: Schöber étagé
Quadrupédie:
L5
Repos
10
10
10
10 cm
Flexion (dos rond)
+1
+1
+1
+0.5
+3.5
Extension (dos creux)
-0.5
-0.5
-0.5
0
-1.5
Normes (en examen debout) :
en flexion N = + 5cm, puis décroît au fur et à mesure que l’on s’élève dans le rachis
en extension N = -2cm
Bien que cette évaluation n’ait pu être réalisée dans les conditions strictes du test de Schöber, les
résultats donnent une représentation de la raideur rachidienne importante du patient. Ils pourront
être confrontés avec ceux obtenus, lors des bilans de fin de prise en charge.
La mesure des inclinaisons du rachis thoraco-lombaire s’est déroulée en position assise, bord de
inclinaison droite = 9cm
table, avec mesure de la distance coude-table :
inclinaison gauche = 11cm
La mesure de la rotation du rachis thoraco lombaire s’est effectuée en position assise, bord de table :
Norme de 35°
rotation droite = 27°
rotation gauche = 30°
(5° en lombaire/30° en thoracique)
Pour les mobilités du rachis cervical, les mesures relevées ne présentent pas de déficits articulaires.
Mesure des flèches sagittales :
C3 = 85mm (N= 40 à 65mm)
C7 = 55mm (25 à 45)
T6 = 0mm
(0)
L3 = 15mm (25 à 45)
S2 = 0mm
(0)
On constate un effacement de la courbure lombaire et une accentuation de la cyphose dorsale.
Une évaluation subjective de l’amplification thoracique, basée sur l’observation, ainsi que sur un
accompagnement manuel des mouvements costaux, lors de la respiration normale puis forcée, n’a
pas
révélé
de
déficit
significatif
de
mobilité
articulaire
de
la
cage
thoracique.
9
Déficience Musculaire :
- Trophicité musculaire : À l’examen palpatoire, on apprécie une tension musculaire bilatérale
marquée au niveau des psoas et des contractures localisées au niveau des paravertébraux.
- Force musculaire (cotation musculaire de 0 à 5, type testing) : L’ensemble des muscles des
membres inférieurs (psoas, grand fessier, moyen fessier, quadriceps et ischio-jambiers) est coté à 4.
La consigne médicale étant de ne pas sur-solliciter les épaules, l’évaluation musculaire des
membres supérieurs n’a pas été réalisée, mais il est estimé une force suffisante, nécessaire aux
transferts de Monsieur B.
Les muscles antérieurs et postérieurs du tronc ont été évalués lors du maintien de l’équilibre, en
position assise, face à des poussées déstabilisantes. On ne relève aucun déficit notable.
État psychologique :
Depuis son entrée au Centre de rééducation, Monsieur B. présente un syndrome dépressif
réactionnel.
Il s’agit d’un état psychologique fragile, dû à une situation de santé complexe,
ponctuée par des complications multiples. Aussi, une situation familiale difficile, se traduisant par
l’altération de la relation avec sa compagne et le manque de contact avec sa fille, accentue sa
fragilité. Des épisodes aigus de détresse psychologique, avec des troubles du sommeil, des pleurs,
des idées suicidaires et une agressivité envers son entourage et le personnel soignant, se sont
manifestés tout au long de son hospitalisation au Centre. La psychologue du Centre de Pen-Bron
assure un suivi depuis son entrée, à raison d’un entretien par semaine et plus si besoin. Monsieur B.
bénéficie également de séances auprès d’un psychomotricien (un rendez-vous tous les 15 jours sur
une séance de 30 minutes) pour un travail de relaxation dynamique, basé notamment sur la
respiration.
Une prise en charge médicamenteuse est associée :
Effexor LP 75mg (antidépresseur), traitement de la dépression.
Imovane 7.5 au coucher (hypnotique), traitement des troubles sévères du sommeil.
Durant les premières séances rééducatives, Monsieur B adopte une attitude défensive.
Il dit être lassé par le travail réalisé en kinésithérapie, qui ne montre pas suffisamment de résultat.
10
I-3- Activités et participation
Activités :
Monsieur B. se déplace de façon autonome en fauteuil roulant électrique, au Centre et durant ses
sorties le week-end. Ses déplacements sont réalisés de manière fluide et sécurisée. A ce jour, la
marche n’est pas possible, du fait de l’interdiction du port de sa prothèse à gauche. On note une
autonomie dans le chaussage de sa prothèse droite, ce qui lui permet quotidiennement, une brève
verticalisation dans les barres parallèles.
L’équilibre en position assise (au fauteuil et au bord de table sur le plateau technique) n’est pas
altéré. Monsieur B. peut maintenir la position yeux fermés, en résistant à des déstabilisations
externes.
