Erik Prairat – Professeur Nancy 2 La sanction en éducation – 2011

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Erik Prairat – Professeur Nancy 2 La sanction en éducation – 2011
Erik Prairat – Professeur Nancy 2
La sanction en éducation – 2011 (collection Que sais-je ?)
Nous ne savons pas sanctionner : peu d’ouvrages pertinents entre 1970 et 2000.
Kant (opuscule en 1803) : « L’horizon de l’éducation, c’est rendre libre. Or, on ne peut pas rendre
libre sans utiliser la contrainte »
 Comment contraindre l’autre pour le rendre libre ?
Pour quelles raisons doit-on considérer la sanction en éducation ?
1. Réarticuler sanction et éducation
Ces 30 dernières années, nous étions dans des idéologies de la substitution.

Conflit  dialogue

Contrainte  contrat

Sanction  empathie
 Attention ! Il ne faut pas éliminer conflit, contrainte et sanction.
2. Les dysfonctionnements institutionnels
- Punir c’est exclure (recours à l’exclusion)  Pas d’harmonie dans les pratiques : « on
compense un illégalisme par un autre »
3. Transformation de la légitimité de l’école : il faut aujourd’hui s’expliquer, justifier ses choix
(dans de nombreuses professions, qui n’avaient pas à le faire avant)
4. La séduction du paradigme (modèle) juridique ne nous fait pas faire l’économie d’une pensée.
Avant, c’était le corpus psycha-psychologique qui fondait la réflexion autour de la sanction.
Attention ! L’école est un lieu spécifique :
a.
b.
c.
d.
De transmission et d’éducation (monde bicolore). Ce qui est enseigné à l’école est consigné dans des
programmes, des textes.
Institution qui se cale entre l’espace privé et l’espace public : l’école est une sphère médiane, un espace
transitionnel.
Un lieu d’exercice. Alain : « les erreurs de calculs à l’école n’ont jamais ruiné personne »  on peut se
tromper, on peut faire des bétises.
Un espace hospitalier.
On ne peut pas importer mécaniquement les principes de droit pénal car l’école est un lieu particulier.
Qu’est-ce qu’une sanction éducative ? Qu’est-ce qui légitime le droit de punir dans un lieu
d’éducation ?
 Distinguer le droit et la morale. La morale n’est pas là pour punir !
 Fonder la sanction, c’est permettre à chacun de connaître les règles de l’espace social. Elles
doivent être écrites, lisibles, en respectant 2 principes :
-
Principe d’identité entre les personnes : Paul vaut Mohamed vaut Sophie.
Principe de mutualité entre les personnes : « vos devoirs sont les miens, mes droits sont
les vôtres »
Penser la sanction, c’est penser à priori le cadre socialisant et en aval la question éthique
(Qu’est-ce que je me permets ? Qu’est-ce que je ne me permets pas ?).  Renvoie à la
déontologie de l’enseignant.
A quelles fins doit-on sanctionner ?
Triple visée :
1. Visée politique : une sanction n’est pas une ruse pour réaffirmer le pouvoir de l’adulte, sa
position dominante, mais pour rappeler la centralité de la règle. Réaffirmer la cohérence
et l’identité du groupe.
2. Visée éthique : la sanction responsabilise un sujet en devenir.
3. Visée psychologique : une sanction est un coup d’arrêt, pour signifier une limite. Puis,
elle doit offrir une ouverture. « La sanction n’est pas une fin mais un nouveau départ ».
4 Caractéristiques d’une sanction éducative
Différence entre règles régulatrices, postérieures à la pratique sociale (ex. code de la route),
et règles constitutives, qui créent la pratique (jeu d’échec).
Au-delà des préceptes juridiques : proportionnalité, gradation.
1. Une sanction doit s’adresser à un sujet.
- Oublier le spectaculaire (l’exemple, l’édification) mais plutôt gravité, solennité
- Pas de sanction muette. Toutes les sanctions doivent être expliquées, comprises
(comprendre n’est pas nécessairement admettre) si possible, et doivent rappeler
l’interdit. Il faut bannir l’idée de l’immédiateté (dérive béhavioriste), et penser que
l’enfant peut comprendre tardivement.
L’action éducative ne relève pas d’une théorie de l’efficacité. La parole crée le lien entre
la sanction et la transgression, elle est le contraire de la vengeance (toujours silencieuse).
2. La sanction porte sur des actes.
« On sanctionne un vol, pas un voleur » (objectivation)
Il faut restreindre le domaine du punissable à des comportements. « Ce que tu as fait, c’est
inacceptable ». (les vertus de la colère maîtrisée, contenue)
Le respect de la personne est inconditionnel. Tout le monde a droit au respect (éthique) , à
différencier de la tolérance (politique) qui porte sur des actes.
3. Une sanction éducative doit prendre une forme privative.
Privation  frustration
Priver :
-
D’un droit
D’un avantage
D’une opportunité
D’un possible… etc.
Le ressort de la sanction n’est pas la honte mais la frustration.
4. Une sanction éducative doit être accompagnée d’un geste, d’une parole, d’une
réparation.
Resocialisation
- La peine est subit, la réparation est un agir
- Lien entre réparer et se réparer
- Renouer avec le groupe, la victime
CONCLUSION
Appliquer une sanctin éducative, c’est …
-
Une occasion de réaffirmer une règle, un principe
Une réponse : réaction et explication
Interpellation du jeune dans son rapport à l’altérité (à l’autre, reconnaissance de l’autre
dans sa différence)