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PRB 01-26F
LE TRAITEMENT DES PRÊTS AUX ÉTUDIANTS
SELON LA LOI SUR LA FAILLITE ET L’INSOLVABILITÉ
Alicia Davies
Division des affaires juridiques et législatives
Révisé le 26 novembre 2008
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TABLE DES MATIÈRES
Page
INTRODUCTION .................................................................................................................
1
LE PROGRAMME CANADIEN DE PRÊTS AUX ÉTUDIANTS......................................
2
LA LOI SUR LA FAILLITE ET L’INSOLVABILITÉ.............................................................
3
LES NIVEAUX D’ENDETTEMENT ET DE FAILLITE DES ÉTUDIANTS....................
5
PRÊTS AUX ÉTUDIANTS ET FAILLITES :
ENJEUX ET CHANGEMENTS PROPOSÉS.......................................................................
11
CONCLUSION......................................................................................................................
16
CANADA
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LE TRAITEMENT DES PRÊTS AUX ÉTUDIANTS
SELON LA LOI SUR LA FAILLITE ET L’INSOLVABILITÉ ∗
INTRODUCTION
Beaucoup de jeunes Canadiens entreprennent des études postsecondaires, et bon
nombre d’entre eux font appel aux programmes fédéraux et provinciaux de prêts aux étudiants
pour financer leurs études.
Depuis une dizaine d’années, le nombre d’étudiants qui ont contracté des
emprunts dans le cadre de ces programmes a augmenté, tout comme le nombre de faillites
impliquant des prêts étudiants.
Au cours de la deuxième moitié des années 1990, les
modifications apportées à la Loi sur la faillite et l’insolvabilité (LFI) ont enlevé aux emprunteurs
la possibilité d’acquitter leurs dettes d’études en faisant faillite si la faillite se produit dans les dix
années suivant la fin de leurs études. Ce changement fait en sorte que les obligations des
étudiants demeurent après une faillite, même si d’autres dettes sont annulées.
Cette période a récemment été réduite à sept ans, mais elle fait toujours l’objet
d’un débat considérable. Les prêteurs l’appuient parce qu’elle améliore leurs chances d’être
remboursés. Les étudiants, certains spécialistes de l’insolvabilité et certains universitaires ont
contesté son bien-fondé. De plus, la Fédération canadienne des étudiantes et étudiants en a saisi
les tribunaux en invoquant la Charte canadienne des droits et libertés.
Le présent document :
•
fournit un bref aperçu de l’histoire du Programme canadien de prêts aux étudiants;
•
indique les dispositions de la LFI relatives aux prêts étudiants;
•
présente des statistiques sur l’endettement des étudiants;
•
expose les modifications qu’on a récemment proposé d’apporter à la LFI.
∗
Version révisée d’un document rédigé par Margaret Smith, qui travaillait auparavant à la Bibliothèque
du Parlement.
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2
LE PROGRAMME CANADIEN DE PRÊTS AUX ÉTUDIANTS
Le gouvernement fédéral a créé le Programme canadien de prêts aux étudiants
(PCPE) en 1964. De 1964 à 1995, le PCPE a fourni une aide financière aux étudiants en
garantissant intégralement les emprunts effectués auprès d’établissements financiers privés. Le
système avait cependant ses inconvénients. Il était coûteux pour le gouvernement, n’incitait
guère les établissements financiers à essayer de se faire rembourser et ne fournissait pas un
niveau de service suffisant aux emprunteurs( 1 ).
En 1995, le gouvernement fédéral a modifié le PCPE. La formule de garantie a
été remplacée par des ententes de financement avec les établissements financiers comportant une
prime en fonction du risque.
Aux termes de ces ententes, les établissements financiers
participants se chargeaient de se faire rembourser les prêts consentis aux étudiants et acceptaient
le risque de non-paiement. En retour, le gouvernement fédéral leur versait une prime de risque
annuelle de 5 p. 100 de la valeur des prêts, prime qui servait à les indemniser du grand nombre
de prêts non remboursés. Ces ententes sont venues à expiration à la fin de juillet 2000( 2 ).
Au début de 2000, le gouvernement fédéral a fait enquête auprès des
établissements financiers pour savoir si une nouvelle entente les intéressait dans le cadre du
PCPE. Selon un communiqué de Développement des ressources humaines Canada, trop peu
d’établissements étaient disposés à conclure une entente pour que le programme soit viable( 3 ).
Le gouvernement a donc recommencé à prêter aux étudiants directement par le truchement du
Centre de service national de prêts aux étudiants.
Les prêts aux étudiants ne sont toutefois pas tous administrés par le PCPE.
L’Ontario, la Saskatchewan, Terre-Neuve-et-Labrador et le Nouveau-Brunswick coordonnent
leurs prêts aux étudiants avec ceux du PCPE, et ces prêts sont ensuite administrés ensemble
comme un seul « prêt d’étude intégré ». La Colombie-Britannique, l’Alberta, le Manitoba, la
Nouvelle-Écosse et l’Île-du-Prince-Édouard administrent leurs prêts séparément du PCPE, ce qui
signifie que les étudiants doivent traiter avec deux instances administratives distinctes pour ces
(1)
Développement des ressources humaines Canada, « Le gouvernement du Canada garantit la prestation
ininterrompue du Programme canadien de prêts aux étudiants », communiqué, 9 mars 2000.
(2)
Ibid.
(3)
Ibid.