Le patient réalise seul ses transferts du fauteuil au lit ou sur la table de kinésithérapie et
inversement. Il est capable de se rehausser et de se retourner au lit et sur table de Bobath. Les
transferts, bien que réalisés avec sécurité, révèlent une raideur générale et particulièrement marquée
au niveau de la colonne rachidienne. En effet, le passage d’une position à une autre est relativement
lent et manque de fluidité. Concrètement, il lui faut 44 secondes pour effectuer le passage assis bord
de table de Bobath, à genoux dressés.
En outre, il est constaté un déconditionnement à l’effort du patient. La nécessité de fragmenter et
d’écourter la durée des premières séances se présente alors.
Au niveau des actes de la vie quotidienne, seuls la toilette et l’habillage appellent à une aide
partielle pour l’extrémité du membre inférieur gauche.
Le score de la MIF est de 109/126 (ANNEXE 2).
Participation :
En arrêt de travail depuis novembre 2006 et en ALD depuis septembre 2007, Monsieur B. est
hospitalisé dès le diagnostic initial de LAM. A partir de juillet 2007, il intègre le CMPR de PenBron, mais profite cependant des week-ends, depuis le mois de mai 2009, pour retourner à son
domicile.
Sa situation médicale représente un réel obstacle dans sa vie sociale et il connaît depuis deux ans,
un éloignement de son entourage.
Ses principaux loisirs étaient le bricolage et le jardinage, pour lesquels il passait la majeure partie de
son temps libre. Aujourd’hui, lors de ses week-ends à domicile, ses activités se voient réduites.
À son arrivée au Centre, il s’est initié à l’informatique.
11
I-4- Facteurs contextuels et environnementaux
Monsieur B. réside en campagne, à proximité de Redon, dans une maison à étages. Il est en
concubinage et vit avec sa fille de 8 ans. Des amis ont réalisé un aménagement provisoire, au
niveau de l’accès à l’habitation (rampe d’accès), ce qui lui permet de rentrer à domicile les weekends. Cependant, dans l’état actuel des choses, la maison n’est pas adaptée au handicap de Monsieur
B. comme lieu de vie à plein temps.
I-5- Projets et attentes
Afin de retrouver une autonomie qui lui permette de réaliser seul les actes de la vie quotidienne,
Monsieur B. souhaite, au travers de cette prise en charge au Centre de Pen-Bron, bénéficier d’un
appareillage, dans le but d’effectuer des petits déplacements dans sa maison. Néanmoins, il compte
sur son fauteuil roulant ou encore, sur l’acquisition future d’une voiture adaptée, pour les
déplacements plus importants.
Le projet principal de Monsieur B. est de retourner habiter dans sa maison, afin d’y retrouver un
environnement familier et par la même, s’éloigner des établissements médicaux. Il veut ainsi
regagner une situation familiale qui était la sienne, avant ses problèmes de santé et souhaite voir
grandir sa fille en se rapprochant d’elle, chose qu’il n’a pas pu faire depuis plus de deux ans. Un
retour à domicile est envisagé et se prépare. Pour ce faire, accompagné de l’assistante sociale et de
l’ergothérapeute, il entreprend la démarche de monter un dossier d’aide à l’aménagement du
domicile auprès de la MDPH et sollicite les différentes aides nécessaires auprès de l’ANAH et du
Conseil Général. La solution retenue est un projet d’adaptation du garage en chambre avec salle de
bain à l’italienne.
Par la suite, il continuera d’être suivi au Centre de Pen-Bron mais en Hôpital de jour (HDJ). Aucune
décision concernant sa situation professionnelle n’est prise. Toutefois, il émet l’hypothèse de
retrouver un poste aménagé au sein de son entreprise, dans laquelle il garde de nombreux contacts.
En mai 2009, il effectue un essai concluant de conduite automobile, avec l’ergothérapeute qui a
évalué ses capacités lors des transferts au véhicule, son adaptation à la spécificité de la voiture et sa
vigilance lors de la conduite sur route. Une visite médicale, datant du 01 septembre 2009, a validé
son permis de conduire. Il restera l’acquisition d’un véhicule et son aménagement, avec l’ensemble
des commandes au volant.
12
I-6- Synthèse des bilans
Les bilans initiaux ont mis en évidence :
- Une impossibilité de marcher, due à l’arrêt provisoire de l’appareillage gauche.
- Un état psychologique fragile et fluctuant au fil des séances (syndrome dépressif réactionnel).
- Des déficits de mobilité articulaire globaux des membres inférieurs, notamment avec des flessums
de hanches importants (15°).
- Une hypo-extensibilité des droits fémoraux.
- Une raideur rachidienne marquée lors des transferts et des changements de positions.
- Un déconditionnement à l’effort.
- Un déficit de force musculaire global des membres inférieurs.
- Une escarre de stade 3 localisée au niveau du talon du membre inférieur gauche, associée à un
œdème du moignon.
- Des douleurs spontanées de la plaie du moignon gauche (escarre), de l’épaule droite et du rachis
thoraco-lombaire (accentuées lors des transferts).
