Droits d`auteurs et Internet.
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Droits d`auteurs et Internet.
DROITS D’AUTEUR ET INTERNET Par Mme Selma Khaled Enseignante à l'Ecole Supérieure des Sciences Economiques et Commerciales de Tunis. INTRODUCTION « Les entreprises qui survivront demain sont celles qui encouragent la créativité d’aujourd’hui.1 », c’est en effet dans le but d’inciter à la créativité humaine que le monde célèbre chaque année le 26 du mois d’avril, la journée mondiale de la Propriété Intellectuelle depuis 2001 sous l’égide de L’Organisation Mondiale de la Propriété Intellectuelle. La créativité humaine est incontestablement l’un des piliers du développement culturel, économique et social de chaque pays, c’est la raison pour laquelle, elle avait depuis très longtemps suscité l’intérêt de plusieurs législateurs, en effet depuis 1709-1710, le « Statut d’Anne » en Angleterre (Statut of Anne) fut considéré comme la première loi sur les droits d’auteur2. Cette loi avait pour objectif l’encouragement du savoir. Le droit d’auteur branche indissociable de la propriété intellectuelle, a de tout temps subi l’influence des évolutions technologiques et ne cesse de les subir. De l’invention de l’imprimerie par Gutenberg et la multiplication des copies, à la révolution du 20ème siècle et l’avènement des nouvelles technologies de la communication et de l’information ; avec la numérisation des œuvres et leur dématérialisation les droits d’auteur passent par une période de mutation considérable. 1 Zeldman M., Ingénieur Américain en sciences techniques. 2 Le statut d’Anne ou la loi sur les droits d’auteur, avait attribué les droits des copies de livres imprimés aux auteurs de ces livres. V° Bertrand André R., Le droit d’auteur et les droits voisins, éd. Dalloz, Paris 1999, p. 29 ; et Colombert C., Propriété littéraire et artistique et droits voisins, éd. Dalloz , Paris, 1990, p.2. 1 La dimension économique culturelle et sociale de la propriété intellectuelle, a entraîné la mise en œuvre d’un arsenal législatif tant au niveau national3 qu’International4. Influencés par la loi anglaise, les américains ont reconnus aux auteurs le droit exclusif d’exploiter leurs écrits, pour une période limitée dans le temps et ce dans un souci de promouvoir le progrès de la science et des auteurs.5 En droit tunisien, les droits des auteurs ont fait l’objet d’une protection depuis 1889.6 Les législations comparées ont à leur tour adopté des lois régissant la propriété littéraire, tel est le cas par exemple pour le Danemark et la Norvège (Ordonnance de 1741), l’Espagne (loi de 1762) etc…, ce n’est que vers la 2ème moitié du XIXème siècle que les pays Européens se sont dotés de législation en matière de droit d’auteur : 1886 la Suisse et la Belgique, 1847 l’Espagne, 1865 l’Italie etc….. L’Invasion de la France par des ouvrages contrefaits imprimés en Belgique vers 1850, a été à l’origine de la création d’une association littéraire et artistique internationale présidée par Victor Hugo. Cette association avait organisé en 1883 une réunion ; d’écrivains, artistes et éditeurs, de différents pays à Berne ; qui a aboutit à la rédaction de l’avant-projet de la Convention de Berne. Le 9 septembre 1886, la première Convention Internationale sur le droit d’auteur, vit le jour. Cette Convention fut complétée à Paris le 4/5/1896, révisée à Berlin le 13/11/1908, complétée à Berne le 20 Mars 1914, révisée à Rome le 2/6/1928, à Bruxelles le 26/6/1948 à Stockholm le 14/7/1967 et à Paris le 24/7/1971 et modifiée le 28/9/1979. La Convention a pour objectif de protéger 3 Loi n° 1994-36 du 24-2-1994 relative à la propriété littéraire et artistique ; loi n° 2001-21 du 6/2/2001 relative à la protection des dessins et models industriels ; Loi n° 2001-20 du 6/2/2001 relative à la protection des schémas de configuration et des circuits intégrés; Loi n° 2001-36 du 17 avril 2001 relative à la protection s des marques de fabriques de commerce et de services ; 4 Convention de Berne de 1886 ; Traité de Rome sur les droits voisins 1961 ; 5 Art. 1 et 2 de la loi des 19-24 juillet 1793. 6 Loi du 15-6-1889, J.O.T. 1889, p. 185, cette loi fut remplacée par la loi n° 66-12 du 14-2-1966, JORT du 15-21966. 2 les œuvres littéraires et artistiques précisément : toutes les productions du domaine littéraire scientifique et artistique quel qu’en soit le mode ou la forme d’expression. Face au développement des technologies de l’information et de la communication, il était impératif de protéger d’avantage les œuvres littéraires et artistiques contre toute reproduction illicite, ainsi la protection internationale du droit d’auteur se consolida encore plus par la création de l’Organisation Mondiale de la Propriété Intellectuelle, instituée par la Convention de Stockholm le 14/7/1967 (modifiée le 28/9/1979). D’après l’article 3 de la Convention, le but de l’OMPI est : de promouvoir la protection de la propriété intellectuelle à travers le monde par la Coopération des Etats, en collaboration s’il y a lieu avec toute autre organisation. L’objet de cette convention était d’aider les ressortissants des Etats parties à obtenir la protection Internationale de leurs droits, d’exercer un contrôle sur l’utilisation de leurs œuvres originales et de percevoir une rémunération à cet égard qu’il s’agisse de : de romans, de nouvelles, de pièces de théâtre ; de chansons, d’opéras de comédies musicales, de sonates ; ou de dessins de peintures de sculptures ou d’œuvres d’Architecture. Ayant déjà subi l’influence des technologies de communication telle que la radiodiffusion, la télévision, le cinéma, la transmission des programmes télévisés par satellite etc…, le droit d’auteur a pu facilement s’y adapter. Toutefois, le rapport des droits d’auteur avec Internet, n’a pas eu le même impact, qu’ont eu les autres moyens de communication, sur les droits en question en raison de sa particularité7. Etant définit comme « un ensemble de réseaux informatiques privés et publics qui sont interconnectés entre eux grâce à un protocole de 7 Son caractère immatériel et International. 