Infotellerie No 63 septembre 2010

Transcription

Infotellerie No 63 septembre 2010
septembre 2010 – No 63
INFOTELLERIE
Le double jeu
de la Confédération
Le Département fédéral
de l’économie (DFE) a
publié durant l’été avec
un battage médiatique
important – conférence
de presse de Madame
Leuthard en personne
– un document intitulé « Stratégie de
croissance pour la place touristique
suisse ».
Ce document fort bien fait énumère
l’évolution récente du tourisme : mondialisation croissante, évolution de
la clientèle, progrès technologique,
changement climatique, menaces pour
l’environnement et déficits structurels.
Il propose également les grandes lignes
d’une stratégie de croissance pour le
tourisme de notre pays : améliorer les
conditions-cadre faites aux entreprises
touristiques, augmenter l’attrait de
l’offre touristique, renforcer l’image de
la Suisse sur les marchés et respecter le
développement durable.
Ces thèmes sont ensuite développés
sur une huitantaine de pages. Nous
saluons la qualité de ce document et
la reconnaissance par la Confédération
de l’importance capitale du tourisme
pour l’économie de notre pays et de
ses régions de montagne. Les acteurs
du tourisme, directeurs d’offices, hôte-
Pages 4-5
liers, transporteurs, créateurs d’animations, etc., avaient toutes les raisons
de se réjouir… Et puis patatras, dans la
même période, le même département
fédéral mettait en consultation le projet de révision de la loi sur l’innovation,
la coopération et le développement du
savoir dans le domaine du tourisme
(Innotour). Nous n’avons rien à redire
sur cette – une fois n’est pas coutume
– courte loi. Elle pérennise Innotour
qui était auparavant remis en question tous les quatre ans. Par contre, au
détour du rapport explicatif, le lecteur
découvre que le financement de 5 millions de francs devra être compensé par
une baisse correspondante des moyens
alloués à Suisse Tourisme (ST) !
Ce rognage de budget est absurde
à plus d’un titre. Premièrement, les
moyens de Suisse Tourisme sont faibles
en comparaison internationale. De
plus, ST en dépense une grande partie
dans des pays à forte inflation. Le financement public de son budget diminue donc de fait depuis des années.
Deuxièmement, aucun entrepreneur
sensé ne financerait son département
« recherche et développement » par
son budget « marketing et publicité ».
Car, c’est bien à cela que revient le
tour de passe-passe du DFE puisque
Innotour vise la création de nouveaux
produits, l’amélioration des prestations, de meilleures structures et une
meilleure formation. Troisièmement,
comment peut-on porter fièrement
l’étendard d’une nouvelle stratégie
de croissance pour le tourisme, avec
notamment pour but d’améliorer les
conditions-cadre, et, dans le même
temps, amputer de 12% les maigres
deniers mis à disposition de l’organisme responsable de l’image touristique de la Suisse dans le monde ?
Nos concitoyens ont déjà pu constater
ces dernières années que le Conseil
fédéral était parfois plus une addition
de chefs de département qu’un collège
gouvernemental basé sur l’échange
d’informations et l’élaboration de décisions communes sur l’ensemble des
problèmes stratégiques. Si, maintenant, dans le même département, la
main gauche ignore ce que fait la main
droite, nous pouvons raisonnablement
avoir quelques craintes pour la direction
à long terme de notre pays. Espérons
que les chambres fédérales, si le projet arrive tel quel au plénum, sauront
l’amender de manière à maintenir au
moins le statu quo en matière de promotion touristique.
Pages 6-7
Philippe Thuner
Président d’Hôtellerie romande
Pages 12-13
L’invité
Charles-André Ramseier, directeur de l’OTV
Trois lustres de tourisme
vaudois
Trois lustres…, quinze années bientôt passées à la tête du tourisme vaudois ! En mai
prochain, je transmettrai la barre de l’OTV
à mon successeur, auquel je souhaite de
connaître autant de joies et de satisfactions.
Quinze ans, c’est à la fois court et long
quand on regarde le chemin parcouru. Un
chemin parsemé de pics et de creux, comme
il se doit en pays de montagnes, un chemin
qui aura aussi été marqué par des révolutions, notamment technologiques.
Durant cette période, le tourisme vaudois a vécu une incroyable (r)évolution
de la communication via le net. Internet,
c’est aujourd’hui 1,8 milliard d’internautes
répartis dans le monde entier, en hausse
de 400% depuis 2000. En Europe, une
personne sur deux recourt à la toile pour
communiquer, transmettre ou obtenir des
informations de toutes sortes. Les plus
demandées concernent précisément les
voyages, les transports, l’hébergement et
les loisirs. Avec ce nouvel outil, les responsables de la branche ont dû changer leurs
habitudes : apprendre à communiquer instantanément, à télécharger des documents,
à transmettre des images et des vidéos qui
braquent le phare sur le canton. Une véritable révolution aussi pour les réseaux de
réservation. L’OTV a développé un logiciel
commun avec ses partenaires du Valais et
de Genève, et en promotion est née la collaboration Lake-Geneva-Matterhorn Region.
Vu de Tokyo ou de New York, les querelles
de clochers qui peuvent parfois entraver
les efforts de promotion paraissent bien
vaines. C’est en 1994 que Vaud et Genève
ont signé une convention de collaboration
sur les marchés lointains. Les Valaisans nous
ont rejoints quatre ans plus tard, permettant
de développer l’axe Genève-Zermatt. Du jet
d’eau au Cervin en passant par la capitale
olympique… Genève était particulièrement
fort sur les marchés du Moyen-Orient, les
Vaudois meilleurs sur l’Amérique du nord,
l’union a fait la force. Cela nous a permis
de présenter une offre touristique
très cohérente. Voyant cela, Suisse
Tourisme a emprunté certains de
nos créneaux et imité quelques
concepts. Mais l’on ne copie que
ce qui a du succès. A l’heure du
bilan, le tourisme vaudois ne
peut pas se plaindre. Malgré la
crise, toutes les villes du canton
montrent une hausse des nuitées.
Les montagnes présentent un bilan moins
rose, mais les caprices de la météo ne sont
pas étrangers à ces résultats en « montagnes
russes ». Les touristes font preuve de toujours plus de mobilité et repartent parfois
aussi vite qu’ils sont venus, si le soleil se fait
rare. A l’heure du bilan, la Ville olympique
n’a pas perdu une nuitée, même en 2009
qui aura été une année difficile. Lausanne va
même augmenter son offre de 1000 à 1500
lits, et Montreux Riviera vient de rénover plusieurs hôtels.
Ce qui m’a enthousiasmé durant toutes
ces années, c’est la façon avec laquelle les
Vaudois ont résisté à la crise. Le canton de
Gilles et de Ramuz a la chance de posséder
un tissu économique très diversifié avec de
grandes entreprises internationales, des
fédérations sportives et des hautes écoles.
C’est un atout. Autre motif de satisfaction,
le Sommet de la francophonie qui aura
lieu le mois prochain à Montreux. L’OTV va
collaborer à l’accueil des accrédités et des
600 journalistes. Une fantastique opération de promotion pour toute la région. Et,
cerise sur le gâteau, Lausanne s’apprête à
accueillir l’été prochain 22 000 gymnastes
de Gymnaestrada 2011. Vu leur nombre, ils
devront être logés dans les hôtels, mais aussi
les écoles, les abris de protection civile, et
chez l’habitant. Mais l’impact touristique est
loin d’être négligeable.
Enfin, le tourisme en général doit faire face à
une autre évolution, les voyages low-cost. Le
touriste voyage plus souvent et moins longtemps. Il s’habitue à négocier les prix met-
Impressum
Infôtellerie Suisse romande : Magazine trimestriel d’informations touristiques et économiques de
l’Association Romande des Hôteliers.
Editeur : Association Romande des Hôteliers, chemin de Boston 25, 1004 Lausanne,
tél. : +41 21 617 72 56, fax : +41 21 617 72 27, e-mail : [email protected].
Site internet: www.hotellerieromande.ch
Impression: PCL Presses Centrales SA, Renens
Rédacteur responsable : Olivier Grivat.
Ont collaboré à ce numéro : Philippe Thuner, Denise Cugini, Charles-André Ramseier et Olivier Grivat.
Adresse de la rédaction : Olivier Grivat, journaliste RP, chemin de Leisis 5a, 1009 Pully,
tél. +41 79 412 22 72, e-mail : [email protected].
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tant la pression sur les hôteliers. Une compagnie comme Easyjet et les trajets low-cost en
train ont généré un trafic de courts séjours
qui incite les partenaires à revoir leurs prix.
