Biotechnologie : Contrastes et espoirs

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Biotechnologie : Contrastes et espoirs
Dossier Biotech
Biotechnologie
Contrastes
et espoirs
C’est sur fond de tornade financière que le 7ème Panorama de l’industrie des
biotechnologies en France confirme que le secteur ne demande qu’à décoller.
Toujours un effet JEI
Cette septième édition confirme en effet la maturité du
secteur, avec une proportion de plus en plus importante de
sociétés ayant franchi le cap des dix ans d’existence. Cellesci représentent 11 % de l’échantillon en 2007 et 20 % en
2008. Si les proportions d’entreprises âgées de cinq à dix
ans (41 % de l’échantillon) et de sociétés de moins de trois
ans (26 % de l’échantillon) restent stables, France Biotech
relève néanmoins un ralentissement des projets de création
de nouvelles entreprises, confirmé par la diminution de
leur nombre observée par les incubateurs. Une très grande
majorité de ces entreprises (66 %) bénéficie du statut de
Jeune entreprise innovante (JEI) qui permet notamment
à des PME de moins de huit ans réalisant l’essentiel de
leurs travaux dans la R&D de bénéficier d’exonération de
charges sociales patronales pour ses salariés participant à
l’activité de recherche. La mesure qui a déjà démontré son
impact positif pour favoriser la création d’entreprises high
tech exerce également une influence non négligeable sur
l’emploi en R&D. La croissance de ces derniers effectifs y
reste ainsi plus rapide que la croissance des effectifs totaux.
Globalement, ils ont augmenté de 5 % entre 2006 et 2007
contre 13 % entre 2005 et 2006. Au niveau des emplois
de R&D, qui représentent plus de la moitié des personnels
de ces sociétés (50,5 %), la progression a atteint 6 % cette
année (+ 17 % en 2005-2006).
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PHARMACEUTIQUES - NOVEMBRE 2008
Effets cancéropole et Alzheimer
A l’instar des biotechs internationales, la santé reste l’activité prédominante des sociétés françaises et occupe 40 %
des entreprises de l’échantillon. Au total, les 132 entreprises concernées disposent d’un portefeuille de 227 produits
thérapeutiques (médicaments, dispositifs médicaux…)
dont une centaine a atteint le stade du développement clinique (phases I, II ou III). Il faut y voir un autre signe de la
maturité croissante des sociétés françaises : l’augmentation
du nombre de produits en phase III. Ces derniers ne représentent que 4 % de la totalité du portefeuille de produits
en 2005-2006, mais leur proportion atteint dorénavant
Graphique 1 : Nombre de produits thérapeutiques en développement enregistrement
et commercialisation, années 2005 à 2008
118
108
103
2005
2006
2007
2008
90
30
41
39
30
23
41
31
32
15
Préclinique
11
Phase 1
10
7
Phase 2
7
13
4
7
Phase 3
Enregistrement
0
2008
2007
Commercialisation
2006
2005
SOURCE : FRANCE BIOTECH – PANORAMA 2007-2008
DE L’INDUSTRIE DES BIOTECHNOLOGIES EN FRANCE
L
’exercice, devenu traditionnel à l’occasion d’Eurobio, de présentation du Panorama de l’industrie des
biotechnologies en France, n’a pas été des plus aisés.
Dans un environnement financier où l’irrationnel
dicte sa loi, chacun se demande de quoi demain sera fait.
Alors que chaque année, ce panorama réalisé par France
Biotech dépeint les principales caractéristiques et évolutions du secteur, sa dernière édition revient sur une situation où maturité et visibilité d’une industrie innovante et
créatrice de valeur contrastent avec un gel des investissements boursiers1.