3 communication commun 8», plus concrètement Internet est un instrument de communication et de transmission des informations, via un réseau informatique dans un espace virtuel et sans frontières, cette technique de communication a permis depuis des années de mettre à la disposition du public plusieurs œuvres d’esprit protégeables par la législation sur les droits d’auteur : la loi du 24 février 1994 en droit tunisien relative à la propriété littéraire et artistique. La particularité du rapport Internet droits d’auteur réside dans la dimension Internationale de ce moyen de communication, dans la dématérialisation que la mise en ligne des œuvres engendre et enfin dans la rapidité de la diffusion et de la transmission de l’information. Le passage de l’analogique au numérique a entraîné une dématérialisation des œuvres qui classiquement étaient représentées grâce à un support matériel, ce qui a suscité les critiques de certains juristes ; partagés en deux courants doctrinaux : certains estiment que le droit d’auteur perd de sa consistance en raison de l’impossibilité de localiser l’œuvre dans l’environnement numérique9 ; d’autres estiment qu’il faut que le contexte juridique s’adapte aux nouvelles technologies et que le droit d’auteur s’applique parfaitement sur le net du moment qu’il existe une législation protégeant toute activité créative de l’esprit.10 L’étude des droits d’auteur face à Internet revêt un intérêt certain11, dans la mesure où elle permet d’une part, de mettre en relief les multiples atteintes portées par l’utilisation du réseau Internet aux droits patrimoniaux et moraux conférés à l’auteur d’une œuvre de l’esprit, elle permet d’autre part d’analyser 8 Le droit d’auteur, Rapport du groupe de Travail de l’Académie des Sciences Morales et Politiques, présidé par Gabriel de Broglie, éd. PUF, Paris, 2001. 9 Ibidem, p. 3. 10 Jezequel C., Lemenicier A., Blin L., « La protection de la propriété intellectuelle face aux nouvelles technologies de l’information et de la communication » in http://memeoireonline.free.fr; Thoumyre L., « La protection des œuvres numériques sur Internet », www.juriscom.net; 11 V° Mezghani N.,« L’avenir du droit d’auteur dans l’environnement numérique (Internet) », in Mélanges en l’honneur de Habib AYADI, éd.C.P.U., 2000, p. 649 et svts. 4 les possibilités offertes par les nouvelles technologies conjuguées avec les textes en vigueur, pour une protection plus efficace des droits d’auteur. La question qui se pose est alors celle de connaître l’étendu de l’impact d’Internet sur les droits d’auteur. Il convient d’analyser dans une première partie : la remise en cause des droits d’auteur par Internet, et dans une deuxième partie : la promotion des droits d’auteur grâce à Internet. 5 PREMIERE PARTIE : INTERNET REMET EN CAUSE LES DROITS D’AUTEUR : L’ubiquité d’Internet, sa dimension Internationale et la dématérialisation qu’il engendre, marque son originalité par rapport à tout autre moyen de communication ou de diffusion des œuvres de l’esprit. La mise en ligne de certaines œuvres quelques soient leur forme d’expression (des tableaux de peinture, des livres, des films, des chansons….) a entraîné une remise en cause de certaines notions classiques du droit d’auteur (A) et a par ailleurs remis en cause les droits reconnus aux auteurs sur leurs œuvres (B). A- La remise en cause de certaines notions : Les notions fondamentales en droit d’auteur sont remises en cause par la numérisation des œuvres, ainsi on atteste à un éclatement de la notion du public (a) et à un élargissement de celle d’œuvre (b). a- La notion de public : La notion de public est souvent présente dans plusieurs domaines, ainsi on parle de jardin public, de lieu public, de service public ou encore de charges publiques, d’opinion publique et d’autorité publique etc.…12 En matière de droit d’auteur, la notion a une autre connotation13, elle est intimement liée à l’exercice des droits que la loi confère à tout auteur d’une œuvre originale, elle acquiert alors une importance particulière et joue par conséquent un rôle déterminant en la matière. Bien qu’employée à plusieurs reprises par le législateur dans la loi du 24 février 1994 ( on parle d’accessibilité de l’œuvre au public, d’exécution 12 Colin C., « Droit de la propriété intellectuelle et notion du public », V° www.edhec.com. Latrive F., « Propriété Intellectuelle : l’irruption du public », Discours prononcé lors du colloque « la propriété intellectuelle en question à Nantes », mis en ligne sur http:// www.freescape.eu.org. 13 6 publique, de communication au public, de lieu public…..), elle n’a fait l’objet d’aucune définition légale. Le dictionnaire Le petit Larousse défini l’expression « public » comme étant tout ce qui « concerne la collectivité dans son ensemble ou qui en émane , est considéré comme public « tout le monde indistinctement, l’ensemble de la clientèle et l’ensemble des personnes réunies dans une salle »14. Par opposition au privé, il est signe d’ouverture et de divulgation. La notion de public peut être rapprochée de celle de clientèle, toutefois si celle-ci peut intégrer la notion du public, en matière de droit d’auteur elle ne peut se confondre avec elle15. Le contenu de la notion du public varie suivant les situations : dans un concert musical, dans une pièce théâtrale, ou dans une projection cinématographique le public est réuni dans le même lieu. Cependant, la dématérialisation des œuvres et leur numérisation a entraîné un changement dans la conception « classique » de la notion du « public ». En matière d’Internet, le public est celui qui se trouve derrière son écran, celui qui manipule son ordinateur sans pour autant être (nécessairement) et physiquement présent devant l’auteur lors de la représentation de l’œuvre, la dématérialisation du support a engendré une dématérialisation du « public » ; Ainsi, la notion classique de « public » qui exigeait la présence physique de personnes et leur réunion devant l’auteur n’est plus valable pour toutes les circonstances, ce changement n’est d’ailleurs par propre à Internet, il est apparut suite la naissance de la technique de la radiodiffusion des œuvres musicales. Internet, a donc consolidé et renforcé cette nouvelle conception du public en contribuant à l’élargissement du concept. 