La certification ISO 9000 est
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La certification ISO 9000 est
© ISO Management Systems, www.iso.org/ims DOSSIER La certification ISO 9000 est-elle rentable ? « La recherche d’une certification ISO 9000 est-elle rentable pour les entreprises ? » Si cette question est aussi vieille qu’ISO 9000, elle n’en demeure pas moins essentielle et, dans une large mesure, sans réponse ! La nouveauté vient, à notre connaissance, de la combinaison de données et de méthodes adoptée par les auteurs de cet article, quatre universitaires qui enseignent dans des écoles de gestion des États-Unis et d’Espagne pour apporter une réponse. Une étude américaine analyse les données du rendement financier PAR C HARLES J. C ORBETT, M ARÍA J. M ONTES , D AVID A. K IRSCH ET M ARÍA J OSÉ A LVAREZ-G IL Nous établissons que la certification semble véritablement induire une amélioration du rendement financier, Ils analysent les données du rendement financier d’entreprises certifiées ISO 9000 dans trois secteurs économiques américains sur une période de 10 ans (1988-1997), par rapport à celles de groupes de contrôle, constitués par des entreprises non certifiées des mêmes secteurs qui avaient une performance économique comparable à celle des premières, avant le lancement de programmes ISO 9000. ISO 9000 a-t-elle créé une différence positive en matière de rendement financier ?... mesuré par le rendement de l’actif (RA) ISO Management Systems – juillet-août 2002 25 © ISO Management Systems, www.iso.org/ims DOSSIER Les auteurs Charles J. Corbett The Anderson School at UCLA, États-Unis E-mail charles.corbett@ anderson.ucla.edu María J. Montes Universidad Carlos III, Madrid, Espagne E-mail [email protected] David A. Kirsch R.H. Smith School of Business, University of Maryland, États-Unis E-mail [email protected] María José Alvarez-Gil Universidad Carlos III, Madrid, Espagne E-mail [email protected] 26 L certification semble véritablement a mise en œuvre d’un système de induire une amélioration du rendement management de la qualité et sa cerfinancier, mesuré par le rendement de tification par rapport à l’une des normes l’actif (ci-après le RA). ISO 9000 n’est pas exactement chose Plus précisément, nous établissons aisée. Si les coûts réels diffèrent d’une que les entreprises qui n’ont pas recherentreprise à l’autre, le processus de cerché une certification ont fait l’expérientification requiert inévitablement d’imce de dégradations substantielles du portants efforts en matière de concepRA, de la productivité et des ventes, tion, d’implantation et de documentation alors que les entreprises certifiées ont de processus appropriés, ce qui entraîne en général fait en sorte d’éviter de tels des coûts directs et indirects associés phénomènes de déclin. En d’autres teraux honoraires de conseil et d’audit, à la mes, les entreprises qui ont obtenu la formation du personnel, etc.. Le jeu en certification n’ont pas, en moyenne, vaut-il la chandelle ? connu une amélioration de leur rendePlus particulièrement, comment ment absolu, mais ont vu leur rendel’investissement dans une certification ment relatif s’améliorer substantielleISO 9000 peut-il être rentable ? Pour ment, par comparaison certains, elle engendre avec leurs homologues une amélioration des non certifiés. processus internes, qui Les entreprises qui n’ont Comment en sompermet à son tour une pas recherché une mes-nous arrivés à productivité supérieucette conclusion? Nous re et des coûts moincertification ont fait décrivons ci-dessous dres. Pour d’autres, les clients exigent de plus l’expérience de dégradations nos données et méthodes puis nous présenen plus ISO 9000 et la substantielles du RA, tons et examinons nos certification devrait résultats plus en proaider à maintenir ou à de la productivité fondeur (voir Corbett augmenter la part de et al. [2002] pour une marché d’une entreet des ventes, description plus détailprise. D’autres encore alors que les entreprises lée des données et des contestent ces avanméthodes adoptées). tages, affirmant que