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3
prêts. Le Québec, les Territoires du Nord-Ouest et le Nunavut, quant à eux, ne participent pas du
tout au PCPE; les étudiants n’ont donc accès qu’aux prêts de leur province ou territoire( 4 ).
Tous ces prêts sont par contre inclus dans l’exemption générale prévue par la LIF
pour les dettes d’études contractées auprès du gouvernement. Les seuls qui ne sont pas visés par
l’exemption sont les prêts directs consentis par les grands établissements financiers privés,
indépendamment de toute disposition prévue par la Loi fédérale sur les prêts aux étudiants et la
Loi fédérale sur l’aide financière aux étudiants. Ces prêts sont souvent contractés par les
étudiants inscrits dans les programmes de formation professionnelle plus coûteux, comme le
droit et la médecine. Cela ne veut pas dire que ceux qui empruntent aux établissements privés
échappent à l’exemption prévue par la LFI, puisque ces établissements exigent généralement à
titre de condition préalable à l’admissibilité d’un prêt privé supplémentaire que les emprunteurs
fassent une demande pour obtenir un prêt d’études du gouvernement. Par ailleurs, bon nombre
de ces étudiants doivent au moins une partie de leur dette totale au gouvernement, partie qui
serait donc assujettie à l’exemption prévue par la LFI.
LA LOI SUR LA FAILLITE ET L’INSOLVABILITÉ
Le processus de mise en faillite sert à effacer toutes les dettes en souffrance d’un
débiteur et à lui permettre de repartir à zéro. Toutefois, la mise en faillite n’efface pas toutes les
dettes : la LFI prévoit que certaines dettes demeurent après une faillite et restent en souffrance
même si toutes les autres dettes sont annulées. Ces dettes sont les suivantes :
•
les amendes imposées par un tribunal;
•
les pensions alimentaires et autres allocations d’entretien;
•
les dommages-intérêts issus d’une poursuite au civil pour voies de fait, agression sexuelle ou
délit ayant entraîné la mort;
•
les dettes et obligations issues d’une fraude( 5 ).
(4)
Le Yukon n’offre que des prêts du PCPE.
(5)
Loi sur la faillite et l’insolvabilité, L.R.C. (1985), ch. B-3, modifiée, art. 178.
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4
En 1992, des modifications importantes au droit de la faillite sont entrées en
vigueur, et l’une de ces modifications était l’abolition de la qualité de créance privilégiée pour
les dettes dues au gouvernement. Ce changement reléguait la Couronne au rang des créanciers
ordinaires qui se partagent au prorata l’actif du débiteur après les créanciers garantis et les
créanciers privilégiés. La Couronne n’avait donc plus la priorité sur d’autres créanciers pour ce
qui est de ses prêts aux étudiants.
Les modifications à la LFI qui sont entrées en vigueur en septembre 1997 ont fait
que les étudiants ne pouvaient plus être libérés de leurs dettes d’études s’ils se déclaraient en
faillite avant d’avoir terminé leurs études à temps partiel ou à temps plein ou dans un délai de
deux ans après la fin de leurs études. Un étudiant qui faisait faillite dans le délai de deux ans
pouvait cependant s’adresser à un tribunal au terme de cette période pour faire annuler sa dette;
le tribunal pouvait accéder à cette demande si l’étudiant était capable de prouver qu’il avait agi
de bonne foi et ne pouvait pas rembourser son prêt en raison de difficultés financières. Les
étudiants qui se déclaraient en état de faillite après la période de deux ans pouvaient faire annuler
leur dette d’études dans le cadre du processus de faillite ordinaire.
Ce changement avait pour but d’atténuer l’incidence du fait que les dettes d’études
dues à la Couronne avaient perdu leur statut de créance privilégiée, et il était motivé par le nombre
croissant de non-remboursements et de pertes sur prêts et par l’impression que les étudiants
abusaient du processus de la mise en faillite pour échapper à leurs obligations.
Moins d’un an après l’entrée en vigueur de la règle des deux ans, le ministre des
Finances apportait un certain nombre de changements au programme de prêts aux étudiants. Le
budget fédéral de 1998 comportait des mesures destinées à réduire le non-remboursement des prêts
étudiants et à aider les étudiants à régler leur endettement croissant par les moyens suivants :
•
les bourses du millénaire;
•
les subventions canadiennes pour études à l’intention des étudiants ayant des personnes à
charge;
•
l’exemption d’intérêts;
•
la prolongation des périodes de remboursement de prêt;
•
la réduction du principal du prêt;
•
la déductibilité des intérêts.
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5
Le Ministre annonçait en même temps que le délai en deçà duquel un prêt
d’étudiant ne pouvait pas être annulé aux termes de la LFI passait de deux à dix ans. Cette
disposition est entrée en vigueur le 18 juin 1998. Par conséquent, la dette d’études ne pouvait
être annulée par une faillite si celle-ci se produisait dans les dix années suivant la fin des études.
Comme dans le cas de la règle des deux ans, le tribunal pouvait ordonner l’annulation de la dette
d’études après expiration du délai de dix ans si le débiteur pouvait le convaincre qu’il avait agi
de bonne foi et ne pouvait rembourser son prêt en raison de difficultés financières.
Des modifications récentes apportées à la LFI, entrées en vigueur le 7 juillet 2008,
ont fait passer cette période de dix à sept ans( 6 ). De plus, les bénéficiaires de prêts d’études qui
déclarent faillite avant d’être admissibles à la libération pourront demander que ces dettes soient
annulées après cinq ans s’ils peuvent faire la démonstration de leurs difficultés financières( 7 ).