14 Dictionnaire Le petit Larousse Illustré, 2000. La notion de clientèle a une connotation économique, c’est celle qui va payer le prix d’une marchandise ou d’un service, elle peut faire partie du public lorsque par exemple le spectateur achète un ticket pour regarder un film cinématographique, en revanche le public peut ne pas contenir forcément une clientèle, exposition de tableaux sans vente. 15 7 Le public dans le cadre d’Internet, est représenté par les internautes, c’est à dire les utilisateurs qui manipulent leurs ordinateurs et qui auront l’occasion de consulter les œuvres en ligne en cas d’une éventuelle connexion au site de l’auteur ou au site dans lequel l’œuvre est publiée ; chacun devant son ordinateur, ils ne sont pas nécessairement réunis au même endroit, ni forcément présents au moment de la mise en ligne de l’œuvre, le public est ainsi dispersé et potentiel. On peut alors dire que la simple mise en ligne d’une œuvre crée un public virtuel. Le public telle que le soutien Mme Colin dans son étude, « n’a pas besoin d’être réuni pour exister, ni physiquement présent il devient éclaté et potentiel16.» La notion classique du public en matière de droit d’auteur est complètement bouleversée les critères ne sont plus les mêmes ; il convient alors de prendre en considération l’influence d’Internet sur la conception et la définition de la notion du public, car en admettant un élargissement de la notion en admettrait par ricochet une protection plus efficace des droits d’auteur. En effet, tout ce qui est relatif au public est du monopole de l’auteur, par contre ce qui est du domaine privé échappe à l’auteur. Face alors aux multiplications des tentatives d’usage illégitime et illégal des œuvres protégées, qui portent inévitablement atteinte aux droits d’auteur, il fallait étendre la notion du public. Dans ce contexte un auteur considère que « la notion de public est digérée par celle de privé en droit d’auteur17. » La remise en cause ne concerne pas uniquement la notion de public elle englobe aussi celle d’ « œuvre ». 16 17 Colin C., art pércit. Colin C. , art. précit. 8 b-La notion d’œuvre : D’après l’article premier de la loi de 1994 le droit d’auteur couvre toute œuvre originale littéraire scientifique ou artistique etc…Ainsi afin de déterminer le champ de la protection, le législateur cite à titre indicatif une liste d’œuvres de l’esprit protégeables par le droit d’auteur. En consultant cette liste il apparaît que les œuvres protégeables sont celles ayant historiquement bénéficié de la protection par les législations sur les droits d’auteur, à l’exception du logiciel. Sont susceptibles de protection toutes les œuvres littéraires ou artistiques du moment qu’elles revêtent un caractère original, c'est-à-dire, contiennent une empreinte de l’auteur permettant de les distinguer d’autres œuvres semblables, il en est ainsi de toute œuvre écrite ou imprimée, des compositions musicales, des œuvres créées pour la scène, des œuvres photographiques, cinématographiques etc.…18 Toutefois, l’évolution des moyens technologiques et le recours à Internet comme moyen de communication des informations, a entraîné une remise en cause de la notion d’originalité de l’oeuvre d’une part et a d’autre part généré de nouvelles formes d’œuvres qui a entraîné une remise en cause de la notion classique d’œuvre de l’esprit et qui a contribué à introduire dans la liste des œuvres protégeables citées par la loi, des œuvres nouvelles, du moment qu’elles répondent aux conditions légales de protection, tel est le cas par exemple : du site web et des éléments composants ce site. - Concernant la remise en cause de la notion d’originalité, condition nécessaire pour la protection de l’oeuvre par le droit d’auteur, elle a été suscitée 18 Edelman B., Propriété littéraire et artistique- Droit d’auteur- Nature du droit d’auteur- J.Cl. Propriété littéraire et artistique, Fasc 1112, n° 99 : Définissant le caractère original de l’oeuvre la Cour d’Appel de Grenoble a en date du 19 septembre 1989 considéré que « l’oeuvre originale est celle qui porte la marque de l’apport intellectuel de l’auteur, c'est-à-dire celle dans la quelle on reconnaît un effort intellectuel personnalisé et un caractère objectif de nouveauté….. » 9 relativement aux logiciels (et particulièrement lorsque ce dernier est mis en ligne). La jurisprudence française a eu à plusieurs reprises l’occasion de se prononcer sur la protection des programmes d’ordinateurs par le droit d’auteur19 et a considéré dans ce contexte que le logiciel original n’est pas celui dans lequel on retrouvera la marque de la personnalité de son auteur, mais celui qui relèvera d’un minimum d’activité inventive20.En effet, la définition subjective de l’originalité a été considérée comme inadaptée au caractère technique et dématérialisé des logiciels surtout lorsqu’ils sont mis en ligne21. - Concernant l’élargissement de la notion d’œuvre : Les techniques informatiques ont fait naître de nouvelles formes d’œuvres , il s’agit d’œuvres multimédia : associant un texte, des images fixes ou animées, des sons, l’œuvre multimédia peut inclure le cinéma par exemple, elle n’est donc pas réellement une œuvre nouvelle. Ce qui est nouveau c’est l’utilisation de ces techniques dans le carde d’Internet et le lien existant entre le multimédia et le numérique.22 La page web23 représente l’une des œuvres multimédia fruit de la combinaison entre Internet et les techniques numériques. La création d’un Site Web suppose un effort intellectuel et économique considérable, la protection de cette création revêt en effet un intérêt certains pour les acteurs du monde virtuel. Un site web est composé d’un ensemble de pages web, qui peuvent être définies comme : « l’assortiment dans un écran de plusieurs objets : texte, 19 Cass. assemblée plénière 7 mars 1986, C.A. Paris 2-11-1982, Cass. 16-4-1991, citées par Lucas A., Propriété Littéraire et Artistique- Objet du droit d’auteur , Oeuvres protégées -Logiciels- J-Cl Propriété Littéraire et Artistique Fasc. 1160, p.8. ; Colin C., art. précit. 