Actuellement en arrêt maladie longue durée, Monsieur B. est hospitalisé au Centre de Pen-Bron.
Lors des week-ends à domicile, il retrouve ses repères familiaux et environnementaux.
II- DIAGNOSTIC KINÉSITHÉRAPIQUE
L’amputation bilatérale, accentuée par des complications, depuis l’entrée de Monsieur B. au Centre
Marin de Pen-Bron, a altéré son état général et sa rééducation.
L’altération cutanée (escarre) localisée au niveau du moignon gauche n’autorise pas le chaussage de
la prothèse. De plus, les déficiences de mobilité articulaire des membres inférieurs et du rachis,
ainsi que celles de la fonction musculaire (hypo-extensibilité et perte de force), perturbent
l’évolution vers la station debout et la reprise de la marche. Monsieur B. est actuellement en arrêt
maladie longue durée et en hospitalisation complète pour une prise en charge rééducative.
13
III- PROBLÉMATIQUE
Monsieur B. espère, au travers de cette prise en charge rééducative au Centre, acquérir une marche
prothétique suffisante à son autonomie. Il souhaite en effet, avoir la possibilité de circuler librement
dans sa maison, en mode bipédique, afin de répondre à ses besoins élémentaires.
Les objectifs principaux, conditionnant la sortie définitive, se distinguent dans la reprise et
l’amélioration des performances de la marche. Celle-ci doit être non traumatisante, sécurisée et
suffisante en terme de périmètre de marche.
En raison des problèmes cutanés actuels (escarre), le chaussage de l’appareillage gauche n’est pas
autorisé. La marche en position physiologique ne peut pas être travaillée, avant l’obtention d’une
cicatrisation complète.
Il s’agit donc de proposer des séances de kinésithérapie, permettant de préparer Monsieur B. à la
reprise future de la marche. De ce constat, en découle la question :
Comment optimiser au mieux cette période précédant la reprise de la marche ?
Afin de répondre à ce questionnement, il semble intéressant de proposer une rééducation basée sur
les mêmes critères fondamentaux que la marche, tout en maintenant la motivation du patient.
La marche est une activité dynamique volontaire, mettant en jeu le corps humain dans sa globalité.
Au regard de ces éléments, le travail gymnique semble être l’activité qui se rapproche le plus de la
marche. Il sollicite l’individu dans son ensemble, que ce soit sur le plan mécanique (articulaire et
musculaire), que sur le plan énergétique.
Suivant son orientation, le travail gymnique peut s’apparenter à la position érigée, nécessaire à la
locomotion bipédique, et contribue aux bienfaits apportés par la verticalisation.
Il nécessite un investissement et une certaine motivation du sujet.
L’hypothèse émise, pourra être vérifiée au travers de ce travail, afin de répondre à la
problématique suivante:
Le travail gymnique sur plan de Bobath peut-il permettre de préparer le retour à la marche chez un
amputé bilatéral des membres inférieurs (amputations sous les genoux)?
La mise en place d’une rééducation alternative, basée sur un travail dynamique sur plan de Bobath,
aura pour but de maintenir l’état actuel du patient, mais aussi de l’améliorer, en vue de préparer le
retour à l’appareillage et à la marche.
14
On pourra évaluer l’intérêt bénéfique ou non de cette rééducation, en se basant sur l’évaluation de
certains critères :
Le conditionnement à l’effort.
La condition physique est décrite comme un paramètre prédictif des capacités de marche après
amputation [9] [10].
Les médecins de "l’Institut régional de médecine physique et de réadaptation" font le constat
suivant : « la diminution des capacités physiques et la désadaptation à l’effort sont constantes chez
l’amputé et proportionnelles au temps nécessaire à l’adaptation et à la maitrise de l’utilisation de
la prothèse et des déplacements » [11].
De plus, l’amputation de membre inférieur, et de surcroît, lorsque qu’elle est bilatérale, occasionne
un surcoût énergétique majeur au cours de la marche [12].
La désadaptation à l’effort des amputés, secondaire à une immobilisation prolongée, s’avère
préjudiciable à la reprise de la marche appareillée. De ce fait, le travail gymnique peut être un
moyen de reconditionnement à l’effort.
Le conditionnement à l’effort de Monsieur B. sera évalué à partir de son ressenti de la fatigue au
cours de la séance (selon l’échelle de Borg). Ainsi, la fréquence des temps de repos nécessaires et la
durée de la séance de travail permettront d’apprécier ou non, une amélioration de la condition
physique du patient.
Les amplitudes articulaires des membres inférieurs.
Chez Monsieur B., les déficits articulaires d’extension de hanche et de genou vont avoir une
incidence directe sur la qualité de la marche.
Outre le défaut de la statique posturale en position verticale, les flessums ne permettront pas
l’allongement complet des membres inférieurs au cours du cycle de marche et limiteront fortement
le pas postérieur.
Ces deux valeurs seront évaluées par des mesures goniométriques.
