p 16 : Fufu nous a quittés - Syndicat National des Journalistes

Transcription

p 16 : Fufu nous a quittés - Syndicat National des Journalistes
Nécrologie
Le SNJ est en deuil
Hommage à notre camarade Jacques Furlan
«F
ufu s'est barré... » La méchante
nouvelle est tombée, le 10 août
dernier, sur la liste de discussion du
Comité national. Aussitôt suivie d'innombrables réactions tant le choc
était immense et l'émotion profonde.
Car avec 50 ans de syndicalisme au
compteur, et un nombre d'amis et de
camarades bien plus élevé encore, d'un
coup laissés en rade au comptoir, le
décès de Jacques Furlan a été ressenti
comme la perte d'une « grande figure
du syndicat ».
« Que l'on partage ou non ses idées, il
avait un sens de l'engagement, du partage, de la bonne humeur et du combat
syndical qui ont impressionné bon
nombre de jeunes débarquant par
exemple à leur premier congrès du SNJ.
Coups de gueule en assemblée, notamment sur Solidaires, rires et partage d'un
petit alcool bien sympathique faisaient
partie d'un personnage attachant, dont
la conversation sur des sujets très vastes
le rendait passionnant ».
« Son charisme, ses principes et convictions, sa gentillesse toujours partageuse
sont ce qui manque le plus dans le
monde où nous vivons », renchérissait
une autre de ses proches amies et
camarade.
Localier au meilleur sens
du terme
Ce sont aussi nombre de ses anciens
collègues qui ont tenu à rendre hommage à celui qui avait écumé tant de
titres de la PQR en France, depuis Oise
Matin, en passant par L'Union de Reims,
puis La Nouvelle République du CentreOuest, avant que ce passionné de l'information locale ne mette à profit sa
retraite gersoise pour donner quelques
derniers petits papiers à Sud Ouest, en
humble correspondant local de presse.
Avec la même modestie que lorsque ce
fils de Rital natif de la région parisienne
avait troqué sa tenue de travailleur dans
le bâtiment, CAP de plâtrier en poche,
contre un calepin et un Rolleiflex, ne
cessant dès lors de jouer tout au long de
sa carrière à cache-cache avec un certain
Robert Hersant… notre futé Fufu s’ingéniant à déguerpir ailleurs juste avant que
le papivore ne vienne s’emparer de son
canard.
Un localier au meilleurs sens du terme,
sachant traquer dans les faits les plus
anodins des liens sensibles entre local et
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LE JOURNALISTE - 3e trimestre 2016
Jacques Furlan à Cuba, en 1995, son journal dans les mains (photo : NRCO).
global. Une finesse alliée à une roublardise qui avaient séduit son copain Cabu
au point de lui consacrer une double
page dans Charlie Hebdo !
D'ailleurs Jacques Furlan comptait
nombre d'amis parmi les plus talentueux
dessinateurs de presse, lesquels savaient
toujours trouver chez lui porte grande
ouverte et table généreusement garnie.
Ses anciens collègues de La Nouvelle
République ont écrit dans une nécrologie
combien ayant « croisé sa route, (ils
avaient) forcément été marqués par sa
personnalité à la fois généreuse et
rigoureuse dans l'exercice de son métier
de journaliste (…) Doté d'un sens profond de l'information locale, d'un talent
naturel pour le contact, Jacques Furlan a
su comme nul autre s'intégrer dans ses
nouveaux environnements professionnels (…) Jacques Furlan était un professionnel respecté par tous, y compris par
l'ensemble de ses collègues pour son
esprit de confraternité et son dévouement à la défense de la profession ».
Changer le monde
Un dévouement, et un engagement
syndical qu'a plus particulièrement tenu
à saluer sa section régionale de Midi
Pyrénées, dont il avait été durant plusieurs mandats l'un des élus titulaires,
cela le conduisant aussi à siéger au sein
de notre Bureau National : « Son parcours journalistique atypique l'a conduit
à travailler dans une demi-douzaine de
quotidiens régionaux où il conjugua
avec bonheur une plume savoureuse,
humaniste et sociale, et la défense de
ses collègues et de la profession. Partout
où il a exercé, il fut de tous les combats
et a contribué à étoffer les sections syndicales du SNJ (…) Il était de tous les
congrès où sa parole, engagée et sage
à la fois, était écoutée et appréciée. »
Mais Fufu savait aussi articuler ses engagements en conscience et en cohérence.
Ainsi, dès son départ à la retraite, c'est
au sein d'une instance telle la commission professionnelle paritaire de la
mutuelle Audiens qu'il s'était tout naturellement investi. Où celui qui siégeait à
ses côtés se souvient de son « courage
extraordinaire » quand, atteint de cette
sale maladie qui rongeait ses poumons,
Fufu revenait pourtant régulièrement à
Vanves, trimballant derrière lui cette
lourde valise destinée à lui procurer un
peu plus d'oxygène...
Témoignage concordant au sein de
l'Union nationale interprofessionnelle
des retraités Solidaires (Unirs) où Jacques
s'était bien entendu pareillement engagé. « Ses montées à Paris devenaient de
plus en plus difficiles, et il était très vite
essouflé », se souvient Gérard
Gourguechon. Qui a tenu à dire à ses
camarades du SNJ qu'au sein du conseil
d'administration d'Unirs, « nous garderons de Jacques le souvenir d'un camarade très sincèrement engagé contre les
évolutions régressives de nos sociétés.
Ses révoltes syndicales s'inscrivaient
dans une réflexion plus large sur les
combats à mener pour contribuer à
changer le monde. » n
Didier LABERTRANDIE