20 Lucas A., Ibidem, p. 10. 21 V° Bellefonds L.X., « Internet et le statut de l’information. Quelles règles du jeu ?», Gaz. Pal ., numéro spécial, 1996, 2ème semestre, in Actes du colloque Internet organisé par ADIJ, des 15 et 16 avril 1996, P ;1071. 22 Lucas A., « Droit d’auteur & Multimédia », In Mélanges en l’Honneur de André Françon, éd. Dalloz, p. 325. 23 V° Khaddouja Ben Hamda Souid, Droits d’auteur et Internet, Mémoire DEA, Faculté des sciences juridiques politiques et sociales de Tunis, 1999-2000, p. 34. 10 graphiques et liens hypertextes (des titres soulignés sur lesquels il suffit de cliquer pour ouvrir une autre page web).»24 Les éléments constitutifs d’un site Internet, bénéficient de la même protection que toute autre œuvre de l’esprit, du moment qu’ils revêtent un caractère original. Il en est de même pour le site en lui-même en tant qu’œuvre multimédia25. D’une manière générale, toute œuvre créée par une technique informatique et mise en ligne est susceptible d’être protégée par le droit d’auteur, il en est ainsi, des bases de données,26 lorsqu’elles sont accessibles via le réseau Internet, ainsi que les logiciels mis en ligne. La multiplication de nouvelles catégories d’œuvres susceptibles de protection par le droit d’auteur a ainsi généré une remise en cause de la notion, voire un éclatement de celles-ci, la notion d’auteur même se trouve atteinte, qui a la qualité d’auteur dans le cadre d’une œuvre multimédia ou d’un site web plus particulièrement ? Le bouleversement est total en droits d’auteur, il s’étend aussi aux droits moraux et patrimoniaux reconnus à l’auteur. B- La remise en cause des droits conférés à l’auteur : La numérisation des œuvres a considérablement influé la protection conférée aux auteurs en portant atteinte à leurs droits. En effet, aussi bien le droit patrimonial (a), que le droit moral s’en trouve touché (b). 24 V° Bellefonds X.L.,art. précit., p. 1072. Le Tribunal de Com. 9/2/1998 (Cybiou/Qualstream) a attribué aux contenus de pages web le caractère d’œuvre originale, œuvre protégeable par le droit d’auteur, v° (www.juriscom.net); V° Gautier P-Y., Propriété littéraire et artistique, œuvres protégées- œuvre multimédia, J-Cl Propriété littéraire et artistique, Fasc. 1165 ; V° aussi Strowel A. et Derclaye E., Droit d’auteur et numérique : logiciels, bases de données, multimédia- Droit Belge, Européen et Comparé, éd Bruylant, Bruxelles, 2001. 25 26 En droit français, l’art. L.112-3 du code de la P.I. définit la base de données comme un : « un recueil d’œuvres, de données ou d’autres éléments indépendants disposés de manière systématique ou méthodique et individuellement accessibles par des moyens électroniques ou par tout autre moyen ».V° dans ce sens Bertrand R. André, op.cit., p. 521 et svts sur les bases de données et le droit d’auteur ; Gaubiac Y., Propriété littéraire et artistique – Œuvres protégées – œuvres créées avec un ordinateur, J-Cl Propriété littéraire et artistique, Fasc 1164 . 11 a- Le droit patrimonial : Ce droit consiste à accorder à l’auteur un droit exclusif pour l’exploitation de son œuvre. L’article 9 de la loi de 1994 reconnaît à l’auteur un droit patrimonial, qui comprend essentiellement le droit de représentation, le droit de reproduction. La représentation de l’œuvre au public peut se faire de deux manières : directement, il s’agit d’une représentation directe de l’œuvre devant un public par exemple : la présentation d’une pièce théâtrale ou d’une œuvre musicale. Ou indirectement, par l’utilisation d’un support tels que les disques, les projections, émissions de radio ou encore via Internet, puisque le législateur admet à l’article 2 de la loi, que la représentation de l’œuvre soit faite par tout moyen transmetteur de signes, de sons ou d’images. La diffusion rapide de l’information et des œuvres à travers les différents sites que permet ce moyen de communication, assure une représentation indirecte de l’œuvre à un public virtuel27. Cependant, face à Internet la conception du droit de représentation a changée. L’œuvre n’est plus en effet, présentée directement au public ou par un support matériel, celle-ci est désormais présentée sous forme dématérialisée. Il est en effet incontestable que la numérisation des œuvres permet sa communication par télédiffusion28. La mise à la disposition d’œuvres de l’esprit via Internet constitue alors un acte de représentation qui ne peut être effectué que par l’auteur ou avec son autorisation, étant donnée qu’il s’agit d’une communication de l’œuvre. Ainsi, la mise en ligne d’une œuvre sans l’autorisation de son auteur est considérée comme une violation de son droit de représentation. 27 28 Art 2 loi 24-2-1994 définit le droit de représentation. Jezequel C., Lemenicier A., Blin L., art. précit. 12 La reproduction de l’œuvre implique sa fixation matérielle par tout procédé, donc même par un procédé numérique tel que sa diffusion par Internet. La numérisation pose un problème quant à sa qualification, peut-on la considérer comme un acte de reproduction ? Certains auteurs pensent qu’il s’agit d’une reproduction puisque le chargement de celle-ci sur la mémoire d’un ordinateur et son stockage constitue un acte matériel de reproduction. Cette idée se confirme par les dispositions de l’article 1 er du traité de l’OMPI du 20-12- 1996 sur les droits d’auteurs qui prévoit que : le droit de reproduction cité à l’article 9 de la convention de Berne s’applique à l’environnement numérique en particulier l’utilisation des œuvres sous forme numérique. Ainsi, la numérisation des œuvres29 et leur mise en ligne sont considérés comme des actes de reproduction au sens du droit d’auteur. Toutefois, la difficulté pratique réside dans le fait que le stockage des informations sur une mémoire d’un ordinateur est à la fois parfait définitif et reproductible à l’infini. L’atteinte au droit de reproduction ne se limite pas à la mise en ligne sans l’autorisation de l’auteur, mais s’étend aussi à la multiplication des copies et à la facilité de reproduction d’œuvres protégées, d’où certains auteurs parlent de clonage des oeuvres30 Il est à noter que l’influence du numérique sur les deux droits : celui de la reproduction et de la représentation tend à supprimer les frontières existantes : la technique permet de dématérialiser le support (le droit de représentation) et de multiplier à l’infini le nombre de représentations et de reproductions. Les frontières entre le droit de représentation et le droit de reproduction s’estompent, avec la mise en ligne d’œuvres protégées, c’est la raison pour 29 La numérisation est définie comme étant la transformation de données analogiques en données binaires, voir Jezequel C., Lemenicier A., Blin L., art. précit. 