La force musculaire des membres inférieurs.
Les muscles des membres inférieurs ont un triple rôle au cours de la marche. À savoir qu’ils sont
freinateurs des segments emportés par l’énergie cinétique, ils amortissent les chocs et les vibrations
et ils accélèrent les segments.
Leur force doit donc être suffisante, pour permettre la répétition des mouvements au cours de la
marche [13].
La force musculaire des membres inférieurs sera estimée par la cotation de 0 à 5 (type testing).
15
La souplesse rachidienne.
La mobilité rachidienne est sollicitée au cours de la marche humaine. Elle participe aux
mouvements combinés des ceintures et assure l’équilibre face aux mouvements du bassin.
Elle sera évaluée par les mesures de mobilité du rachis thoraco-lombaire.
IV- RÉÉDUCATION
IV-1- Objectifs
Les objectifs principaux, conditionnant la sortie définitive, se distinguent dans la reprise et
l’amélioration des performances de la marche. Celle-ci doit être non traumatisante, sécurisée et
suffisante en terme de périmètre de marche.
Objectifs durant cette prise en charge :
Redonner la motivation et l’envie au patient lors des séances
Récupérer les amplitudes articulaires des membres inférieurs nécessaires à la marche
physiologique, notamment réduire les flessums de hanche
Récupérer l’extensibilité et la souplesse des muscles du rachis et du bassin
Travailler le schéma de marche
Reconditionner le patient à l’effort
Réduire les douleurs rachidiennes
Gagner en force musculaire des membres inférieurs
IV-2- Principes
Respect des consignes médicales
Respect du temps de cicatrisation cutanée
Adaptabilité au patient
Règle de la non-douleur
Respect de la fatigabilité du patient
Progressivité du travail rééducatif
16
IV-3- Moyens
Moyens de rééducation mis en place en séance du matin :
Cette séance est basée sur les techniques classiques de prise en charge du patient amputé. Elle a
pour but d’entretenir et de préparer au mieux les systèmes articulaire et musculaire des membres
inférieurs.
On y associe :
Des techniques de mobilisations passives des hanches et des genoux.
Des techniques de renforcement musculaire, ciblées sur : les psoas, les grands-fessiers, les
moyens-fessiers, les quadriceps et les ischio-jambiers.
Des étirements musculaires passifs analytiques, ciblés sur : les psoas, les quadriceps, les
adducteurs et les ischio jambiers.
Des postures visant à réduire les flessums de hanche (le patient est installé soit en décubitus, soit
en procubitus).
Et en fin de séance, un temps court de verticalisation, par mise en charge sur le membre inférieur
droit dans les barres parallèles.
De manière générale, la séance du matin est une préparation au travail plus dynamique de l’aprèsmidi. Elle permet un échauffement des structures articulaires et musculaires.
Moyens de rééducation mis en place en séance d’après-midi :
Cette séance s’effectue sur un plan de Bobath large, permettant une certaine aisance lors des
mobilisations du sujet. Elle est rythmée par les différents exercices gymniques et par les temps de
repos nécessaires au patient. La fatigue est évaluée selon l’échelle de Borg (perception de la fatigue
ressentie par le patient). Monsieur B. gère ainsi ses temps de repos tout au long de la séance.
Les exercices mis en place sont issus des techniques de la méthode quadrupédique de Klapp [14] et
des Niveaux d’Évolution Motrice.
L’utilisation des NEM a pour but de restaurer les sensations et activités motrices chez un sujet ne
pouvant bénéficier pleinement de son système locomoteur. Les exercices de Klapp ont pour visée
de redonner de la mobilité rachidienne.
Présentations des différents exercices :
Le sujet est en quadrupédie (Photo 1). On recherche la mobilité du rachis dans le plan sagittal, en
demandant alternativement un dos creux, puis un dos rond (Photo 2). Par un travail de guidance
orale et tactile, on sollicite les zones présentant une mobilité réduite.
La respiration est associée aux mouvements demandés.
17
Le sujet est en quadrupédie. Il recherche une extension de hanche droite (Photo 3), puis gauche et
maintient la position pendant 15 secondes. Remarquons que le patient n’est pas en mesure de tendre
le bras controlatéral simultanément. Cet exercice sollicite le grand fessier contre apesanteur et
contribue à étirer le psoas, pour lutter contre le flessum.
Le sujet réalise une marche à quatre pattes, afin d’activer et d’automatiser la dissociation des
ceintures.
"Promenade". Le sujet est en quadrupédie, il exécute une marche croisée : les genoux glissent en
avant sans quitter le sol, la tête suit les mouvements du tronc et regarde du côté du genou avancé, le
bassin reste horizontal. Le rachis décrit une grande incurvation alternée. Cet exercice est indiqué
pour l’assouplissement du rachis thoracique.
Rappel : C’est à 11 mois que l’enfant va se hisser de la position quatre pattes vers la station debout.
La recherche de la verticalité se fera par le passage à la position genoux dressés [15].