la certifiées ont en général Nous avons eu norme est trop générecours à deux sources rique pour produire fait en sorte d’éviter de principales d’informades améliorations aution. En premier lieu, thentiques. De leur tels phénomènes de déclin WorldPreferred (www. point de vue, une corworldpreferred.com) rélation positive entre nous a aimablement communiqué ses la certification ISO 9000 et le rendedonnées sur 21 482 certifications ISO ment financier ne ferait que refléter le 9000 délivrées aux États-Unis jusqu’en fait que les entreprises qui sont mieux 1998. Ces données nous donnent le nom dirigées rechercheront plus probableet la localisation du site certifié, la date ment une certification ISO 9000. Quel de la certification et d’autres informacamp a raison ? tions qui ne jouent pas un rôle décisif Il est surprenant qu’aucune réponse dans notre étude. franche à cette question n’ait encore été En second lieu, nous avons utilisé la donnée, bien que les normes existent base de données Compustat donnant depuis 1987 et que plus de 500 000 certides informations financières, telles fications aient été délivrées dans le qu’elles ont été rapportées à la monde. Les faits anecdotiques abondent Securities and Exchange Commission à la fois pour conforter et contredire (SEC), sur toutes les entreprises cotées l’hypothèse d’un rendement financier en bourse aux États-Unis, de 1988 à amélioré en quelque manière grâce à 1997. ISO 9000. Pour mesurer les incidences finanDans cet article, nous examinons cières de la certification ISO 9000, nous l’effet de la certification ISO 9000 sur avons dû fusionner ces deux ensembles des entreprises cotées en bourse aux de données. Pour toute entreprise figuÉtats-Unis et nous établissons que la ISO Management Systems – juillet-août 2002 © ISO Management Systems, www.iso.org/ims DOSSIER rant dans notre base de données financières, il a fallu établir si elle avait reçu une certification ISO 9000, et quand. Cette mise en correspondance a été tout sauf directe : les deux bases de données n’ont pas la même méthode d’identification des entreprises ou des sites et nous avons dû en fin de compte recourir à divers processus manuels. Cet effort, qui a duré de 1999 à 2001, a permis de produire une base de données comprenant 7 598 entreprises figurant dans Compustat qui avaient reçu un ou plusieurs certificats ISO 9000 avant 1998. Nous nous sommes centrés sur les trois secteurs industriels comptant le plus grand nombre de certificats ISO 9000 et correspondant aux codes SIC 28 (produits chimiques et produits associés), 35 (machines industrielles et commerciales et équipements informatiques) et 36 (équipements et composants électroniques et autres équipements et composants électriques, à l’exclusion des équipements informatiques). Le tableau 1 contient une répartition détaillée de notre échantillon final. Pour SIC 28, le résultat final est un ensemble de 74 entreprises ayant reçu leur première certification ISO 9000 jusqu’en 1997; pour SIC 35 et 36, notre échantillon final comprend respectivement 132 et 167 entreprises certifiées. Nous avons utilisé plusieurs mesures de performance. L’analyse principale est centrée sur le rendement financier, tel qu’il est mesurée par le rendement de l’actif (RA – quotient du bénéfice d’exploitation avant dépréciation, par le total de l’actif). Une autre mesure de plus en plus employée est le ratio de Tobin, ou rapport entre la valeur marchande de la créance en cours et le coût de remplacement de l’actif, qui mesure la valeur de remplacement de l’actif. Chung et Pruitt (1994) proposent d’approximer le ratio de Tobin par (MVE + PS + DEBT) / TA, où MVE est la valeur marchande des capitaux propres, PS la valeur liquidative du capital-actions privilégié, DEBT la valeur du passif à court terme après déduction des éléments de l’actif à court terme plus la valeur comptable de la dette à long terme, et TA la valeur comptable du total de l’actif de l’entreprise. Des valeurs du ratio de Tobin supérieures à 1 signifient que l’entreprise retire davantage de valeur de ses actifs