30 Le droit d’auteur et Internet, Rapport du groupe de travil de l’Académie des sciences morales et politiques, précit., p. 19. 13 laquelle on parle de « communication » de l’œuvre plutôt que de sa représentation. Toutefois, les reproductions strictement réservées à « l’usage privé du copiste », ne représentent pas une violation du droit d’auteur, ce sont en effet des exceptions, tolérées. C’est dans ce contexte que le législateur français est intervenu afin de limiter avec précision les exceptions aux droits d’auteur dans l’environnement numérique avec la promulgation de la loi du 1er Août 2006 relative aux droits d’auteur et droits voisins dans la société de l’Information. Cette loi prévoit par ailleurs une répression sévère des atteintes au droit moral de l’auteur. b-Le droit moral : C’est un droit perpétuel est inaliénable qui confère à l’auteur un droit de divulgation, un droit de paternité et un droit à l’intégrité de l’oeuvre. Ainsi, tout auteur d’œuvre protégée peut en interdire toute altération ou modification, il peut par ailleurs exiger que son nom soit indiqué sur toutes les reproductions. La protection ainsi conférée par la loi n’est pas toujours évidente, les violations se multiplient surtout lorsqu’il s’agit d’une œuvre mise en ligne, l’évolution des techniques informatiques permet un usage illicite des œuvres numérisées qui échappe au contrôle de l’auteur En effet, le droit de divulgation est atteint, quand la mise en ligne est une nouvelle publication, faite sans l’autorisation de l’auteur sur le réseau Internet, ce dernier est seul maître de la décision de diffuser ou de ne pas diffuser son œuvre. Ce droit est doublement atteint, lorsque l’œuvre publiée sur un support papier, est scannée et mise en ligne, c'est-à-dire numérisée, sans l’autorisation de son auteur. 14 En outre, Internet risque de fragiliser le droit de paternité de l’auteur, l’œuvre peut être en effet, reproduite à l’infini, sans que sa mise à la disposition du public ne soit accompagnée du nom de l’auteur. Quant au droit au respect de l’œuvre, il n’est pas à l’abri des menaces de l’Internet, par sa numérisation et sa mise en ligne, l’œuvre est reproduite, modifiée et manipulée et transformée qu’il s’agisse d’un texte, d’une image, ou même d’une chanson, ce qui a pour conséquence de créer une confusion entre l’originale et la copie. L’œuvre est ainsi dénaturée, détournée sinon complètement « défigurée ». Grâce à la technique du copier coller, Internet a facilité le mixage des œuvres. Le retrait de l’oeuvre de la circulation risque de ne pas pouvoir être effectif, car celle-ci ayant déjà été copiée et reproduite, elle échappe à son auteur. Les atteintes ainsi portées aux droits d’auteur par le réseau Internet sont très importantes et d’un impact considérable sur l’évolution de la créativité elles risquent de dissuader les auteurs de recourir aux technologies de communication tel qu’Internet afin de diffuser leurs œuvres. La multiplication de contrefaçons et d’actes de piraterie a fait naître une nouvelle forme de criminalité c’est ce qu’on a convenu d’appeler cybercriminalité31. Pour une protection plus efficace des auteurs et de leurs droits et afin de marier la créativité avec numériques ont grâce les nouvelles technologies ; les techniques à un effort législatif national et International considérable ; créées des mesures de protections des droits d’auteur d’œuvres numérisées. 31 V° pour plus de détails : Chawki M., « Essai sur la notion de cybercriminalité », www.ihei.org; Féral-Schul C., Cyber droit- Le droit à l’épreuve d’Internet, 3ème 2d. Dalloz, Paris, 1999, p.41 ; Thoumyre L., « la protection des œuvres numériques sur Internet », www.juriscom.net; Wekestein I., Droits voisins du droit d’auteur et numérique, éd. Litec, Paris, 2002, p. 93 et svts. 15 II- INTERNET AU SERVICE DE LA PROMOTION DES DROITS D’AUTEUR Etant un moyen de communication servant à faire circuler les informations via un réseau, Internet contribue grâce à des particularités qui lui sont propres de faire diffuser l’information, les moyens techniques utilisés permettent par ailleurs aux auteurs d’assurer une sécurité pour leurs œuvres (A) ; d’autre part, l’impact d’Internet sur les droits d’auteur et les atteintes portées, ont suscité l’intérêt de plusieurs acteurs : législateurs , organisations internationales et même professionnels qui viennent au secours des droits d’auteur afin de les promouvoir par l’amélioration du dispositif législatif existant (B). A- La diffusion et la sécurité des œuvres sur Internet : Internet permet incontestablement de diffuser les œuvres de l’esprit que les auteurs ont choisis de mettre en ligne, toutefois malgré les risques d’utilisation illicite et de contrefaçon, cette diffusion n’est pas incontrôlée. * Aucun moyen de communication n’a permis d’assurer une si grande diffusion des informations et des données. En effet, la rapidité et l’universalité du réseau permettent de faire une publicité de l’oeuvre, de la porter à la connaissance du public au delà des frontières nationales. La rapidité et la facilité de diffusion apparaissent, à travers la simplicité dans l’utilisation d’informations ou d’œuvres mises en ligne, il suffit de cliquer pour pouvoir accéder en quelques secondes aux données que l’internaute recherche. L’utilisation d’Internet, fait alors gagner beaucoup de temps et permet par conséquent à l’auteur de faire connaître son œuvre le jour même où il a achevée sa création, aux internautes se trouvant aux quatre coins du monde. Le caractère