Développement économique et renouvellement urbain
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Développement économique et renouvellement urbain
DEVELOPPEMENT ECONOMIQUE ET RENOUVELLEMENT URBAIN JEUDI DE LA VILLE DU 13 MAI 2004 Jeudi de la Ville organisé par l’IREV Institut Régional de la Ville – 23 avenue Roger Salengro – BP 318 – 59336 Tourcoing Cédex Tél 03 20 25 10 29 – Fax : 03 20 25 46 95 – E.Mail : [email protected] – Site Internet : www.irev.fr -1– SOMMAIRE Avant-Propos page 2 Développement Economique et Politique de la Ville : l'imposible rencontre ? Claudine Bansept, chargée de mission au CNV page 3 Quand les capitaux publics et privés s'associent : la société d'investissement régionale Dominique Mirada, directeur de Batixia page 5 Quelles stratégies et quels acteurs dans le développement économique des quartiers ? David Vallat, universitaire, responsable du technopole de Vaulx en Velin Le développement commercial au service de la mixité sociale Daniel Boys, premier adjoint au Maire de Bethune Comment construire une stratégie pour une ville et ses quartiers ? Hervé Dheilly, Directeur de la politique de la ville et de l'insertion de la communauté d'agglomération d'Amiens Métropole Le rôle d'un opérateur de l'aménagement économique et de la commercialisation Jean Badarou, directeur de la SEM Ville Renouvelée L'engagement des promoteurs : conditions et modalités Jean-Charles Lefévre, Président Régional de la FNPC L'activité commerciale dans les quartiers en renouvellement urbain Carole Bogaert, Directrice générale adjointe à l'aménagement du territoire et des projets de la ville de Lens L'implantation d'une enseigne : pourquoi et à quelles conditions ? Renauld Bourlet, Directeur de l'expansion de Match Du projet commercial à l'implantation des commerces en site de renouvellement urbain Guy Lalin, Directeur Général des services techniques de Valenciennes Métropole Le point de vue d'un acteur national Pierre Boulier, Directeur Général de l'EPARECA page 6 page 7 page 7 page 8 page 9 page 10 page 12 page 12 page 13 Jeudi de la Ville du 13 mai 2004 Développement économique et Renouvellement urbain -2– AVANT PROPOS Devant l’importance des projets de renouvellement urbain, l’IREV a souhaité revenir sur un aspect déterminant : le développement économique. Ce Jeudi de la Ville, organisé le 13 mai 2004 a, tout d’abord, permis de souligner une récurrence : la difficulté d’aborder l’économique dans le renouvellement urbain. Ainsi, face à ce problème, pourtant déterminant du succès des projets de rénovation urbaine des quartiers en difficulté, cette journée a été l‘occasion de : - comprendre les logiques d’action et les contraintes des différents acteurs, représentants des collectivités engagés dans l’action économique et le (re)développement des territoires, acteurs du monde économique, opérateurs ; - identifier les conditions d’élaboration et de conduite des projets où s’inscrive le développement économique, et notamment les conditions de dépassement de « l’incompréhension entre acteurs publics et acteurs économiques dans le cadre du renouvellement urbain » (rapport du CNV). La présence de professionnels du monde économique mais aussi de la politique de la Ville et du Renouvellement urbain a ainsi permis de mettre en débat les termes de l’action économique dans les quartiers et, notamment, la nécessité de mettre en place de nouveaux outils. Vous trouverez dans cette synthèse l’essentiel des enseignements de cette journée. Jeudi de la Ville du 13 mai 2004 Développement économique et Renouvellement urbain -3- DEVELOPPEMENT ECONOMIQUE ET POLITIQUE DE LA VILLE RENCONTRE ? Claudine Bansept Chargée de mission au Conseil National des Villes : L’IMPOSSIBLE Une mauvaise articulation entre les stratégies économiques et urbaines Pourquoi les acteurs privés et publics ne se rapprochent-ils pas pour articuler leurs stratégies de développement économique et de renouvellement urbain, alors que les unes ne semblent pouvoir se réaliser sans les autres ? L’existence d’un projet urbain est, en effet, un préalable indispensable au retour de l’économie dans les quartiers. La réciproque est également vraie : l’implication du secteur privé est une condition de réussite des projets. Le Conseil national des villes (CNV) a analysé la césure entre politique de la ville et développement économique. Comme le rapporte Claudine Bansept, chargée de mission au CNV, la politique de la ville demeure un champ clos d’acteurs publics, qui ne parvient pas à associer la participation et la réflexion des