LES NIVEAUX D’ENDETTEMENT ET DE FAILLITE DES ÉTUDIANTS
Les données de Statistique Canada confirment que le nombre de faillites d’étudiants
qui ont fait un emprunt dans le cadre du PCPE a augmenté au cours des années 1990. Les données
relatives à l’endettement des étudiants de 1990-1991 à 1995-1996 révèlent également ce qui suit :
•
Dans les années 1990, le niveau d’endettement des étudiants a augmenté.
(6)
BankruptcyCanada.com, « Canadian Bankruptcy Reform. Changes to the Bankruptcy Laws »,
7 juillet 2008 (http://www.bankruptcycanada.com/PropChngsBIA.htm).
(7)
Les alinéas 178(1)g) et h) et le paragraphe 178(1.1) de la LFI disposent que :
(g) [le failli n’est pas libéré] de toute dette ou obligation découlant d’un prêt consenti ou
garanti au titre de la Loi fédérale sur les prêts aux étudiants, de la Loi fédérale sur l’aide
financière aux étudiants ou de toute loi provinciale relative aux prêts aux étudiants lorsque
la faillite est survenue avant la date à laquelle le failli a cessé d’être un étudiant, à temps
plein ou à temps partiel, au regard de la loi applicable, ou dans les sept ans suivant cette
date;
(h) [le failli n’est pas libéré] de toute dette relative aux intérêts dus à l’égard d’une somme
visée à l’un des alinéas a) à g).
Ordonnance de non-application du paragraphe (1)
(1.1) Lorsque le failli qui a une dette visée à l’alinéa (1)g) n’est plus un étudiant à temps
plein ou à temps partiel depuis au moins cinq ans au regard de la loi applicable, le tribunal
peut, sur demande, ordonner que la dette soit soustraite à l’application du paragraphe (1)
s’il est convaincu que le failli a agi de bonne foi relativement à ses obligations découlant de
cette dette et qu’il a et continuera à avoir des difficultés financières telles qu’il ne pourra
pas acquitter celle-ci.
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6
•
Le remboursement des prêts peu après la fin des études pose problème pour un nombre
croissant d’étudiants : en 1995-1996, 30,9 p. 100 des étudiants avaient de la difficulté à
rembourser leur prêt au cours de la première année suivant la fin de leurs études,
comparativement à 21,7 p. 100 en 1990-1991.
•
Les étudiants inscrits dans des collèges et établissements de formation privés étaient ceux qui
avaient le plus de difficultés à rembourser leur prêt : environ un tiers d’entre eux ont manqué
à leurs engagements au cours de la première année de remboursement( 8 ).
L’analyse des emprunts contractés par les étudiants (bases de données de l’Enquête
nationale auprès des diplômés de collèges et universités du Canada en 1982, 1986, 1990 et 1995)
révèle une augmentation du nombre d’emprunts et des problèmes de remboursement :
•
En 1995, un peu moins de 50 p. 100 des diplômés de niveau postsecondaire avaient contracté
un emprunt pour leurs études.
•
Parmi les diplômés de 1995, le montant total emprunté s’élevait en moyenne à 9 500 $ pour
les diplômés de collèges et entre 12 500 $ à 14 000 $ pour les diplômés universitaires (tous
les cycles).
•
Environ 24 p. 100 des diplômés de 1995 avaient emprunté 20 000 $ ou plus et 7 p. 100
d’entre eux au maximum avaient emprunté environ 30 000 $, ce qui représente une
augmentation importante par rapport aux groupes antérieurs.
•
Parmi les diplômés de 1995, entre 20 et 40 p. 100 de ceux qui avaient emprunté ont
entièrement remboursé leur dette dans les deux années suivant l’obtention de leur diplôme,
tandis que les autres n’ont rien remboursé ou n’ont versé que de petits montants.
•
Les taux moyens de remboursement du groupe de 1995 se situaient entre 40 et 55 p. 100, soit
une baisse par rapport aux groupes antérieurs.
•
Le nombre de problèmes de remboursement, selon les déclarations des intéressés, ont
augmenté avec le temps : pour le groupe de 1995, la proportion de ceux qui devaient de
l’argent deux ans après l’obtention de leur diplôme se situait entre 21 et 33 p. 100.
(8)
Statistique Canada, « La dette étudiante de 1990-91 à 1995-96 : Une analyse des données du Programme
canadien de prêts aux étudiants », Revue trimestrielle de l’éducation, été 1999, vol. 5, no 4, Faits
saillants de l’article
(http://www.statcan.ca/francais/indepth/81-003/feature/eqhi1999005004s2a01_f.htm).
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7
•
Une fois comptés les diplômés qui n’ont pas emprunté et ceux qui ont entièrement remboursé
leur prêt, les problèmes de remboursement atteignent une proportion de 10 à 15 p. 100 parmi
les diplômés de 1995( 9 ).
D’autres études éclairent également le problème de la faillite chez les étudiants.
Dans Analyse empirique d’un échantillon de canadiens sollicitant la protection de la loi de la
faillite (1998), Saul Schwartz et Leigh Anderson confirment l’importance des prêts aux étudiants
comme facteur de faillite parmi les jeunes Canadiens :
Pour les jeunes ayant recours à la faillite, les prêts étudiants étaient
susceptibles de constituer la majeure partie de la dette totale. Les prêts
étudiants constituaient plus de 50 % de la dette totale de 28 % des
jeunes et plus de 90 % de la dette totale […] de 10 % des jeunes.