International que revêt Internet est aussi marqué par la circulation de l’œuvre sans limitation de frontières, elle est accessible à tous 16 n’importe où dans le monde et au même moment, Internet s’affranchit ainsi des distances et du temps. Ceci permet d’attribuer à l’oeuvre un caractère universel, ce qui n’était pas aussi évident pour les autres moyens de représentation et de reproduction. Etant diffusée rapidement et internationalement, l’oeuvre en ligne jouie d’une publicité internationale, ce qui permet de la promouvoir. * La protection des droits d’auteur a entraîné la mise à la disposition des titulaires des droits, des moyens leur permettant de sécuriser leurs œuvres afin d’éviter tout acte de piraterie ou de contrefaçon. Ainsi, les nouvelles technologies servent de moyen de promotion des droits d’auteur et contribuent à son développement. A cet effet, des techniques informatiques, ont été instaurées par les informaticiens afin de pallier les difficultés de protection que fait naître la pratique. Ces techniques de protection permettent ainsi à des niveaux différents de garantir l’authentification, et l’intégrité de l’œuvre, dans ce contexte que la loi a réglementé la signature électronique, la cryptographie ou cryptage, elle a par ailleurs mis à la charge des fournisseurs de service une obligation de sécurité et de confidentialité qui devrait permettre de protéger les œuvres diffusées via Internet. - La signature électronique : « elle consiste à apposer de la propre main du contractant, un nom ou un signe spécial intégré à l’écrit auquel il se rapporte. Lorsque la signature est électronique, elle consiste en l’utilisation d’un procédé d’identification fiable garantissant le lien entre la dite signature et le document électronique auquel elle se rattache.32 » 32 Article 453 du code des obligations et des contrats modifié par la loi n°2000-57 du 13 Juin 2000 alinéa 2 nouveau. Afin de concrétiser et de garantir cette fiabilité du procédé utilisé et dans le but de s’assurer de la réalité de la signature électronique des transactions faites via Internet, le législateur tunisien a déterminé à travers l’Arrêté du Ministre des technologies et de la communication daté du 19/7/2001 les données techniques relatives aux 17 La signature, permet grâce aux multiples exigences légales imposées et prévues pour l’obtention d’un certificat électronique, d’identifier le signataire. En effet, l’article 4 de l’Arrêté du 19/7/200133 prévoit que les certificats sont utilisés pour la réalisation des opérations suivantes : « - l’identification de son titulaire – l’attestation de la réalisation d’une transaction ainsi que la fixation de sa date et de son horaire – la réalisation des opérations de commerce électronique. » Ainsi, l’auteur peut apposer une signature électronique sur l’oeuvre qu’il met à la disposition du public via Internet ce qui permettra de garantir son authenticité ainsi que son intégrité. Ce dispositif de protection a été aussi adopté en droit comparé tel que le droit français, par la loi du 13 mars 200034 et en droit américain par le E- sign Act du 30 juin 2000 qui a légalisé la signature électronique à l’échelle fédérale des Etats-Unis35. Le cryptage36, représente aussi un moyen de protection des œuvres mises en ligne, il s’est considérablement développé, permettant de rendre une communication parfaitement indéchiffrable. Il a fait l’objet d’une définition légale en droit tunisien, l’article 2 de la loi du 9 Août 2000 relative aux échanges et au commerce électronique, prévoit qu’il consiste en « l’utilisation de codes ou de signaux non usuels permettant la conversion des informations à transmettre en des signaux incompréhensibles aux tiers ou l’utilisation de codes et de signaux indispensables à la lecture de l’information. » certificats électroniques et leur fiabilité auxquels doivent se conformer les fournisseurs de services de certificat électronique ayant obtenu l’autorisation d’exercer cette activité, de l’Agence Tunisienne de Certification conformément aux dispositions de l’article 11 de la loi relative aux échanges et au commerce électronique du 9/8/2000. 33 Arrêté du ministre des technologies de la communication du 19/7/2001, fixant les caractéristiques techniques du dispositifs de création de la signature électronique, JORT du 27/7/2001, n°60. 34 Cette loi est une transposition de la directive de la communauté européenne du 13-12-1999. 35 V° Féral-scuhl C., op.cit, p . 204. 36 Pour plus de détails voir Breese P. , op.cit., p . 320 et svts. 18 Le système d’IBM nommé « cryptolopes » propose un système de cryptage et de signature électronique pour assurer la protection des droits d’auteur lors de la distribution des contenus.37 D’autres mesures techniques de sécurité ont été prévues à cet effet permettant d’identifier l’œuvre, l’identifiant est placé à l’intérieur du fichier numériquement représentatif de l’œuvre au moyen de deux techniques possibles : l’étiquetage et l’aquamarquage (watermarking). La première, consiste à placer dans la partie initiale du fichier une information donnant la valeur de l’identifiant selon une convention de codage. Cet identifiant sera alors utilisé comme un lien vers une base de données alimentée par les titulaires des droits. (Organisations Internationales des titulaires de droits). La deuxième consiste à opposer une marque codée par exemple sur une image en la rendant invisible38. Dans l’objectif de consolider et de renforcer ces mesures de protection, l’article 12 du traité de l’OMPI sur les droits d’auteur interdit de toucher l’identifiant. L’identification permet ainsi d’immatriculer l’œuvre et de garantir la conservation et l’utilisation légales des données fournies39. Outre l’intérêt porté par les techniques informatiques et numériques et la protection qu’elles confèrent aux droits d’auteur, Internet a permis d’attirer encore plus l’attention des acteurs nationaux et Internationaux quant à la 37 Les cryptolopes consistent en des conteneurs englobant des informations, des logiciels ou des produits au sein d’une enveloppe chiffrée, l’enveloppe est envoyée avec la description du contenu de l’objet commandé, un système de signatures électroniques permettant d’identifier l’expéditeur et le destinataire, ainsi qu’ un formulaire d’achat. Après avoir accepté les conditions d’usage, le client recevra un récépissé ; le centre de gestion des droits lui enverra également une clé destinée à ouvrir le conteneur. L’acheteur pourra reproduire et distribuer les cryptolopes à des tiers, mais ces derniers ne seront autorisés à accéder au contenu qu’après avoir effectuer une requête auprès du centre de gestion des droits, V° Thoumyre L., art.précit. 