On recherche en séance la même progression : de la quadrupédie vers les genoux dressés, pour une
préparation à la station debout.
Le sujet est en position genoux dressés, avec un appui bi-manuel sur un ballon de Klein (Photo 4)
(cet appui lui permet de tenir cette posture). Il se redresse progressivement, en luttant contre les
flessums de hanche. Un travail respiratoire est associé dans un but de détente, face à la sensation
d’étirement. Au fil des séances, Monsieur B. lâche le ballon de Klein et prend appuis sur la face
antérieure des cuisses (Photo 5). En fin de prise en charge, le patient est en mesure de tenir la
position genoux dressés sans appui, en recherchant son équilibre par la projection de ses membres
supérieurs, en arrière de l’axe du tronc (Photo 6). Cette posture active sollicite et renforce le plan
musculaire postérieur (synergie grands-fessiers et érecteurs du rachis). Dans cette position proche
de la station debout, on demande au patient de tourner la tête à gauche, à droite, en haut, puis de
fermer les yeux pour travailler l’équilibre et stimuler les stabilisateurs latéraux de hanches.
Le sujet est en position genoux dressés. Il travaille la dissociation des ceintures, en faisant rouler
un grand ballon à gauche et à droite.
Le sujet est en position genoux dressés. Il effectue une marche en avant, puis en arrière, avec
appuis sur le ballon de Klein. Cet exercice permet de travailler les séquences de la marche debout,
notamment le transfert d’appuis sur son genou droit, ensuite sur le gauche. Il sollicite les muscles
fléchisseurs de hanche, pour la marche en avant et les extenseurs pour celle en arrière.
18
V- BILANS DE FIN DE PRISE EN CHARGE
V-1- Bilan des déficiences structurales et fonctionnelles
Déficience liée à la douleur :
Au niveau de son escarre du moignon gauche, la douleur a augmentée et est évaluée à 4 sur 10.
Les algies lombaires, ressenties en position de repos et lors des transferts, demeurent moins
intenses et s’évaluent à 1 sur 10. Les douleurs localisées à l’épaule droite sont toujours cotées à 3.
Parallèlement, le traitement médicamenteux a été légèrement modifié, avec l’arrêt du Topalgic
50mg.
Déficiences cutanées-trophiques-vasculaires :
- Sur le plan cutané : Visuellement, la plaie du moignon gauche (4x3cm) n’a pas évolué. Le
protocole pansement a été modifié récemment, afin de stimuler la cicatrisation cutanée.
- Sur le plan trophique : L’extrémité distale du moignon gauche est toujours inflammatoire et
oedématiée (signe positif du godet au niveau de la Talo-crurale). Le moignon est comparativement
plus chaud que celui du membre inférieur controlatéral.
Les mesures périmétriques (en cm) sont sensiblement les mêmes.
Déficience de mobilité articulaire :
Déficience de la mobilité articulaire passive
Membre inf. droit
Membre inf. gauche
100°
-15°
25°
25°
15°
100°
-15°
25°
15°
25°
105°
95°
-5°
115°
95°
-5°
HANCHE :
Flexion (genou fléchi) *
Extension (genou tendu)
Abduction
Rotation latérale
Rotation médiale *
GENOU :
Flexion (hanche fléchie)
Flexion (hanche tendue)
Extension
19
On constate un gain de mobilité articulaire pour l’extension de hanche (-10° contre -15°
initialement) et pour la flexion de genoux (hanche tendue : 95° contre 90°).
Le type d’arrêt ressenti se présente comme ferme et douloureux pour l’ensemble des limitations
articulaires, avec en particulier, des douleurs plus importantes au niveau de la hanche droite.
Déficience de la mobilité articulaire active
- Au niveau des membres inférieurs :
Membre inf. droit
Membre inf. gauche
95°
-12°
20°
20°
10°
90°
-12°
20°
15°
25°
100°
-5°
110°
-5°
HANCHE :
Flexion (genou fléchi) *
Extension (genou tendu)
Abduction
Rotation latérale
Rotation médiale *
GENOU :
Flexion (hanche fléchie)
Extension
Les déficits d’amplitudes articulaires sont sensiblement les mêmes que les passifs, avec un léger
gain d’extension de hanche (-12° contre -15°) et de genou (-5° contre -7°).
Les mobilisations actives de la hanche droite sont toujours douloureuses en fin d’amplitude.
- Au niveau du tronc :
Mobilité du rachis en flexion/extension : Schöber étagé
Quadrupédie: Repos
10
10
10
L5
10 cm
Flexion (dos rond)
+1
+1
+1.5
+1.5
+5
Extension (dos creux)
-0.5
-0.5
-1
-0.5
-2.5
Mobilité du rachis thoraco-lombaire en inclinaison (distance coude-table en position assise bord de
table) :
inclinaison droite = 9.5cm
inclinaison gauche = 11cm
Mobilité du rachis thoraco-lombaire en rotation (position assise bord de table) :
rotation droite = 30°
rotation gauche = 32°
20
Les résultats révèlent une augmentation minime, mais réelle, de la mobilité globale de
flexion/extension du rachis, plus spécialement localisée dans le secteur lombaire et thoracolombaire. Il y a également augmentation des amplitudes de rotations. Les mesures des inclinaisons
gauche et droite sont sensiblement les mêmes.