[…]
Durant la dernière décennie, 20 milliards de dollars ont été prêtés à des
centaines de milliers d’étudiants du niveau post-secondaire (Finnie et
Schwartz, 1996). Un certain nombre de ces étudiants étaient des
universitaires dont les perspectives d’emploi étaient assez bonnes.
Cependant, une très grande proportion des prêts furent accordés à des
étudiants inscrits dans des programmes de certification dont la valeur,
en termes de formation professionnelle, était douteuse.
De plus, ces prêts étaient accordés aux étudiants davantage en fonction
de leurs besoins financiers que de leur capacité de remboursement.
Cette politique a certes eu pour effet de rendre plus accessibles les
programmes d’études post-secondaires mais elle a également
contribué à grever les jeunes de dettes difficiles à rembourser( 10 ).
(9)
Ross Finnie, Student Loans: Is It Getting Harder? Borrowing, Burdens and Repayment, (en anglais),
mars 2000, p. 15 à 16, (http://www.cesc.ca/pceradocs/2000/00Finnie_e.pdf). Voir aussi Ross Finnie et
Gaétan Garneau, Les prêts étudiants au Canada : micro-analyse de emprunts de diverses cohortes à la
fin des études postsecondaires, R-96-16F, juillet 1996, Direction générale de la recherche appliquée,
Politique stratégique, Développement des ressources humaines Canada; Ross Finnie et Saul Schwartz,
Les prêts étudiants au Canada : Analyse économique de l’emprunt et du remboursement d’après les
Enquêtes nationales auprès des diplômés, W-96-3F, janvier 1996, Direction générale de la recherche
appliquée, Politique stratégique, Développement des ressources humaines Canada.
(10) Saul Schwartz et Leigh Anderson, Analyse empirique d’un échantillon de Canadiens sollicitant la
protection de la loi de la faillite, École d’administration publique, Université Carleton, janvier 1998
(http://www.ic.gc.ca/epic/site/oca-bc.nsf/vwapj/p1_f.pdf/$FILE/p1_f.pdf).
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8
Dans un document publié en 1999, Saul Schwartz fait remarquer que 9 p. 100
environ des étudiants canadiens qui avaient obtenu un prêt étudiant ne l’avaient pas remboursé
en 1980, alors que, selon le vérificateur général du Canada, la proportion était de un sur six en
1990( 11 ). Les coûts assumés par le gouvernement ont augmenté en proportion du nombre de
faillites d’étudiants. En 1996-1997, par exemple, les dettes d’études non remboursées pour cause
de faillite auraient coûté 70 millions de dollars au gouvernement fédéral, comparativement à
30 millions en 1990-1991( 12 ).
S’appuyant sur des données portant sur plus de 1 000 débiteurs qui ont fait faillite
en 1997, Schwartz a examiné la situation des faillis qui ont des dettes d’études. Comparant leur
situation économique à celle de l’ensemble de l’échantillon, il conclut ce qui suit :
•
Il ne semble pas y avoir de différence particulière entre les sexes pour ce qui est de
l’obtention de prêts étudiants, mais plus de 60 p. 100 des faillis qui avaient des dettes
d’études étaient des femmes, comparativement à 40 p. 100 pour l’ensemble de l’échantillon.
Schwartz attribue ce taux élevé au fait que les femmes gagnent moins d’argent que les
hommes et ont donc plus de difficultés à s’acquitter de leurs obligations financières( 13 ).
•
Les faillis qui avaient des dettes étudiantes avaient aussi des revenus plus faibles que ceux de
l’ensemble de l’échantillon : le revenu médian des faillis qui avaient des dettes étudiantes
était de 14 000 $ et le revenu médian de ceux qui déclaraient que le prêt étudiant était le
déclencheur de la faillite ou représentait plus de 50 p. 100 de leur dette était de 12 000 $,
tandis que le revenu médian de l’ensemble de l’échantillon était de 24 000 $( 14 ).
•
Une forte proportion des faillis qui avaient une dette d’études occupaient des emplois non
spécialisés, c’est-à-dire 37,6 p. 100 des personnes qui avaient une dette d’études et
34,8 p. 100 de celles dont le prêt étudiant était le déclencheur de la faillite ou représentait
plus de 50 p. 100 de la dette. Dans l’ensemble de l’échantillon, 33,4 p. 100 des membres
occupaient des emplois non spécialisés( 15 ).
(11) Saul Schwartz, « The Dark Side of Student Loans: Debt Burden, Default, and Bankruptcy »,
Osgoode Hall Law Journal, vol. 37, nos 1 et 2, 1999, p. 317
(www.ohlj.ca/archive/articles/37_12_schwartz.pdf).
(12) Ibid., p. 318.
(13) Ibid., p. 326.
(14) Ibid., p. 327.
(15) Ibid., p. 328.
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9
•
Dans les deux années précédant la faillite, 47,6 p. 100 des membres de l’ensemble de
l’échantillon avaient reçu des prestations de soutien du revenu ou d’assurance-emploi,
comparativement à 56,5 p. 100 des faillis qui avaient une dette d’études et 61,7 p. 100 de
ceux dont le prêt étudiant était le déclencheur de la faillite ou représentait plus de 50 p. 100
de la dette( 16 ).