38 V° Le droit d’auteur et l’Internet, Rapport du groupe de travail de l’Académie des Sciences morales et politiques, précit, spécialement : les protections techniques anti-piratage. La technique de l’aquamarquage est utilisée surtout pour les photographies. 39 V° Le droit d’auteur et l’Internet, Rapport du groupe de travail de l’Académie des Sciences morales et politiques, précit, spécialement : les mesures techniques de protection, l’identification des œuvres. 19 nécessité de réprimer les infractions aux droit d’auteur et d’harmoniser les différentes législations pour un meilleur avenir de la propriété littéraire. B- L’intérêt National et International accordé aux droits d’auteur : - A l’échelle nationale : La loi du 24 février 1994 représente un cadre juridique favorable à la protection des auteurs ainsi que de leurs œuvres. L’avènement d’Internet a accru cette protection dans la mesure où le législateur tunisien a mis en œuvre des mesures techniques visant à renforcer la protection des données informatisées destinées à circuler à travers le réseau Internet. Outre la modification du code des obligations et des contrats et l’admission de la signature électronique et du document électronique comme moyen de preuve de toute opération accomplie sur le net, il a crée par la loi du 3 février 2004 relative à la sécurité informatique l’Agence Nationale de la Sécurité Informatique, qui compte parmi ces fonctions d’assurer la veille technologique dans le domaine de la sécurité informatique et d’établir des normes spécifiques à la sécurité informatique, ainsi que d’ oeuvrer à encourager le développement de solutions nationales dans le domaine de la sécurité informatique et à les promouvoir, conformément aux priorités et aux programmes qui seront fixés par l'agence40. L’instauration de cette Agence et le rôle considérable qu’elle joue dans le domaine de la protection des données et informations numérisées, permettra incontestablement de protéger les œuvres en ligne et d’en faire contrôler tout usage illicite. 40 Article 3 de la loi n° 2004-5 du 3/2/2004 relative à la sécurité informatique, JORT N° 10 du 3/2/2004, p. 242 et 243. 20 Par ailleurs, devant la propagation de la fraude informatique et de la cybercriminalité et dans l’objectif d’adapter la législation tunisienne au contexte International, le Code pénal a été modifié, prévoyant des sanctions pénales visant à réprimer toute fraude quelque soit le moyen utilisé. Ainsi prévoit-il à l’article 199 troisièmement un emprisonnement d’un an et d’une amende de deux mille dinars, toute personne qui modifierait le contenu de documents informatiques ou électroniques, lorsqu’il a causé en agissant de la sorte un dommage à autrui. La personne qui détiendrait ou utiliserait intentionnellement ces documents sera punie par la même sanction. Cette modification du code pénal en 199941, témoigne de la volonté du législateur de réprimer la fraude informatique et les multiples violations qui touchent les droits en question y compris les droits d’auteur, cette disposition constitue en effet un moyen de dissuasion de tout usage illicite des œuvres numérisées. Quand bien même n’ayant pas trait directement aux droits d’auteur, ces dispositions légales démontrent que les modifications et les apports législatifs en matière de sécurité informatique et de répression pénale des fraudes commises en ligne et dont la promulgation a été exigée par l’invasion d’Internet, permettent de promouvoir les droits des auteurs d’œuvres numérisés et de les protéger à l’échelle nationale. Cette promotion à l’échelle nationale se trouve consolidée par la multiplication des efforts Internationaux en vue de leur assurer une protection face aux multiples atteintes dues à leur mise en ligne. - A l’échelle Internationale : *La meilleur illustration de la promotion des droits d’auteur qu’à permis Internet, apparaît à travers les deux traités adoptés par l’OMPI en date du 20 41 Art 199 ter C P. ajouté par la loi n° 99-89 du 2-8-1999. 21 décembre 1996: l’un relatif aux droits d’auteurs et l’autre aux droits des artistes interprètes ou exécutants et les producteurs des phonogrammes, appelés traités Internet. Le traité relatif aux droits d’auteur tend à renforcer la protection des auteurs sur leurs œuvres quant à leur distribution et leur communication au public ainsi qu’à l’accès aux œuvres en ligne (article 12 du traité). Ce traité reconnaît par ailleurs aux auteurs des logiciels et des bases de données une protection de leurs œuvres, il leur reconnaît à travers l’article 8 un droit exclusif d’autoriser la communication au public de leurs œuvres avec ou sans fil. Ils, obligent enfin les Etats contractants à prévoir des mesures sanctionnatrices contre la neutralisation et le contournement des mesures techniques de protection, ainsi prévoit-il l’interdiction d’effacer le tatouage ou le marquage électronique des œuvres. C’est dans ce contexte que le législateur français a adopté la directive européenne 2001/29 du 22/5/ 2001 relative à l’harmonisation de certains aspects du droit d’auteur et des droits voisins dans la société de l’information ; par la loi du 1 août 2006 relative aux droits d’auteur et droits voisins dans la société de l’Information42 modifiant ainsi les dispositions du code de la propriété intellectuelle; Cette loi a instauré une protection des œuvres numérisées et a exigé un dépôt légal de ces œuvres . Par ailleurs elle a précisé les exceptions aux droits d’auteur et renforcé la répression de toute violation de ces droits. Le rôle de l’OPMI s’étend aussi aux manifestations mondiales qu’elle organise pour la promotion de la propriété intellectuelle et son adaptation aux évolutions technologiques, c’est d’ailleurs dans ce contexte qu’a été organisé le troisième congrès mondial de lutte contre la contrefaçon les 30 et 31 janvier 2007 qui a permis à de hauts fonctionnaires, des chefs d’entreprises et des 42 V° Dusollier S., Droit d’auteur et protection des œuvres dans l’univers numérique, Collection Création Information Communication, éd. Larcier, Bruxelles, 2005, p.34 et svts ; V° aussi Dossier Le nouveau droit d’auteur au lendemain de la loi du 1er août 2006, Recueil DALLOZ, cahier Droit des affaires du 14/9/2006, N° 31/7260. 