entreprises. Les élus sont convaincus de l’interdépendance entre l’économique et le développement territorial. Ils savent qu’il faut agir à la fois sur l’exclusion économique et sur l’exclusion sociale et souhaitent d’ailleurs pour cela territorialiser davantage leurs politiques. Or, les grandes entreprises aspirent plutôt à se détacher des territoires pour se développer à l’extérieur, surtout quand ceux-ci ne présentent pas tous les atouts recherchés. Dans les quartiers en renouvellement urbain, les difficultés urbaines et sociales concentrent l’attention, alors de la réflexion sur le développement économique est négligée. On parle de démolition-reconstruction, de mixité sociale, de présence des services, mais quand les acteurs abordent le thème du développement économique, ils s’aventurent rarement au-delà de la question de l’emploi ou de l’insertion par l’économique. Les pouvoirs publics, en particulier, se mobilisent peu sur ce thème, à l’exception de la redynamisation du commerce et du dispositif zone franche urbaine, qui représente une avancée certaine, mais reste insuffisant pour soutenir la création d’entreprises et le développement économique. Si les entreprises appellent le renouvellement urbain de leurs vœux (75 % disent que c’est un enjeu pour elles), peu s’y impliquent en réalité. 70 % refusent même de s’implanter dans une zone de renouvellement urbain et 87 % n’ont pas de relations avec les acteurs de la politique de la ville. Enfin, le rapport du CNV indique que les investissements publics et privés ne sont pas coordonnés, les premiers étant affectés à la politique de la ville mais sans lien avec les attentes des acteurs économiques et privés et les seconds consacrés à des logiques économiques peu articulées avec les logiques politiques des territoires. Or, sans investissement conjoint le renouvellement urbain trouve rapidement ses limites. Les explications de l’échec Comment expliquer l’échec de la coopération entre acteurs économiques et acteurs publics ? Le CNV avance plusieurs causes. Jeudi de la Ville du 13 mai 2004 Développement économique et Renouvellement urbain -4- Les entreprises exigent d’abord des projets urbains globaux, qui répondent à l’essentiel de leurs attentes (immobilier, accessibilité, marché local, marché du travail, etc.) et qui soient établis sur la durée et solidement organisés. Sans la garantie de ces conditions réunies, les entreprises ne s’engagent pas. Elles ont aussi parfois l’impression que les engagements politiques sont confus et fragiles car soumis à la conjoncture, alors qu’elles exigent des orientations claires, lisibles et pérennes. Les acteurs privés n’entendent pas jouer les entreprises citoyennes qui rendraient service aux quartiers en difficulté. Ils préfèrent être dans un rapport gagnant/gagnant avec l’Etat. Ils souffrent aussi de l’absence d’un aménageur capable de fédérer les acteurs et de créer de la relation et ils aimeraient être davantage associés à la phase de conception des projets. Quand les entreprises s’intéressent au renouvellement urbain, elles ont peine à trouver un interlocuteur unique, forcées de composer avec les diverses collectivités locales concernées par le projet (communes, agglomération, départements, région). Enfin, s’implanter en zone de renouvellement urbain, dans des communes bien souvent en déséquilibre financier, c’est accepter de supporter une fiscalité plus lourde qu’ailleurs. En contrepartie de cette taxation inéquitable et des risques courus, les entreprises demandent une rentabilité supplémentaire, mais les élus ne semblent pas encore prêts à l’entendre. Convaincus de la nécessité de rapprocher les sphères économique et urbaine, les élus déplorent que l’unité ne soit toujours pas établie sur le plan institutionnel, citant la séparation de la DATAR (Délégation à l’aménagement du territoire et à l’action régionale) et de la DIV (Délégation interministérielle à la ville). Ils réclament une vision plus unitaire sur ces problématiques. Leurs équipes des institutions souffrent aussi d’un manque de culture et de compétence économiques. Elles ne disposent pas toujours non plus d’outils financiers et d’organisation disponibles et adaptés aux réalités économiques. Beaucoup de ceux qui se penchent sur le développement des quartiers rencontrent, de surcroît, la difficulté à formuler des perspectives. Il est plus aisé de parler de moyens à mettre en œuvre que de bâtir un projet cohérent et partagé par tous. Les entreprises et les élus se trouvent, qui plus est, confrontés à deux problèmes supplémentaires : l’insécurité urbaine et l’absence de dialogue. Dans notre culture du consensus, le manque de discussion et de négociation empêche d’identifier les points de vue, les zones de blocage et de trouver les termes d’un accord commun. Que faut-il changer ? Pour parvenir à une meilleure articulation entre le développement économique et le renouvellement urbain, le CNV suggère quelques changements. Il propose en premier lieu de concevoir la politique de développement économique à l’échelle régionale ou de l’agglomération. Les collectivités locales se réapprorieraient ainsi la définition des projets économiques et de restructuration urbaine des quartiers, tandis qu’elles ont plutôt tendance actuellement à assurer « l’accompagnement de projets structurants décidés ailleurs ». Jeudi de la Ville du 13 mai 2004 Développement économique et Renouvellement urbain -5- La main-d’oeuvre devrait, selon le rapport, être associée à la réflexion et la définition des grands projets français et européens afin d’en partager les enjeux et de voir les entreprises s’implanter dans ses quartiers. Le CNV envisage aussi la création d’un cadre législatif fort qui formaliserait l’engagement du secteur public et du secteur privé. Il propose qu’une loi d’orientation et de programmation soit élaborée par les régions et les agglomérations pour définir le cadre général orchestrant le partenariat. Ce texte pourrait comprendre les principes suivants : - mobiliser les grands projets économiques nationaux en association avec des villes en renouvellement urbain ; intégrer le développement économique des villes en renouvellement urbain dans la politique économique des régions et des agglomérations ; établir des liens forts entre renouvellement urbain et développement économique régional ; changer le regard sur les quartiers, pour passer d’une vision « quartier à problème » à une vision « quartier à potentialité » ; impliquer les services publics ; impliquer les entrepreneurs privés et leur association dans la phase amont des projets de renouvellement ; prendre en compte les recettes induites par le renouvellement urbain ; apprécier rigoureusement les critères de rentabilité et de risque. prendre en compte les contextes locaux avec la création d’outils organisationnels et financiers en fonction des problèmes rencontrés en local, en assumant la diversité. QUAND LES CAPITAUX PUBLICS ET PRIVES S’ASSOCIENT : LA SOCIETE D’INVESTISSEMENT REGIONALE Dominique Mirada Directeur de Batixia Dans ses propositions, le rapport du CNV suggère de créer des sociétés d'investissement régionales ou interrégionales, associant capitaux privés et publics, pour financer le renouvellement urbain. Le Conseil régional du Nord-Pas-de-Calais s'est saisi de la proposition : il a fondé Batixia, une société d'investissement régionale, qu'il finance à 34 %. 41 % du capital sont en outre apportés par un acteur privé et la Caisse des dépôts et des consignations complète la mise. La société Batixia se comporte comme un capital-risqueur investissant sur les territoires de la politique de la ville (GPV, contrats de ville, zones urbaines sensibles, ZRU, ZFU, friches industrielles et tous les territoires sur lesquels le Conseil régional contractualise). Son objectif : leur redonner, par l’implantation d'un immobilier d'affaires, l'attractivité nécessaire au retour de l'investissement privé. L’intervention conjointe du secteur privé et du secteur public semblait être la meilleure option car lorsque la puissance publique est la seule à agir sur un territoire, il est rare de voir le privé prendre le relais. Inversement, la voie du tout privé conduit à la relégation accélérée des territoires en difficulté. Cette troisième voie permet au contraire, comme l’explique Dominique Mirada, directeur de Batixia, de dépasser la principale difficulté liée à ce type d'opération : la gestion du couple Jeudi de la Ville du 13 mai 2004 Développement économique et Renouvellement urbain -6- risque-rentabilité. En réunissant les acteurs-clés de la chaîne immobilière, en créant le dialogue nécessaire à l’élaboration de projets urbains de qualité, Batixia rassure les investisseurs privés. Les montages financiers leur apportent en plus un rendement plus élevé qui couvre le risque pris. Batixia peut aussi mobiliser les ressources du FEDER, chaque fois qu’une contribution publique s’avère nécessaire. Les acteurs privés peuvent alors pratiquer une politique de bas loyers, élément attractif pour les entreprises. QUELLES STRATEGIES ET QUELS ACTEURS DANS LE DEVELOPPEMENT ECONOMIQUE DES