Cour de cassation de Belgique Arrêt
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10 DÉCEMBRE 2014 P.14.1203.F/1 Cour de cassation de Belgique Arrêt N° P.14.1203.F 1. M.R.-A., M., C., prévenue, 2. SANOFI, société anonyme, dont le siège est établi à Diegem (Machelen) Culliganlaan, 1C, civilement responsable, demandeurs en cassation, ayant pour conseil Maître Philippe Loix, avocat au barreau de Liège. I. LA PROCÉDURE DEVANT LA COUR Les pourvois sont dirigés contre un jugement rendu le 19 juin 2014 par le tribunal correctionnel de Liège, division Verviers, statuant en degré d’appel. La demanderesse R.-A. M. invoque quatre moyens et la société anonyme Sanofi en fait valoir un, chacune dans un mémoire. Ceux-ci sont joints au présent arrêt, en copie certifiée conforme. Le président de section Frédéric Close a fait rapport. 10 DÉCEMBRE 2014 P.14.1203.F/2 L’avocat général Raymond Loop a conclu. II. LA DÉCISION DE LA COUR A. Sur le pourvoi de R.-A. M. : Sur le premier moyen : Le moyen invoque la prescription de l’action publique. Il soutient que l’article 3 de la loi du 25 avril 2014 portant des dispositions diverses en matière de justice n’est entré en vigueur qu’après l’expiration du second délai de prescription d’un an qui avait pris cours à la date du dernier acte interruptif, de sorte que ce second délai n’a pu être suspendu en application de l’article 24, alinéa 4, du titre préliminaire du Code de procédure pénale. Dans sa rédaction de l’article 7 de la loi du 14 janvier 2013 portant des dispositions fiscales et autres en matière de justice, cet article 24, alinéa 4, énonçait que, « lorsque la juridiction de jugement sursoit à l’instruction de l’affaire en vue d’accomplir des actes d’instruction complémentaires », la prescription est suspendue à partir du jour où « la juridiction d’instruction » décide de remettre l’affaire. L’intervention d’une juridiction d’instruction étant, en règle, exclue lorsque la juridiction de jugement est saisie de l’examen de la cause, le texte comportait une erreur manifeste que rectifie l’article 3 de la loi du 25 avril 2014 précitée. Celui-ci remplace désormais les mots « juridiction d’instruction » par « juridiction de jugement ». Apportée par une loi rectificative du texte original, cette correction législative rétroagit, de sorte que la disposition de l’article 24, alinéa 4, du titre préliminaire du Code de procédure pénale, est censée signifier, depuis son entrée en vigueur le 10 février 2013, que, lorsque la juridiction de jugement sursoit à l’instruction de l’affaire en vue d’accomplir des actes d’instruction, la prescription est suspendue à partir du jour où « la juridiction de jugement » 10 DÉCEMBRE 2014 P.14.1203.F/3 décide de remettre l’affaire jusqu’à la veille de la première audience où l’instruction de l’affaire est reprise. Il en résulte que, contrairement à ce que le moyen soutient, l’action publique n’était pas prescrite à la date du jugement attaqué. En effet, soumis au délai de prescription d’un an prévu par l’article 68 de la loi relative à la police de la circulation routière, les faits ont été constatés le 30 août 2012. Le délai originaire a été interrompu pour la dernière fois le 3 juin 2013, par l’apostille du procureur du Roi de Liège renvoyant l’exploit de l’huissier de justice au parquet de Verviers. Le second délai d’un an, qui a pris cours à cette date, a ensuite été suspendu, en application de la cause de suspension de la prescription applicable dès le 10 février 2013 aux procédures en cours. Cette suspension a duré du 6 mars 2014, date à laquelle le jugement ordonnant des devoirs complémentaires a été rendu, au 21 mai 2014, veille de l’audience à laquelle le tribunal a repris l’instruction de l’affaire. Le terme du second délai de prescription étant ainsi prolongé d’une durée égale à la période durant laquelle la prescription a été suspendue, l’action publique n’était pas éteinte le 19 juin 2014. A cet égard, le moyen ne peut être accueilli. Pour le surplus, le moyen fait valoir que la demanderesse n’a pas été invitée à se défendre sur la question résultant, selon elle, de l’application de la loi du 25 avril 2014, entrée en vigueur le 24 mai 2014. Dès lors qu’il ne calcule pas expressément le délai de prescription, le jugement ne comporte aucune considération relative à l’application de cette loi. 10 DÉCEMBRE 2014 P.14.1203.F/4 Dans la mesure où il est étranger à la décision attaquée, le moyen est irrecevable. Pour le surplus, le juge doit vérifier d’office et, partant, en l’absence même de conclusions, si l’action