2001, l`odyssée de l`espace
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2001, l`odyssée de l`espace
2001, l’odyssée de l’espace (1968), Stanley Kubrick. 2h 40min Les scénarios, et surtout les scénaristes, se partagent entre deux tendances : soit privilégier les situations fortes, soit privilégier le développement des personnages. Car l’équilibre entre les deux est difficile à obtenir et généralement l’un des choix se fait au détriment de l’autre, qui lui devient en quelque sorte subordonné. En outre, lorsqu’il s’agit d’insister avant tout sur l’agencement de situations qui structurent et font évoluer le film, il est important de tenir compte de la manière dont cet agencement est pensé et réalisé, des outils cinématographiques employés pour former le récit. Il existe plusieurs figures de style qui rendent plus ou moins manifeste la présence de cette manière de raconter. Il en est ainsi une : l’ellipse, une saute plus ou moins importante dans le temps de l’histoire représentée. Elle peut être d’une durée très variable, passant inaperçue si elle ne dure que quelques secondes mais occasionnant une rupture assez brutale si elle concerne une longue période. Son utilisation permet soit de rythmer le récit en omettant des faits et gestes inutiles soit d’orienter l’intrigue en vous cachant des faits importants mais qui ne vous serons révélés que plus tard dans ce récit. L’ellipse certainement la plus importante de l’histoire du cinéma, est celle de 2001, l’odyssée de l’espace qui condense – pardon pour ce manque de précision – rien de moins que quelques millénaires . Nekochka : filmothèque du net L’avis de Nekochka : Les premières images du film se situent à l’aube de l’humanité, aube féroce puisque deux clans de singes s’affrontent. Et déjà ce sont ceux qui ont une arme qui l’emportent sur les autres. Cette arme n’est encore qu’un os. Il est lancé dans le ciel dans un geste de victoire, filmé au ralenti comme pour en accentuer l’importance, et alors qu’il est en train de retomber il se transforme soudain en vaisseau spatial flottant en apesanteur dans l’espace intergalactique. Cette ellipse est un mélange de rapidité et de lenteur, car elle enchaîne subitement, dans le collage sec de deux plans, le passage de la préhistoire au monde de demain. Et pourtant, l’os comme le vaisseau ont quasiment la même silhouette, évoluent au même rythme, le mouvement du vaisseau spatial prolonge le mouvement descendant de l’os : voilà qui crée des affinités visuelles, rendant l’association possible et donc l’ellipse acceptable malgré son grand écart temporel. Ce n’est seulement qu’après cette rupture adoucie que vous pouvez entendre la musique prendre progressivement sa place sur les images. Il s’agit du Beau Danube bleu, de Johann Strauss. Celle-ci continue le mouvement de bercement présent dans les plans : la valse leur donne une dimension supplémentaire. Vous êtes loin désormais des grognements agressifs des singes, vous flottez, comme les personnages et les vaisseaux, dans un monde étoilé. D’autant que les mouvements à l’intérieur des plans, en particulier les déplacements des vaisseaux, suivent le rythme et les envolées de la musique. Le film de Stanley Kubrick allie d’ailleurs avec brio de nombreux extrêmes cinématographiques, non seulement dans le temps mais aussi dans l’espace. Au cours d’une autre séquence vous traversez ainsi l’univers entier jusqu’à un foetus humain. Extrêmes aussi dans le montage qui associe une musique classique à des plans représentant l’ultra-modernité, en tout cas celle qui était imaginée à la fin des années 60 au moment de la réalisation du film. Nekochka : filmothèque du net