Je n`en n`ai rien à faire du groupe, de la promo. J`aime me dire d

Transcription

Je n`en n`ai rien à faire du groupe, de la promo. J`aime me dire d
Je n’en n’ai rien à faire du groupe, de la promo. J’aime me dire ça, pour me souvenir qu’on est avant tout des êtres. J’aime les situations bien menées. Dans la vie ce sera toujours plus fort. Mais au théâtre c’est plus que du voyeurisme, c’est du viol. On viole la vie. Et après les passages de doute (et encore…) on « possède ». On la viole parce que pour une fois on la maîtrise, on en fait ce qu’on veut et parfois c’est elle qui nous étonne après coup. Comme des grosses vagues vivantes et furieuses coincées dans un bassin. Violer quelqu’un c’est crime, violer la vie c’est de l’art. On chasse, c est un labeur jusqu’à ce qu’on dirige notre rêve (vraiment comme dans nos rêves où en une fraction de seconde on en devient maitre). Un jour j’ai vu un chien bouffer une poule. Il l’a vue, il l’a poursuivie et lui a brisé le coup. Et malgré le coup de pied que je lui ai mis dans le ventre (c’était une de mes poules), je ne pense pas être capable d’imaginer l’état orgasmique du chien à ce moment là : l’instinct animal satisfait. Etre fier de soi en sortant de scène, ça doit être ça. J’utilise exprès des mots comme le viol, la chasse et la dévoration. Mais c’est (selon moi) en partant de cette violence interne qu’on pourra parler d’amour aux gens qu’on aime, et se permettre d’anéantir ce et ceux qu’on hait. Etre dans une école de théâtre, en fait c’est contradictoire pour moi. Ce que j’y apprécie, c’est d’y rencontrer certaines personnes. Et de savoir quel style, quelle race (et je parle de psychologie, de personnalité) de personnes avec qui je ne voudrai plus jamais trainer, car avec ce genre de gens on ne fait justement que « trainer ». Trainer dans un bar… oui, mais c’est tout. Evidemment ici pas de noms, mais on apprend à faire attention aux autres (et donc aussi à s’en méfier). C’est important pour moi de le dire : quand je vais au théâtre je m’ennuie. Je n’aime pas le théâtre en général (les pièces qui m’ont marquées depuis que je suis né je les compte sur les doigts de la main). Et bizarrement si je ne joue pas plus tard, j’ai bien peur de me traiter comme on se traite dans le mal. Mais justement c’est peut être que de la peur parce que j’en sais rien du tout et qu’en fait je n’en n’aurai vraiment plus rien à faire et qu’enfin je pourrai faire des doigts d’honneur à tous comme un chien qui bouffe une poule et que peut être que ce serait une misère minable de vouloir à tout prix être ce qu’on voulait être à 20 ans. En fait l’école, c’est soit se parer, soit c’est avoir trop peur pour sortir du jardin. Et peut être qu’il faut se dire un peu de tout ça, quoi qu’on en fasse. Je suis très mécontent d’avoir écrit tout ça, parce que c’était obligé. Et même si je reste tranquille, je suis le même gosse que j’étais à la fac, à l’école et qui déteste les classes, les petits bureaux, les devoirs et les autres gosses immondes qui se battent pour s’entre jouir avec des profs ragnagna de ragnagnères qui parlent de fleures fluo quand tous on patine dans des nids de serpents. J’ai peut être l’air de geindre, mais si j’étais mécontent je serais parti. Et puis ce serait craignos de ne pas vouloir sortir, en finir et changer. Sinon, c’est trois ans pour rien. Le travail avec François j’en parlerai plus tard. Pour le moment je lui fais confiance. Et même si je n’aime pas tout dans le projet, c’est génial de bosser avec lui. Je suis content (mais effrayé) d’aller jouer. (Boris Balsan carnet de bord du 29/10/2015)