publique est recevable et si elle n’est pas éteinte au moment où il statue. Dans la mesure où il considère qu’en n’ayant pas invité la demanderesse à s’expliquer sur la prescription de l’action publique, le tribunal correctionnel a violé les droits de la défense, le moyen manque en droit. Sur le deuxième moyen : Dans ses conclusions, la demanderesse a sollicité la production du manuel décrivant les conditions d’emploi du cinémomètre-radar, pour permettre au tribunal correctionnel de s’assurer que toutes les prescriptions du fabricant indiquées dans celui-ci avaient été respectées. Pour rejeter cette demande, le jugement répond toutefois à ces conclusions que les pièces déposées dans le cadre de la réouverture des débats sont suffisantes pour emporter la conviction du tribunal quant à la régularité du contrôle, qu’aucun élément du dossier ne permet de mettre en doute que l’appareil utilisé en l’espèce n’ait pas fonctionné comme il le devait, que l’appareil de mesure était en ordre de validité, qu’il a été installé et utilisé conformément à la législation et que l’agent avait la formation nécessaire requise. Le moyen manque en fait. Sur le troisième moyen : Le moyen reproche au jugement de ne pas répondre aux conclusions de la demanderesse, selon lesquelles celle-ci ne pouvait circuler à la vitesse qui lui 10 DÉCEMBRE 2014 P.14.1203.F/5 est reprochée, dès lors que le moteur de son véhicule subissait un problème d’alimentation en carburant. Ayant déclaré la prévention d’excès de vitesse établie sur la base de constatations fondées sur des preuves matérielles fournies par des appareils fonctionnant automatiquement, les juges d’appel ont régulièrement motivé la condamnation de la demanderesse sans être tenus de répondre à une défense qui devenait sans pertinence en raison de leur décision. Le moyen ne peut être accueilli. Sur le quatrième moyen : Il résulte du dispositif du jugement que, contrairement à ce qu’allègue le moyen, le tribunal correctionnel, qui a aggravé la peine, a statué pour ce faire à l’unanimité de ses membres. Procédant d’une lecture incomplète de la décision attaquée, le moyen manque en fait. Le contrôle d’office Les formalités substantielles ou prescrites à peine de nullité ont été observées et la décision est conforme à la loi. B. Sur le pourvoi de la société anonyme Sanofi : Sur le moyen : Le moyen reproche au jugement de statuer sur l’action exercée par le ministère public contre la demanderesse, agissant en qualité de civilement responsable, alors que celle-ci n’a pas été citée en degré d’appel devant le tribunal correctionnel. 10 DÉCEMBRE 2014 P.14.1203.F/6 La juridiction d’appel est saisie par l’exercice même du recours, et non par la citation directe qui convoque ultérieurement les parties à l’audience pour leur permettre d’y exercer contradictoirement leur défense. Il ressort des pièces de la procédure - que la demanderesse a fait une déclaration d’appel au greffe du tribunal de police ; - que le procureur du Roi a interjeté appel à charge de la demanderesse par déclaration faite au même greffe conformément à l’article 203, § 1er, du Code d’instruction criminelle, et non en application de l’article 205 de ce code ; - qu’à l’audience du 22 mai 2014 à laquelle l’examen de la cause a été repris ab initio après exécution des devoirs complémentaires mentionnés dans le jugement d’avant dire droit du 6 mars 2014, la demanderesse était représentée par son conseil qui a déposé des conclusions au nom de la prévenue mais aussi de la demanderesse. Il s’ensuit que, d’une part, le tribunal correctionnel était régulièrement saisi de l’appel de la demanderesse et de celui du ministère public dirigé contre elle mais aussi, d’autre part, que la demanderesse a pu faire valoir devant les juges d’appel tous les éléments utiles à sa défense. A cet égard, le moyen ne peut être accueilli. PAR CES MOTIFS, LA COUR Rejette les pourvois ; Condamne chacune des demanderesses aux frais de son pourvoi. 10 DÉCEMBRE 2014 P.14.1203.F/7 Lesdits frais taxés à la somme de soixante-sept euros septante et un centimes dus. Ainsi jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre, à Bruxelles, où siégeaient Frédéric Close, président de section, Benoît Dejemeppe, Pierre Cornelis, Gustave Steffens et Françoise Roggen, conseillers, et prononcé en audience publique du dix décembre deux mille quatorze par Frédéric Close, président de section, en présence de Raymond Loop, avocat général, avec l’assistance de Fabienne Gobert, greffier. F. Gobert F. Roggen G. Steffens P. Cornelis B. Dejemeppe F. Close