Schwartz résume comme suit ses constatations :
La situation économique de tous ceux qui déclarent faillite laisse
penser que la faillite est avant tout un dernier recours. La situation
économique de ceux dont la dette comprend un prêt étudiant ou dont le
prêt étudiant est un déclencheur important de la faillite est encore pire
que la situation déjà désespérée du groupe entier. Chose certaine, ils
sont plus jeunes et ont plus d’instruction, mais ils ont des revenus de
ménage annuels et des revenus mensuels plus faibles au moment de la
faillite. Plus de 40 p. 100 d’entre eux ont reçu un soutien du revenu
dans les deux années précédant la faillite et environ 30 p. 100 ont
touché des prestations d’assurance-chômage.
Une proportion
surprenante – plus d’un tiers – d’entre eux occupent des emplois non
spécialisés( 17 ).
Cette conclusion est aussi celle d’un rapport de 2005 financé par le Bureau du
surintendant des faillites, qui a examiné le traitement réservé dans le régime de faillite aux prêts
d’études financés par le gouvernement, au Canada et dans quatre autres pays. Ce rapport
souligne que la politique de ces pays qui exige le remboursement des prêts étudiants même après
la faillite est motivée surtout par l’impression, peu étayée par les faits, que les étudiants utilisent
la procédure de faillite à la légère pour éviter de rembourser leurs dettes d’études( 18 ).
Le rapport précise que d’autres facteurs pourraient avoir causé la hausse des
faillites liées à des prêts aux étudiants dans les années 1990. En effet, au cours de la période où
les pertes du gouvernement canadien attribuables aux défauts de paiement sur les prêts aux
étudiants sont passées de 30 à 70 millions de dollars, le nombre de prêts accordés a augmenté de
53,6 p. 100 et la valeur moyenne des prêts, de 61,2 p. 100. Le taux des pertes pourrait ainsi être
attribuable au fait que les étudiants devaient emprunter plus, et ce, en raison de la hausse des
(16) Ibid., p. 329.
(17) Ibid. (traduction)
(18) Stephanie Ben-Ishai, Les prêts gouvernementaux aux étudiants, les sommes dues au gouvernement et la
faillite : Analyse comparative, Bureau du surintendant des faillites, Initiative de projets de recherche en
insolvabilité, 30 août 2005, p. 3–5 et 19–20
(http://strategis.ic.gc.ca/eic/site/bsf-osb.nsf/fra/br01667f.html).
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10
coûts liés à l’instruction qui est survenue pendant cette même période( 19 ). Cette tendance a aussi
été observée aux États-Unis, où l’on a eu de plus en plus recours aux prêts pour faire face à
l’augmentation des frais de scolarité, ce qui a fini par mener à l’adoption d’une mesure
législative excluant les prêts aux étudiants de la libération par la faillite afin de limiter les pertes
sur prêts subies par le gouvernement ( 20 ).
En Nouvelle-Zélande, où on pouvait encore se libérer des prêts d’études en cas de
faillite, les tendances concordaient avec celles des autres pays. Selon le rapport, seulement un
étudiant du niveau postsecondaire sur dix n’avait aucune dette, et l’on prévoyait que le montant
des prêts consentis par le gouvernement passerait de plus de 5 milliards de dollars à près de
20 milliards entre 2002 et 2020( 21 ).
Selon la Fédération canadienne des étudiantes et étudiants, l’endettement étudiant
moyen au Canada est passé de 8 000 $ en 1990 à 25 000 $ en 1998. De plus, les frais de
scolarité ont augmenté de 126 p. 100 au cours de la même période et « la plupart des provinces
ont éliminé les bourses( 22 ) ». Il convient toutefois de noter que le programme fédéral de prêts
aux étudiants offre encore des bourses pour aider les étudiants ayant un faible revenu, des
personnes à charge ou une incapacité permanente.
D’après des statistiques du gouvernement fédéral, 42 p. 100 des étudiants des
provinces et territoires participants ont eu recours à des prêts d’études fédéraux au cours de
l’exercice
2002-2003( 23 ),
( 24 )
l’exercice 2003-2004
.
et
71 p. 100
des
étudiants
y
ont
eu
recours
pour
Pour les exercices 2004-2005 et 2005-2006, ce pourcentage
s’établissait à 40,3 p. 100, mais le nombre d’emprunteurs a augmenté( 25 ).
(19) Ibid., p. 21-23.
(20) Ibid., p. 22-23.
(21) Ibid., p. 23.
(22) Comité sénatorial permanent des banques et du commerce, Les débiteurs et les créanciers doivent se
partager le fardeau : Examen de la Loi sur la faillite et l’insolvabilité et de la Loi sur les arrangements
avec les créanciers des compagnies, novembre 2003, p. 62.
(23) Ben-Ishai (2005), p. 8.
(24) Ressources humaines et Développement des compétences Canada, Programme canadien de prêts aux
étudiants : Rapport annuel 2003-2004, p. 4.
(25) Ressources humaines et Développement social Canada, Rapport annuel du Programme canadien de
prêts aux étudiants 2004-2005, 2007, p. viii; Ressources humaines et Développement social Canada,
Rapport annuel du Programme canadien de prêts aux étudiants 2005-2006, 2007, p. viii. (Ces deux
documents sont disponibles à :
http://www.rhdsc.gc.ca/fr/apprentissage/subventions_etudes/Publications/index.shtml).
