Stratégies fiscales en direct - Raymond Chabot Grant Thornton

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Stratégies fiscales en direct - Raymond Chabot Grant Thornton
BEPS et prix de transfert : publication des
recommandations finales de l’OCDE
Stratégies fiscales en direct
L'Organisation de coopération et de développement
économiques (OCDE) a publié, le 5 octobre dernier, ses
recommandations finales dans le cadre de ses travaux en matière
d’élimination de l’érosion de la base d’imposition et le transfert
de bénéfices, un projet mieux connu sous le nom de BEPS, de
l’expression anglaise « Base Erosion and Profit Shifting ».
Le projet BEPS, lancé en juillet 2013 à la demande des pays du
G20, vise à remédier aux situations où les bénéfices découlant
d’une activité commerciale ne sont pas imposés dans la
juridiction où les activités se sont déroulées, se soldant ainsi en
un transfert de l’assiette fiscale vers des pays où les taux
d’imposition sont faibles.
Cet ambitieux projet a mobilisé l’attention de la communauté
d’affaires, des autorités fiscales et des spécialistes au cours des
deux dernières années. Les rapports finaux seront présentés aux
ministres des Finances des pays du G20 lors d’une réunion qui se
tiendra le 8 octobre prochain à Lima, au Pérou.
En ce qui a trait aux prix de transfert, l’un des objectifs du projet
BEPS est de faire en sorte que l’allocation des profits soit en lien
avec les activités créant de la valeur. En d’autres termes, l’OCDE
veut éviter que les profits soient artificiellement transférés dans
des juridictions où le taux d’imposition est faible, par le biais
d’entités qualifiées de « cash boxes », caractérisées par une
capitalisation élevée, un faible nombre d’employés et des activités
économiques très limitées.
À cet égard, Marlies de Ruiter, chef de la division de l’OCDE
chapeautant les conventions fiscales, le prix de transfert et les
transactions financières, a mentionné les points suivants lors du
webinaire accompagnant la sortie des rapports finaux :

Afin qu’un contrat entre deux parties liées soit considéré par
les autorités fiscales, la conduite des parties doit être alignée
sur les termes et conditions contenues dans l’entente
intersociété.

De la même façon, le fait d’être propriétaire légal d’un actif
incorporel ne donne pas automatiquement droit à la totalité
(ou à une portion) des profits générés par l’exploitation de
cet actif.

Une entité qui exerce des activités de financement sans
assumer les risques associés sera rémunérée, au mieux, par
un taux de rendement sur investissement correspondant aux
taux sans risque. Ceci signifie que, afin que le rendement
soit ajusté au risque, l’entité effectuant le financement doit
exercer un contrôle sur son investissement.

