L`IMPOSITION DES BREVETS, MARQUES DE COMMERCE

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L`IMPOSITION DES BREVETS, MARQUES DE COMMERCE
L'IMPOSITION DES BREVETS, MARQUES DE COMMERCE ET DROITS D'AUTEUR
Hugues G. Richard*
LEGER ROBIC RICHARD, avocats
ROBIC, agents de brevets et de marques de commerce
Centre CDP Capital
1001 Square-Victoria – Bloc E - 8e étage
Montréal (Québec) H2Z 2B7
Tél: 514-987-6242 - Fax: 514-845-7874
[email protected] – www.robic.ca
L'article 3(a) de la Loi de l'Impôt sur le Revenu1 stipule que le revenu d'un
contribuable pour une année d'imposition est entre autres le revenu tiré de
chaque charge, emploi, entreprise et bien.
L'article 248 de la Loi de l'Impôt sur le Revenu définit l'expression "bien"
comme signifiant des biens de toute nature, meubles ou immeubles,
corporels ou incorporels et comprend, sans en restreindre la portée générale:
a)
un droit de quelque nature qu'il soit, une action ou part;
b)
de l'argent (à moins d'une intention contraire évidente), et;
c)
un avoir forestier.
Les brevets, les marques de commerce et les droits d'auteur font partie de
cette catégorie de biens dits "incorporels", et on peut également les
regrouper sous l'appellation "propriété intellectuelle". Toute intellectuelle
qu'elle soit, cette propriété n'échappe pas pour autant à l'emprise de la Loi
de l'Impôt sur le Revenu.
LES BREVETS D'INVENTION
Un brevet est défini dans la Loi sur les Brevets2 comme étant les lettres
patentes couvrant une invention. Le mot "invention" est lui-même défini
© LEGER ROBIC RICHARD / ROBIC, 1981.
* Avocat et agent de marques de commerce, Hugues G. Richard, est l'un des associés
principaux du cabinet d'avocats LÉGER ROBIC RICHARD, s.e.n.c. et du cabinet d'agents de
brevets et de marques de commerce ROBIC, s.e.n.c. (1981), 3 Revue de planification fiscale
et successorale 71-105. Publication 23.
1
S.C. c. 63, 1970, 1971, 1972 tel que modifié.
2
Loi sur les Brevets, S.R.C. c. P-4 art. 1.
comme étant "toute réalisation, tout procédé, toute machine, fabrication ou
composition de matières, ainsi qu'un perfectionnement quelconque de l'un
des susdits, présentant le caractère de la nouveauté et de l'utilité". Il est donc
à noter qu'une invention n'est pas une simple idée mais une réalisation
concrète et utile. Une idée nouvelle ne suffit pas pour obtenir un brevet, c'est
d'ailleurs ce qui faisait dire au Juge Buckley dans Reynolds v. Herbert Smith &
Co. Ltd.3:
"Now, the idea that leads to an invention is, in my opinion no part of the
invention. The idea, or the recognition of the want, stimulates the
inventor to do something else. It is the something further which he does
which is the invention. The mere idea, or the conception that it is very
desirable to have a patch, such as that you can put it on when you
have not got the materials in the workshop is not patentable. What is
patentable is a new way of doing that thing, either by way of a new
article to be used, or a new method of putting it on, or some
combination which would be capable of being patented."
Lorsque le gouvernement émet des lettres patentes couvrant une invention, il
accorde au titulaire un monopole d'exploitation du brevet pour une période
de dix-sept (17) ans4 sur l'ensemble du territoire canadien. Après la période
de 17 ans, l'invention tombe dans le domaine public et peut être exploitée
par quiconque.
Pour une protection à l'étranger, l'inventeur ou le
cessionnaire de ces droits devra obtenir un brevet dans chacun des pays où il
désire avoir un monopole d'exploitation.
Nous venons de voir que le brevet d'invention est un bien que l'on peut
classer dans la catégorie des biens incorporels. L'article 3 de la Loi de l'Impôt
sur le Revenu stipule que le revenu annuel d'un contribuable comprend le
revenu de chaque charge, emploi, entreprise et biens. Ainsi donc, tout
revenu provenant de l'usage d'un brevet sera assujetti à la Loi de l'Impôt sur
le Revenu. Il n'est pas nécessaire de se référer à l'article 12(1)(g) pour trouver
dans la Loi de l'Impôt sur le Revenu une disposition rendant taxable les
sommes reçues par un contribuable pour l'usage d'un brevet. L'article 3,
comme nous l'avons vu, ainsi que l'article 9(1) suffisent pour atteindre cette
fin.
L'article 12(1)(g) fut introduit dans notre droit à cause d'une pratique
devenue courante dans l'industrie pétrolière de l'Ouest canadien. Cette
pratique consistait à acheter des propriétés productives de pétrole en
échange d'une participation dans la production du pétrole qui y serait
3
4
(1903), 20 R.P.C. 123 p. 127.
Loi sur les Brevets, art. 48.
produit. Il avait été décidé dans l'affaire Spooner v. Le Ministre du Revenu
National (1928-34) C.T.C. 184, que le produit de disposition d'une telle
propriété productrice de pétrole constituait une recette de nature capitale.
C'est parce que le gouvernement fédéral a voulu changer cette orientation
jurisprudentielle inscrite par le Conseil Privé, que l'article 12(1)(g) ne se restreint
pas aux transactions pétrolières. Si le contexte de la transaction s'y prêtait, il
serait utilisé par le fisc canadien pour imposer le produit de disposition d'un
brevet.
Le brevet est donc un bien par lequel un contribuable peut tirer un revenu.
Toute dépense pour l'obtention d'un brevet, occasionnée par l'élaboration
de l'invention et de l'enregistrement, ou par une simple acquisition, doit être
considérée comme une dépense encourue pour gagner un revenu5.
Toutefois, à cause des dispositions de l'article 18(1)(b), cette dépense
constituerait un paiement à titre de capital et dès lors, ne serait pas
déductible comme telle. L'article 20(1)(a) ouvre toutefois la voie à une
déduction à titre d'allocation du coût en capital dans la mesure où un
règlement l'autorise. Or, le Règlement 1100(1)(c) prévoit une allocation à
l'égard du coût en capital pour les brevets. Ce Règlement se lit comme suit:
"En vertu de l'alinéa (a) du premier paragraphe de l'article 20 de la Loi,
il est par les présentes alloué au contribuable dans le calcul de son
revenu d'une entreprise ou de biens, selon le cas, des déductions pour
chaque année d'imposition égales au montant qu'il peut réclamer à
l'égard de biens de la catégorie 14 dans l'annexe B sans dépasser le
moindre
(i)
de l'ensemble des montants obtenus pour l'année en répartissant
ce que chacun des biens lui a coûté en capital sur la durée utile
restant au bien, au moment où le coût a été encouru, ou
(ii)
du coût en capital non déprécié, pour lui, des biens de la
catégorie à l'égard de l'année d'imposition (avant d'opérer
quelque déduction en vertu du présent paragraphe pour
l'année d'imposition)."