Déficience Musculaire :
- Trophicité musculaire : A l’examen palpatoire, on apprécie une tension musculaire bilatérale
importante au niveau des psoas et des contractures moins marquées, localisées au niveau des
paravertébraux.
- Force musculaire (cotation musculaire de 0 à 5 type testing) : L’ensemble des muscles des
membres inférieurs (psoas, grand fessier, moyen fessier, quadriceps et ischio-jambiers) est évalué à
4+.
État psychologique :
Monsieur B. est toujours suivi par la psychologue du Centre et continue également de rencontrer un
psychomotricien.
La prise en charge médicamenteuse n’a pas été modifiée durant cette période.
En séances de kinésithérapie, Monsieur B. s’implique davantage. Sa participation et son
investissement ont accru progressivement. Il dit se sentir mieux et est satisfait des résultats obtenus.
V-2- Activités et participation
Activités :
La cicatrisation n’évoluant pas favorablement, l’équipe médicale a décidé de proposer au patient un
nouvel appareillage, qui permettrait une reprise plus précoce de la marche. La semaine suivante,
suite à un rendez-vous avec le podo-orthésiste, un nouveau moulage est réalisé. L’appareillage sera
confectionné de telle sorte que la plaie soit en décharge complète avec un appui sous rotulien.
Les transferts se font sans difficulté et sont davantage fluides.
Le passage, assis bord de table de Bobath à genoux dressés, est effectué en 9 secondes.
21
On constate un net recul de l’apparition et de l’intensité de la fatigue à l’effort. La durée des
séances, ainsi que le temps effectif de travail, ont augmentés tout au long de la prise en charge.
Participation :
Monsieur B. retourne à son domicile chaque week-end et profite de son temps pour se consacrer à
sa compagne et à sa fille.
L’informatique et internet sont devenus ses principaux loisirs au Centre.
V-3- Analyse des écarts par rapport aux bilans initiaux
- Les douleurs du rachis lombaire ont sensiblement diminué, tandis que celles de la plaie cutanée
ont augmenté. Rappelons la réévaluation à la baisse du traitement médicamenteux.
- Sur le plan cutané-trophique-vasculaire, aucune évolution significative n’est à signaler.
- Sur le plan articulaire, il est constaté un gain de mobilité au niveau du rachis thoraco-lombaire,
ainsi qu’une réduction des flessums de hanche et de genou.
- Sur le plan musculaire, on constate globalement une récupération de la force, sur l’ensemble des
muscles des membres inférieurs.
- Sur le plan psychologique, Monsieur B. montre en séance un investissement et une motivation
plus importants.
- La réalisation des transferts s’effectue moins lentement et de manière plus fluide. De plus, on note
un recul de la fatigabilité à l’effort durant les séances.
VI- DISCUSSION
La mise en place d’une rééducation alternative, basée sur un travail dynamique sur plan de Bobath,
avait pour but de préparer le retour à l’appareillage et soulevait la problématique suivante :
Le travail gymnique sur plan de Bobath peut-il permettre de préparer le retour à la marche chez un
amputé bilatéral des membres inferieurs (amputations sous les genoux)?
22
En se basant sur les résultats obtenus aux différents critères de suivi, établis en problématique, nous
pouvons répondre positivement à la problématique. Toutefois, il convient d’émettre des réserves
quant à une stricte affirmation.
Concernant les critères de suivi, établis en problématique :
Le conditionnement à l’effort.
Aucune étude ne s’intéresse spécifiquement au réentrainement à l’effort des amputés d’origine non
vasculaire. Le réentrainement à l’effort doit être personnalisé, en raison de l’hétérogénéité de la
population des amputés, tant par ses capacités orthopédiques, vasculaires ou cardiologiques, que par
ses projets de vie [16].
Le cyclo-ergomètre à bras est un moyen intéressant pour le reconditionnement à l’effort. Cet outil
pourrait être un complément au travail sur table, cependant, les douleurs actuelles de l’épaule droite
et les consignes médicales ne permettent pas son utilisation. La réadaptation à l’effort de Monsieur
B. s’est donc effectuée par un travail gymnique.
L’apparition de la fatigue étant moins rapide, le temps effectif de travail au cours des séances a
progressivement augmenté et le nombre de temps de repos nécessaires au patient s’est réduit.
Parallèlement, on constate un allongement de la durée totale de la séance (45 minutes contre 30 au
début de la prise en charge).
Les amplitudes articulaires des membres inférieurs.