Cela concerne essentiellement les déplacements individuels. Les hommes d’affaires
passent volontiers un week-end à une heure
d’avion et n’hésitent pas à reporter sur les
hôtels, les restaurants et l’offre sportive, les
économies obtenues sur le transport. Mais si
les touristes restent moins longtemps, il faut
aussi en trouver constamment de nouveaux
pour continuer à développer les nuitées.
C’est un travail d’équipe à peaufiner avec
nos collègues vaudois et des cantons voisins.
Le tourisme n’a pas de frontière.
De ces quinze ans, je garde le souvenir d’une
excellente collaboration entre tous les partenaires, notamment les hôteliers qui sont
d’excellents ambassadeurs du tourisme.
C’est à eux aussi que je dois le prix qui m’a
beaucoup touché, le « Milestone » de la personnalité de l’année pour l’œuvre d’une vie
reçu à Berne en 2005. Il n’a récompensé
jusqu’à présent qu’un seul Romand. Mon
vœu le plus cher : que d’autres acteurs du
tourisme romand le reçoivent à leur tour…
Charles-André Ramseier
Sommaire
2L’invité
3Actuel
4-5
Sommet de la francophonie
6-7
Eric Favre à Djibouti
8-9
Le Signal de Chexbres
10
Remise de prix
11
Brèves VD, NE et FR
12-13
Un Grand Chambellan à l’EHL
14-15
Ecole hôtelière suisse à Athènes
16
En bref – Agenda
Infôtellerie – Septembre 2010 – No 63
Point fort
Lausanne attend 1500 nouveaux lits
Crise ? Qui a parlé de crise ? Ce n’est pas le
cas pour la plupart des hôteliers lausannois
qui ne peuvent décemment pas se plaindre
ni voir l’avenir en noir. Grâce à son tissu économique, le dynamisme des multinationales
comme Philip Morris, Nestlé ou Logitech
ainsi que des fédérations sportives gravitant
autour du CIO, le chef-lieu n’a pas souffert
du ralentissement de la conjoncture. Et l’on
ne parle pas du Sommet de la francophonie à Montreux dont les effets vont rejaillir
jusqu’à Lausanne, notamment avec la réunion des maires francophones.
Résultat des courses : la capacité hôtelière
du grand Lausanne n’est pas suffisante
en toutes occasions. Comme l’a relevé le
directeur du Lausanne-Palace Jean-Jacques
Gauer, la région lausannoise va pouvoir
offrir ces prochaines années 1000 à 1500
chambres 3 ou 4 étoiles supplémentaires.
La donne comprend la nouvelle aile du
Mövenpick à Ouchy et l’hôtel Starling à
Dorigny proche du Learning Center, le futur
hôtel-tour de Beaulieu, l’Aqua-Ecopôle
d’Epalinges que projette le groupe BOAS
et son patron Bernard Russi (pas le skieur,
l’autre…) ou encore le grand hôtel du Signal
de Chexbres qui va faire peau neuve.
Même les « 5 étoiles » sont concernés avec
la rénovation complète du Royal Savoy,
qui va se voir réhaussé au niveau palace,
notamment pour une hôtellerie de congrès
et de séminaires d’entreprises : « Il ne faut
pas avoir peur de la concurrence. C’est
au contraire une belle opportunité pour
Lausanne d’accroître sa capacité d’accueil,
estime Jean-Jacques Gauer. L’hôtellerie de
luxe devrait suivre le même chemin que
l’horlogerie et remonter la pente. » Le directeur du Lausanne-Palace se veut optimiste :
« La chute de l’euro a fait souffrir l’hôtellerie,
mais le taux d’occupation devrait remonter
d’ici fin 2010. » Les derniers résultats font
apparaître un chiffre d’affaires en légère
hausse pour atteindre 48,9 millions avec
un profit (GOP) en baisse à 9,2 millions
contre 10,9 l’an précédent. Si le LausannePalace réalise le deuxième meilleur résultat de son histoire, c’est grâce à l’apport
du Château d’Ouchy, dont il gère les 50
chambres et le restaurant depuis avril
2009. Racheté par la Loterie Romande pour
34 millions de francs au vigneron Patrick
Fonjallaz avant la réintroduction des casinos en Suisse, le château été transformé
en hôtel après le refus de la concession
par Berne : « Nous bénéficions d’un droit
d’emption sur le bâtiment. Il n‘est pas exclu
que nous le rachetions à la Loterie », confie
celui qui préside également la chaîne des
Leading Hotels of the World depuis 20 ans
et qui va passer la main au congrès de
Tokyo, en novembre prochain.
Des étoiles…
ment l’esthétisme des rénovations ainsi que
son personnel très à l’écoute des attentes
et besoins de la clientèle. Et comme si cela
ne suffisait pas, Michael Smithuis s’apprête
à accueillir le Sommet de la francophonie :
« Ce sera quatre ou cinq jours de visibilité
mondiale, un hôtel plein de chefs d’Etat, 40
ou 50 petits groupes logés dans le même
établissement avec des souhaits différents.
Un sacré défi mais aussi une belle opportunité pour Montreux », commente Michael
Smithuis qui a déjà reçu Tony Blair, Gerhard
Schroeder et toutes les stars du Jazz Festival,
mais jamais autant de chefs d’Etat à la fois :
« On s’attend à beaucoup de changements
de dernière minute. Il faudra se montrer très
flexible avec une équipe sur pied de guerre,
24 heures sur 24. »
pour l’avenir. Le chef du Département des
infrastructures a proposé de placer la flotte
historique des « vieux vapeurs » dans une
fondation à part. Avant l’été, il a aussi suggéré d’augmenter la contribution des communes disposant d’un débarcadère, provoquant un véritable tollé. Une autre voie
(d’eau) évoquée pourrait être une diminution des bateaux Belle-Epoque assurant les
lignes touristiques : « Les pistes évoquées
donnent plus d’insécurité que de certitudes
pour l’avenir de la compagnie et son personnel», a répliqué Patrick Schaffner, président
de la section lac Léman du syndicat SEV. Le
ministre vaudois « plus vert que bleu » s’est
attaqué maladroitement au puissant symbole de la flotte historique, provoquant la
colère des amis des bateaux à vapeur et des
communes.
Michael Smithuis
Une constellation d’étoiles pour le directeur du Montreux Palace. Pour la troisième
fois en quatre ans, son établissement est
reconnu par le magazine Bilanz comme le
meilleur Hôtel de ville en Suisse devant le
Beau-Rivage Palace. Une référence ! Son établissement a obtenu le maximum de points
dans les quatre critères retenus, notam-
Infôtellerie – Septembre 2010 – No 63
… et des
casseroles
Un hôtel bon marché au Flon
En attendant, la société du Lausanne-Palace
que préside le banquier genevois René
de Picciotto s’apprête à ouvrir un nouvel
établissement bon marché dans la zone
très branchée du Flon récemment rachetée par la société alémanique Mobimo.
L’investissement (modeste) ne se monte qu’à
1,5 million de francs. L’hôtel dont le nom
n’est pas encore choisi proposera 24 petites
chambres à bas tarif – de 100 à 120 francs –
dès l’automne 2011 – avec une terrasse sur
le toit : « Il fonctionnera avec un personnel
réduit. Une borne automatique sera installée
à la réception sur le modèle de ce qui existe
à l’aéroport d’Amsterdam ».
Qui a dit que l’hôtellerie lausannoise ne
misait que sur le haut de gamme ?
Olivier Grivat
François Marthaler
On ne peut pas dire que le conseiller d’Etat
François Marthaler a fait montre d’un soutien débordant envers la CGN, quand bien
même il a assuré la volonté du Conseil
d’Etat de trouver des solutions sur le fond
3
Montreux
« Le Sommet de la francophonie
ne sera pas réservé aux chefs
Municipal en charge de
l’organisation du Sommet de
la Francophonie qui se tiendra à Montreux du 23 au
24 octobre, Laurent Wehrli
se réjouit d’accueillir une quarantaine de chefs d’Etat, dont
le président français Nicolas
Sarkozy.
– L’Organisation internationale de la
francophonie (OIF) représente une
population de 870 millions d’habitants et de 200 millions de locuteurs de
français. A un mois du sommet le plus
important jamais accueilli à Montreux,
quel est l’état des préparatifs ?
– Le compte à rebours va bon train. Pour
Montreux, cela représente un défi des plus
intéressants sur le plan de l’organisation et
de la sécurité, avec des milliers de nuitées
hôtelières à la clé, un investissement en
matériel et tout ce qui touche l’image internationale d’une ville comme Montreux et sa
région. On parle de 500 à 700 journalistes
qui accompagnent généralement ce sommet
des chefs d’Etat. Ils viennent non seulement
des 56 pays membres et des 14 pays observateurs. Une chaîne américaine comme CNN
et la britannique BBC ne peuvent pas ne
pas en parler et maintenir un certain suivi.