qu’elle n’en obtiendrait en les vendant. Nous cherchons aussi à savoir si la certification conduit à des améliorations internes en productivité ou à des améliorations externes en commercialisation. Pour examiner l’effet sur la productivité, nous comparons si le coût des produits vendus exprimé en pourcentage des ventes (CPV/VENTES) s’est amélioré après la certification, c’est-àdire s’il a diminué par rapport au groupe de contrôle. Pour examiner l’effet sur la commercialisation, nous établissons par comparaison si le ratio de rotation de l’actif, c’est-à-dire le quotient des ventes par les actifs (VENTES/ACTIFS), a augmenté après la certification par rapport au groupe de contrôle. Ces mesures sont SIC 28 SIC 35 SIC 36 1990 4 2 0 1991 2 5 6 1992 14 15 11 1993 16 25 35 1994 15 16 32 1995 13 27 34 1996 4 23 26 1997 6 19 23 Total 74 132 167 Tableau 1 : Nombre d’entreprises certifiées ISO 9000 de notre échantillon, par année de la première certification, dans les trois secteurs industriels américains comptant le plus grand nombre de certifications ISO 9000 ISO Management Systems – juillet-août 2002 27 © ISO Management Systems, www.iso.org/ims DOSSIER toutes deux étroitement liées au RA : des améliorations de productivité ou de la rotation de l’actif devraient immédiatement entraîner des améliorations du RA. Méthodologie de l’étude d’évènement Nous nous sommes centrés sur les trois secteurs industriels comptant le plus grand nombre de certificats ISO 9000 28 Pour examiner les effets de la certification ISO 9000 sur le rendement, nous avons adopté la méthodologie dite de l’étude d’évènement pour détecter les améliorations dans la performance d’exploitation. Pour l’essentiel, une étude d’évènement compare le rendement d’un groupe d’entreprises qui ont fait l’objet d’un évènement particulier (en l’occurrence, une première certification ISO 9000) avec le rendement d’un groupe comparable d’entreprises qui n’ont pas connu cet évènement. Cette méthode, d’usage courant en recherche financière, a aussi été employée pour montrer que le TQM (management total de la qualité) améliore le rendement des entreprises (Hendricks et Singhal, 1997). Ce type d’étude exige que l’on spécifie la période de l’évènement, dans notre cas la période durant laquelle ISO 9000 est mise en œuvre. Une mise en œuvre type prenant entre 6 et 18 mois, nous avons défini la période de l’évènement comme étant l’année de la première certification (année t) et l’année précédant immédiatement la certification (année t – 1). La période précédant la période de l’évènement (année t – 2) sert à définir le groupe de contrôle. Les années suivant la période de l’évènement (années t + 1 à t + 3) sont utilisées pour vérifier si les entreprises certifiées ont connu un rendement supérieur (ou excédentaire) en comparaison du groupe de contrôle. Par exemple, si une entreprise a obtenu la certification en 1994, nous utilisons son rendement de 1992 pour sélectionner un groupe de contrôle, puis nous comparons le rendement financier dans les années suivantes, c’est-à-dire l’année t – 1 (1993), l’année t (1994), etc.. ISO Management Systems – juillet-août 2002 Explication des diagrammes Les diagrammes des Figures 1, 2, et 3 sont présentés pour résumer les résultats d’une manière succincte et graphique. Pour construire ces diagrammes, nous avons compilé les changements annuels progressifs du rendement des entreprises certifiées et non certifiées. À strictement parler, cela n’est pas exact car l’échantillon des entreprises certifiées change sur le plus long terme. Les chiffres cités dans le texte sont les vrais niveaux de rendement supérieur des entreprises certifiées, donnés dans l’étude complète; ils correspondent largement à ceux suggérés par les diagrammes, mais sans y être absolument identiques. Les diagrammes sont interprétés comme suit. La ligne continue montre le rendement des entreprises après l’obtention de leur première certification ISO 9000, comparé à celui d’un groupe d’entreprises de contrôle, indiqué par la ligne pointillée. La certification a été délivrée