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Discours de Cécile DUFLOT
COLLOQUE ORF
27 novembre 2012
LE FONCIER CA SE FABRIQUE
Madame la Vice-présidente du conseil Régional,
Monsieur le Président,
Mesdames et Messieurs,
Vous m'avez invitée à participer à votre colloque placé sous le signe de
la « fabrication du foncier en Ile-de France ». Chacun d'entre vous connaît les défis auxquels l'Ile-de-France est
confrontée en matière de logement et de développement économique. Le logement est la préoccupation majeure des Franciliens qui,
confrontés aux prix sans cesse croissants de l'immobilier, sont contraints
de s'installer en périphérie des villes, dans des secteurs mal desservis
en infrastructures de transport, ou quittent purement et simplement la
région parisienne. 1
Le parc de logement social quant à lui est insuffisant et pour cause : 62
communes ne respectent pas les objectifs de mixité fixés par la loi SRU
et 57 d'entre elles font l'objet d'un constat de carence. Le taux de vacance et de rotation du parc social est faible alors que de
nombreux ménages et personnes isolées sont sur liste d'attente :
380 000 demandes ne sont pas satisfaites dont 40 000 au titre du droit
au logement opposable. Le développement économique, ensuite, est un autre enjeu majeur pour
l'Ile-de-France, qui doit maintenir le tissu de PME-PMI de proximité qui la
caractérise. Les pouvoirs publics ont donc pour mission de maintenir un équilibre
habitat-emploi, sous peine de voir le tissu social et économique des
communes franciliennes remis en cause et aggraver les déséquilibres
territoriaux existants.
Au-delà d’un réseau de transport, c’est le Grand Paris des habitants qu’il
nous faut construire ! Face à la crise du logement, le Président de la République a proclamé
que le logement était une priorité en fixant un objectif de 500 000
logements construits par an dont 150 000 sociaux à l'échelle du territoire
national. En Ile-de-France, il en faudrait 70 000 quand on en produit
aujourd’hui à peine 40 000. Encore faut-il, avant de poser la première pierre, savoir où la poser.
Il faut remédier à la question de la disponibilité du foncier, et de son coût.
Il faut donc renforcer l’offre de terrains constructibles. Pour cela il faut réaliser les anticipations et constituer les réserves
foncières pour trouver les terrains adaptés, au bon endroit et au bon
moment mais aussi développer le recyclage des terrains disponibles.
Cette question de la mobilisation des emprises mutables est un sujet
majeur pour l'Ile-de France. Vous l’avez souligné à l'occasion de ce
colloque, grâce aux travaux menés par le groupe de travail sur les
gisements fonciers disponibles, l'Ile-de-France abrite de nombreux
terrains, en friche ou enclavés, de taille et de nature variées, qui
nécessitent une transformation effective en terrains à bâtir.
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Je partage votre constat : la mobilisation des terrains mutables passe
par une meilleure articulation des documents de planification. Je suis
favorable par exemple à une simplification de la hiérarchie des normes.
En Ile-de-France, des réflexions sont en cours sur l'articulation entre le
SDRIF et la Charte de PNR.
Ce qui est en jeu, en réalité, c'est moins la capacité de pallier
l’insuffisance
de
terrains
constructibles,
ou
potentiellement
constructibles, que la capacité à les mobiliser rapidement dans des
conditions financières et techniques compatibles avec les opérations
souhaitées et dans des formes d’urbanisation assurant une quantité de
logements ou d’emplois à l’hectare suffisante. Cette question est
particulièrement prégnante en péri-urbain dont la situation a été étudiée
par le second groupe de travail de l'ORF.
L'enjeu est aussi de mettre un terme à l'artificialisation continue des
terres en limitant de manière drastique l'étalement urbain. Il faut qu'à
côté des mesures incitatives de densification et de renouvellement des
secteurs urbanisés on impose des conditions plus difficiles et exigeantes
pour l'ouverture à de nouvelles urbanisations. Comme vous l'avez souligné dans vos propositions, le développement
des PLU intercommunaux est une des voies à privilégier pour y parvenir
en limitant la mise en concurrence stérile des territoires et en organisant
la cohérence et la solidarité y compris en matière foncière.