Si l'on se réfère à l'annexe B et plus particulièrement à la catégorie 14, on
pourra lire:
"Les biens constitués par un brevet, une concession ou un permis de
durée limitée à l'égard des biens, mais ne comprenant pas
5
Art. 18(1)(a) de la Loi de l'Impôt sur le Revenu.
a)
une concession ou permis à l'égard des minéraux, de pétrole, de
gaz naturel, d'autres hydrocarbures connexes ou de bois et des
biens y afférents (excepté une concession pour la distribution de
gaz aux consommateurs ou un permis d'exportation de gaz du
Canada ou d'une province ou à l'égard d'un droit d'exploration,
de forage, de prise ou d'enlèvement concernant des minéraux,
du pétrole, du gaz naturel, d'autres hydrocarbures connexes ou
du bois,
b)
une tenure à bail, ou,
c)
les biens compris dans la catégorie 23."
Ainsi, les brevets, et plus généralement les concessions sont dépréciables en
ligne directe en répartissant proportionnellement le coût en capital de
chaque bien sur la vie restant au brevet ou à la concession au moment où le
coût fut encouru.
Ce coût, comme nous le mentionnions précédemment, aurait pu être
encouru par l'acquisition simple d'un brevet déjà existant. Ce coût sera alors
amortissage en le répartissant sur le nombre d'années restant au brevet avant
que l'invention ne tombe dans le domaine public. Ce coût pourrait
également être encouru par l'inventeur lui-même pour la réalisation de son
invention ainsi que pour les dépenses légales relatives à l'enregistrement de
son brevet. Ainsi, dans l'affaire Weinberger v. M.N.R. (1964) C.T.C. 103, la Cour
de l'Échiquier a reconnu les coûts encourus par l'inventeur pour développer
son invention durant une période de 20 ans. Il fut alors décidé que le coût en
capital incluait non seulement les frais légaux et les autres frais accessoires à
l'enregistrement, tel que cela avait été décidé par la Commission d'Appel
d'Impôt, mais devait comprendre toutes les dépenses encourues dans le but
de produire l'invention et de la parfaire.
Il est à noter que l'allocation du coût en capital ne serait permise que dans la
mesure où une invention fut brevetée. Ainsi, un inventeur qui ne réussirait pas
à obtenir l'enregistrement d'un brevet ne pourrait réclamer aucune
déduction à l'égard des dépenses encourues pour réaliser son invention. Ce
principe fut d'ailleurs reconnu dans l'affaire No 244 v. M.N.R., 12 Tax ABC 371.
Dans cette affaire, un paiement avait été fait en vue de l'achat d'un brevet
dont la demande d'enregistrement avait été déposée mais n'avait pas
encore été accordée. Le Tribunal a alors décidé que le coût d'acquisition de
ce "patent pending" n'était pas dépréciable car il ne faisait pas partie de la
catégorie 14 tant et aussi longtemps que le brevet ne serait pas accordé.
Au Règlement 1100(9), il est prévu une méthode particulière d'amortissement
dans le cas de certains brevets. Le Règlement 1100(9) se lit comme suit:
"Lorsque le coût d'un brevet est établi en partie ou en totalité d'après
l'usage qui en est fait, au lieu de la déduction allouée en vertu de
l'alinéa (c) du paragraphe (1), un contribuable peut, en calculant le
revenu qu'il a tiré d'une entreprise ou de biens, selon le cas, dans une
année d'imposition, déduire le montant qu'il peut réclamer à l'égard
des biens de la catégorie 14 dans l'annexe B sans dépasser le moindre
a)
de l'ensemble (i) de la partie du coût en capital établi d'après
l'usage qui est fait du brevet dans l'année, et, (ii) du montant qui
serait calculé en vertu du sous-alinéa (i) dudit alinéa (c) si le coût
en capital du brevet ne comprenait pas les montants établis
d'après l'usage fait du brevet durant cette année-là et les
années antérieures, ou,
b)
du coût en capital non déprécié pour lui, à la fin de l'année
d'imposition des biens de la catégorie (avant d'opérer quelque
déduction en vertu du présent paragraphe pour l'année
d'imposition)."
Cette règle spéciale d'amortissement peut être utilisée à l'égard d'un brevet
si c'est à l'avantage du contribuable. Cette règle est applicable lorsqu'une
partie ou la totalité du coût d'un brevet est déterminée par rapport à son
usage. Dans ce cas, le coût du brevet est réparti entre les portions
dépendantes de son usage dans l'année et la portion fixe. La portion
variable peut être réclamée dans l'année à laquelle elle s'applique. La
portion fixe qui n'est pas dépendante de l'usage sera sujette à la règle
générale des actifs de la catégorie 14 qui requiert que le coût soit amorti sur
une base linéaire durant la vie du brevet. Selon Prentice-Hall, l'allocation du
coût en capital pour une année complète peut être réclamée relativement
à un brevet même si le brevet ne fut acquis qu'à la dernière journée de
l'année d'imposition.6
Le ministère du revenu national émet l'opinion
contraire dans son bulletin d'inter-prétation IT-477. Il considère pour les biens
du calcul du coût en capital que le coût en capital d'un bien de la catégorie
14 doit être réparti également sur chaque jour de la durée restante à ce bien:
«Par exemple, si le 31 décembre 1979, un contribuable achetait une
concession d'une durée d'une année civile, seulement un trois cent
soixante-cinquième du coût en capital de la concession deviendrait
dépréciable en 1979.»7
6
7
Income Taxation in Canada, Prentice-Hall, Vol. 1, p. 21098.
IT-477, par. 4.
Les critères pour déterminer si la vente d'un brevet engendre un gain en
capital ou un revenu sont les mêmes que ceux établis par la jurisprudence
dans le cadre de transactions où des biens d'autres natures sont impliqués.