l’année t. Le diagramme du rendement de l’actif (RA) montre que le groupe de contrôle est sélectionné de façon à avoir le même RA initial à l’année t – 2 que l’entreprise certifiée. La différence entre les entreprises certifiées et non certifiées dans la période t + 1, par exemple, indique la différence de rendement réalisée par les entreprises certifiées l’année suivant la certification, par rapport à leur groupe de contrôle, sous forme d’une moyenne de toutes les entreprises certifiées. Pour les trois autres mesures de rendement (ratio de Tobin, rapports CPV/VENTES et VENTES/ACTIFS), nous laissons artificiellement commencer les groupes de contrôle au même point que les entreprises certifiées, pour mettre en relief les différences de rendement après la certification et faciliter la comparaison avec le diagramme du RA. © ISO Management Systems, www.iso.org/ims DOSSIER Figure 1: La certification ISO 9000 dans l’industrie chimique (SIC 28) Certifié Non-certifié En choisissant un groupe de contrôle sur la base de caractéristiques comparables avant l’évènement, c’est-à-dire avant l’obtention de la certification ISO 9000, une étude d’évènement nous permet de vérifier si les entreprises certifiées ISO 9000 ont un rendement supérieur à celui d’entreprises par ailleurs comparables mais qui n’ont pas été certifiées. Résultats Produits chimiques Les résultats pour chacune des trois industries sont indiqués dans les Figures 1, 2 et 3 respectivement – voir l’encadré « Explication des diagrammes » en page 28. Le premier diagramme de la Figure 1 compare le RA des entreprises certifiées et non certifiées dans l’industrie chimique (code SIC 28). La figure montre qu’en moyenne, les entreprises non certifiées ont vu leur RA chuter alors que le RA des entreprises certifiées demeurait fort constant. Une entreprise débutant avec un RA de 17,9 % (moyenne des entreprises SIC 28 certifiées à l’année t – 2) verra en moyenne son RA demeurer plus ou moins constant l’année avant la certification, alors que le RA chute pour les entreprises non certifiées. La différence entre les deux groupes est 0,9 point de pourcentage, soit une différence relative de RA de 5,0 %. À l’année t + 3 , l’entreprise certifiée aura vu l’écart de RA augmenter pour passer à 2,1 points de pourcentage, soit une différence relative de 12 %. Pour le ratio de Tobin, le second diagramme de la Figure 1 indique une tendance largement comparable bien qu’il 1) Les résultats présentés ici sont tous fondés sur un rendement excédentaire médian; la médiane est définie par le fait que les observations sont pour moitié supérieures et pour moitié inférieures à la médiane. Les médianes sont souvent préférées aux moyennes car elles sont moins sensibles aux valeurs aberrantes. ISO Management Systems – juillet-août 2002 29 © ISO Management Systems, www.iso.org/ims DOSSIER Figure 2: La certification ISO 9000 dans l’industrie des machines industrielles et des ordinateurs (SIC 35) Certifié Non-certifié faille attendre un an de plus, c’est-à-dire l’année de la certification, pour que l’effet se concrétise. À l’année t + 3, le ratio de Tobin pour les entreprises certifiées est supérieur de 0,45 à celui des entreprises non certifiées, une différence relative de 29 % par rapport à la valeur de départ de 1,5. Quelle est la cause de l’amélioration du RA ? Immédiatement après avoir décidé de rechercher la certification, les entreprises connaissent une amélioration de la productivité, contrairement aux entreprises non certifiées, qui n’observent pas une telle amélioration et connaissent finalement un déclin progressif de leur productivité, comme l’indique la chute du rapport CPV/VENTES dans le troisième diagramme de la Figure 1. L’écart se creuse avec le temps. Les entreprises certifiées ont en moyenne des rapports CPV/VENTES inférieurs de 1,5 point de pourcentage à ceux des entreprises non certifiées à l’année t + 3, soit une différence relative de 2,7 %. Le quatrième diagramme de la Figure 1 montre que les entreprises certifiées connaissent un déclin légèrement plus faible du