Afin qu’une portion des profits attribuables à la prise d’un
risque puisse lui être attribuée, il est essentiel qu’une entité
exerce un contrôle sur le risque et ait les capacités
financières de l’assumer. Cette recommandation vise à
empêcher le transfert contractuel de risques et des
rendements associés à la prise de ces risques, sans
alignement sur l’activité économique.
Par ailleurs, le rapport final portant sur les questions spécifiques
aux prix de transfert (Actions 8 à 10) présente également les
révisions qui seront apportées aux Principes de l’OCDE applicables
en matière de prix de transfert. Ces révisions toucheront notamment
la question des avantages synergiques, le traitement des actifs
incorporels, l’utilisation de la méthode transactionnelle du
partage des bénéfices, les transactions impliquant des
commodités, ainsi que les services à faible valeur ajoutée.
Octobre 2015
Ceux qui attendaient des précisions au sujet de la déclaration
pays par pays, l’un des aspects les plus controversés du projet
BEPS, n’ont rien appris de nouveau lors de la publication des
rapports finaux. En effet, l’OCDE a confirmé les informations
contenues dans les rapports publiés en septembre 2014 et en
février 2015, et discutées à de multiples reprises depuis.
Rappelons que l’OCDE recommande la mise en place d’une
documentation de prix de transfert en trois parties : un dossier
local, un dossier maître et la déclaration pays par pays. Les
recommandations quant au contenu que devrait présenter
chacun de ses rapports sont résumées dans le tableau suivant :
Dossier maître
Dossier local
Déclaration pays par pays
 Structure
organisationnelle du
groupe
Information sur l’entité
du pays
 Revenus provenant de
tiers
 Description de la
structure de gestion
 Revenus provenant de
parties liées
Description de la
transaction interco
 Bénéfice avant impôts
 Description des
activités du groupe
 Actifs incorporels du
groupe
 Financement interco
 Positions financières
et fiscales du
groupe
 Circonstances
 Impôts payés dans l’année
courante
 Montants
 Impôts à payer
 Analyse économique
 Capital déclaré
Information financière
 Bénéfices non répartis
 États financiers
locaux
 Actifs corporels
 Résultats financiers
des comparables
 Nombre d’employés
Comme indiqué préalablement par l’OCDE, la déclaration pays
par pays vise les groupes multinationaux ayant un chiffre
d’affaires consolidé de 750 millions d’euros ou plus (ou un
montant équivalent en devises locales). L’OCDE recommande
que la déclaration soit produite par la société mère ultime du
groupe multinational dans sa juridiction de résidence, et ce, dans
un délai d’un an suivant la fin de l’exercice financier débuté après
le 1er janvier 2016. Un mécanisme d’échange de renseignements
entre les autorités fiscales sera par ailleurs mis en place.
Mentionnons que l’OCDE raffinera ses recommandations sur la
déclaration pays par pays avant la fin de l’année 2015, par la
publication d’un modèle et d’un guide d’implantation.
1
L’OCDE compte également modifier son modèle de convention
fiscale, un modèle largement utilisé par les États dans le cadre de
leurs négociations, afin de tenir compte des résultats de ses
travaux sur les BEPS.
L’Action 6 propose des modifications au modèle de convention
fiscale visant à limiter les bénéfices octroyés par les conventions
fiscales, afin d’éviter l’utilisation abusive de celles-ci. Le rapport
final discute notamment de la problématique du chalandage
fiscal, un phénomène mieux connu sous le nom anglais de
« treaty shopping ». Le chalandage fiscal est une stratégie par
laquelle une personne qui n’est pas résidente d’un État tente
d’obtenir les avantages qu’une convention fiscale conclue par cet
État accorde à ses résidents, par la création, par exemple, d’un
intermédiaire.
Par ailleurs, l’Action 7 propose de modifier le modèle de
convention fiscale afin d’empêcher que les contribuables
prennent des mesures visant à éviter le statut d’établissement
stable dans une juridiction, faisant ainsi en sorte que les bénéfices
ne sont pas imposables dans cet État.
Les modifications proposées par l’OCDE visent notamment à
encadrer les accords de commissionnaires, qui permettent à une
entité de vendre des produits dans un pays sans techniquement y
posséder un établissement stable. L’OCDE veut en effet faire en
sorte que « lorsqu’il est prévu que les activités d’un intermédiaire
donnent lieu à la conclusion régulière de contrats à exécuter par
une entreprise étrangère, celle-ci devrait être considérée comme
ayant une présence imposable dans le pays, sauf si l’intermédiaire
exerce ses activités dans le cadre d’une entreprise
indépendante1 ».
Lors de la mise en place du projet BEPS, l’OCDE a identifié
l’utilisation de dispositifs hybrides comme étant une source
importante d’érosion de la base fiscale pour les pays. Les
dispositifs hybrides exploitent les différences de traitement fiscal
d’une entité ou d’un instrument entre deux législations,
permettant ainsi des situations de double non-imposition.
Le rapport dévoilant l’Action 2 présente les recommandations de
l’OCDE pour renforcer la cohérence des règles fiscales à
l’échelle internationale, et ainsi neutraliser les effets de ces
dispositifs hybrides. Ces recommandations se divisent en deux
parties, soit les modifications proposées aux législations
nationales et les changements qui seront apportés au modèle de
convention fiscale.
Projet OCDE/G20 sur l’érosion de la base d’imposition et le transfert des
bénéfices. Rapports finaux 2015, Résumés, page 30.
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Octobre 2015
Dans le cadre de l’Action 4 de son projet BEPS, l’OCDE s’est
également penchée sur les activités de financement intragroupe,
notamment sur les stratégies utilisant les prêts intragroupes pour
générer des déductions d’intérêts supérieures aux charges réelles
payées à des tierces parties. Les recommandations proposées par
l’OCDE tournent autour de la mise en place d’un ratio qui
limiterait les déductions nettes en termes d’intérêts (ou de
paiements équivalant à des intérêts) d’une entité à un certain
pourcentage de son bénéfice avant impôt, intérêts et
amortissement.

BEPS : Rapports finaux 2015 :
http://www.oecd.org/fr/fiscalite/beps-rapports-finaux2015.htm
Le modèle de convention fiscale de l’OCDE contient
actuellement une disposition permettant aux autorités
compétentes des États de résoudre à l’amiable des différends
commerciaux ou des disputes résultant de l’interprétation ou de
l’application des conventions. Cette procédure a pour objectif de
réduire l’incertitude pour le contribuable et d’éviter les situations
de double imposition. L’Action 14 de l’OCDE a pour objectif de
renforcer l’utilisation et l’efficacité de cette procédure à l’amiable.
Par ailleurs, l’OCDE s’est entendue avec les pays suivants afin
que ceux-ci s’engagent à instaurer une procédure d’arbitrage
obligatoire dans leurs conventions fiscales bilatérales :
Allemagne, Australie, Autriche, Belgique, Canada, Espagne,
États-Unis, France, Irlande, Italie, Japon, Luxembourg, Norvège,
Nouvelle-Zélande, Pays-Bas, Pologne, Royaume-Uni, Slovénie,
Suède et Suisse.
Il est important de noter que les recommandations émises par
l’OCDE doivent être ajoutées au cadre législatif de chacun des
pays. L’OCDE est toutefois confiante que l’implantation des
recommandations se fera dans un avenir rapproché, compte tenu
de l’implication importante des représentants des pays membres
et de plusieurs pays non membres dans le projet.
Votre conseiller Raymond Chabot Grant Thornton peut vous
aider à déterminer les mesures qui s’appliquent à votre entreprise
et vous assister dans les démarches nécessaires pour vous
permettre d’en bénéficier. N’hésitez pas à le consulter.
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