Les Tribunaux s'entendent pour reconnaître que la règle applicable fut bien
résumée par Lord Justice Clerk dans l'affaire Californian Copper Syndicate
Ltd. v. Harris. Cette règle s'énonce de la façon suivante:
"It is quite a well settled principle in dealing with questions of assessment
of Income Tax that where an owner of an ordinary investment chooses
to realize it, and obtains a greater price for it than he originally
acquired it at, the enhanced price is not profit (...) assessable to
income tax. But, it is equally well established that enhanced values
obtained from realization or conversion of securities may be so
assessable where what is done is not merely a realization or change of
investment, but an act done in what is truly the carrying on, or carrying
out of a business. The simplest case is that of a person or association of
persons buying and selling lands or securities speculatively, in order to
make gain, dealing in such investments as a business, and thereby
seeking to make profits. There are many companies which in their very
inception are formed for such a purpose, and in these cases it is not
doubtful that, where they make a gain by a realization, the gain they
make is liable to be assessed for Income Tax."8
Il a toujours été difficile de distinguer le gain en capital du revenu proprement
dit. Ceci demeure vrai dans le cas d'une vente de brevet. Il arrivera à
certaines occasions que sous l'apparence d'un contrat de vente, se cache
en fait un contrat de licence. Il sera généralement stipulé dans ce genre de
contrat que le prix d'achat du brevet sera établi en fonction du nombre
d'unités brevetées vendues. Dans un cas semblable, les Tribunaux verront
dans les paiements effectués par versements, le paiement de royalties plutôt
qu'une partie du prix de vente.9
Dans le cadre d'un contrat de licence, il s'avère possible qu'une partie des
sommes reçues représente des royalties, alors qu'une autre partie soit un
paiement de nature capitale. C'est d'ailleurs ce que Canadian Industries Ltd.
a tenté de démontrer dans une cause l'opposant à Sa Majesté La Reine,
rapportée à (1980) 2 C.F. 463. Il s'agit là d'une décision de la Cour d'Appel
Fédérale qui a maintenu un jugement de la Cour de Première Instance qui
avait elle-même maintenu celui de la Commission de Révision de l'Impôt. Les
faits de cette affaire fort intéressante peuvent se résumer ainsi:
8
9
(1904), 5 Tax Cas. 159, page 165.
Nr. R. v. M.N.R., (1950), 2 Tax A.B.C. 364.
En 1960, la société Canadian Industries Ltd. (ci-après désignée: "C.I.L.")
a acquis d'une société suédoise certains droits non exclusifs dans des
brevets et dans des données visant à l'amélioration d'un procédé pour
la fabrication de dynamite. Avant 1967, le gouvernement des ÉtatsUnis était, à toutes fins pratiques, le seul client de la C.I.L. pour l'achat
de dynamite.
Durant cette année, la C.I.L. a consenti au
gouvernement des États-Unis le droit non exclusif d'utiliser les brevets
américains détenus par la société suédoise pour une période de 10
ans. Il fut également convenu que la C.I.L. fournirait des informations,
du know-how et une assistance technique pour la fabrication de la
dynamite. Selon les termes de l'entente, la C.I.L. a reçu un paiement
forfaitaire en deux versements. Subséquemment, le gouvernement
américain cessa d'acheter de la C.I.L. de la dynamite. Le problème en
litige était de savoir si le paiement reçu par la C.I.L. en 1967 est de
nature capitale ou du revenu. La Commission de Révision de l'Impôt et
la Cour Fédérale de Première Instance décidèrent quil s'agissait là d'un
revenu. L'Honorable Juge Le Dain, rendant la décision unanime de la
Cour, rejeta l'appel et maintint le jugement de la division de Première
Instance. L'appelante avait plaidé que la somme reçue devait être de
nature capitale puisqu'elle représentait la considération pour avoir
abandonné un actif de nature capitale de la compagnie. Ainsi, on
plaidait que le paiement effectué en vertu du contrat de licence avait
été effectué une fois pour toutes et n'avait aucun lien avec l'usage des
brevets et du know-how. De plus, il fut plaidé qu'en raison du résultat
direct d'avoir consenti la licence, la C.I.L. perdait la totalité de ses
ventes de dynamite pour fins militaires auprès du gouvernement des
États-Unis.
L'intimée, de son côté, plaidait que pour comprendre la véritable
nature du paiement reçu par la C.I.L., il fallait remonter à l'entente
originale intervenue entre la C.I.L. et la société suédoise. Cette licence
par laquelle la C.I.L. autorisait le gouvernement américain à utiliser les
brevets et le know-how, était par sa nature non exclusive, et, de ce fait,
permettait à la C.I.L. de faire d'autres arrangements semblables aux
États-Unis.
L'Honorable Juge Le Dain fit une longue étude de la jurisprudence citée par
les parties et en vint à la conclusion suivante:
"Il ressort de cette analyse qu'il ne suffit pas que soit prévu un paiement
forfaitaire, versé indépendamment de l'importance de l'utilisation
prévue du brevet, pour que ce paiement soit une recette en capital.
La licence en contrepartie de laquelle ce paiement est reçu doit
constituer une aliénation des droits afférents au brevet. Cette notion
d'aliénation d'un bien immobilier forme l'élément essentiel du critère
énoncé par le lord juge Bankes dans British Dyestuffs, critère qui a été
adopté dans plusieurs arrêts. L'opinion exprimée dans Rustproof Metal
repose sur ce critère et il ressort du jugement prononcé par lord
Denning dans Imperial Chemical Industries qu'il a prévalu devant la
Cour d'Appel. Ce critère va ouvertement à l'encontre de l'opinion
exprimée par lord Evershed, M.R., dans Evans Medical Supplies, qui
semble considérer l'octroi d'une licence non exclusive comme
entraînant une diminution suffisante de l'actif immobilisé pour qu'un
paiement forfaitaire non relié à l'importance de l'utilisation soit une
recette en capital. Mais ce qu'il a dit et ce qu'a déclaré le lord juge
Romer dans cette affaire ne peuvent pas être séparés des faits propres
à l'affaire et, en particulier, de ce qu'étaient les répercussions finales de
l'entente sur les affaires de la société en Birmanie.