rapport VENTES/ACTIFS dans les deux premières années suivant la certification par rapport aux entreprises non certifiées bien qu’à long terme, cet effet ne semble pas statistiquement significatif. Pour résumer les résultats du secteur SIC 28, il est clair que la première certification ISO 9000 des entreprises a réellement conduit à des améliorations relatives du RA, principalement par une productivité accrue. Machines industrielles et ordinateurs Pour le secteur des machines industrielles et des ordinateurs (code SIC 35), les effets sur le RA suivent une tendance similaire mais sont amplifiés. Une fois de plus, certaines entreprises évitent la chute significative du RA que connaissent les entreprises non certi- 30 ISO Management Systems – juillet-août 2002 © ISO Management Systems, www.iso.org/ims DOSSIER Figure 3: La certification ISO 9000 dans l’industrie des équipements et composants électroniques (SIC 36) Certifié Non-certifié fiées, et ces améliorations relatives persistent dans le temps. À l’année t + 3, les entreprises certifiées ont un RA supérieur de 4,8 points de pourcentage à celui des entreprises non certifiées, soit une différence relative de 37 %. Il est intéressant d’observer qu’il n’y a pas ici de fort effet correspondant sur le ratio de Tobin. Les entreprises non certifiées connaissent une importante perte de productivité et de ventes en comparaison des entreprises certifiées. À l’année t + 3, le rapport VENTES/ACTIFS des entreprises certifiées est supérieur de 9,9 points de pourcentage à celui des entreprises non certifiées, soit une différence relative de 7,6 %. En résumé, les entreprises du secteur SIC 35 connaissent également des améliorations significatives du RA, dues en partie aux ventes et en partie à des réductions relatives des coûts. Équipements électroniques et électriques De façon comparable, les entreprises non certifiées dans le secteur des équipements électroniques et électriques (code SIC 36) connaissent une importante chute du RA alors que les entreprises certifiées conservent un RA plus ou moins constant. À l’année t + 3, la différence est de 8,7 points de pourcentage, soit une différence relative de 55 % en comparaison de l’année t – 2. Ces améliorations relatives du RA se traduisent par des différences significatives dans le ratio de Tobin. À l’année t + 3, la différence est passée à 0,24, soit une augmentation de 15 %. Les entreprises du secteur SIC 36 maintiennent une productivité constante, alors que les entreprises non certifiées connaissent d’importantes augmentations des coûts. À l’année t + 3, le rapport CPV/ VENTES des entreprises certifiées est inférieur de 2,9 points de pourcentage à celui des entreprises non certifiées, soit une ISO Management Systems – juillet-août 2002 31 © ISO Management Systems, www.iso.org/ims DOSSIER merciales, des équipements informatiques, des équipements électroniques et autres équipements et composants électriques, on observe des effets à la fois sur les ventes et sur les coûts. Selon des analyses plus détaillées qui sont toujours en cours, certains de ces effets apparaissent plus forts pour les entreprises qui avaient obtenu plusieurs Les groupes de contrôle dans l’étude d’évènement Un article essentiel sur les méthodes de l’étude d’évènement est celui de Barber et Lyon (1996), qui établissent que le groupe de contrôle doit être mis en correspondance avec les entreprises certifiées sur la base du rendement avant l’évènement. Nos résultats suggèrent que le fait de ne pas rechercher une certification ISO 9000 contribue à une évolution défavorable graduelle du rendement 32 différence relative de 4,9 %. Dans l’ensemble, elles connaissent aussi un déclin beaucoup plus modeste du rapport VENTES/ACTIFS que les entreprises non certifiées ; une analyse plus pointue révèle que c’est particulièrement le cas des entreprises précocement certifiées. En résumé, les entreprises du secteur SIC 36 connaissent, par la certification, des réductions des coûts et des bénéfices des ventes importants, engendrant des améliorations claires du RA et du