QUARTIERS ? David Vallat Universitaire, responsable du technopole de Vaulx en Velin Quelle place pour l’économie dans le territoire ? Pour David Vallat, responsable du technopole de Vaulx-en-Velin, l’économie est l’une des dimensions du territoire qui lui confèrent une existence, au même titre que la dimension lieu de vie et celle de lieu d’échange. L’économie étant, elle aussi, un construit social, elle prend diverses formes dans un même territoire, comme l’indique Fernand Braudel en parlant d’économie plurielle. L’économie rassemble la micro-économie qui concerne les ménages, les très petites entreprises et l’économie domestique ; l’économie de marché qui est celle des PME et le capitalisme avec ses échanges internationaux et ses grandes entreprises. Pour développer tel ou tel autre type d’économie sur un territoire, il convient donc d’actionner des leviers différents, de s’adresser à des acteurs distincts et d’employer des outils spécifiques. De l’économie sociale à l’économie de marché D’après David Vallat, la forme d’économie la mieux adaptée dans l’immédiat aux territoires en politique de la ville, c’est l’économie sociale et solidaire. Elle croise en effet l’économique avec d’autres dimensions, elle est adaptée au développement endogène des petites activités et a prouvé sa capacité à créer des emplois, dont le nombre est souvent sous-estimé par ailleurs. Comment impulser ensuite dans ces territoires l’économie de marché, voire le capitalisme, au sens que lui donne Fernand Braudel ? La structuration de l’accueil des entreprises, l’aide à l’accompagnement des initiatives privées, le décloisonnement du territoire et l’organisation des réseaux d’acteurs locaux sont autant d’actions qui aident les porteurs de projet à être rapidement opérationnels et rendent un territoire attractif. Un chef d’orchestre de toutes ces actions de développement économique est indispensable. Il doit être un visionnaire du long terme et le moteur d’un développement économique concerté. C’est le rôle de l’acteur politique, selon David Vallat. La réussite de la zone franche de Vaulx-en-Velin Comment la zone franche de Vaulx-en-Velin est-elle parvenue à enregistrer un taux d’accueil d’entreprises de + 119 % entre 1996 et 2003 et un taux de création d’emplois de + 178 % ? Jeudi de la Ville du 13 mai 2004 Développement économique et Renouvellement urbain -7- Pour faire venir les entreprises sur le site, les pouvoirs publics ont choisi d’agir sur quatre dimensions : lutter contre le chômage, changer l’image de la ville, développer l’économie et favoriser la mixité sociale. Ces orientations expliquent, par exemple, que la ville ait préféré accueillir une enseigne Casino plutôt qu’un hard discounter. Puis, pour fidéliser les entreprises et préserver leur bonne santé, la ville a décidé d’accompagner de près et durablement les créateurs d’entreprises avant, pendant et après la création d’entreprise. Un réseau de partenaires s’est mobilisé pour sélectionner les projets (ville, Chambre de commerce, consultants professionnels de l’entreprise, services de l’Etat). LE DEVELOPPEMENT COMMERCIAL AU SERVICE DE LA MIXITE SOCIALE Daniel Boys, premier adjoint au Maire de Bethune Le quartier du Mont Liébaut à Béthune, ancienne ZUP des années 1960 actuellement en politique de la ville, est séparé du centre-ville, physiquement par la voie ferrée et socialement par son caractère populaire. Dans le but de créer des échanges entre les deux quartiers et d’améliorer, du même coup, la mixité sociale, la ville a décidé d’aménager un territoire qui les sépare, le quartier de la gare et de le consacrer au commerce, aux services (agences de location de voiture, de voyage, hôtels, etc.) et aux loisirs (patinoire, cinéma, discothèque, etc.). Les populations du centreville et celle du quartier du Mont Liébaut devraient ainsi partager les mêmes espaces. Des aménagements viseront aussi à attirer les étudiants (résidence étudiante) dans le quartier de la gare ainsi que de l’activité économique. L’idée n’est pas nouvelle à Béthune, rappelle Daniel Boys, premier adjoint au maire. Déjà dans les années 1980, la transformation d’une rotule de la SNCF, située le long de la voie ferrée, en centre commercial et en site d’équipements publics avait entrepris d’articuler les deux quartiers. Les effets de cette première opération ont été positifs, mais l’accès au centre commercial est progressivement devenu plus difficile et un nouveau réaménagement de l’espace est devenu nécessaire. COMMENT CONSTRUIRE UNE STRATEGIE POUR UNE VILLE ET SES QUARTIERS ? Hervé Dheilly, Directeur de la politique de la ville et de l'insertion de la communauté d'agglomération d'Amiens Métropole Une intercommunalité de projet à Amiens Dans l’agglomération d’Amiens, qui compte vingt-sept communes, les projets de développement des quartiers, qu’ils soient en renouvellement urbain ou plus développés, sont tous conçus et menés dans une démarche partenariale. Il s’agit d’une « intercommunalité de projet », selon Hervé Dheilly, directeur de la politique de la ville et de l’insertion de la Communauté d’agglomération d’Amiens Métropole. Jeudi de la Ville du 13 mai 2004 Développement économique et Renouvellement urbain -8- En effet, élus de la puissante ville centre, comme élus des communes plus petites s’y impliquent au même titre. Quatre maires de petites communes sont d’ailleurs nommés viceprésidents des quatre secteurs communautaires de l’agglomération, qu’ils pilotent politiquement. Hervé Dheilly défend en effet l’idée que désenclaver les quartiers exige de savoir comment leurs échanges s’exercent avec l’extérieur. Il ajoute que le partenariat politique intègre également les élus de la Chambre de commerce et d’industrie. Sur le plan technique, l’instruction des dossiers, la promotion et la commercialisation sont réalisées conjointement par les services politique de la ville et développement économique d’Amiens Métropole et en partenariat avec les services de la CCI. Le quartier Amiens-nord donne l’exemple Si le projet du quartier Amiens-nord est une réussite, c’est notamment grâce à une volonté politique forte, estime Hervé Dheilly. Il cite également l’implication du comité d’agglomération et des élus de la politique de la ville, du renouvellement urbain et du développement économique. La démocratie locale, avec la participation de vingt-six comités de quartier ; la mise en réseau des acteurs par la création d’un guichet unique de création d’entreprise et le pilotage d’un dispositif de suivi politique et technique par le sous-préfet à la Ville, le vice-président d’Amiens Métropole et le vice-président du Conseil général de la Somme, sont également pour beaucoup dans la réussite du projet. Grâce à cette organisation et aux investissements publics, le projet de territoire d’Amiensnord conjugue l’équipement, le logement et le développement économique. On trouve sur le site deux hôtels d’entreprises, un village PMI, une pépinière d’entreprises, un collège, un habitat renouvelé comprenant du petit collectif et des maisons individuelles. Maintenant que l’image du quartier a radicalement changé, la ville espère voir arriver les promoteurs et les investisseurs privés. LE ROLE D’UN OPERATEUR DE L’AMENAGEMENT ECONOMIQUE ET DE LA COMMERCIALISATION Jean Badarou, Directeur de la SEM Ville Renouvelée Créée en 1980 sur les territoires du versant nord-est de la métropole lilloise, la société d’économie mixte (SEM) Ville renouvelée était initialement chargée de réintroduire de l’emploi dans les zones textile sinistrées. Elle a rapidement étendu son action à la problématique urbaine, orientation renforcée avec l’introduction du concept de ville renouvelée dans le schéma directeur de la métropole lilloise au milieu des années 1990. Elle a alors commencé à gérer la crise économique, mais aussi la crise urbaine, celle du commerce, l’équipement… Concrètement, explique Jean Baradou directeur de la structure, la SEM achète les immeubles dans lesquels elle réalise les travaux de rénovation et d’adaptation nécessaires, puis les loue Jeudi de la Ville du 13 mai 2004 Développement économique et Renouvellement urbain -9- aux entreprises. Pour attirer celles-ci dans le quartier, notamment les entreprises naissantes, la SEM s’efforce de répondre très précisément à leurs besoins, en leur proposant des bâtiments d’activité fonctionnels, un bail commercial souple et un loyer maîtrisé. Ces entreprises trouvent ainsi une solution en sortie de ruche d’entreprise, elles qui n’ont pas les moyens d’investir dans l’immobilier, tout en bénéficiant des avantages de la zone franche urbaine. L’ENGAGEMENT DES PROMOTEURS : CONDITIONS ET MODALITES Jean-Charles Lefévre, Président Régional de la FNPC A quelles conditions un promoteur privé accepte-t-il de s’engager dans un projet de renouvellement urbain et de développement économique ? Pour Jean-Charles Lefèvre, président Régional de la FNPC, les promoteurs sont d’abord soumis à une obligation de résultat et recherchent avant tout un projet économiquement fiable et rentable. Ils se fient pour cela à la stratégie, qui est en général affichée