En me fondant sur ces arrêts, j'estime donc que, en l'espèce, le fait que
le paiement forfaitaire ait été versé en contrepartie d'une licence
permettant l'utilisation de brevets et de "techniques opératoires" ne
renforce nullement la prétention de l'appelante selon laquelle la
somme doit être considérée comme une recette en capital. Bien que
les brevets américains soient de toute évidence des biens immobilisés,
la licence, qui est non exclusive, accordée pour un but précis
(accordée au gouvernement américain pour usage militaire non
commercial) et pour une durée limitée, ne peut être considérée,
compte tenu de la jurisprudence, comme une aliénation des droits
afférents à un brevet."10
Se fondant sur ce raisonnement, la Cour Fédérale d'Appel décida que les
montants reçus, même s'ils étaient forfaitaires et n'avaient aucun lien avec
l'usage que l'on pouvait faire des brevets, étaient malgré tout du revenu.
Nous pouvons donc dégager comme règle générale de cet arrêt que pour
qu'un montant soit considéré comme gain en capital, il faut qu'il résulte d'une
disposition au moins partielle du brevet d'invention. Le fait qu'une licence
permette en plus de l'usage du brevet, l'usage d'un certain "know-how", ne
change rien. Une licence non exclusive accordée pour des fins limitées ne
peut être considérée comme la disposition, même partielle, d'un brevet
d'invention.
Certaines des règles que nous venons d'étudier en cette première partie
s'appliqueront également aux marques de commerce lorsqu'elles font l'objet
10
Canadian Industries Ltd. v. The Queen, op. cit. page 484. (voir également) Collins v. FirthBrearly Stainless Steel Syndicate Ltd. (1925), 9 Tax Cas. 520; No 442 v. M.N.R. (1957), 17 Fox
Pat. C. 23; Scoble & Al. v. Secretary of State for India (1903), 4 Tax Cas. 618; Glasson v.
Rougier (1944) 1 ALL E.R. 535; Howson (Inspector of Taxes) v. Monsell, (1950) 2, ALL E.R.
1239.
de concessions sous licence. Ce sont entre autres ces questions que nous
allons maintenant aborder.
LES MARQUES DE COMMERCE
L'image de marque est un concept moderne qui semble vouloir caractériser
notre époque. Aucune autre génération n'aura vu aurant de concessions
sous licence, que ce soit dans le domaine de l'alimentation (e.g. fast food),
de l'automobile, de la mode ou ailleurs. Sur le plan commercial, la
concession de licences est devenue une industrie florissante. Généralement,
la marque de commerce est l'élément essentiel de la licence, mais non le
seul. Pour réussir, le concédant devra fournir un ensemble structuré (un
"package") comprenant entre autres: le produit à être fabriqué sous licence,
les marques de commerce (noms et dessins), l'assistance technique, les plans
architecturaux, les spécifica-tions au niveau des standards de qualité, les
systèmes de contrôle, etc...
Il sera généralement prévu au contrat de licence un terme limité dans le
temps, avec ou sans option de renouvellement, par le concessionnaire de la
licence pour une période additionnelle déterminée. Il est important que le
contrat de licence ne soit pas pour une période indéterminée; il ne faut pas
non plus qu'il soit annulable par le concédant. La raison pour laquelle il est
préférable que le contrat soit pour une période déterminée dépend du
Règlement 1100(1)(c) auquel nous avons déjà fait référence.11 En effet, il est
stipulé à ce Règlement que les biens de la catégorie 14 sont constitués entre
autres d'une concession d'une durée limitée. La Cour de l'Échiquier a eu à se
pencher sur cette question dans l'affaire M.N.R. v. Kirby Maurice Co. Ltd.12
L'honorable Juge écrivit alors ce qui suit:
"But not all franchises are within Class 14; only those that are "for a
limited period" are within the class. The intention of Parliament in using
these words "for a limited period" seems to me to be quite clear. Unless
the duration of the franchise is definitely ascertained and limited there
is no yardstick by which the value of the franchise can be ascertained.
Further, it would be impossible to ascertain the life of the property or
franchise, a matter which must be known in order to make the
computation required in paragraph (i) of subsection (c) of Section 1 of
Regulation 1100, namely:
11
12
Voir page 5 des présentes.
(1958) C.T.C., 41, page 46.
"By apportioning the capital cost to him of each property over
the life of the property remaining at the time the cost was
incurred." "
Le concessionnaire qui en vertu de son contrat de licence d'une durée
limitée a eu à verser à titre de "droits d'entrée" un montant forfaitaire, devra
considérer le paiement de ce montant comme une dépense de nature
capitale car elle fut encourue une fois pour toutes pour le bénéfice durable
de l'entreprise, comme cela fut énoncé par le Viscount Cave dans l'affaire
Atherton v. British Insulated and Helsby Cables Ltd.:13
"When an expenditure is made, not only once and for all, but with a
view to bringing into existence an asset or an advantage for the
enduring benefit of a trade, I think that there is very good reason (in the
absence of special circumstances leading to an opposite conclusion)
for treating such an expenditure as properly attributable not to revenue
but to capital."
Cette dépense encourue comme "droits d'entrée" ne sera donc pas
déductible en totalité durant l'année où elle fut encourue puisque l'article
18(1)(b) le défend. Toutefois, l'article 20(1)(a) et le Règlement 1100(c)
permettront qu'on l'amortisse.
Cette déprécia-tion sera linéaire et
proportionnelle au nombre de jours restant à la licence. Si au contrat de
licence il est prévu une option de renouvellement à la discrétion du
concessionnaire, alors il sera considéré que la durée de la licence sera pour
toute la période du contrat, y compris la période sous option. Si l'option n'est
pas prise, le concessionnaire pourra alors prendre une perte terminale. La
question de savoir si la période d'amortissement comprendra la période
optionnelle demeure une question de fait à évaluer selon les circonstances.14
Dans le cas d'une simple marque de commerce qui serait achetée pour un
prix déterminé, cette dépense serait considérée comme une dépense en
immobilisation admissible car, alors, il ne peut s'agir d'une concession puisque
l'acquéreur devient le propriétaire de la marque et non un simple usager
inscrit de celle-ci. Une telle dépense en immobilisation admissible sera
amortissable pour moitié à un taux de 10% l'an.15 On peut également dire
que les paiements faits dans le cadre d'un contrat de licence pour une
période indéterminée tomberont aussi dans la catégorie des dépenses en
immobilisation admissible et seront donc amortissables pour moitié à un taux
de 10%. Le Bulletin d'Interprétation IT-143-R est assez spécifique sur ce sujet.
On peut en effet y lire au paragraphe 12 ce qui suit:
13
14
15
10 T.C. 155, page 192.
Bowater Power Co. v. M.N.R., 1971, C.T.C. 818.
Articles 14(5)(a) et 20(1)(b).