ratio de Tobin. En combinant les résultats obtenus pour toutes ces catégories SIC, nous parvenons à la conclusion que les entreprises qui avaient décidé de rechercher la certification ISO 9000 ont maintenu leur RA dans les trois industries, tandis que les entreprises non certifiées ont vu leur rendement décliner avec le temps. Dans l’industrie chimique, les effets sont principalement internes : ISO 9000 induit des réductions des coûts par une productivité améliorée. Dans les secteurs des machines industrielles et com- ISO Management Systems – juillet-août 2002 Si l’on ne procède pas à une telle mise en correspondance, un rendement post-certification supérieur des entreprises certifiées ISO 9000 peut simplement répercuter un rendement pré-certification déjà supérieur. En sélectionnant un groupe de contrôle à rendement correspondant, il est probable qu’une différence de rendement positive reflétera plus une causalité sous-jacente qu’une cause commune. Cela signifie qu’un rendement escompté Pi,t+l de l'entreprise i dans toute période t + l (où la période t est l’année de la certification) est donné par l’équation E[Pi,t+l] = Pi,t–2 + (Pli,t+l – Pli,t–2), où Pli,t dénote le rendement du groupe de contrôle de l’entreprise i. Le rendement excédentaire (ou « anormal ») est le rendement de l’entreprise certifiée par rapport au référentiel défini par le groupe de contrôle, à savoir APi,t+l = Pi,t+l – E[Pi,t+l]. Suivant la recommandation de Barber et Lyon, nous faisons correspondre chaque entreprise certifiée avec un groupe de contrôle d’entreprises non certifiées du même secteur industriel (au niveau de code SIC à 2 chiffres) avec un RA dans l’année t – 2 compris entre 90 % et 110 % du RA de l’entreprise certifiée. © ISO Management Systems, www.iso.org/ims DOSSIER Références Barber, B.M. et J.D. Lyon. 1996. Detecting Abnormal Operating Performance : The Empirical Power and Specification of Test Statistics. Journal of Financial Economics 41 359-399. Chung, K.H. et S.W. Pruitt. 1994. A Simple Approximation of Tobin’s Q. Financial Management 23(3) 70-74. Corbett, C.J. 2002. Diffusion of ISO 9000 and ISO 14000 Through Global Supply Chains. Manuscript, UCLA. Disponible à http://personal.anderson.ucla. edu/charles.corbett/research.htm. Cela suggère fortement qu’après avoir décidé de rechercher leur première certification ISO 9000, les entreprises ont procédé à des changements qui ont conduit directement ou indirectement à des améliorations relatives du RA, à la fois par une meilleure maîtrise des coûts et par des ventes accrues. Ces améliorations sont-elles un effet causal direct de la décision d’être certifié ISO 9000 ? Il est tout à fait possible que cette décision soit positivement associée à d’autres pratiques de « bon management », et que ce soient ces dernières qui améliorent le RA plutôt que le processus de mise en œuvre et de certification ISO 9000 en tant que tel. Corbett, C.J., M.J. Montes et D.A. Kirsch. 2002. The Financial Impact of ISO 9000 in the US : An Empirical Analysis. Manuscript, UCLA. Disponible à partir d’octobre 2002 à http://personal.anderson.ucla. edu/charles.corbett/research.htm. Hendricks, K.B. et V.R. Singhal. 1997. Does Implementing an Effective TQM Program Actually Improve Operating Performance ? Empirical Evidence from Firms That Have Won Quality Awards. Management Science 43(9) 1258-1274. certifications jusqu’en 1997 que pour les entreprises certifiées une seule fois, et souvent plus forts pour les entreprises certifiées précocement que pour celles certifiées tardivement. Interpréter les résultats Comment interpréter ces résultats ? À strictement parler, ils montrent que « les entreprises connaissent un rendement significativement meilleur après avoir décidé de rechercher leur première certification ISO 9000 par rapport aux entreprises d’un groupe de contrôle dont les rendements étaient similaires avant cette décision ». Toutefois, les groupes de contrôle sont composés d’entreprises qui avaient le même RA avant la décision de certification; quelque chose a donc spécifiquement changé