comme une ambition politique. Celle-ci doit être parfaitement claire, simple et réaliste, reposant sur la connaissance des réalités sociales et économiques du territoire. Ils veillent aussi à ce que les procédures d’accompagnement soient adéquates : les commissions de travail doivent être ni trop ni trop peu nombreuses et il faut un chef de projet compétent et moteur. Les finances publiques doivent aussi être à la hauteur du projet. Les promoteurs s’attachent par ailleurs à ce que les institutions en jeu acceptent le management du chef de projet et ne se livrent pas de compétition entre elles. Ils demandent aussi à être associés comme des partenaires à part entière. Sur le projet lui-même, ils accordent une attention toute particulière aux conditions d’attractivité : une bonne accessibilité, des réflexions sur l’urbanisme cohérentes avec l’ambition politique et le marché et d’un solide partenariat public-privé. Une fois toutes ces conditions réunies, les promoteurs privés peuvent intervenir de diverses manières. Ils peuvent être contactés par une SEM d’aménagement à laquelle la collectivité a fait appel au préalable et qui leur propose un foncier à des prix cohérents au regard du marché. Cette démarche est courante dans le Nord-Pas-de-Calais et la Picardie, mais souffre d’une lenteur dans les décisions. D’autres fois, certains promoteurs, connus pour leur expérience et leur implication dans l’aménagement urbain, sont directement contactés par les élus. Ils participent dans ce cas à la définition du projet, des conditions financières et des modalités d’intervention. L’importance du partenariat public-privé Actuellement, pour la première fois en France, dix promoteurs s’associent et décident de s’inscrire dans la politique de renouvellement urbain et de revitalisation des quartiers de Lille, Roubaix et Tourcoing. Il a fallu la volonté, l’ambition et la stratégie d’un leader politique (la Communauté urbaine de Lille), le soutien de deux villes, un homme responsable de la politique d’aménagement (Alain Cacheux), l’appui technique de l’agence d’urbanisme et l’écoute réciproque du privé et du public pour mener à bien cette initiative. Jeudi de la Ville du 13 mai 2004 Développement économique et Renouvellement urbain -10- Le partenariat privé-public est particulièrement abouti, puisque le cahier des charges a été défini en commun et que les deux secteurs ont signé une charte. Le public s’engageait à mettre les moyens pour réaménager le quartier et requalifier les espaces publics ; le privé a travaillé dans la plus grande transparence en communiquant ses bilans, appels d’offres et devis aux élus. Après un an et demi de fonctionnement, ce système porte ses fruits, puisque 70 % des maisons construites dans le quartier difficile de Lille sont destinés à l’accession. L’ACTIVITE COMMERCIALE DANS LES QUARTIERS EN RENOUVELLEMENT URBAIN Carole Bogaert, Directrice Générale adjointe à l'aménagement du territoire et des projets de la ville de Lens Choisir l’implantation commerciale : une question d’échelle Comment déterminer l’implantation des commerces dans les projets de renouvellement urbain ? Selon Carole Bogaert, directrice générale adjointe de l'aménagement du territoire et des projets de la ville de Lens, il convient d’étudier l’attractivité du territoire à différentes échelles. Il faut d’abord s’intéresser au caractère socio-économique et aux besoins spécifiques du quartier lui-même, puis analyser la dynamique et l’offre commerciale des quartiers voisins, du centre-ville, mais aussi des communes adjacentes et des pôles périurbains quand il en existe. Créer les conditions de l'attractivité Certains quartiers sont devenus des « repoussoirs », selon elle et la renaissance de leur attractivité suppose des interventions relevant de l’action publique. Si les moyens publics existent, il faut encore convaincre les financeurs de patienter plusieurs années avant que se manifeste un impact significatif sur la transformation du quartier et avant qu’ils obtiennent un retour sur investissement. L’insécurité urbaine (braquages, cambriolages) doit par ailleurs être maîtrisée si l’on veut attirer les investisseurs et les entreprises dans un quartier. L’accueil de populations diversifiées contribue à créer de nouveaux besoins de consommation. C’est dans ce sens d’ailleurs que le quartier de la Grande Résidence à Lens a décidé de transformer l’une de ses tours pour y accueillir une école d'infirmières. Redynamiser un quartier suppose de lui fixer une vocation. Pour le quartier de la Grande Résidence, les