La francophonie est devenue aujourd’hui
un véritable organisme international. Il ne
s’agit pas seulement d’une rencontre de
pays chargés de défendre le français. C’est
un sommet où l’on parle aussi de politique
internationale.
– Comment la ville de Montreux a-t-elle
été choisie par l’OIF ?
– Madagascar avait été planifié en 2007 déjà
pour organiser ce sommet, décision confirmée à Québec en 2008. Mais en mars 2009,
un coup d’Etat a modifié la donne avec un
nouveau président malgache qui n’a pas été
reconnu par l’OIF. En se portant candidate
au pied levé, la Suisse a joué un joli coup.
– Comment en arrive-t-on à un total de
70 Etats et gouvernements ?
– Il y a 56 pays membres, mais aussi 14 pays
observateurs, tels l’Autriche, la Géorgie,
la Thaïlande ou l’Ukraine. Cela fait de
cette organisation la deuxième plus importante au monde derrière l’ONU et avant
le Commonwealth en nombre de pays
membres.
4
– Combien de chefs d’Etat sont-ils
annoncés présents à Montreux ?
– Nous tablons sur la présence de 35 chefs
d’Etat et de gouvernement, ce qui est un
chiffre tout à fait dans les normes des derniers sommets, comme celui de Québec en
2008. La venue du président Sarkozy est
confirmée. Le sommet des chefs d’Etat se
déroulera sur deux jours, le samedi 23 et le
dimanche 24 octobre, avec l’arrivée prévue
le vendredi dans la journée et un départ en
fin d’après-midi du 24. Mais il y a par ailleurs une conférence ministérielle de tous
les ministres en charge de la francophonie,
qui va se tenir le mercredi et le jeudi précédents. Ce sont la plupart du temps les
ministres des affaires étrangères, et dans
certains pays c’est même un ministre ad
hoc. Par ailleurs, les diplomates en charge
de la francophonie se rencontreront le
mardi 19 octobre sous l’égide du conseil
permanent de la francophonie. Montreux
va vivre une véritable montée en puissance
tout au long de la semaine, en passant de
quelques centaines de délégués jusqu’à
plus de mille personnes, le dernier weekend. En nombre de personnes sur place,
c’est un sommet plus important que le
G 20 d’Evian en 2003. C’est une très grosse
manifestation, également avec la présence
de l’Association internationale des maires
francophones qui se déroulera à Lausanne
(réd. : le syndic Daniel Brélaz est l’un des
vice-présidents), sans parler de l’Association
des journalistes francophones qui se réunira
à Cully.
– Quel seront les différents thèmes de
discussion de ce 13e sommet ?
– Ils ne sont pas encore tous définis, mais
du moment qu’il s’agit du 40e anniversaire
de l’OIF, l’un des thèmes attendus portera
sur l’avenir de l’OIF. Seront aussi à l’ordre du
jour, la poursuite des efforts de développement durable après Kyoto et Copenhague,
la diversité culturelle et la défense du français…
– … une langue qui est un peu en perte
de vitesse ?
– On assiste dans le monde à une montée très
forte de l’espagnol, sans parler du chinois et
du sabir anglo-américain. D’un autre côté,
grâce à une chaîne comme TV5 Monde ou
la présence du réseau mondial d’universités
françaises, le monde francophone se développe. C’est intéressant à ce titre de voir le
nombre de pays qui s’intéressent à la francophonie. Depuis l’automne passé, la Finlande
réfléchit même à entrer dans l’OIF. Il y a
peut-être une certaine perte de vitesse face
à d’autres langues internationales, mais les
pays concernés y sont sensibles.
– Quels seront les principaux points
forts ?
– Il y aura la cérémonie officielle d’ouverture
du samedi, où le Premier ministre du Canada,
président en exercice de la Francophonie,
la présidente de la Confédération Doris
Leuthard, le président français Nicolas
Sarkozy et le secrétaire général Abdou Diouf,
l’ancien président du Sénégal prendront la
parole. Les chefs d’Etat, de gouvernement et
de délégation au Sommet seront invités à un
dîner officiel par le Conseil fédéral, le samedi
soir. En parallèle, les ministres des différents
pays membres seront reçus au village de la
francophonie, qui se tiendra sous le marché couvert de Montreux. Ce sera un grand
village avec trois espaces, dont 54 chalets
réservés pour les deux tiers par des pays
membres et l’autre tiers par des associations
actives dans le domaine du français ou de la
coopération. Il y aura aussi une grande scène
avec une animation musicale, tous les soirs
de la semaine, avec un espace pour manger
et boire grâce à la présence des vignerons
de Lavaux.
– Combien de nuitées cela représente-til pour la Riviera vaudoise ?
– On parle de 1500 délégués sur quatre ou
cinq jours, plus les journalistes, on n’est donc
pas loin des 10 000 nuitées. Au niveau des
délégations officielles, la règle veut que le
pays hôte paie pour le chef d’Etat et quatre
collaborateurs pendant la durée du Sommet,
soit trois jours. La Suisse prendra donc en
charge cinq délégués par pays membre. Pour
une délégation comme celle de la France qui
comptera plus d’une centaine de personnes,
les autres nuitées seront à charge de leur
gouvernement. Tous les hôtels de la région
vont être occupés. La capacité hôtelière de
Vevey-Montreux est de plus de 2000 lits.
– La sécurité du sommet est-elle un gros
souci ?
– A partir du milieu de la semaine précédent
le sommet, les deux principaux hôtels qui
vont accueillir les participants et les conférences complémentaires, soit le Montreux
Palace et le Royal Plaza, ne seront accessibles qu’aux porteurs de badges. Dès le vendredi midi et jusqu’à la fin du week-end, la
Grande-Rue entre le Palace et le Centre des
congrès sera fermée à la circulation. Cela ne
devrait pas déranger beaucoup plus que lors
du Festival de jazz, d’autant plus que la plu-
Infôtellerie – Septembre 2010 – No 63
d’Etat »
part des participants seront venus en train
ou en bus de l’aéroport de Genève, sans
être accompagnés de voitures officielles. Il y
aura bien sûr quelques désagréments pour
la population. Dès le début des discussions,
l’été passé, nous avons voulu faire en sorte
que le sommet soit une rencontre conviviale
qui n’empiéterait pas trop sur les habitudes
de la population. Nous avions connaissance
de la mauvaise expérience de la ville de
Québec, en 2008, transformée en forteresse avec trois pâtés d’immeubles entiers
bloqués à la circulation pendant toute une
semaine. A Montreux, les mesures de sécurité devront être prises, à des degrés différents en fonction de la montée en puissance
de la manifestation. Il y aura la police locale
fusionnée de la Riviera, la police cantonale
et même l’armée en réserve. Avec autant de
chefs d’Etat et de journalistes, c’est évidemment un événement qui peut intéresser des
fauteurs de troubles. Mais on est très loin
du G 20 ou du G 8. Le monde de la francophonie est composé d’un tiers de pays riches
pour deux tiers de pays en développement.
Les trois quarts des moyens financiers de
l’OIF partent dans des programmes d’aide
humanitaire et de coopération. Ce n’est pas
le capitalisme mondial qui se réunit pour
asservir les pays pauvres.
– Quel est le budget de toutes ces festivités ?
– Le budget de 30 millions de francs a été
fixé par la Confédération (réd. : il a été réduit
de 5 millions sur décision du Parlement), ce
qui est la moitié de ce que le Québec a mis à
disposition. Le coût de la sécurité est estimé
à plus d’un tiers, le reste des dépenses est
formé par les nuits d’hôtel, les repas, le
montage du centre de presse, etc. Les frais
de la sécurité avancés par le canton sont
de l’ordre de 7 millions, mais sont compris
dans les 30 millions de la Confédération.
Montreux a mis sur la table un demi-million de francs de façon à gérer notamment
le village de la francophonie. C’est une
merveilleuse plate-forme de promotion de
Montreux, que l’on espère bien voir relayée
par la presse du monde entier. C’est ce que
Montreux met dans le panier de la mariée.
Pour la commune, ce sommet est une rencontre diplomatique et politique, à laquelle
nous avons voulu donner un complément
culturel. A long terme, c’est un fantastique outil de communication pour toute la
région : qui peut organiser une telle manifestation peut mettre sur pied n’importe quel
événement…
Propos recueillis par Olivier Grivat
Infôtellerie – Septembre 2010 – No 63
Laurent Wehrli
Né en 1965, conseiller municipal de
Montreux (Economie, culture, tourisme et sport) depuis 2000, député
radical au Grand Conseil vaudois,
ancien journaliste (au Matin) et ancien
délégué aux affaires extérieures du
canton de Vaud
5
Hôteliers du bout du monde
Eric Favre et le chaudron du monde
Avec des navires de guerre
et des cargos battant tous
pavillons sous ses fenêtres, le
Vaudois Eric Favre est aux pre-
mières loges pour assister à la
lutte contre la piraterie internationale.