Le travail genoux dressés a permis l’étirement du plan antérieur des hanches. Les étirements
musculaires ont un but proprioceptif et permettent de combattre la fibrose et les rétractions
tendineuses [17].
La mobilité articulaire en extension des genoux n’a pas significativement augmentée (flessums
bilatéraux de 5°). Les flessums de hanche ont réduit, mais restent toujours prononcés (10° contre
15° au début de la prise en charge).
La force musculaire des membres inférieurs.
Le renforcement et la reprogrammation neuro-motrice sont destinés à l’amélioration de la
performance [18].
L’ensemble des muscles des membres inférieurs a été sollicité au cours des différents exercices
gymniques. Les bilans finaux montrent une amélioration globale de la force musculaire des
membres inférieurs (passage d’une cotation de 4 à 4+).
23
La souplesse rachidienne.
L’ensemble du rachis est stimulé lors de la marche.
Le rachis thoracique participe aux mouvements combinés des ceintures. La dissociation s’opère
autour d’une zone neutre, située en regard de T7 ou de T8. Le rachis lombaire rétablit l’équilibre
face aux mouvements du bassin [19]. Il convient donc d’avoir un rachis équilibré, fort et souple.
Les résultats révèlent une augmentation minime, mais réelle, de la mobilité globale du rachis, plus
particulièrement localisée dans les secteurs lombaire et thoraco-lombaire.
Au vue d’une amélioration globale de ces critères, on peut espérer que la reprise de la marche sera
facilitée. Toutefois, il reste difficile de juger objectivement les bénéfices de ce travail à la reprise de
la marche. En effet, Monsieur B. a bénéficié de deux séances quotidiennes, basées sur des contenus
différents. Il n’est donc pas possible d’attribuer les résultats obtenus, uniquement au travail
gymnique. Ce dernier, accompagné d’un travail plus analytique, doivent se poursuivre jusqu’à la
verticalisation de Monsieur B. sur ces deux prothèses.
Ce type de rééducation présente d’autres aspects bénéfiques qui n’ont pu être évalués, à savoir :
La progression vers la position érigée et la verticalisation.
Dans un pronostic de reprise de la marche, la verticalisation s’intègre dans une stratégie de
rééducation posturale globale. Elle nécessite l’action constante des muscles extenseurs, dits
antigravifiques.
Dans un contexte médical souvent difficile, elle prévient les méfaits du décubitus et de la station
assise prolongée [20].
Le statut psychologique et social de l’individu connaît une véritable amélioration, grâce à une
dignité redonnée via la verticalisation. Cela s’avère d’autant plus vrai, lorsque la station érigée est
dynamique.
Selon le médecin Michel Enjalbert, la verticalisation constitue « le préalable indispensable à la
reprise de la marche » [21].
Le travail de l’équilibre, en position genoux dressés proche de la station debout.
La progression dans les exercices, de la quadrupédie vers la position dynamique genoux dressés, a
demandé au sujet une adaptation constante, face à de nouvelles situations déséquilibrantes.
Le travail des différentes séquences de la marche.
Un travail de dissociation des ceintures, ainsi que celui des transferts d’appuis ont été réalisés grâce
aux exercices proposés.
24
La remotivation du sujet dans sa rééducation.
Rappelons l’entrée de Monsieur B. au Centre de Pen-Bron, en juillet 2007 et son suivi depuis 28
mois de rééducation quotidienne. Certes, depuis son arrivée au Centre, l’évolution de son état et son
contexte médical l’ont découragé, mais le changement de mode de prise en charge, avec l’apparition
de moyens rééducatifs différents, a vivement intéressé le patient et lui a redonné l’envie de
s’investir en séances. Il prend donc connaissance, par le biais de ces exercices, d’une approche plus
ludique et fonctionnelle de la rééducation.
L’application de cette rééducation dépend du profil du patient. En général, il est difficile de pouvoir
mettre en place ce type de travail auprès des amputés de membre inférieur.
Citons les spécificités de Monsieur B. favorables à ce type de prise en charge :
- Son jeune âge (42ans)
- L’origine de ses amputations (complication d’une LAM)
Dans le cas d’un patient artéritique, les exercices gymniques risqueraient d’occasionner une
ischémie secondaire.
- Le niveau d’amputation (sous les genoux)
Une amputation fémorale supprimerait les appuis nécessaires à la quadrupédie et à la station
genoux dressés.
Le choix d’un nouvel appareillage, basé sur une décharge distale, permet d’envisager une reprise
d’appuis bipodaux plus précoce et ce, malgré l’absence d’une cicatrisation cutanée.
En France, dans les différents Centres de rééducation recevant des patients amputés, la politique en
matière de planning d’appareillage peut varier. Si la majorité émet le choix d’attendre une
cicatrisation cutanée complète du moignon avant de proposer une prothèse provisoire, certains
choisissent d’appareiller très précocement (à l’entrée au centre et J10 post-opératoire), quelque soit
l’état cicatriciel du moignon.