Sur tous ces sujets, le travail a déjà commencé. La loi de mobilisation du
foncier public, qui sera bientôt (à nouveau) adoptée, permettra à l’Etat et
ses établissements publics de mettre à disposition les terrains en
consentant une forte décote pour permettre d’équilibrer financièrement
les programmes de logements sociaux. C’était l’urgence. Ce sera
possible dès 2013.
Les particuliers seront incités par ailleurs à mettre sur le marché leurs
terrains à bâtir qu’ils étaient, jusqu’à présent, fiscalement encouragés à
conserver le plus longtemps possible. On revient ainsi sur un système
absurde qui incitait à la rétention foncière au moment où on manque de
terrains disponibles.
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Mais, au-delà de ces premières mesures, pour mieux traiter ces enjeux,
d’autres évolutions législatives sont envisagées :
-
Le projet de loi que portera Marylise LEBRANCHU sera l’occasion
d’un Acte III de la décentralisation qui pourrait être une chance
pour la gouvernance en Ile-de-France. - Le projet de loi logement-urbanisme que je porterai dès le premier
semestre 2013 pourra porter les évolutions tendant à la mise en
place d’une stratégie foncière dans les documents de planification,
avec l'aide des EPF qui ont vocation à être généralisés sur tout le
territoire :
- il nous faut des opérateurs fonciers professionnels, efficaces pour
mieux traiter ces enjeux.
- Vous le savez, je suis favorable à plus de clarté, de simplicité dans
la mobilisation d’une planification adaptée à chaque échelon
territorial : au niveau régional la vision stratégique à grande maille,
l’expression des grandes trames qui viendront constituer le
maillage général, au niveau du bassin de vie, la définition des
cohérences territoriales à l’échelle des SCOT, au niveau
intercommunal la définition d’un projet de territoire permettant de
dire pourquoi, comment et où construire, aménager, préserver.
Oui, je suis favorable à un PLU intercommunal, parce qu’il permet
la coopération plutôt que la concurrence, parce qu’il doit vous
permettre de dire plus facilement oui au logement et non à
l’étalement urbain.
C’est exigeant, c’est compliqué, mais c’est une voie d’avenir. J’en
suis convaincue.
-
Cette loi sera aussi l’occasion de définir le cadre juridique d’une
ville plus dense, moins consommatrice d’espaces et d’énergie afin
d'assurer la transition écologique et énergétique des territoires. -
La lutte contre l'artificialisation des terres agricoles et naturelles est
une politique au cœur de la feuille de route et du programme de
travail du gouvernement. Les objectifs sont très ambitieux et ne
pourront être atteints que par des mesures fortes pour limiter
l'étalement urbain : fin des POS, limitation du pastillage en zone A
et
N,
déclassement
des
zone
2AU
anciennes
et
surdimensionnées...coordonnées avec des mesures favorisant les
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projets en zone urbaine, la mobilisation des friches, la densification
ou la mutation des tissus pavillonnaires. -
Enfin, ainsi que vous le signalez très justement, les conséquences
des recours contentieux, en particulier lorsqu’ils présentent un
caractère abusif ou lorsqu'ils font l'objet de délais importants,
peuvent être préjudiciables pour la réalisation d'opérations
d'aménagement. C'est la raison pour laquelle, je proposerai dans
ce projet de loi des mesures visant par exemple à accélérer les
délais de traitement. Plus que d’une loi, c’est d’un véritable plan d'actions en faveur des
territoires durables à l'horizon 2020 dont nous avons besoin. L'ORF, qui est un lieu d'échanges entre tous les acteurs œuvrant sur le
foncier et l’aménagement au sein de la région Ile-de-France, que ces
acteurs soient institutionnels ou élus, publics ou privés, a toute sa place
dans cette démarche et je sais pouvoir compter sur votre force de
proposition.
Je vous remercie.
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