22 groupes de consommateurs de traiter la question des conséquences profondément dévastatrices de la contrefaçon et du piratage et leurs retombées économiques et sociales. * Les accords de l’OMPI avec l’Organisation mondiale du commerce, relatifs aux aspects des droits de propriété intellectuelle qui touchent au commerce (ADPIC), fixent parmi leurs objectifs la protection et le respect des droits de la propriété intellectuelle qui devrait contribuer à la promotion de l’innovation et de la technologie, la protection s’étend aussi aux droits voisins. * D’autre part , la création et le renforcement du rôle des associations et des organisations mondiales dans le domaine de la propriété intellectuelle permet de mettre l’accent sur la promotion de la matière des droits d’auteur grâce à Internet ; ainsi la création d’une association internationale de protection des logiciels contre le piratage et la contrefaçon la Business Software Alliance en témoigne, en effet, celle-ci joue un rôle important dans le cadre de la protection des logiciels et de leurs auteurs et des entreprises créatrices. Les logiciels sont l’une des technologies les plus stratégiques de la société de l’information. Ils permettent de faire fonctionner l’ensemble de la chaîne, des ordinateurs jusqu’à Internet. Malheureusement, les copies que les ordinateurs permettent de réaliser assez facilement en quelques secondes, la contrefaçon de logiciel est largement répandue, la fraude est omniprésente, à la maison, à la faculté, dans les entreprises et au sein des administrations. Les pirates de logiciels volent non seulement les entreprises créatrices de logiciels, mais avec la diminution des budgets réservés à la recherche et au développement de nouveaux logiciels, ce sont aussi tous les utilisateurs qui en subissent les conséquences. Pour lutter contre toutes ces fraudes quelque soient leurs formes, les efforts des différentes parties se sont regroupés tant au niveau national 23 qu’International, les textes récents visent à réprimer et à sanctionner sévèrement la fraude Internet qu’il s’agisse d’une contrefaçon ou d’un piratage le traité anti cyber- criminalité en est la preuve. * L’adoption du conseil de l’Europe d’une convention anti- cybercriminalité, en date du 23 novembre 2001 à Budapest, illustre par ailleurs l’intérêt qu’a suscité Internet quant à la nécessité de protéger les droits d’auteur, en effet cette convention prévoit des mesures protectrices de la propriété intellectuelle et droits connexes et sanctionne toute atteinte à ces droits. Ainsi, l’article 10 considère que les violations aux droits d’auteur tels que prévus par la convention de Berne constitue, par l’Accord sur les aspects commerciaux des droits de propriété intellectuelle et du traité de l’OMPI sur la propriété intellectuelle, à l’exception de tout droit moral conféré par ces conventions, comme infraction pénale lorsque de tels actes sont commis délibérément, à une échelle commerciale et au moyen d’un système informatique. La même règle est prévue pour les droits connexes aux droits d’auteur par application de la convention de Rome. *Enfin, en date du 17 avril 2007 le directeur général du moteur de recherche Google a annoncé la présentation d’un outil de protection des droits d’auteur qui devrait permettre aux propriétaires de vidéos de savoir instantanément si des diffusions illégales sur le site ont lieu43. La mobilisation de tous ces efforts et la promulgation d’une législation de plus en plus protectrice des droits d’auteur, témoignent l’impact positif d’Internet et son rôle considérable dans la promotion de la propriété intellectuelle malgré les risques qu’il présente. 43 www.lefigaro.fr du 18/4/2007. 24 CONCLUSION - Les droits d’auteur ont été sensiblement remis en cause par l’avènement d’Internet et des nouvelles technologies de communication, toutefois cet impact n’est pas aussi néfaste, ni négatif, que l’on pense, en effet, ce moyen de communication et de transmission des données, contribue nécessairement à l’évolution de la matière et au renforcement de la protection des droits en question. - Quant à la législation tunisienne en vigueur, elle contient des règles assez protectrices des droits d’auteur, des règles qui restent cependant obsolètes dans certaines circonstances, d’où la nécessité de l’adapter aux évolutions technologiques et aux mesures internationales techniques et juridiques visant la protection des droits d’auteur et des droits connexes, ainsi que la répression des atteintes à leurs droits. Espérant alors que le projet de modification de la loi 24 février 1994 puisse combler les insuffisances actuelles. - Pour assurer un équilibre entre le droit de l’auteur sur son œuvre et le droit au libre accès à la culture appartenant à tout citoyen, il faudra concevoir les droits d’auteur et leur protection comme un critère de développement socioculturel. Pour finir à l’instar de ce que disait le professeur Josserand concernant l’influence que subissent les règles de droit par les développements économiques, je dirai que le numérique bouscule le juridique lui impose sa loi et le façonne à son image, c’est pour cette raison que le droit de la propriété intellectuelle doit répondre aux exigences des nouvelles technologies et s’ y adapter avec respect de l’auteur des droits des utilisateurs, droit qui ne doit pas être abusivement exercé, tenant compte des exceptions faites aux droits d’auteur visant à promouvoir la liberté d’expression, telle que celle de la copie privée. 25