Depuis janvier dernier, il dirige le Djibouti Palace,
un cinq étoiles de la chaîne
Kempinski, une oasis de luxe et
de fraîcheur dans la fournaise.
On avait quitté Eric Favre sur les hauteurs
de Vevey à la tête du Mirador Kempinski au
Mont-Pèlerin. On le retrouve huit mois plus
tard à l’autre bout du monde, dans la ville
de Djibouti, aux portes du golfe d’Aden, à
la tête d’un autre… mirador, moins pacifiste
celui-ci.
Le port de Djibouti se situe au milieu d’une
région du monde particulièrement chaude
au propre et au figuré. En été, le thermomètre peut grimper allégrement au-delà
de 50 degrés, notamment près du lac salé
d’Assal, à 150 m sous le niveau de la mer.
Mais le climat y est aussi très chaud au
sens figuré, en raison de la présence d’une
flottille de guerre venue du monde entier
pourchasser les pirates somaliens : frégates,
porte-hélicoptères, avions de patrouille
maritime et commandos armés à bord de
petits bateaux rapides…
Il y a là pas moins de 26 armées mobilisées
pour protéger leurs flottes marchandes,
y compris des bateaux de guerre japonais
à l’emblème du soleil levant que l’on était
davantage habitué à voir dans les films de
guerre d’il y a 50 ans. Les Français sont
omniprésents, mais aussi les Espagnols,
les Suédois, les Allemands, les Belges, les
Hollandais, les Grecs, les Norvégiens, etc.
Depuis le 8 décembre 2008 dans le cadre de
l’Union européenne, 16 pays de la mission
militaire et diplomatique Eunavfor Atalante
sont sur le pied de guerre pour assurer la
sécurité du trafic maritime dans le golfe
d’Aden et l’océan Indien. Une flotte européenne à laquelle la Suisse ne s’est finalement pas associée avec son détachement
d’élite du DRA 10 malgré les souhaits de la
cheffe de la diplomatie suisse et les vœux des
armateurs suisses qui ont dû avoir recours,
à une occasion au moins, à des bateaux
de guerre russe et indien pour chasser les
pirates : « Djibouti est une ville de garnison
qui accueille plusieurs milliers de militaires
étrangers », explique le Vaudois Eric Favre
depuis son poste d’observation en bordure
de mer. En tant qu’officier d’artillerie de
l’armée suisse, il n’en perd pas une miette.
Les Américains sont en train de construire
une énorme base, un véritable bunker dans
6
cet emplacement stratégique du globe. Les
Français sont également présents dans leur
ancienne colonie d’Afrique avec leur forces
terrestres, maritimes et aériennes – notamment les Mirage 2000 –, mais aussi la Légion
étrangère et ses képis blancs. Si Français et
Américains sont logés dans des habitations
privées – les militaires français avec leur
famille, tandis que les militaires américains
sont là en « célibataires » –, d’autres soldats et officiers ont troqué leurs casernes
nationales, l’espace de trois mois, pour les
chambres climatisées du Kempinski.
« Actuellement, les attaques de pirates
somaliens se font plus rares », commente
le chargé d’affaires de l’ambassade de
France, Jacques Biau, à l’heure de l’apéro
au coucher du soleil, face au golfe d’Aden.
« Mais les choses sérieuses pourraient bien
reprendre en octobre quand les vents tempétueux se seront calmés. »
Les forces de l’Euvnavfor auront à nouveau
leur raison d’être. Une quinzaine de navires
de commerce et 250 hommes d’équipage
seraient encore aux mains des pirates sur
la côte somalienne. Ils réclament généralement une rançon représentant les 10% de la
valeur de la cargaison, une somme que tous
les armateurs ne sont pas disposés à verser.
Des problèmes d’eau
et d’intendance
Depuis son « mirador » de bord de mer, le
directeur du Djibouti Palace, est confronté
à d’autres problèmes d’intendance. Dans
ce luxueux 5 étoiles construit par l’émir
de Dubaï – le cheikh Al-Maktoum qui est
aussi le bâtisseur du nouveau port commercial de Djibouti –, une cinquantaine
d’expatriés venus de France, d’Algérie, du
Maroc, d’Indonésie, des Philippines ou de
Thaïlande, mais aussi de Suisse, règnent
sur 250 chambres et suites. Le chef-cuisinier est un Français venu du Kempinski de
St-Petersbourg. Sous leurs ordres, quelque
350 employés djiboutiens, somaliens ou
éthiopiens constituent le personnel de base :
« Nous sommes confrontés à un réel problème de formation du personnel, avoue le
directeur vaudois. A Djibouti, l’hôtellerie de
luxe manque encore de références. Jusqu’à
présent, il n’y avait là qu’un Sheraton datant
de 30 ans. Il y avait bien une petite école
hôtelière gérée par des Tunisiens, mais
elle manque cruellement de moyens. Les
Djiboutiens sont un peuple de nomades,
certes très accueillant mais qui n’a pas vraiment le service dans leurs gênes. Sur huit
apprentis recrutés, il n’en reste plus que
deux pour terminer leur formation. » Le
palace possède aussi sa boîte de nuit pour
les nombreux militaires en permission et un
casino, sous-traité à une société turque.
« L’autre problème, c’est la maintenance des
installations », poursuit le directeur suisse
formé à l’Ecole hôtelière de Lausanne et qui
est venu à Djibouti avec sa femme Claudia,
d’origine brésilienne. Ses trois enfants, tous
dans l’hôtellerie, sont restés en Suisse ou
en stage à Dubaï pour l’aîné. A Djibouti,
tout est importé et il n’y a pas d’industries
ou de fournisseurs attitrés. En cas de problème, il faut se fournir à Dubaï et cela peut
prendre trois mois. En raison d’une panne
de brûleur, l’hôtel n’a pas eu d’eau chaude
pendant deux mois, le temps que les pièces
arrivent d’Angleterre. Heureusement le climat est très chaud et les militaires qui forment les 90% de la clientèle ne sont pas des
hôtes trop exigeants.
Produits frais importés d’Ethiopie
par camions entiers
La nappe phréatique est largement insuffisante à Djibouti et il faut recourir à des
camions-ravitailleurs d’eau payés très cher
(environ 50 000 dollars par mois) pour alimenter l’hôtel. A force de pomper dans la
nappe, l’eau douce est lentement infiltrée
par l’eau de mer et devient salée, abîmant
les installations, les tuyauteries et autres
boilers ou climatiseurs : « Pour assurer les
300 m3 qui représentent nos besoins quotidiens, l’hôtel s’apprête à construire sa
propre usine de dessalement », poursuit
l’hôtelier.
Même casse-tête pour l’approvisionnement
en produits frais. Rien ne pousse dans les
sables de Djibouti et tout doit être acheté à
l’étranger, notamment en Ethiopie voisine :
« Nous faisons venir d’Addis Abeba, à deux
jours de route, des camions de 20 t pour
assurer trois semaines de fruits et légumes
ainsi que de produits laitiers. Actuellement
nous affrontons une pénurie de tomates, par
moment ce sont les oranges qui manquent,
voire même le poisson… Nous devons
suivre les standards de qualité de la chaîne.
Ce n’est pas toujours facile, mais c’est un
challenge intéressant. Ce qui me manque le
plus, à part mes enfants, ce sont mes grands
crus qui sont restés dans ma cave au MontPèlerin. Le climat tropical n’est pas fait pour
les vins et les taxes à l’importation sont très
importantes. A Djibouti, on consomme
davantage des alcools forts ou de la bière.
Et l’on travaille beaucoup : six jours sur sept,
de 12 à 15 h par jour. Le personnel de base,
lui, est au régime des 48 heures, mais il est
privilégié par rapport aux autres employés
locaux. Ils bénéficient d’une cantine pour
le personnel, d’un environnement de qualité et les pourboires doublent leur salaire
de 54 000 francs de Djibouti, soit plus de
300 dollars par mois, un revenu confortable
pour la région, avec lequel ils font vivre des
familles de 10 à 15 personnes ! »
Olivier Grivat
www.kempinski.com
Infôtellerie – Septembre 2010 – No 63
Depuis la piscine du Djibouti Palace Kempinski, les hôtes ont une vue imprenable sur la flotte marchande internationale qui passe par le
golfe d'Aden.
(Photos O. Grivat)
Eric Favre, à droite, en compagnie de son chef-cuisinier, Philippe Bossert
Infôtellerie – Septembre 2010 – No 63
7
Projet
La métamorphose
du Signal Palace
Après deux ans de fermeture, l’Hôtel du Signal, à
Chexbres, va renaître plus
beau qu’avant : 26 chambres
et suites, 34 résidences et plus
de 70 millions investis dans des
travaux qui vont commencer
cet hiver et durer deux ans.