"Un brevet, une franchise, une concession ou un permis qui ne sont pas
des biens amortissables en vertu de la catégorie 14 de l'Annexe B des
Règlements de l'Impôt sur le Revenu sont admis à titre de dépenses en
immobilisa-tion admissible lorsqu'ils sont acquis pour servir dans une
entreprise."
Un contrat de concession comprend généralement, en plus des "droits
d'entrée", le paiement des redevances ou royalties. Ainsi, les redevances
seront déductibles en vertu de l'article 18(1)(a) de la Loi de l'Impôt sur le
Revenu. Certains contrats de concession prévoient en plus des "droits
d'entrée" et des redevances, le paiement d'une somme à titre d'honoraires
de supervision. Cette somme est déductible également en vertu de l'article
18(1)(a). Le Ministre pourrait toutefois refuser sa déduction à titre de
dépenses courantes dans la mesure où aucune supervision n'est en fait
effectuée. Le paiement ne serait alors qu'une forme déguisée de "droits
d'entrée" payable par versements annuels. L'article 20(1)(k) servira alors au
Ministre pour désallouer la partie de ce paiement qui, en fait, est de nature
capitale. Cette portion devrait normalement suivre le sort du "droit d'auteur"
initial et être considérée comme un coût d'un bien amortissable de la
catégorie 14. Si le Ministre refusait de reconnaître le bien fondé de cette
catégorisation, il semble, compte tenu du passage que nous venons de citer
du Bulletin d'Interprétation IT-143-R, que la somme ainsi payée serait au moins
amortissable à titre de dépenses en immobilisation admissible.
D'autres coûts peuvent être inhérents à l'obtention d'une conces-sion ou à
l'enregistrement d'une marque de commerce. Ainsi, les honoraires payés aux
agents de marques de commerce ou à tout professionnel qui auront travaillé
à l'obtention de l'enregis-trement, seront déductibles en vertu de l'article
18(1)(a) de la Loi de l'Impôt sur le Revenu. Selon le Bulletin d'Interprétation IT143-R, les dépenses déductibles durant l'année comprennent également les
frais de conception, les frais juridiques, les frais de dépôt et aussi tout
paiement versé à une personne pour s'abstenir de contester le dépôt.
On peut donc conclure que le contribuable qui devient concession-naire
sous licence pourra déprécier le coût initial représentant son "droit d'entrée"; il
pourra également déduire annuellement les montants qu'il dépensera sous
forme de redevances ou royalties. Dans la mesure où le contribuable, plutôt
que de devenir simple concessionnaire ou usager inscrit d'une marque de
commerce, s'en porte acquéreur, le coût d'acquisition sera considéré
comme une dépense en immobilisation admissible.
Sera également
considérée comme une dépense en immobilisation admissible toute
dépense inhérente à l'obtention d'une concession qui ne rencontrerait pas les
exigences de la catégorie 14 de l'Annexe B des Règlements de la Loi de
l'Impôt sur le Revenu.
En ce qui concerne le concédant, toute somme qu'il aura reçue d'un
concessionnaire à titre de "droit d'entrée" sera considérée comme du revenu
pour le concédant. D'autre part, un concédant pour lequel l'octroi de
franchise est exceptionnel et ne fait pas partie de ses opérations courantes,
pourrait toujours tenter de démontrer au Ministère du Revenu que le "droit
d'entrée" est en fait un montant de nature capitale.16 Comme dans toute
autre situation où une recette peut être considérée comme un revenu ou un
gain en capital, ce sera en analysant les faits et les circonstances entourant
la transaction qu'une détermination de la nature du paiement pourra être
faite. Les redevances payées par le conces-sionnaire au concédant seront
considérées comme un revenu et imposables en vertu de l'article 3 de la Loi.
Les mêmes principes que ceux étudiés dans la partie 1 pour les brevets sont
applicables ici. Les honoraires de supervision seront également imposables
entre les mains du concédant.
toutefois, comme nous l'avons vu
précédemment, si le Ministre du Revenu décidait de refuser entre les mains
du concessionnaire la déduction d'une partie des honoraires de supervision
en vertu de l'article 20(1)(k)(ii), logiquement le Ministère devrait considérer la
partie non déduc-tible de ce paiement comme ayant la même nature que
le "droit d'entrée". Il en découlerait alors que cette partie non déductible
serait ou de nature capitale ou de nature revenu dépendant des
circonstances comme nous l'avons vu ci-haut.
Dans le cas où une marque de commerce est vendue et que l'acquéreur en
devient propriétaire, le produit de disposition sera dès lors considéré comme
étant celui de la disposition d'un bien en immobi-lisation admissible. Alors, la
moitié du produit de disposition (ou tout autre montant moindre tel que
prescrit par l'article 21(1) des Règles transitoires) doit être déduite du solde du
montant admissible des immobilisations cumulatives de l'entreprise. Si le
résultat est négatif à la fin de l'année fiscale, le montant négatif devra être
inclus dans le revenu de l'année en vertu de l'article 14(1) de la Loi de l'Impôt
sur le Revenu.
Le montant admissible des immobilisations comprend
l'ensemble des dépenses en immobilisation admissible encourues par
l'entreprise et qui peuvent, comme nous l'avons vu, être amorties pour fins
fiscales. En résumé, les montants suivants représentent le côté positif du
compte:
1)
16
La moitié du total de toutes les dépenses en immobilisation
encourues par l'entreprise;
Smitty's Pancake House, 39, A.B. Cases, page 297.
The Dixie Lee Co. Ltd. (1971), A.B. Cases, page 592.
2)
Tous les montants inclus à titre de revenu en vertu de l'article
14(1) de la Loi de l'Impôt sur le Revenu durant les années
d'imposition antérieures.
Les montants suivants représentent maintenant en résumé le côté négatif du
montant admissible des immobilisations cumulatives:
1)
tout montant réclamé à titre de déductions dans le calcul du
revenu en vertu du paragraphe 20(1)(b) pour les années
d'imposition antérieures (ce paragraphe prévoyant une
déduction maximum de 10% du solde du montant admissible des
immobili-sations cumulatives à la fin de chaque année;
2)
la moitié du produit de disposition du bien en immobilisation
admissible, déduction faite des dépenses se rapportant à la
vente.