vrés l’ont été à des sociétés de ce secteur, nano-biotechnologies et alimentation humaine comptant
Graphique2 : Les plateformes utilisées par les sociétés
respectivement 16 % et 10 % de ce total. Les infrançaises de biotechnologies
formations recueillies sur les plateformes technoBiologie cellulaire
logiques et leurs conditions d’utilisation s’avèrent
Biologie moléculaire
aussi particulièrement révélatrices (voir graphique
Biologie structurale
2). Les sociétés de biotechnologie françaises disIngénierie / Production
posent ainsi en proportions significatives de plate6%
3%
Microbiologie
4%
15%
formes de biologie cellulaire (15 %) et moléculaire
7%
Drug discovery
3%
(15 %), de chimie/biochimie (9 %), de modèles
15%
Chimie/Biochimie
2%
animaux (9 %), de drug discovery (8 %) et de
Modèles animaux
microbiologie (7 %). Ce dernier résultat étant lié,
Diagnostic
note encore France Biotech, au développement
4%
Banque
1%
de traitements des maladies infectieuses. Au-delà
9%
9%
Puces
de la nature des technologies ainsi accessibles aux
9%
5%
8%
Imagerie, cytométrie
sociétés françaises, leur utilisation se révèle aussi
Analytique
riche d’enseignement sur leurs business model. En
Bioinformatique
effet, indique France Biotech, « ces plateformes
Autres
sont utilisées à 60 % pour la recherche propriétaire, à 35 % pour la production et 71 % pour la
SOURCE : FRANCE BIOTECH – PANORAMA 2007-2008 DE L’INDUSTRIE DES BIOTECHNOLOGIES EN FRANCE
fourniture de services. Sachant que 21% des sociétés de l’échantillon ont une activité exclusive de
7 % (voir graphique 1). Près de la moitié de ces produits R&D sous contrat, 50 % des plateformes seraient donc
se concentrent sur quatre aires thérapeutiques majeures. La utilisées pour une activité mixte de R&D propriétaire et de
cancérologie tient la vedette avec 15 % des produits théra- R&D sous contrat ».
peutiques et 14 % des outils diagnostic en développement.
Derrière ce résultat, il faut probablement voir l’impact du Retour du capital risque
Plan cancer 2003-2007 et des actions engagées par les can- Après une période inédite en France où quelque 517 millions
céropôles. Arrivent ensuite à égalité en termes de produits d’euros ont été levés sur les marchés boursiers en 2007, le
thérapeutiques en développement les maladies infectieuses balancier revient clairement dans le camp du capital-risque.
et l’immunologie avec chacune 12 %. Enfin, la neurologie Partenaires historiques de cette industrie, ces sociétés sont
et les pathologies du système nerveux central concentrent redevenues ses sources majeures de financements (88 % du
9 % de ces candidats contre 7 % l’année précédente. Une total, soit 98 millions d’euros) au premier semestre 2008.
progression qui, relève France Biotech, porte manifeste- Aussi, les évolutions boursières actuelles laissent-elles prément la marque du plan Alzheimer qui prévoit d’engager sager que le capital risque, comme l’industrie pharmaceu1,6 milliard d’euros sur cinq ans pour accélérer la R&D de tique, vont jouer un rôle essentiel pour cette industrie dans
nouveaux traitements et améliorer la prise en charge des les mois à venir. Les résultats sont là, ainsi que le souligne
malades. Pour finir, le panorama illustre la place croissante aussi la dernière étude Precepta2. Avec un portefeuille de
du diabète et de l’obésité parmi les produits en dévelop- produits en croissance dont l’industrie pharmaceutique est
pement dans les sociétés françaises, à l’instar de l’étude de de plus en plus dépendante et un dynamisme évident des
l’Institut national de la propriété industrielle sur les biomé- alliances pharma-biotech notamment en Europe, les modicaments qui montre des progressions spectaculaires du tifs d’optimisme existent, mais attention à ne pas fragiliser
nombre de demandes de brevets liés à ces pathologies.
et déstabiliser cette industrie des biotechnologies dont la
bonne santé conditionne notre indépendance sanitaire et
Des brevets rentrés dans les mœurs
thérapeutique. ■
A l’évidence, les brevets font maintenant partie intégrante
de la culture des entrepreneurs biotech français, ainsi qu’en
Anne-Lise Berthier
attestent les résultats de cette enquête. Près de 80 % des
Rédactrice en chef
sociétés actives dans la R&D de nouveaux produits ont
de BioPharmaceutiques
déposé des demandes de brevets. Elles n’étaient que 60 %
dans l’enquête de 2003. Se développe également la prise de
conscience de l’intérêt de disposer d’une couverture géogra- (1) Le questionnaire sur lequel se base cette étude réalisée entre
phique large. Sur quelque 4 400 demandes déposées, 55 % mai et septembre 2008 par France Biotech a été adressé à
le sont simultanément en France et en Europe et 48 % en plus de 500 sociétés exerçant une activité dans les sciences du
France, en Europe et aux Etats-Unis. Sans surprise, ce sont vivant en France. Sur les 178 réponses reçues, 149 ont pu être
les sociétés les plus anciennes qui concentrent la majorité incluses dans l’enquête. Ces chiffres étaient respectivement de
134 et 113 dans l’enquête 2007.
des brevets. 67 % des 2 654 brevets délivrés sont détenus (2) « Les sociétés de biotechnologie en France
par des entreprises de plus de 10 ans et la prépondérance de – Quels modèles économiques de référence ? », Precepta groupe
la santé humaine se reflète ici aussi. 55 % des brevets déli- Xerfi – Juillet 2008.
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NOVEMBRE 2008 - PHARMACEUTIQUES