Un tout nouveau palace aux
portes d’une zone placée sous
la protection de l’UNESCO…
« Fermeture définitive de l’hôtel le dimanche
28 septembre 2008 », affiche un modeste
panneau placé à l’entrée de l’ancien Hôtel
du Signal, à Chexbres. Le jardin qui donne
comme un formidable balcon sur le lac a
grise mine, tout comme la piscine couverte
désaffectée depuis des années. Un mauvais
signal pour le tourisme de Lavaux et ses
vignobles placés sous la haute protection
de l’UNESCO comme patrimoine mondial
de l’humanité…
Mais tout cela est heureusement en train
de changer. La page est tournée. Un nouvel
investisseur – un couple suisse mais d’origine française qui a réalisé l’essentiel de sa
fortune outre-Sarine – a racheté l’établissement à la famille propriétaire depuis près
de 70 ans, dont Yves de Gunten est le dernier descendant et exploitant : « Les travaux
devraient débuter cet hiver et durer deux
ans, jusqu’en 2013. Plus de 70 millions
de francs vont être investis dans la transformation, sans compter le prix d’acquisition », explique Bernard Bovy, le président
du conseil d’administration du Domaine du
Signal SA. Le vigneron et ancien syndic de
Chexbres est l’une des chevilles ouvrières
du futur établissement, au côté de Me
François Chaudet, le président de la holding
qui chapeaute la société propriétaire et la
société d’exploitation du Signal Palace, car
tel sera son nom.
Management & Consulting) – l’ancien
directeur du Beau-Rivage et actuel directeur
général du Crowne Plaza, à Genève – chapeautera le concept hôtelier, probablement
en collaboration avec son ami Jean-Jacques
Gauer, du Lausanne Palace.
Il y a deux ans, un premier projet prévoyait
la création de 53 unités d’hébergement. Les
chambres hôtelières auraient été placées
derrière le bâtiment historique à la place
des anciennes dépendances et écuries
situées au nord. Les résidences avec service
hôtelier auraient pris place dans l’ancien
Hôtel du Signal. Finalement, les promoteurs ont fait machine arrière et opté pour
une rocade, en privilégiant les chambres
d’hôtels sur le front de lac, avec une vue à
couper le souffle sur le Léman et le Lavaux.
C’est cette version qui a reçu le permis de
construire. Le projet à cheval sur les communes de Chexbres et Puidoux a obtenu,
de la part de cette dernière, un quota pour
la vente aux étrangers.
De 1,5 à 10 millions de francs
l’appartement
Le bâtiment principal compte 26 chambres
et suites de type palace ainsi que treize
résidences avec services hôteliers, dont deux
splendides attiques sur le toit, commente
Grégory Marchand, le directeur de vente
de CGi Immobilier à Lausanne qui a
l’exclusivité de la vente des appartements
en PPE : « Les prix s’échelonnent de 1,35
à 11,5 millions de francs, de 2,5 pièces de
77 m2 de surface intérieure et jusqu’à plus
de 300 m2 en attique avec grande terrasse
sur le toit. On est dans la gamme de prix
des appartements de luxe de la région pul-
Le nouveau Signal Palace comptera une trentaine de suites, un restaurant de 90 places,
un spa et une piscine. Deux autres bâtiments
seront construits derrière l’hôtel pour abriter
une vingtaine d’appartements avec service
hôtelier et salles de conférence.
Les chambres d’hôtel
devant les résidences
Pourquoi une période de fermeture aussi
longue ?, se demandent les habitués de
ce lieu magique : « Il a fallu affiner le projet, répond Bernard Bovy. L’Hôtel du Signal
aurait pu rester ouvert une saison de plus,
mais il y avait trop de travaux à entreprendre. La piscine couverte notamment
était à bout ». C’est le bureau d’architecture Samuel Créations, à Genève et à
Dubaï, qui a conçu le projet dans sa globalité, tandis que Christian Marich (Majestic
8
L’un des vingt appartements de luxe construits derrière l’hôtel.
Infôtellerie – Septembre 2010 – No 63
liéranne », précise le vendeur. Il a déjà reçu
des offres de retraités alémaniques ou de
dirigeants d’entreprises de la région, souvent en déplacement à l’étranger et attirés
par le service hôtelier et les prestations qui
vont avec. Car le Signal Palace aux 5 étoiles
comptera aussi un espace bien-être de
500 m2, une piscine, un restaurant de
90 places et un lobby-bar d’une soixantaine
de places. Des prestations auxquelles les
résidents d’appartement auront aussi libre
accès : « Etre chez soi tout en bénéficiant
de prestations hôtelières de haut luxe, c’est
ça le luxe. Dans la région, je ne vois que le
Mirador Kempinski à offrir de telles prestations. Mais le domaine, la qualité du projet
et le panorama ne sont pas comparables »,
vante Grégory Marchand.
Après démolition des anciennes écuries
et dépendances situées à l’arrière, deux
nouveaux groupes d’immeubles seront
construits. Ils abriteront chacun une dizaine
de résidences privées ainsi que des salles de
conférence. Les nouveaux bâtiments seront
reliés à l’ancien Hôtel du Signal par une
« coulée verte », une voie piétonnière arborisée passant au-dessus de l’ancienne route
qui sera enterrée.
Infôtellerie – Septembre 2010 – No 63
Construit en 1862, l’Hôtel du Signal – ou
du moins son aile est la plus ancienne – a
vu passer des hôtes prestigieux, comme le
grand-duc Michel de Russie (frère du dernier tsar Nicolas II, mort à Cannes en 1909),
le ministre français Maurice Schumann,
le professeur Auguste Piccard, le Général
Guisan, l’écrivain C.-F. Ramuz ou encore
le peintre Ferdinand Hodler qui y a peint le
Bleu Léman, dans son axe sud-ouest le plus
spectaculaire.
O. G.
Le restaurant pourra compter sur une vue du Léman à couper le souffle.
9
Lauréats
190 apprenti(e)s félicité(e)s
par Frédy Girardet
En présence du conseiller d’Etat Jean-Claude
Mermoud et d’un
invité d’honneur en
la personne du grand
chef Frédy Girardet,
190 apprentis et
apprenties ont reçu le
précieux diplôme qui
leur ouvre les portes
du monde professionnel.
C’est le 1er juillet dernier que la
cérémonie de remise des certificats fédéraux de capacité (CFC)
et des attestations de formation professionnelle (AFP) des
métiers de la restauration et de
l’hôtellerie a eu lieu au Palais de
Beaulieu à Lausanne. En tout, ce
sont 128 cuisiniers, 16 employés
en cuisine, 24 spécialistes en restauration,
6 employés en restauration, 15 spécialistes
en hôtellerie et un employé en hôtellerie qui
ont reçu leur précieux sésame.
Invité d’honneur, Frédy Girardet a décerné
les prix spéciaux aux meilleurs apprentis du
canton devant un parterre de 950 invités,
parents, amis, maîtres d’apprentissage et
personnalités de la branche. Le Conseiller
d’Etat Jean-Claude Mermoud a pour sa part
assuré la partie officielle de la manifestation,
en transmettant le message du gouvernement vaudois.
« Offrir des émotions à nos clients »
Pour Philippe Thuner, le président de l’Association romande des hôteliers (ARH), c’était
l’occasion d’adresser toutes ses félicitations
10
et ses encouragements aux nouveaux promus pour cette étape importante de leur
carrière professionnelle : « Mais ce n’est
qu’un début et la seule maîtrise technique
ne suffit pas. Notre métier, c’est d’offrir des
émotions à nos clients, des expériences dont
ils se souviendront et dont ils parleront à
leurs amis. Vous faites partie d’une chaîne
de prestations qui conduit à ces émotions.
Faites-vous plaisir en faisant plaisir ! Pour le président des hôteliers romands, le
diplôme n’est cependant que l’aboutissement de trois années d’efforts mais aussi et
surtout le début de leur carrière : « N’arrêtez
pas de vous former, de vous perfectionner
et de découvrir de nouveaux aspects de
votre métier. Notre branche offre de nombreuses possibilités de perfectionnement
allant du cours de flambage à l’école hôtelière en passant par les brevets et diplômes
fédéraux. Ces formations complémentaires
font l’objet d’aides financières de plusieurs
organisations, notamment la Fondation vaudoise pour la formation professionnelle des
métiers de bouche et notre convention collective de travail ».
Pour l’hôtelier lausannois Jacques Pernet,
vice-président d’hotelleriesuisse, des hôteliers romands et président de la commission vaudoise de formation professionnelle,
c’était enfin l’occasion de remercier chaleureusement Frédy Girardet, le « cuisinier du
XXe siècle » ainsi qu’Olivier Rey, le responsable de commission vaudoise de formation
pour les cafés-restaurants et les hôtels.