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11
En 2005-2006, la dette d’études moyenne due à la Couronne dans le cadre du
Programme canadien des prêts aux étudiants (PCPE) était de 11 323 $, ce qui représentait une
augmentation de 2,5 p. 100 par rapport à l’année précédente( 26 ). (Ces chiffres ne comprennent
pas l’endettement auprès des sources autres que le PCPE.) Les données plus récentes n’ont pas
encore été rendues publiques.
PRÊTS AUX ÉTUDIANTS ET FAILLITES :
ENJEUX ET CHANGEMENTS PROPOSÉS
La question de savoir si les dettes d’études doivent être traitées différemment des
créances ordinaires dans le cadre d’une faillite fait l’objet d’un débat considérable. Lorsque la
règle des deux ans a été introduite dans le projet de loi C-5 (première lecture le 6 mars 1996), le
Comité sénatorial permanent des banques et du commerce s’était demandé si les prêts étudiants
devaient faire l’objet d’un traitement distinct. On entendait souvent dire que les étudiants
faisaient faillite après la fin de leurs études pour éviter de rembourser leur dette d’études, mais le
Comité voulait savoir s’il existait des preuves que des étudiants se servaient délibérément du
système de la faillite simplement pour éviter de rembourser leur prêt( 27 ).
Des fonctionnaires d’Industrie Canada ont déclaré au Comité que « au cours des
trois dernières années, le montant des prêts [étudiants] non remboursés [était] passé de 20 à
60 millions de dollars »( 28 ) et que de 65 à 70 p. 100 des faillites d’étudiants emprunteurs se
produisaient dans les deux ou trois premières années après l’obtention du diplôme. Ils estimaient
que les étudiants en difficulté devraient essayer d’obtenir de l’aide dans le cadre des dispositions
du programme de prêts étudiants relatives à l’allégement de la dette avant de recourir à la
faillite( 29 ). En fait, la période de deux ans a été déterminée en fonction de la période de grâce
prévue dans le cadre du programme de prêt tel qu’il fonctionnait alors.
Nous avons choisi une période de deux ans parce que, d’après le
régime de remboursement des prêts aux étudiants, l’étudiant n’est pas
(26) Rapport annuel du Programme canadien de prêts aux étudiants 2005-2006, (2007), p. ix.
(27) Douzième rapport du Comité sénatorial permanent des banques et du commerce, fascicule 17,
11 février 1997, p. 7.
(28) Comité sénatorial permanent des banques et du commerce, Témoignages, deuxième session de la trentecinquième législature, 4 novembre 1996 (M. David Tobin)
(http://www.parl.gc.ca/35/2/parlbus/commbus/senate/com-f/bank-f/13cvf.htm?Language=F&Parl=35&Ses=2&comm_id=3).
(29) Ibid.
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tenu de rembourser le prêt durant les six premiers mois. Cette période
est suivie d’une autre période de 18 mois durant laquelle on l’aide à
rembourser l’intérêt. Elle coïncide avec la période de 24 mois de
grâce durant laquelle l’étudiant n’a pas à rembourser le prêt( 30 ).
Le Comité n’a pas eu connaissance de preuves directes permettant de penser que
beaucoup d’étudiants abusaient de la procédure de faillite, mais le fait qu’un fort pourcentage de
faillites d’étudiants se produisaient au cours d’une période où, selon les fonctionnaires, une
certaine forme d’allégement était à leur disposition, indique que la règle des deux ans a été
instituée pour dissuader les étudiants de faire faillite.
L’introduction de la règle des dix ans en 1998, moins d’un an après l’entrée en
vigueur de la règle des deux ans, a surpris plusieurs personnes.
Les professionnels de
l’insolvabilité ont critiqué le manque de concertation à cet égard, qui tranchait avec les
importantes consultations qui avaient précédé les autres modifications apportées au système de
mise en faillite. Ils estimaient que la période de dix ans était trop longue et ne constituait pas un
juste milieu entre la nécessité de permettre aux étudiants en faillite de repartir à zéro et celle de
prévenir les abus présumés du système de mise en faillite( 31 ).
Selon un des critiques du principe de refuser l’annulation de la dette d’études
pendant une certaine période :
Quelle que soit la logique gouvernementale qui étaie l’introduction du
délai de dix ans, les données empiriques […] laissent penser que la
plupart des personnes qui cherchent la protection de la loi sur la faillite
et dont les dettes comprennent un prêt étudiant ont des revenus très
faibles et n’ont aucune certitude d’accéder à des revenus supérieurs.
Une attente de dix ans ne risque pas de changer leur situation
économique, mais, en plus, elle leur refuse la possibilité d’un
« nouveau départ », l’un des objectifs de la LFI( 32 ).
La Fédération canadienne des étudiantes et des étudiants critique également très
vivement la règle des dix ans. À la fin de 2000, la Fédération s’est adressée aux tribunaux pour
contester cette règle en vertu des dispositions de la Charte canadienne des droits et libertés
(30) Ibid.
(31) Comité sénatorial permanent des finances nationales concernant le projet de loi C-36, Témoignages,
première session de la trente-sixième législature, 11 juin 1998, (Association du Barreau canadien et
Association canadienne des professionnels de l’insolvabilité),
(http://www.parl.gc.ca/36/1/parlbus/commbus/senate/com-f/fina-f/15cvf.htm?Language=F&Parl=36&Ses=1&comm_id=13).
(32) Schwartz, « The Dark Side of Student Loans », 1999, p. 332 (traduction).