Quand à la fin d'une année d'imposition, le solde est négatif, ce montant doit
être inclus dans le revenu en vertu de l'article 14(1) de la Loi de l'Impôt sur le
Revenu. S'il est positif, on pourra alors l'amortir à un taux de 10%, cet
amortissement constituant une déduction dans le calcul du revenu en vertu
du paragraphe 20(1)(b) de la Loi de l'Impôt sur le Revenu.17
On peut donc résumer que, pour le concédant d'une licence, la réception
par lui d'un "droit d'entrée" sera considérée soit comme un revenu ou un
paiement de nature capitale, dépendant des circons-tances. En ce qui a
trait aux redevances ou royalties, celles-ci constitueront dans tous les cas un
revenu. Relativement aux honoraires de supervision, si ces derniers sont
réputés véritables par les autorités fiscales, alors, tout montant reçu à ce titre
devrait être inclus dans le revenu. Si, par ailleurs, une partie de ces honoraires
de supervision n'était pas déductible par le concessionnaire, le paiement
correspondant reçu par le concédant devrait suivre le sort du "droit d'entrée"
reçu initialement. Dans le cas de la vente pure et simple d'une marque de
commerce, la moitié du produit de disposition risque d'être considérée
comme un revenu, dans la mesure où aucun coût n'est inscrit aux livres de la
compagnie relativement à l'acquisition de ladite marque de commerce.18
LES DROITS D'AUTEUR
17
18
Canada Tax Services, Vol. I, pages 14-106-H et 14-107.
Ce résultat découle du fait que n'ayant encouru aucun coût pour l'acquisition de la
marque de commerce, le solde du compte des immobilisations admissibles cumulatives
sera nil.
Le brevet et les droits d'auteur se ressemblent à certains égards en ce qu'ils
protègent la substance du bien faisant l'objet du droit. Les prohibitions
contenues dans les Lois relatives au brevet et aux droits d'auteur s'étendent à
toute fabrication ou reproduction non autorisée tant et aussi longtemps que
le monopole persiste. Le brevet et le droit d'auteur reposent sur une thèse
que le résultat du travail original d'un auteur ou d'un inventeur en toute
justice, doit être protégé contre la piraterie.19
Le brevet et le droit d'auteur se distinguent toutefois en ce que le brevet
constitue un monopole absolu pendant qu'il est en vigueur, empêchant
l'usage par d'autres d'un procédé conçu par son inventeur; alors que le droit
d'auteur est un monopole limité au fait d'empêcher les autres de copier
l'oeuvre protégée. Si quelqu'un crée une oeuvre semblable ou identique à
l'oeuvre protégée, le titulaire du droit d'auteur n'aura pas le droit d'en
empêcher la réalisation. Pour plus de précisions, le droit d'auteur est défini
par la Loi sur le Droit d'Auteur comme désignant "le droit exclusif de produire
ou de reproduire une oeuvre, ou une partie importante de celle-ci, sous une
forme matérielle quelconque, d'exécuter ou de représenter ou, s'il s'agit
d'une conférence, de débiter en public, et si l'oeuvre n'est pas publiée, de
publier l'oeuvre ou une partie importante de celle-ci."20
Le droit d'auteur, contrairement au brevet, prend naissance par la réalisation
de l'oeuvre, l'enregistrement du droit d'auteur n'étant qu'optionnel.21 Le
certificat d'enregistrement de droit d'auteur sur une oeuvre est une preuve
que cette oeuvre fait l'objet d'un droit d'auteur et que la personne portée à
l'enregistrement est titulaire de ce droit.22 Dans le cas d'un brevet, l'inventeur
n'a aucun droit s'il n'obtient pas ses lettres patentes. Celles-ci sont la source
de son monopole et non pas de l'invention elle-même. Sans lettres patentes,
il n'y a pas de brevet, sans enregistrement de droit d'auteur, il peut très bien
exister un droit d'auteur.
Pour qu'un bien puisse se qualifier comme bien de la catégorie 14, il doit être
un brevet, une licence, une concession dont la durée sera limitée. Le droit
d'auteur est un droit qui existe durant toute la vie de l'auteur et cinquante
années après son décès. La vie de l'auteur étant une période indéterminée,
le contribuable ne peut inclure dans la catégorie 14 que les droits d'auteur
acquis après le décès de l'auteur. À retenir toutefois qu'une licence
accordée du vivant de l'auteur pour une période limitée (cinquante ans au
moins) sera dépréciable comme bien de la catégorie 14.
19
20
21
22
The Canadian Law of Copyrights and Industrial Designs, Harold J. Fox, second ed., 1967,
page 3.
Statuts refondus du Canada, Chap. 55, art. 3.1.
The Canadian Law of Copyrights and Industrial Designs, op. cit., page 299.
Loi sur les Droits d'Auteur, art. 36(2).
La Loi de l'Impôt sur le Revenu est relativement silencieuse quant au
traitement à accorder au droit d'auteur. Sauf dans les cas bien spécifiques
que nous étudierons ci-après, la Loi de l'Impôt sur le Revenu ne prévoit aucun
traitement particulier à accorder au droit d'auteur. On peut donc considérer
que le prix reçu lors de la disposition d'un droit d'auteur sera traité de la
même manière que le prix reçu pour la disposition d'autres biens. Ainsi, le
montant reçu sera normalement considéré comme un paiement de nature
capitale, sauf lorsque le contribuable a disposé de son droit d'auteur dans le
cours normal de ses affaires. On peut également énoncer comme principe
général que si le droit d'auteur est vendu pour un prix dépendant de l'usage
qu'on en fera, le produit de disposition sera alors considéré comme du revenu
en vertu de l'article 12(1)(g) de la Loi de l'Impôt sur le Revenu, tel que nous
l'avons d'ailleurs vu précédemment.
Si au lieu de vendre ses droits d'auteur, le titulaire accorde plutôt une
concession ou une licence d'exploitation, alors les
règles qui régiront les
rapports entre le concédant et le concessionnaire seront semblables à celles
que nous avons étudiées aux chapitres précédents.
Ainsi, pour le
concessionnaire, tout montant forfaitaire payé initialement pour l'obtention
de la concession sera amortissable en vertu de l'article 20(1)(a) de la Loi et du
Règlement
1100(1)(c).
Les
redevances
et
royalties
payables
subséquemment, constitueront une dépense encourue pour gagner du
revenu et seront déductibles en vertu de l'article 18(1)(a) et imposables entre
les mains du concédant en vertu de l'article 3. Pour le concédant, la somme
forfaitaire reçue en vertu du contrat de franchise, sera soit du revenu ou une
somme de nature capitale, dépendant des circonstances de chaque cas.