O. G.
Infôtellerie – Septembre 2010 – No 63
VD – FR – NE en bref
Le miracle fribourgeois
Le défi de Gastonomia 2010
Le canton de Fribourg affiche la plus forte
dynamique démographique en Suisse, assure
une récente étude du Credit suisse. Au cours
de la dernière décennie, la population fribourgeoise a progressé à une vitesse près de
deux fois supérieure à celle de la moyenne
suisse. Nourries par la dynamique exceptionnelle des régions lémaniques, la Gruyère et
la Glâne/Veveyse connaissent les plus forts
taux de progression. La migration est le principal moteur du « miracle démographique »
fribourgeois. Des immigrants étrangers et
suisses, toutes classes d’âges confondues,
s’installent dans le canton de Fribourg, lequel
exerce un très grand attrait notamment
sur les familles. En dépit de la dynamique
démographique, la progression du revenu
des ménages du canton demeure toutefois
inférieure à la moyenne. Cependant, une
comparaison sur le long terme montre que
le canton de Fribourg a pu progressivement
améliorer sa base de revenu entre 1975 et
2006, pour atteindre un seuil légèrement
supérieur à la moyenne nationale.
Malgré l’organisation de trois salons gastronomiques en l’espace de quelques mois et
à 60 km de distance, la Salon des professionnels de la restauration et de l’hôtellerie
renaît cet automne au Palais de Beaulieu
sous la houlette de la société bâloise MCH,
qui a repris le « Comptoir » : « Malgré la
crise, malgré la concurrence du nouveau
Salon Gourmet à Genève, avec le Bocuse
d’Or, nous avons atteint nos objectifs
d’exposants (une centaine) et de surfaces
(10 000 m2) », observe René Zürcher, le
directeur de Gastonomia et représentant de
MCH.
Le nouveau Gastonomia aura lieu du dimanche 7 novembre au mercredi 10 novembre,
sur trois espaces : un salon professionnel
dans les halles nord, le forum de débats
qui accueillera tous les soirs des groupes
musicaux et le village VIP où les exposants
pourront recevoir leurs invités dans un environnement confortable, avec quatre bars
proposant une quarantaine de vins et un
restaurant avec service, mais sans le « restaurant des chefs » : « Si nous avions la
gueule de bois en bouclant l’édition 2008,
nous sommes aujourd’hui très heureux de
cette renaissance », se réjouit Pierre-André
Michoud, vice-président de l’ARH et membre
du comité de Gastronomia.
Le mardi 9 novembre aura lieu la Journée de
l’hôtellerie romande avec un débat consacré
aux sites internet de notations d’hôtels.
Le Conseil des régions
à la vallée de Joux
Pierre-André Michoud, vice-président de
l’ARH, Daniel Lehmann de l’Hôtel de la
Truite au Pont, et le président Philippe
Thuner.
Par bateau – l’unique bateau de ligne du lac
de Joux… – du Pont jusqu’au Sentier, puis
par bus à travers les magnifiques et mystérieuses forêts du Risoux, les membres du
conseil des régions élargi et du Codir ont
effectué leur sortie annuelle, le 6 juillet dernier. Au programme, une visite du musée
horloger de Jaeger-Lecoultre, du Musée du
vacherin aux Charbonnières et un repas servi
dans la propriété en France voisine de Daniel
Lehmann, un chalet d’alpage situé à 1200 m
d’altitude.
Les itinéraires culturels et touristiques de Suisse
Avec de magnifiques illustrations dues au
photographe zurichois (installé en France)
Heinz-Dieter Finck, Via Storia – Centre
pour l’histoire du trafic publie un très beau
livre consacré aux itinéraires culturels de
Suisse. « Chemins historiques – un regard
nouveau » propose douze itinéraires qui
racontent chacun une page d’histoire du trafic et de la culture helvétiques.
La Via Salina retrace ainsi l’histoire du sel, la
Via Valetellina celle de la culture, du négoce
et du transport du vin de la Valteline, la
Via Romana, celle des voies romaines, tandis que la Via Cook évoque les débuts du
tourisme en Suisse. De superbes images
du célèbre photographe alémanique retracent un étincelant tour de Suisse à travers
les montagnes, les vallées, les glaciers et les
vignobles, tels que le pionnier du tourisme
Thomas Cook les a sans doute découverts
en 1863, en effectuant sa première visite
en Helvétie, accompagné d’un groupe de
voyageurs ébahis. Rassemblés sous le nom
de Junior Alpine Club, quatre hommes et
quatre femmes firent le voyage de Genève
au pied du Mont-Blanc à Chamonix. Après
avoir visité la Mer de Glace, ils poursuivirent
leur route dans le Valais en direction de
Sion et de Loèche-les-Bains, avant de poursuivre leur chemin avec guides et mulets
en direction de l’Oberland bernois, puis en
calèche et bateau à vapeur vers Interlaken.
Chroniqueuse et fine plume, Miss Jemima
Morrell narra ce périple dans son journal de
bord (Editions Weber, 3645 Thoune [BE],
Fr. 49.–, www.weberverlag.ch )
Le Château de Chillon tel qu’ont dû le voir
les premiers touristes emmenés sur les
bords du Léman par le Britannique Thomas
Cook (photo H.-D. Finck)
Infôtellerie – Septembre 2010 – No 63
11
Royal
L’Ecole hôtelière
sacre un Thaïlandais
hors du commun
L’ancien élève de l’EHL (volée 1951) Khwankeo Vajarodaya
a servi le roi de Thaïlande durant 60 ans. Il a reçu le titre de
Professeur honoraire pour avoir contribué au rayonnement de
Lausanne à Bangkok et dans le monde.
« Bienvenue. Vous êtes ici chez vous. L’Ecole
hôtelière de Lausanne est votre école
depuis les années 50 ! », a pu saluer Michel
Rochat, le nouveau directeur de l’EHL, en
accueillant le 18 juin dernier, un hôte de
marque en ses murs. De passage en Suisse,
le Grand Chambellan du roi de Thaïlande,
Khwankeo Vajarodaya, âgé de 82 ans, a
été reçu en grande pompe au Chalet-àGobet par Michel Rochat en présence de
la conseillère d’Etat Anne-Catherine Lyon,
du syndic de Lausanne Daniel Brélaz et de
Lysandre Séraïdaris, les deux artisans de l’accord de collaboration signé entre Bangkok
capitale thaïlandaise. Par ailleurs, une bourse
Khwankeo, financée par le secteur privé,
servira à financer les études de jeunes talents
thaïlandais.
Entre la ville de Bangkok, une mégapole
dépassant les 12 millions d’habitants, et
la commune de Lausanne, des liens très
spéciaux se sont tissés depuis trois quarts
de siècle à l’arrivée de deux futurs rois de
Thaïlande, en 1933. C’est à cette date que
la princesse Mahidol est arrivée à Lausanne
avec sa fille aînée Galyani et ses deux fils
Ananda et Bhumibol, âgés respectivement
de 8 et 6 ans. Son mari, le prince Mahidol de
Le directeur de l’EHL Michel Rochat remet un diplôme au Grand Chambellan
et Lausanne il y a six mois, et du directeur
de l’ECAL Pierre Keller. « C’est le roi, un
grand ami de la Suisse et des Vaudois que
vous honorez à travers moi », a relevé le
nouveau professeur honoraire, le premier
à recevoir ce titre au sein de la HES lausannoise. En contrepartie, l’école lausannoise a
pu envoyer deux étudiants invités par la ville
de Bangkok pour un voyage d’étude dans la
12
Songkla et fils du roi Chulalongkorn (Rama
V), un docteur en médecine, était décédé
prématurément en 1929. Devenue veuve,
la jeune princesse décidait de s’installer en
Suisse pour l’éducation de ses trois enfants
avec l’appui d’un précepteur lausannois,
Cléon Séraïdaris jeune doctorant en droit.
Alors que les deux frères allaient fréquenter
l’Ecole Nouvelle et l’Université de Lausanne,
la princesse Galyani s’était retrouvée sur les
bancs de l’Ecole Supérieure de jeunes filles,
sous le nom de Galyani Mahidol (réd. : son
nom complet étant Galyani Vadhana Krom
Luang Naradhiwas Rajanagarindra) : « Nous
étions dans un petit pays et l’on nous appelait
monsieur, mademoiselle, et non pas princes
et princesse, aimait à dire la sœur des deux
rois. Nous vivions comme les petits Suisses et
menions la vie simple des gens ordinaires ».