perspectives ne peuvent être dissociées ni de la rocade minière située juste à proximité ni des communes adjacentes. Pour réaliser son ambitieux projet de centre commercial, la ville de Lens ressent, enfin, le besoin impérieux de trouver des partenaires, en complément de la Chambre de commerce et d'industrie qui l’aide déjà à mettre en oeuvre des solutions temporaires. Jeudi de la Ville du 13 mai 2004 Développement économique et Renouvellement urbain -11- L’IMPLANTATION CONDITIONS ? D’UNE ENSEIGNE : POURQUOI ET A QUELLES Renauld Bourlet, Directeur de l'expansion de Match Pour l'acteur privé Match, l'implantation d'une enseigne est prioritairement guidée par un principe économique : la taille de la zone de chalandise, qui doit atteindre 18 000 à 20 000 habitants en moyenne. A moins qu’il ne se situe dans une métropole importante comme Lille, l’investisseur doit donc adopter une vision plus large que celle du quartier intra-muros et étudier la capacité de ce dernier à attirer la population des communes voisines. L'enseigne a également besoin de surface disponible. Pour offrir les dix ou onze mille références de produits dont le consommateur a besoin pour vivre quotidiennement, les supermarchés Match s’étendent sur une surface de vente d’au moins 1 000 mètres carrés. L’enseigne attache également une extrême importance au devenir du quartier et souhaite avoir une lisibilité de son évolution sur dix ans. C’est indispensable pour rassurer l'actionnaire et lui garantir le retour sur investissement. Selon Renauld Bourlet, directeur de l’expansion de Match, cela serait facilité si les acteurs privés étaient associés bien en amont aux réflexions des élus locaux. Que le quartier soit en difficulté ou favorisé, Match propose une offre de produits identique et de qualité, mais à des tarifs modulés, refusant de paupériser l’offre et rompant de fait avec la logique du hard-discount. L'enseigne entend ainsi contribuer à conserver les consommateurs du quartier dans le quartier. DU PROJET COMMERCIAL A L’IMPLANTATION DES COMMERCES EN SITE DE RENOUVELLEMENT URBAIN Guy Lalin, Directeur Général des services techniques de Valenciennes Métropole Sur quels principes une collectivité construit-elle son schéma commercial ? Le schéma de développement commercial du Valenciennois repose, pour commencer, sur les centres-villes. Pour Guy Lallain, directeur général des services techniques de Valenciennes Métropole, le commerce est d'abord intimement lié à la centralité. Là où il y a un centre-ville ou un centrebourg, même en déshérence, il existe une potentialité de développement commercial. Il faut alors renforcer cette centralité. Le schéma commercial de la métropole repose, en outre, sur la périphérie où est programmé le développement du très grand commerce. La collectivité compte ainsi combler à la fois son lourd déficit d’offre de proximité, notamment en commerces haut de gamme, mais aussi freiner la concurrence des grands centres commerciaux de la métropole lilloise, d’Hénin-Beaumont et de la Belgique. Jeudi de la Ville du 13 mai 2004 Développement économique et Renouvellement urbain -12- Ces deux axes sont déjà bien engagés et Valenciennes Métropole commence à étudier une troisième piste. Il s’agit de développer une gamme intermédiaire de commerces dans trois communes qui témoignent d’une activité commerciale dynamique et qui ont démontré leur capacité à développer une nouvelle offre de commerces et de services. Attirer les clients, les commerçants et les investisseurs Mais pour développer un schéma d’implantation commercial harmonieux dans les quartiers en difficulté, plusieurs conditions semblent, une fois encore, nécessaires. Guy Lallain les rappelle. Il lui semble d’abord que pour séduire la clientèle, il faut renforcer l’attractivité des centres en y concentrant un maximum d’équipements publics et de services. Il faut garder à l’esprit que la clientèle est évidemment sensible à la qualité urbaine et paysagère ainsi qu’à la fonctionnalité des espaces publics. Guy Lallain suggère aussi de privilégier le resserrement urbain plutôt que de laisser le commerce se développer de manière éparpillée. Les commerçants, eux, sollicitent des vitrines, des passages et des aires de stationnement. L’expérience montre qu’ils s’intéressent davantage à un site quand il dispose d’un marché. Pour que les investisseurs s’intéressent à une opération commerciale, il faut leur présenter un projet global d’aménagement et de renouvellement urbain, qui intègre tous les aspects du développement. Celui-ci gagnera encore en