Ces circonstances seront les mêmes que celles déterminant la nature (revenu
ou capital) du produit de disposition du droit d'auteur tel que nous l'avons vu
au début de cette partie.23
Tout montant reçu par un individu, auteur d'une production littéraire,
dramatique, musicale ou artistique, peut se qualifier comme revenu pouvant
servir à l'achat d'un contrat de rente à versements invariables tel que le
prévoit l'article 61(1)(b)(iii) de la Loi de l'Impôt sur le Revenu. Les montants qui
se qualifient comprennent le produit de disposition reçu par l'auteur lors de la
vente de ses droits dans l'oeuvre ou les redevances reçues relati-vement à
une licence accordée pour l'usage des droits. Il est à noter que seul un
individu peut profiter des dispositions de l'article 61(1)(b)(iii) et que seul
l'auteur véritable peut s'en prévaloir. Les titulaires subséquents des droits
23
Withers v. Nethersole, 28, T.C. 501; Mason v. Innes, (1967) 2 ALL. E.R. 926; Murray Schafer v.
M.N.R., 1981 C.T.C. 2261.
d'auteur n'y ont pas droit. Les individus visés sont entre autres les écrivains,
dramaturges, compositeurs, sculpteurs, peintres, producteurs de films ou
dessinateurs de costumes. Les agents ou autres individus qui financent la
production ou la vente des oeuvres ne font pas partie de la catégorie de
personnes pouvant bénéficier du contrat de rente à versements invariables.
Les royalties reçues par le conjoint survivant ou les descendants d'un artiste
ne se qualifient pas non plus comme revenu admissible aux fins d'un
placement dans un contrat de rente à versements invariables.
LES NON-RÉSIDENTS
La partie XIII de la Loi de l'Impôt sur le Revenu traite de l'impôt sur le revenu
de personnes non-résidentes du Canada. Ainsi, à l'article 212(1)(d), il est
stipulé:
"Toute personne non résidente doit payer un impôt sur le revenu de 25%
sur toute somme qu'une personne résidente au Canada lui paie ou
porte à son crédit, ou est réputée, en vertu de la Partie I lui payer ou
porter à son crédit au titre ou en paiement intégral ou partiel du loyer,
de la redevance ou d'un semblable paiement, y compris, mais sans
restreindre la portée générale de ce qui précède, tout paiement fait (i)
en vue d'utiliser ou d'obtenir le droit d'utiliser, au Canada, des biens,
inventions, appellation, brevets, marques de commerce, dessins ou
modèles, plans, formules secrètes, procédés de fabrication, ou toute
autre chose, (ii) pour des renseignements relatifs à des connaissances
industrielles, commerciales et scientifiques lorsque la somme totale
payable à titre de contrepartie pour ces renseignements dépend en
totalité ou en partie (A) de l'utilisation qui doit en être faite ou de
l'avantage qui doit en être tiré, (B) de la production ou de la vente de
marchandises ou de services, ou (C) des bénéfices, (iii) pour des
services de nature industrielle, commerciale ou scientifique, rendus par
une personne qui est un non-résident lorsque la somme totale payable
à titre de contrepartie pour ses services, dépend en totalité ou en
partie (A) de l'utilisation qui doit être faite ou de l'avantage qui doit en
être tiré, (B) de la production ou de la vente de marchandises ou de
services ou (C) des bénéfices, mais à l'exclusion d'un paiement
effectué pour des services fournis pour la vente de biens ou la
négociation d'un contrat, (...)"
Il est à noter que la retenue à la source de 25% qui est stipulée à l'article
212(1)(d) sera réduite par différents traités fiscaux existants entre le Canada
et la plupart des pays industrialisés du monde. Le taux applicable dans les
cas où le non-résident réside dans un pays avec lequel le Canada a conclu
un traité variera d'un pays à l'autre. Cette taxe imposée au non-résident par
l'article 212(1)(d) doit être perçue en vertu de l'article 215(1) par le résident
canadien qui est l'auteur du paiement. Si le résident canadien omet ou
néglige de défalquer ou de retenir à la source le montant prévu à l'article
215(1), il sera tenu de verser à titre d'impôt, en vertu de la Partie XIII de la Loi,
au nom de la personne non résidente, la totalité de la somme qui aurait due
être défalquée ou retenue, et elle aura alors le droit de défalquer ou de
retenir sur tout montant payé par elle à la personne non résidente ou porter à
son crédit, ou par ailleurs de recouvrer de cette personne non résidente toute
somme qu'elle a versée pour le compte de cette dernière à titre d'impôt, le
tout tel qu'il est prévu par l'article 215(6) de la Loi de l'Impôt sur le Revenu.
Lorsqu'un concédant est une personne non résidente et qu'il est prévu au
contrat de licence qu'un "droit d'entrée" initial sera payable, le
concessionnaire canadien aura-t-il l'obligation de retenir à la source un
montant de 25% (ou tout autre montant moindre prévu par le traité) comme
semble l'indiquer l'article 212(1)(d)? Il est difficile de répondre en termes
absolus à cette question. Il semble une fois de plus que chaque cas devra
être étudié et évalué selon les circonstances particulières qui l'entourent. En
faveur de la thèse de la non-retenue à la source, on peut argumenter que le
"droit d'entrée" payé par le concession-naire au concédant est un montant
forfaitaire qui n'est ni du loyer, ni une redevance, ni un semblable paiement.
Les termes "loyer" ou "redevances" font appel à des critères relatifs à l'usage
que l'on fera d'une chose pour une période de temps déterminée. Puisque le
"droit d'entrée" est un paiement forfai-taire fait une fois pour toutes, et
puisqu'il demeure invariable, qu'il y ait ou non usage du droit concédé, on
pourrait conclure que ce paiement ne sera pas assujetti à la retenue à la
source.
Le Ministère du Revenu, dans son Bulletin d'Interprétation IT-303 exprime
l'opinion contraire. En effet, il estime que les mots "loyer" et redevances" ont
un sens large et ne se limitent pas nécessairement à des paiements effectués
périodiquement. Ils peuvent, dans certaines circonstances, comprendre des
paiements uniques ou forfaitaires. Le Ministre estime qu'en général, un loyer
ou une redevance est une somme versée aux propriétaires d'un bien en
contrepartie du droit d'utiliser celui-ci durant une période donnée. Dans la
plupart des cas où une redevance ou un loyer est payé, c'est le propriétaire
du bien utilisé par la personne effectuant le paiement qui garde le titre de
propriété.