Dans les vignes de Lavaux
C’est en 1935 – il n’avait pas dix ans – que
le jeune Lausannois Ananda Mahidol a
été appelé à régner sous le nom de Rama
VIII. Mais il fut assassiné lors d’un séjour à
Bangkok, le 9 juin 1946, avant même son
couronnement, alors qu’il terminait des
études de droit à Lausanne. Son jeune frère
Bhumibol, de deux ans son cadet, lui succéda alors. Le futur Rama IX avait 19 ans.
Il entama à son tour des études de droit à
Lausanne, laissant trois régents nommés par
le Parlement mener les affaires du Royaume.
En 1950, Bhumibol qui avait épousé la
princesse Sirikit, fille de l’ambassadeur de
Thaïlande à Paris, fut couronné à Bangkok,
puis revint terminer ses études à Lausanne.
Plus tard, en 1960, le roi Bhumibol logea
durant presqu’une année au Flonzaley, une
propriété de Puidoux-Chexbres dominant
les vignes de Lavaux, région pour laquelle il
garde une grande affection.
Choisi par la princesse, la mère des deux
futurs rois, au sein de la bonne famille de
Bangkok, Khwankeo Vajarodaya et son frère
jumeau Keokhwan seront tout d’abord les
pages de Rama VIII et Rama IX. Ensemble,
ils construiront leurs premières maquettes
d’avions et de bateaux, comme tout adolescent. Le second fut inscrit à l’Institut
agricole de Grangeneuve (FR), tandis que
le premier allait suivre les cours de l’Ecole
hôtelière, de 1948 à 1951, après avoir fréquenté avec succès l’Ecole de commerce.
Elève assidu et discipliné, le jeune Khwankeo
obtient son diplôme d’hôtelier en 1951 avec
Infôtellerie – Septembre 2010 – No 63
Royal
la mention « très bien » pour les cours de service, de cuisine et de secrétaire comptable.
Il va effectuer ses stages tout près du Palais
fédéral, au Bellevue Palace, puis à Brighton
pour y perfectionner son anglais. Il sera
ensuite engagé au service du roi Bhumibol,
au Palais de Bangkok où il va superviser les
grands banquets donnés aux visiteurs, têtes
couronnées ou chefs d’Etat. En février 1972,
le roi Bhumibol et la reine Sirikit reçoivent
ainsi au Grand Palais de Bangkok, la reine
Elizabeth et le prince Philippe. En connaisseur des vins, le Grand Chambellan sélectionna un Mouton Rothschild, non sans avoir
goûté personnellement le fin nectar avant le
service. En 1977, le club qui réunit les Chefs
des chefs accueillit en son sein l’ancien élève
de l’Ecole hôtelière sous la houlette de Paul
Bocuse et de Pierre Troisgros, né le même
jour de la même année et à la même heure,
le 3 septembre 1928, à 10 h 40 !
Un livre d’arts de la table
Pour immortaliser ses souvenirs de palais
(royal), le Grand Chambellan est l’auteur
d’un livre consacré aux arts de la table :
« L’évolution et l’art de dresser la table, de
gérer l’approvisionnement, les boissons et
les menus ». Dans cet ouvrage paru et réédité sept fois en thaï, puis en anglais en
attendant la version française, il présente
une compilation des diners de gala royaux
servis sous le règne des rois de Siam depuis
les années 1900. Il y célèbre la gastronomie française, le service à la française et
les meilleurs crus de France. Khwankeo
Vajarodaya a pourtant tenu à faire figurer
en page de couverture un caquelon à fondue avec une bouteille de vin blanc de la
Ville de Lausanne ! Ce qui ne l’empêche pas
de clamer haut et fort la supériorité de l’art
de vivre « à la française » qui a une longue
tradition à la cour de Siam. Lorsque le roi
Chulalongkorn, ou Rama V, revint de ses
différents voyages en Europe en 1897 et en
1907, il apporta avec lui l’art épicurien de
la table, la manière de se tenir et de servir
à table, avec des menus pour les banquets
royaux rédigés dans la langue d’Auguste
Escoffier. Mais le Grand Chambellan ne
s’est pas contenté de superviser la bonne
marche du palais, il a aussi dirigé les stations de radio et de télévision chargés de
l’enseignement à distance jusque dans les
régions les plus éloignées de la capitale. Il
préside aussi la Fondation Rajaprajanugroh
qui finance 39 écoles situées le long des
frontières du royaume et dans les régions
frappées de catastrophes (le tsunami
notamment), la drogue ou le trafic d’êtres
humains. Elle prend soin des orphelins dont
les parents ont été victimes de ces fléaux
et du virus du sida. Le nouveau professeur
honoraire est aussi le plus proche serviteur
du roi « le plus Suisse de la planète » et du
souverain qui détient le record du plus long
règne de l’Histoire. Agé d’un an de moins
que lui, le roi Bhumibol n’a pas pu s’empêcher de plaisanter – en français, langue qu’il
manie fort bien – en apprenant que l’école
hôtelière s’apprêtait à le nommer professeur honoraire : « Comment peut-on nommer professeur un jeune homme comme
lui ? ».
Olivier Grivat
Le syndic de Lausanne Daniel Brélaz, le directeur de l’EHL Michel Rochat, le Grand Chambellan du roi de Thaïlande et Lysandre Séraïdaris,
fils de l’ancien précepteur du roi
Infôtellerie – Septembre 2010 – No 63
13
Ecole hôtelière
Alpine School :
un label suisse
à Athènes
Sur le front de mer de la capitale, Eric et Sybil Hofmann
exploitent depuis une vingtaine
d’années une école hôtelière à
l’emblème helvétique.
Quand Sybil Hofmann, mi-Allemande et miLibanaise, et son futur mari Eric Hofmann se
sont connus à Bagdad, ils ne pensaient pas
créer un jour ensemble une école hôtelière
« suisse » dans la capitale grecque : « Nous
avons eu l’idée de créer cet établissement
en Grèce en 1986, car il y avait manifestement une carence de formation hôtelière.
Nous avons conclu un partenariat avec
l’Ecole hôtelière de Lucerne. Les élèves qui
peuvent suivre un cursus de deux ou trois
ans viennent d’un peu partout. Il y a une
majorité de Grecs bien sûr (60%), mais aussi
des Russes, des Macédoniens, des Chinois,
etc. C’est une école internationale qui s’appuie sur un label et une qualité suisses. Nous
avons même quelques enseignants suisses,
dont un Valaisan et un consultant grison,
Gianni Riatsch, qui a étudié à Rome et dirigé
pendant deux ans deux grands hôtels parisiens. »
A Athènes, l’école est basée dans un hôtel
de Glyfada, sur le front de mer : « Les tragiques évènements du mois de mai dernier
qui ont vu trois employés de banque périr
lors des mouvements de protestation contre
les mesures du FMI et de l’Union européenne ont entraîné l’annulation immédiate
de 24 000 nuitées en Grèce », commente à
chaud le Grison Gianni Riatsch. D’origine
romanche, il a étudié à l’Ecole suisse de
Rome et travaillé à Paris, notamment au
Lutetia et à l’Hôtel du Louvre, ainsi que dans
de grandes chaînes hôtelières comme Hilton,
Holiday Inn, Méridien, Marriott, etc. Il a travaillé aussi bien à Dubaï qu’en Guadeloupe,
à Nice, au Sénégal, avant d’arriver à Athènes
durant les Jeux olympiques de 2004, puis
à Paradise Island aux Bahamas, à Santiago
du Chili, avant d’être transféré à Florence
comme directeur général de deux des meilleurs hôtels de la ville et enfin à Londres et
de nouveau à Athènes. A la base, il a suivi
une école d’ingénieur avant de se tourner
vers l’hôtellerie et de trouver un premier
job comme commis dans un palace de
Mannheim. Aujourd’hui, il travaille comme
consultant hôtelier, principalement pour
un propriétaire chypriote qui possède le
Marriott à Athènes et un bel hôtel en bord
de mer, à Limassol.
La Grèce touchée de plein fouet
par la crise
« La crise ? Elle est visible ici. Il y a d’abord eu
la crise internationale qui a touché de plein
fouet les palaces du monde entier et les
compagnies aériennes. Athènes a fait partie
de la deuxième vague et elle a été davantage touchée que des grandes capitales
incontournables comme Paris ou Londres.
La Grèce est plus affectée que les villes d’affaires. Les prix moyens ont aussi baissé en
même temps que les marges des hôteliers.
Eric et Sybil Hofmann en compagnie de l’hôtelier d’origine grisonne Gianni Riatsch
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Infôtellerie – Septembre 2010 – No 63
Ecole hôtelière
Les prix sont environ inférieurs de 25% à
l’année passée. Cela ne se voit pas trop dans
la rue où les tavernes sont bondées cet été,
Les Grecs, pour les faire rester à la maison,
il faut qu’ils aient de la fièvre ! S’il reste trois
jours de suite à la maison, cela ne va pas !