pertinence s’il bénéficie de la réalisation d’études économiques et commerciales menées sur le quartier. Ces acteurs exigent aussi la fiabilité de l’implantation et l’assurance du soutien de la part de la collectivité. Ils ont, enfin, besoin de moyens d’accompagnement. LE POINT DE VUE D’UN ACTEUR NATIONAL Pierre Boulier, Directeur Général de l'EPARECA Quand les conditions d’attractivité ne sont pas remplies ou quand le devenir du quartier en renouvellement urbain n’apparaît pas encore avec évidence, les investisseurs privés et parfois même publics se font rares. L’EPARECA a été créé pour pallier cette absence, par la loi du Pacte de relance pour la ville en 1996. Il est situé à Lille et a pour mission de maintenir une offre commerciale et de qualité dans les quartiers en difficulté (zones de la politique de la ville, en contrat de ville, en zone franche et éligibles à l’ANRU). Il rachète des centres commerciaux neufs ou des centres anciens qu’il fait rénover. Il gère actuellement quinze centres en exploitation, il en rénove et construit quinze autres et étudie une cinquantaine de nouvelles propositions. Pierre Boulier, directeur général de cet établissement public, indique que les opérations durent en général de trois à quatre ans, confrontées à la présence de plusieurs propriétaires (souvent les commerçants eux-mêmes) qu’il faut convaincre de réaliser le projet ou auxquels il faut racheter les parts. L’opérateur veille tout particulièrement à la taille du centre qu’il construit ou rénove. Trop nombreuses, les boutiques ne parviennent pas toutes à trouver preneur. Le gestionnaire est alors tenté de louer les cellules à des commerçants de moins bonne qualité, moins attrayants Jeudi de la Ville du 13 mai 2004 Développement économique et Renouvellement urbain -13- et qui risquent même, si le service est médiocre, de dégrader rapidement l’image du centre commercial. Pour éviter cet écueil, la programmation commerciale doit préciser le type de la « locomotive alimentaire », sa surface de vente, le nombre et de la qualité des boutiques implantées tout autour. Le niveau du loyer doit aussi être établi en fonction du chiffre d’affaires des commerçants et des tarifs qu’ils supportaient auparavant. L’EPARECA tient compte aussi de l’accessibilité des lieux au point que si elle lui paraît insatisfaite, il préfère reconstruire le centre plutôt que le rénover. Pierre Boulier indique que la rénovation et la construction de centres commerciaux dans les quartiers en renouvellement urbain ne sont possibles qu’à condition que les collectivités locales s’impliquent et définissent le projet de restructuration urbaine. L’EPARECA ne peut, pour sa part, agir que sur la partie commerciale de l’opération. En prouvant que les centres commerciaux sont rentables pour les commerçants, de telles opérations commencent à séduire les investisseurs privés, qui pourraient à terme racheter les sites. Ils n’auront plus à ce stade à supporter des risques élevés ni la faible rentabilité de départ. Les principales difficultés semblent, à Pierre Boulier, se situer à l’étape de commercialisation des sites, mais aussi dans la perception des loyers. Il évoque aussi lourdeur des charges et la gestion des contentieux. Il ne manque pas, enfin, d’ajouter problème de l’insécurité urbaine. Il suffit qu’un groupe de jeunes stationne pour que sentiment d’insécurité gagne la clientèle et nuise au commerce. la la le le Par chance, les promoteurs s’intéressent aujourd’hui davantage aux quartiers en difficulté et aux opérations de dimension plus petite. C’est l’occasion pour l’EPARECA de réduire la taille de ses interventions. Simultanément, les enseignes de petite surface, de type Casino, essaient de développer des pris plus bas, ce qu’elles ne faisaient pas jusqu’alors. Jeudi de la Ville du 13 mai 2004 Développement économique et Renouvellement urbain -14- Institut Régional de la Ville Centre de Ressources Politique de la Ville Région Nord Pas-de-Calais 23 avenue Roger Salengro BP 318 59336 TOURCOING Cédex Le programme est financé par : Les membres de l'IREV POUR EN SAVOIR PLUS... Sur notre site www.irev.fr Rubrique « Programme d’actions » le programme de la journée une bibliographie sélective trois fiches d’expériences des PowerPoints Rubrique « Dossiers thématiques » Un dossier « Renouvellement urbain et développement économique » est en cours de préparation Consultez le rapport du CNV : « Les enjeux du développement économique dans le renouvellement urbain » sur le site de la DIV Rédaction : Séverine GRUMIAUX [email protected]