Toutefois, si le bien est vendu et que le paiement dépend de l'utilisation du
bien ou de la production qui en résulte, le paiement sera assujetti à l'impôt en
vertu de l'article 212(1)(d)(v) à moins qu'il ne s'agisse d'un terrain agricole.24 Il
est à noter que le Ministère du Revenu ne considérera pas les paiements pour
24
IT 303 paragraphe 7, voir aussi paragraphes 11 et 12.
l'achat intégral d'un brevet ou pour obtenir du détenteur le transfert intégral
d'une franchise, comme assujettis à la retenue à la source. Ce n'est donc
que dans le cas d'une concession de licence que le problème
d'interprétation subsiste. D'après Irene M. Anthony, qui a fait une étude
remarquable sur les conséquences fiscales des licences ou concessions25, la
jurispru-dence ne donnerait pas clairement raison au Ministre du Revenu
National. Elle estime que si le paiement forfaitaire était structuré de façon à
n'avoir aucune relation avec un élément périodique, le montant ainsi payé
ne serait pas sujet à la retenue à la source. Nous avons par ailleurs déjà vu
que pour le conces-sionnaire, il importait que la concession qui lui était
accordée le soit pour une période de temps limitée. Cette condition est
essentielle pour se prévaloir de l'amortissement des biens de la catégorie 14.
Il semble donc ici que le concédant et le concessionnaire ont des intérêts
divergents; pour le concédant, il va de son intérêt que la concession soit
accordée pour une période indéterminée, de cette façon, tout paiement
forfaitaire reçu ne pourrait pas être considéré comme un loyer puisque la
notion même de "loyer" fait appel à la notion de "temps".
Pour le
concessionnaire, son intérêt est tout autre puisque s'il ne peut pas se prévaloir
de l'amortissement prévu pour les biens de la catégorie 14, le paiement sera
alors considéré comme une dépense en immobilisation admissible dont
l'amortissement est nettement moins avantageux.26
Les honoraires de supervision payés à un non-résident seront assujettis à la
retenue à la source à moins que l'on puisse établir qu'il s'agit-là d'honoraires,
tel que prévu à l'article 212(4) de la Loi de l'Impôt sur le Revenu. La
détermination de la nature exacte de ce paiement dépendra donc des
circonstances de chaque cas. L'article 212(1)(a) prévoit qu'une retenue à la
source devait être effectuée par le résident canadien qui paierait des
honoraires ou des frais de gestion ou d'administration à un non-résident. Or,
les honoraires de supervision pourraient tomber dans cette catégorie de
paiement et seraient alors assujettis à la retenue à la source. Pour ne pas être
ainsi assujettis, il faudrait que les honoraires soient conformes à l'exception
prévue à l'article 212(4) de la Loi.
Il est stipulé à cet article que les honoraires, frais de gestion ou
d'administration, ne comprennent pas une somme versée en paiement
intégral ou partiel d'un service fourni par la personne non-résidente si, au
moment où elle a fourni ce service, elle agissait dans le cadre normal de
l'exploitation d'une entreprise qui comportait la fourniture d'un tel service
25
26
Canadian Tax Journal, Vol. 28 No 6, page 752.
Quality Chekd Dairy Products Association v. M.N.R., 67, D.T.C. 5303; Western Electric Cny
Inc. v. M.N.R., 71, D.T.C. 5068; The Queen v. St.John Shipbuilding and Dry Dock Co. Ltd.,
80, D.T.C. 6272; The Queen v. Farmparts Distributing Ltd., 80, D.T.C. 6157.
contre versement d'honoraires, et si la personne non-résidente et le payeur
canadien n'avaient aucun lien de dépendance. Si une réelle supervision est
faite par le concédant et si les honoraires qu'il réclame pour rendre ce
service sont raisonnables, et si le concédant et le concessionnaire traitent à
distance, il y a alors de bons arguments à invoquer en faveur de la nonretenue de la taxe à la source.
Concernant le droit d'auteur, l'article 212(1)(d)(vi) prévoit une exception
importante, à savoir que, toute redevance ou paiement semblable à l'égard
d'un droit d'auteur au titre de la production ou de la reproduction d'une
oeuvre littéraire, dramatique, musicale ou artistique, ne sera pas assujettie à
la retenue à la source. Il y a lieu de se demander si cette exception ne
pourrait pas servir lors d'une concession de licence à rendre une partie des
paiements du concessionnaire non assujettie à la retenue à la source. Ceci
pourrait être envisagé dans la mesure où il serait stipulé dans le contrat de
licence qu'un paiement forfaitaire ou des redevances seront exigés en
contrepartie de la cession des droits d'auteur sur toute la documentation
faisant partie de l'ensemble ("package") offert sous licence par le concédant
non résident.
Généralement, accompagnant la concession d'une licence pour l'opération
d'une entreprise particulière, il existe une littéra-ture abondante quant au
standard de qualité, aux différentes recettes, formules, l'organisation du
personnel, les menus, les factures, etc... Toute cette littérature peut être
sujette à des droits d'auteur. Le concédant pourrait, pour une somme forfaitaire ou des redevances, accorder à son concessionnaire le droit de
reproduire, partiellement ou totalement cette oeuvre "littéraire" pour des fins
spécifiques, tel l'octroi des sous-licences, ou des fins internes dans plusieurs
établissements de la même entreprise, etc... Si les montants payés se
rattachent au transfert d'une partie des droits d'auteur, il est possible que le
Ministère du Revenu soit plus conciliant à accepter la non-retenue à la
source que s'il s'agissait du paiement d'un "droit d'entrée" ou de rede-vances
relatifs à l'obtention d'une franchise. Nous ne connaissons pas de situation où
l'interprétation suggérée ci-haut a été mise à l'épreuve devant les Tribunaux.
En dernier lieu, nous désirons attirer votre attention sur le Bulletin
d'Interprétation IT-477 publié le 30 avril 1981. Dans le Bulletin, le Ministère émet
son opinion quant à l'imposition des brevets, marques de commerce et droits
d'auteur.
ROBIC, un groupe d'avocats et d'agents de brevets et de marques de commerce voué
depuis 1892 à la protection et à la valorisation de la propriété intellectuelle dans tous les
domaines: brevets, dessins industriels et modèles utilitaires; marques de commerce, marques
de certification et appellations d'origine; droits d'auteur, propriété littéraire et artistique, droits
voisins et de l'artiste interprète; informatique, logiciels et circuits intégrés; biotechnologies,
pharmaceutiques et obtentions végétales; secrets de commerce, know-how et
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arbitrage; vérification diligente et audit; et ce, tant au Canada qu'ailleurs dans le monde. La
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