C’est culturel. Je le sais bien, ma femme est
grecque ! » constate Gianni Riatsch. La crise
ne se voit pas dans les restaurants ou les
bars, mais dans les caddies des supermarchés ou à la pompe à essence où le prix de
l’essence est passé de 1 € à 1.50 € : 50% de
hausse en quelques mois ! »
« Des grosses erreurs ont été commises par
les gouvernements successifs de gauche et
de droite, poursuit le Grison. Le pays produisait 1000 et dépensait 1800. Le premier
gouvernement Papandreou, père du Premier
ministre actuel, était adoré. Avant l’entrée de
la Grèce dans l’Union européenne comme
10e membre, le 1er janvier 1981, il a accordé
des avantages sans compter : retraite avant
60 ans, 14 salaires avec un 13e à Noël, une
moitié du 14e à Pâques et l’autre moitié
avant le départ en vacances d’été. L’armée
a su aussi jouer avec le conflit potentiel avec
le voisin turc. La Grèce compte un million de
fonctionnaires sur 11 millions d’habitants et
ils n’ont pas grand-chose à faire. C’est un
Infôtellerie – Septembre 2010 – No 63
gâchis énorme et les riches grecs ne paient
pas les impôts qu’ils devraient. Selon les
médias allemands, la Grèce compte plus de
Porsche Cayenne que l’Allemagne. Il lui reste
heureusement le tourisme avec un climat et
une mer magnifiques. Il faut encore développer ce secteur, de même que le shipping
et améliorer les infrastructures. »
L’atout du pavillon suisse
Sybil Hofmann est d’origine à la fois libanaise et allemande, mais suissesse par
mariage. Elle est bien consciente de l’attrait
du label helvétique pour l’école qu’elle
dirige avec son mari, d’origine bernoise :
« Le directeur du FMI n’a jamais demandé à
la Grèce d’abaisser les salaires, mais d’améliorer sa compétitivité. L’avenir sera dur
pour tout le monde. Les Grecs en sont bien
conscients. Heureusement, la mémoire des
choses négatives est relativement courte.
L’euro baisse. Pour les Grecs, c’est un avantage pour le tourisme et j’espère qu’il va
continuer à baisser, mais à l’avenir il faudra
travailler mieux et plus. La crise ? On doit
s’attendre à moins d’élèves inscrits pour les
prochains semestres, mais ce n’est pas sûr.
En revanche, l’écolage sera moins cher pour
les élèves russes par exemple. Il coûte près
de 14 000 euros en internat, puis les élèves
effectuent ensuite un stage payé de six mois.
L’éducation est importante pour les Grecs,
mais ils n’aiment pas trop les métiers de service. Il y a beaucoup à améliorer de ce côtéci. C’est culturel et c’est ce à quoi nous nous
attelons. Le tourisme va diminuer et il faudra
revaloriser l’image du pays. »
Sortir la Grèce de la zone euro ? Pour Gianni
Riatsch, ce serait une erreur : « Sans les milliards prêtés par l’Europe, le pays serait en
faillite. Faire partie d’un groupe de pays
forts, c’est un atout. Il ne faut pas retourner dans le passé. Mais il faudrait stopper
la corruption, notamment dans les hôpitaux
publics, où il est de coutume de glisser une
enveloppe de 500 € au chirurgien avant
de se faire opérer. Mais cela risque de
prendre une ou deux générations. Il faudra probablement adopter une politique
monétaire commune pour pouvoir gérer
une monnaie commune, conclut le consultant grison. Comme aux Etats-Unis où se
côtoient un budget fédéral et un budget
pour chaque Etat. »
Olivier Grivat/Athènes
www.alpine.edu.gr
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En bref – Agenda
L’avion d’Edgar
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L’école du sourire…
hôtelier
La cérémonie de remise des diplômes SSH
de l’Ecole de secrétariat hôtelier a eu lieu
le 20 août dernier au Lausanne Palace.
L’occasion pour Mme Françoise Aramendi,
responsable du domaine Profession &
Formation et responsable du bureau romand
P.P.
A l’initiative du professeur d’astrophysique
et ancien directeur de l’Observatoire de
Genève André Maeder, Villars Tourisme
a inauguré cet été un chemin original le
long des sentiers qui mènent de Bretaye à
Villars-sur-Ollon. Pas moins de neuf postes
s’offrent aux promeneurs pour mieux faire
Dépôt en nombre
4,6 milliards d’années
sur 4,6 km
1000 Lausanne 1
La Table d’Edgar prend résolument de l’altitude… Depuis le 1er septembre et jusqu’à fin
novembre, les passagers des classes affaires
et 1re peuvent déguster la cuisine du chef du
Lausanne-Palace, le Valaisan Edgar Bovier,
17 points sur 20 au GaultMillau.
Avant lui, des chefs romands comme Frédy
Girardet, Didier Schneiter du Beau-Rivage
Palace et le Fribourgeois Pierrot Ayer notamment ont déjà officié à 10 000 m d’altitude,
chez Swissair comme chez Swiss. C’est
depuis 2002 que la filiale de Lufthansa collabore tous les trois mois, dans le cadre de son
programme Taste of Switzerland, avec un
chef renommé pour présenter les spécialités
culinaires de sa région : « J’aime les produits
qui ont un goût intense et considère de mon
devoir le plus important de laisser à chaque
produit sa véritable saveur, plaide le Valaisan
qui a pris domicile dans les Alpes vaudoises.
Ma cuisine repose sur la qualité des produits
et le respect que j’éprouve pour eux ».
Fleur de courgette farcie à la mousse de
sandre du Léman, filet de veau en croûte
aux agrumes et porchetta de poulet avec
farce méditerranéenne figurent au menu
des passagers de la First Class. La tomme
de Rougemont et le fromage de L’Etivaz ne
sont pas oubliés.
La compagnie s’offre l’image du grand chef à
bon compte : cela ne lui coûte que quelques
billets d’avion et elle se fait même sponsoriser comme pour une opération marketing
par l’Office du tourisme vaudois, Lausanne
Tourisme et la marque horlogère Blancpain.
Ainsi que l’a relevé avec humour son viceprésident Alain Delamuraz, « ce partenariat
est tout naturel, toutes nos montres portent
en toutes lettres sur leur cadran la mention
SWISS ! ».
comprendre l’histoire de notre planète : de
l’apparition des hominidés à la formation
du système solaire. Les grands moments de
notre Planète sont expliqués au moyen de
sculptures en fer forgé : les premiers mammifères, l’explosion des formes de vie, la
photosynthèse, la terre complètement gelée,
les premières bactéries, et d’autres moments
extraordinaires sont expliqués simplement,
en français et en anglais.
Deux artistes romands ont participé au
projet : Pierre-André Tschantz, forgeron à
Bière, et Laurent Berger, artiste-peintre neuchâtelois résidant à Genève : « Le but n’est
pas de refaire un sentier planétaire comme
à St-Luc, mais de proposer un projet original se différenciant de tout ce qui a été fait
jusqu’ici, assure Villars Tourisme. Ce chemin
de l’Histoire de la Terre a une vocation écologique, invitant à la protection de la Nature.
Il veut faire prendre conscience de la longue
histoire qui précède l’arrivée de l’homme
et montrer que les changements que nous
apportons sont explosifs à l’échelle des
temps géologiques. »
Agenda
Quelques rendez-vous importants pour le
secteur touristique
7 au 10 octobre
Salon de Broquante et d’antiquités,
Morges
De g. à dr. : Nora Sterchi, Marylin Perrod,
Aude Jacot et Astrid Fontimpe
16 au 17 octobre
d’hotelleriesuisse de féliciter les lauréat(e)s
qui ont passé une année de stage dans un
hôtel, avant de passer leurs examens et de
recevoir leur diplôme : « La réception est la
première vitrine de notre branche et c’est à
ce moment crucial du contact que la viabilité
de notre branche se joue. Nous espérons que
vous saurez être à l’écoute des besoins des
clients, analyser activement les problèmes,
envisager des solutions et prendre position. »
Quant à Jacques Pernet, le vice-président
de l’Association romande des hôteliers, il a
relevé l’importance de la formation donnée
à l’Ecole de secrétariat hôtelier : « Il n’y a
pas d’autre formation pour ce métier, à ce
jour, que le diplôme que vous recevez. Or, la
branche manque cruellement de réceptionnistes formées. C’est donc les bras ouverts
que la branche vous accueille en son sein. »
19 au 24 octobre
Salon Animalia à Beaulieu
Comptoir de Morges
22 au 24 octobre
Sommet de la francophonie à
Montreux
29 au 31 octobre
Foire des Planches, Montreux
7 au 10 novembre
Gastronomia à Beaulieu
19 au 21 novembre
Foire de la St-Martin, Payerne
4 au 5 décembre
Marché Artisanal de Jérusalem, Aigle
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