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relatives à l’égalité. Mais en 2005, la Cour supérieure de l’Ontario a statué que les étudiants
emprunteurs ne constituaient pas un groupe social particulier qui serait protégé par les droits à
l’égalité de l’article 15 de la Charte( 33 ).
D’autres ont demandé une réduction du délai.
En 2001, le Comité de
l’insolvabilité personnelle de l’Institut canadien de l’insolvabilité a recommandé :
•
que la règle soit abrogée et que le délai soit ramené à cinq ans à partir de la date d’obtention
du dernier prêt;
•
que les tribunaux aient le loisir d’accorder une annulation dans certaines circonstances avant
que les mesures d’allégement soient expirées;
•
que des mesures d’allégement plus ouvertes, plus accessibles et plus transparentes soient
instaurées dans le cadre du PCPE;
•
que l’on procède à un examen des critères d’attribution des prêts dans le cadre du PCPE( 34 ).
En outre, la règle des dix ans a été analysée par le Groupe de travail sur
l’insolvabilité personnelle (GTIP)( 35 ) chargé par le Bureau du surintendant des faillites
d’examiner les dispositions de la LFI en matière de faillite personnelle. Le sous-groupe 5 du
GTIP, qui était chargé d’examiner les faillites impliquant des prêts étudiants, a fait deux
recommandations : ramener de dix à cinq ans le délai pendant lequel la dette ne peut être annulée
et permettre aux faillis qui doivent rembourser une dette d’études de demander un allégement
aux tribunaux en raison de difficultés financières après un an au lieu des dix ans actuellement
prévus par la Loi. Plus précisément, le Groupe recommande :
•
de ramener de dix à cinq ans après la fin des études le délai pendant lequel la dette d’études
ne peut être annulée;
(33) Fédération canadienne des étudiantes et étudiants, Campagnes et Pressions : Déclaration de faillite pour
prêt d’études « État actuel de la cause » – mise à jour le 4 juillet 2005 (http://www.cfsfcee.ca/html/french/campaigns/bankruptcy_charter.php).
(34) Rapport du Comité de l’insolvabilité personnelle de l’Institut d’insolvabilité du Canada,
Recommendations for Reform and Further Amendments to the Bankruptcy and Insolvency Act –
Personal Insolvency, janvier 2001, p. 8-9 (http://www.insolvency.ca/papers/PICReport.pdf).
(35) Le Groupe de travail était composé de groupes s’intéressant à la faillite : créanciers et/ou leurs
représentants, représentants de débiteurs, membres du pouvoir judiciaire, fiduciaires, un membre de
l’Association canadienne des professionnels de l’insolvabilité et un certain nombre de spécialistes
universitaires du droit de la faillite.
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14
•
de permettre l’annulation, à la demande du failli, d’une dette d’études un an après la fin des
études si un tribunal, après audience, conclut à l’existence de « difficultés exceptionnelles »;
•
de modifier la LFI pour permettre l’annulation partielle d’une dette d’études si un tribunal,
après audience, conclut à l’existence de « difficultés exceptionnelles »;
•
de permettre l’annulation conditionnelle, sous réserve de plans de remboursement pouvant
comporter le paiement d’un certain pourcentage du revenu pendant un certain nombre
d’années( 36 ).
Dans son budget de 2003, le gouvernement fédéral a renforcé le programme
d’allégement des dettes d’études en supprimant le plafond qui limitait la réduction de la dette
active à la moitié de la valeur du principal et en établissant un nouveau plafond de 10 000 $. Les
emprunteurs qui éprouvaient encore des difficultés à rembourser leur prêt pouvaient en outre
bénéficier d’une réduction supplémentaire de 5 000 $ un an après la remise initiale et, au besoin,
d’une autre réduction de 5 000 $ deux ans plus tard. Les règles ont également été modifiées pour
permettre aux emprunteurs ayant déclaré faillite ou dont le prêt d’études était en souffrance de
demander un allègement des intérêts ( 37 ).
En novembre 2003, le Comité sénatorial permanent des banques et du commerce
a fait un bilan de la LFI. Il a alors recommandé que le délai de dix ans soit ramené à cinq ans et
que la LFI habilite les tribunaux à autoriser l’annulation d’une partie de la dette d’études avant
l’échéance de cinq ans dans les cas où le débiteur peut démontrer qu’il éprouve des difficultés
indues.( 38 )
Le Sénat a encore une fois constaté que seule une minorité d’étudiants ne
remboursaient pas leurs prêts, et que les défauts de paiement étaient habituellement dus à des
difficultés financières et non à de la mauvaise volonté. En fait, selon le Sénat, les bénéficiaires
de prêts étudiants qui déclaraient faillite pouvaient souvent se trouver dans une situation
financière plus difficile que le failli moyen( 39 ). Le Sénat n’a cependant pas recommandé le
retour au délai initial de deux ans en invoquant la nécessité de limiter les coûts pour les
contribuables du programme de prêts aux étudiants( 40 ).
(36) Bureau du surintendant des faillites Canada, Groupe de travail sur l’insolvabilité personnelle, Problèmes
du sous-groupe 5, « Sommaire des problèmes et des recommandations du GTIP »
(http://strategis.ic.gc.ca/SSGF/br01178f.html).
(37) Ministère des Finances du Canada, Le plan budgétaire de 2003 (http://www.fin.gc.ca/budget03/bp/bptocfra.asp).
(38) Comité sénatorial permanent des banques et du commerce (2003), recommandation 9, p. xv.
(39) Ibid., p. 55.
