Design Albini, maestro de l`apesanteur

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Design Albini, maestro de l`apesanteur
Date : 15/28 AVRIL 16
Page de l'article : p.12
Journaliste : Christian Simenc/
Itzhak Goldberg
Périodicité : Bimensuel
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Design Albini, maestro de l'apesanteur
L'exposition de l'Institut italien ne permet malheureusement pas d'appréhender
à sa juste mesure le travail de Franco Albini, designer très connu dans les années 1950
FRANCO ALBINI, LA SUBSTANCE DE Ut FORME, jusqu'au
30 mai, Institut culturel italien, 73, rue de Grenelle, 75007
Paris, tél. oi i>4 39 w 39, du
lundi au vendredi ioh-i3h,
PARIS • On connaît peu, sinon
mal, en France, l'œuvre de Franco
Albini (1905 1977), «l'architecte
des équilibres instables », comme
aimait à le définir l'historien de
l'art napolitain Cesare de Seta.
Diplôme du Politecnico de Milan
en 1929, ce fils d'ingénieur rompu
à la technique et doué pour le des
sin fut pourtant le maître d'ceuvre
transalpin le plus connu des années 1950. L'exposition « Franco
Albini, la substance de la forme »
proposée par l'Institut culturel
italien, à Paris, tente de réparer
quelque peu cet oubli, à travers
une sélection de photographies, de
dessins et de mobilier. Le visiteur
y découvre un créateur des plus
prolifiques, depuis une ligne de
couverts jusqu'à l'architecture,
en passant par une télévision
(Brionvega) ou un luminaire
(AM/AS). Ainsi, Franco Albini
est notamment l'auteur, avec son
associée Franca Helg, de l'aménagement de la ligne I du métro de
Milan (1962-1964) : des éclairages
des stations aux bancs d'attente,
des garde-corps aux cendriers ou
porte-parapluies, sans oublier la
signalétique, le tout dans une élégante sobriété.
Engagé dans le Mouvement mo
derne, Albini incarne néanmoins
ce courant néorationaliste italien
des années 1930 qui cherche à
marier fonctionnalisme euro
péen et patrimoine classique de
la Péninsule. On peut voir, ici, des
photos d'un chalet de vacances
construit à Cervinia, le refuge
Pirovano (1952), lequel est juché
sur d'étonnants pilastres mêlant
formes fonctionnalistes et architecture vernaculaire, et celles,
dans un registre beaucoup plus
strict, des grands magasins La
Rinascente, à Rome (1961).
De fait, Franco Albini est aussi un
pionnier du design italien. Son
credo : réinventer des typologies
en accord avec une «poétiquefondée sur le défi de la pesanteur ».
Ici présente, son meuble le plus
célèbre n'est autre que la bibliothèque Veliera [« Voilier »], datant de 1940, structure tendue
de verre et de filins d'acier qui, de
profil, ressemble effectivement à
un trois mâts, avec sa multitude
de haubans. D'autres meubles témoignent de sa remarquable sensibilité aux matériaux, tel le fau-
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Vue de l'exposition « Franco Albini. La sostanza délia forma », à l'Institut culturel italien, Paris,
teuil Margherita, en rotin et quasi
en apesanteur. Ou la chaise Luisa,
dont on peut voir la structure en
bois astucieusement dessinée.
Présentation pauvre
La présentation est toutefois un
peu faiblarde. Déjà l'an passé à
la même époque, l'exposition sur
Carlo Mollino (lire le/(M n° 431,
13 mars 2015) avait été montée
sur le même principe, à savoir :
une multitude de panneaux de
carton plume au format identique
- pour une question de transport sans doute - sur lesquels
sont fixées les photographies ;
peu sinon pas de textes ; enfin,
quèlques meubles, pour Albini
en l'occurrence, non des origi
naux mais des éditions actuelles,
en majorité celles du fabricant
italien Cassina, sponsor de la
présentation. Un principe qui
ne suffît pas à entrer pleinement
dans le travail de ce créateur
hors pair, et à peine à le survoler.
C'est dommage ! Pour combler
le manque, il faudra « plonger »
dans le catalogue, ou, pour les
plus intrépides, faire le voyage à...
Gênes, où Franco Albini a conçu,
dans les années 1950 et 1960,
quatre musées emblématiques : le
Palazzo Bianco, le Palazzo Rosso,
le Musee del Tesoro et le Musee di
San'Agostino.
Christian Simenc
CASSINA 0245267400501