dans les entreprises certifiées dans l’année précédant la certification. ISO Management Systems – juillet-août 2002 33 © ISO Management Systems, www.iso.org/ims DOSSIER Après avoir décidé de rechercher leur première certification ISO 9000, les entreprises ont procédé à des changements qui ont conduit directement ou indirectement à des améliorations relatives du RA, par une meilleure maîtrise des coûts et par des ventes accrues 34 Étant donnée l’amplitude des améliorations du rendement, il semble probable que d’autres effets que la seule certification ISO 9000 sont intervenus. Toutefois, en raison de l’utilisation de groupes de contrôle à rendement équivalent et du caractère persistant des améliorations relatives, nos résultats suggèrent fortement que la préparation de la première certification ISO 9000 a aussi contribué à un rendement supérieur. La bonne nouvelle est manifestement que, dans toutes nos analyses, nous avons découvert des améliorations relatives significatives du RA. Dans cette perspective, nous pouvons répondre à notre question du début – « la certification ISO 9000 est-elle rentable ? » – par un « OUI ! » clair et net (bien que, en notre qualité de chercheurs, nous devions immédiatement pondérer cette assertion de plusieurs facteurs qui sont examinés dans notre étude complète). Il est toutefois intéressant de relever que la certification ISO 9000 apparaît plus souvent comme une condition nécessaire pour maintenir le rendement que comme un moyen infaillible de l’améliorer. C’est tout à fait compréhensible : ISO 9000 étant une norme publique, on voit mal comment telle ou telle entreprise pourrait en retirer un atout concurrentiel durable. Une entreprise doit disposer de ressources autres, plus profondes et plus difficiles à imiter. Toutefois, nos résultats suggèrent que le fait de ne pas rechercher une certification ISO 9000 contribue à une évolution défavorable graduelle du rendement. En utilisant le RA comme mesure de rendement, nous avons délibérément pris en compte un vaste éventail de coûts et d’avantages, y compris ceux qui sont indirects ou difficiles à quantifier et qui sont donc normalement exclus d’une analyse coûts-avantages étroite pour décider de rechercher ou non la certification. Le fait que la certification ait induit des améliorations relatives du RA ne se traduit pas nécessairement par des améliorations spécifiques susceptibles d’être prédites et capturées dans une telle analyse coûts-avantages. Cela est encore accentué par le fait que les améliorations du rendement ne sont pas absolues, mais relatives, et contribuent à maintenir plutôt qu’à ISO Management Systems – juillet-août 2002 améliorer le rendement financier. Dans l’ensemble, nous sommes ainsi amenés à une conclusion en apparence paradoxale : la décision de rechercher la certification ISO 9000 a réellement conduit à de substantielles améliorations du rendement, mais elle est difficile à justifier à l’avance au moyen d’une analyse coûts-avantages traditionnelle, ce qui implique qu’une telle décision doit être fondée, dans une certaine mesure, sur un acte de foi. Remerciements Les auteurs sont reconnaissants à WorldPreferred (www. worldpreferred.com), la société canadienne qui établit une base de données internationale des organisations certifiées selon des normes de système de management, de leur avoir communiqué ses données sur les certifications ISO 9000 en Amérique du nord, ainsi qu’à Marvin Lieberman, Raghavendra Rau, et Lena Sernova pour leurs utiles suggestions. Une partie de ce travail a été réalisée alors que le deuxième auteur était Chercheur invité et le troisième auteur Professeur invité à Anderson School, UCLA, Université de Californie, Los Angeles, États-Unis. Nous sommes reconnaissants du soutien financier apporté par le Programme de recherche Pacific Rim de l’Université de Californie et par le Harold Price Center for Entrepreneurial Studies. Le premier auteur a reçu un soutien financier du Secrétariat central de l’ISO pour une autre étude, qui porte sur la diffusion mondiale d’ISO 9000 et ISO 14000.