(40) Ibid., p. 64.
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En 2004, de nouvelles modifications ont été apportées au Règlement fédéral sur
l’aide financière aux étudiants( 41 ), qui comprenaient certaines recommandations du Comité
sénatorial. L’exigence de prêt en règle a alors été remplacée par des critères d’admissibilité
moins contraignants et le montant des allègements a été accru. Aussi, le plafond fixé pour la
réduction du principal a encore été augmenté afin qu’une plus grande partie de la dette puisse
être annulée en cas de difficultés financières.
De plus, les étudiants ayant déclaré faillite
pouvaient de nouveau être admissibles à un nouveau prêt d’études fédéral pour la poursuite de
leurs études ou aux programmes d’allégement de la dette( 42 ).
En 2005, d’autres modifications au Règlement ont de nouveau augmenté le
plafond de réduction du principal, soit à 26 000 $ au total (10 000 $ pour une première demande,
10 000 $ pour une deuxième et 6 000 $ pour une troisième)( 43 ). Toutefois, pour être admissible
au programme de réduction, tout emprunteur doit avoir épuisé toutes les mesures possibles
d’exemption d’intérêt pendant la période maximale de 30 mois prévue, être en règle quant au
paiement du principal et faire des versements sur sa dette qui dépassent un certain pourcentage
de son revenu, déterminé par un tableau dans le Règlement
( 44 )
.
Par ailleurs, un débiteur
souffrant d’une invalidité permanente peut être admissible à la Disposition applicable aux
étudiants ayant une invalidité permanente, qui le dispense de rembourser toute sa dette ou une
partie( 45 ).
Comme nous l’avons indiqué, les modifications à la LFI même, introduites
en 2005, sont entrées en vigueur en juillet 2008 avec des modifications supplémentaires
apportées par le gouvernement subséquent en vue de les clarifier( 46 ).
(Les modifications
originales ont été adoptées et ont reçu la sanction royale plus tôt que prévu par un processus
parlementaire accéléré en raison de l’imminence d’élections, et ce, même si le Comité sénatorial
permanent des banques et du commerce n’avait pas terminé l’audition de ses témoins( 47 ).) Ces
(41) Règlement fédéral sur l’aide financière aux étudiants, DORS/95-329, modifié.
(42) Ben-Ishai (2005), p. 10-12.
(43) Règlement fédéral sur l’aide financière aux étudiants, art. 42.
(44) Ben-Ishai (2005), p. 10-11.
(45) Ibid., p. 11.
(46) Marcia Jones, Projet de loi C-12 : Loi modifiant la Loi sur la faillite et l’insolvabilité, la Loi sur les
arrangements avec les créanciers des compagnies, la Loi sur le programme de protection des salariés et
le chapitre 47 des Lois du Canada, LS-584F, Service d’information et de recherche parlementaires,
Bibliothèque du Parlement, 14 décembre 2007
(http://www.parl.gc.ca/LEGISINFO/index.asp?Language=F&List=ls&Query=5298&Session=15&.).
(47) Industrie Canada, C-55 a reçu la sanction royale,
(http://strategis.ic.gc.ca/eic/site/bsf-osb.nsf/fra/br01561.html).
modifié
le
13 novembre
2008
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modifications ont ramené de dix à sept ans le délai de non-annulation de dettes d’études en cas
de faillite. Elles ont de plus permis aux débiteurs de s’adresser aux tribunaux pour inclure leurs
prêts gouvernementaux dans leur libération cinq ans après la fin de leurs études( 48 ).
Par ailleurs, Ressources humaines et Développement social Canada a annoncé
qu’un nouveau Programme d’aide au remboursement sera lancé à l’automne 2009. Selon le site
de Ciblétudes, le nouveau Programme garantit :
•
qu’aucun emprunteur ne sera tenu de faire face à des versements qui dépassent ses moyens
financiers pour rembourser son prêt d’études;
•
qu’aucun versement ne sera exigé des emprunteurs au revenu très faible;
•
que la période de remboursement des prêts ne dépassera jamais 15 ans;
•
que les critères d’admissibilité sont simples et normalisés( 49 ).
Les détails du Programme n’ont pas encore été rendus publics.
CONCLUSION
Bien que les modifications récentes apportées à la LFI aient assoupli un peu les
modalités de traitement des prêts aux étudiants en matière de faillite, l’approche fondamentale
consistant à les exclure de la libération demeure. Par ailleurs, même si des systèmes encore plus
contraignants sont courants dans les pays occidentaux( 50 ), cette approche n’en demeure pas moins
controversée.
Les étudiants préféreraient que leur dette puisse être annulée intégralement. Les
prêteurs, de leur côté, veulent que leurs intérêts soient protégés et craignent que l’augmentation du
nombre d’étudiants emprunteurs et le niveau d’endettement n’entraînent un plus grand nombre de
faillites et des pertes plus importantes. La question des prêts étudiants et de leur traitement dans le
cadre de la Loi canadienne sur la faillite et l’insolvabilité risque donc de continuer à alimenter de
vifs débats pendant un certain temps.
(48) Loi sur la faillite et l’insolvabilité (voir note 7).
(49) Gouvernement du Canada, Ciblétudes, « Aide financière aux étudiants – Programme d’aide au
remboursement », modifié le 1er octobre 2008
(http://www.cibletudes.ca/fra/principal/envedette/bdg2008/rap.shtml).
(50) Ben-Ishai (2005), p. 30.