25
VII- CONCLUSION
Ce cas clinique a mis en valeur une rééducation alternative, basée sur un travail gymnique sur plan
de Bobath, dans la préparation à la marche d’un sujet amputé bilatéral (amputations sous les
genoux). La recherche de la verticalité et la mise en situation, par des exercices se rapprochant des
contraintes de la marche, ont pour objectifs principaux de conserver et de restaurer les schémas
sensori-moteurs de la marche bipédique.
Ce type de rééducation, en complément des techniques plus classiques, s’est mis en place grâce aux
spécificités de ce patient. En outre, les exercices gymniques ne sont donc pas à envisager
systématiquement pour l’ensemble des patients amputés en attente d’appareillage.
A la lueur des résultats et d’une proposition nouvelle de rééducation, Monsieur B. a concrètement
retrouvé l’envie de s’investir dans le travail en kinésithérapie. Le déroulement du travail rééducatif
se voit directement influencé par l’investissement du patient lors des séances.
Il demeure important que le kinésithérapeute s’efforce de maintenir et de développer l’intérêt du
patient.
26
Références bibliographiques
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[2] http://www.has-sante.fr/portail/upload/docs/application/pdf/cepp-1688rheokneepdf.pdf
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Scientifique », n°371, Octobre 1997
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[7] BOFFA (J.F.) – L’appareillage et la douleur du membre fantôme : liens et bénéfices chez l’amputé du
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pp.922-927
[8] ASSI (C.), BONNEL (F.), BOULOUEDNINE (M.), CANOVAS (F.), FAURE (P.) – Amputation de la
jambe et du pied in « Amputation du membre inférieur, Appareillage et rééducation», sous la direction de
P.CODINE, V.BRUN et J-M.ANDRÉ, Éditions Masson, 1996, pp.17-26
[9] CHIN (T.), SAWAMURA (S.) ET AL – The efficacy of the one leg cycling test for determining the
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[11] ANDRÉ (J-M.), BOSSER (G.), MARTINET (N.), PAYSANT (J.), RUMILLY (E.) – Le réentraînement
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Éditions Scientifiques et Médicales Elsevier SAS, 2008, pp.50-56
[12] VIEL (E.) – Chapitre Coût énergétique de la marche in « La marche humaine, la course et le saut:
biomécanique, explorations, normes et dysfonctionnements », Éditions Masson, pp.146-147
[13] VIEL (E.) – Chapitre Activités des muscles pendant le cycle de marche in « La marche humaine, la
course et le saut: biomécanique, explorations, normes et dysfonctionnements », Éditions Masson, pp.25-29
[14] KLAPP (B.) – La méthode Quadrupédique du Pr Dc R. Klapp, 3ème édition française, Éditions Maloine,
1977, p.138
[15] BRANGER (M-F.) – Chapitre La marche normale, les étapes d’acquisition de la marche in « La
marche humaine et sa pathologie » par BRUN (V.), PELISSIER (J.) – Éditions Masson, 1994, pp.1-6
[16] Ibid [11]
[17] DUPEYRON (A.), KOTZKI (N.) – Renforcement musculaire et reprogrammation motrice, Éditions
Masson, 2008
[18] Op. Cit.
[19] KARLSSON (D.), ÖBERG (T.), SYCZEWSKA (M.) – Segmental movements of the spine during
treadmill walking with normal speed in « Clinical Biomechanics », Vol.14, Issue 6, July 1999, pp.384-388
[20] CORNU (J-Y) – Verticalisation – Annales de Réadaptation et de Médecine Physique, vol.44 supplément
1, Éditions Scientifiques et Médicales Elsevier SAS, décembre 2001, pp.176-184
[21] ENJALBERT (M.) – La verticalisation, Éditions Masson, 1998
ANNEXE 1
Prothèse du membre inférieur droit
Orthèse de cheville/jambe gauche
VERSO DE LA PAGE 3
PARCOURS MÉDICAL DU PATIENT
1986
Leucémie
aigüe
myéloblastique
(L.A.M.)
Novembre 2006
Mai 2007
Juillet 2007 Septembre 2007 Novembre 2008 Février 2009
Récidive Nécrose sévère Entrée au
L.A.M
des extrémités CRRF de
Pen Bron
des deux
membres
inférieurs
Amputation bilatérale
le 15 Mai.
Arthrite
infectieuse
Sévère de
la hanche
gauche
Arthroplastie
totale
de la hanche
gauche
Juin 2009
Juillet 2009
Début de
Marche (70m.)
l’appareillage à l’aide de deux
cannes anglaises
Apparition
d’une escarre
de stade III
31 Août 2009
Prise en charge
de 4 semaines
(jusqu’au 25
Septembre)
Arrêt de l’appareillage
gauche, le temps de la
cicatrisation.
VERSO DE LA PAGE 17
Photo 1
Photo 2
Photo 3
Photo 4
Photo 5
Photo 6

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