Ressources génétiques, diversité et amélioration du melon
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Ressources génétiques, diversité et amélioration du melon
"Le Sélectionneur Français" 2005 (55), 3-12 RESSOURCES GENETIQUES, DIVERSITE ET AMELIORATION DU MELON Michel PITRAT INRA, Unité de Génétique et Amélioration des Fruits et Légumes BP 94, 84143 Montfavet cedex Le melon (Cucumis melo L.), comme la trentaine d’autres espèces du genre Cucumis ayant n=12 chromosomes, est originaire de l’Afrique, sauf toutefois C. hystrix, possédant lui aussi n=12 chromosomes, qui est originaire du Sud de la Chine (KIRKBRIDE, 1993). La domestication du melon est ancienne et remonterait vers 2500 à 3000 av. J.C. en Egypte, en Mésopotamie et en Chine. Sa zone de diversification est l’Asie depuis la Méditerranée jusqu’à l’Extrême-Orient. Aucun croisement interspécifique n’a pu être exploité jusqu’à maintenant, bien que des caractères intéressants, en particulier des résistances aux maladies, aient été identifiés dans des espèces voisines : C. metuliferus et C. anguria pour la résistance aux nématodes à galles Meloidogyne sp., par exemple. Seul le pool génique primaire, formes sauvages et cultivées de l’espèce, est donc utilisable. Le melon sauvage, C. melo agrestis, est monoïque et la pollinisation est entomophile. On pourrait donc penser que l’allogamie est la règle. Cependant, il y a très peu de baisse de vigueur liée à l’état homozygote et il est parfaitement possible de cultiver des lignées pures. En prenant un minimum de précautions, il est relativement facile de maintenir des variétés homogènes. Le melon est un fruit qui présente un certain « contenu culturel ». Alors que l’on peut manger à peu près les mêmes tomates en Afrique du Nord, en Espagne, en Italie, en France ou aux Pays-Bas, les types variétaux et les cultigroupes de melon varient considérablement d’un pays à l’autre. Les « Piel de sapo », « Tendral » ou « Amarillo » espagnols n’ont rien à voir avec les « Souhela » ou « Maazoul » marocains, les « Beji » tunisiens ou les « Charentais » français. Cela complique évidemment la tache du sélectionneur qui travaille pour un marché étroit mais rend passionnante l’étude de la diversité de cette espèce. 1 – DIVERSITE DE L’ESPECE Le melon sauvage que l’on rencontre encore assez couramment en Afrique tropicale sub-sahélienne est caractérisé par des petits fruits de 20 à 50 g, de couleur vert clair strié ou marbré de vert foncé, avec une chair blanc-verdâtre extrêmement mince et de nombreuses petites graines. On pense que c’est pour l’utilisation des graines, riches en protéines et en lipides que le melon a d’abord été cueilli puis domestiqué. Cette utilisation persiste avec l’utilisation des seinat au Soudan (MOHAMED et PITRAT, 1999). 4 Les premiers melons domestiqués devaient probablement être non sucrés et correspondent à une utilisation comme « légume » soit cru, comme du concombre, soit cuit. Ils peuvent être également confits au sel et au vinaigre comme des cornichons. Ils sont généralement récoltés immatures. Les premières descriptions entretiennent une assez grande incertitude entre le « melon-légume » et le concombre. Cependant il est à peu près certain maintenant que les Egyptiens anciens ne connaissaient pas le concombre. Ainsi les Hébreux pendant l’Exode errent dans le désert du Sinaï en regrettant l’abondance en Egypte : « Qui nous donnera de la viande à manger ? Ah ! quel souvenir ! le poisson que nous mangions pour rien en Egypte, les concombres, les melons, les laitues, les oignons et l’ail ! Maintenant nous dépérissons, privés de tout... » (Nombres 11 :5). Les « concombres » en question sont plus probablement des melons et les « melons » des pastèques… De nombreux auteurs ont tenté des classifications au sein de l’espèce, en particulier Ch. NAUDIN (NAUDIN, 1859). Les ressources génétiques de l’espèce peuvent être structurées en une vingtaine de variétés botaniques (PITRAT et al., 2000). Comme dans toute taxinomie infra-spécifique, il existe des types intermédiaires qui sont difficiles à classer. A l’intérieur des variétés botaniques, des cultigroupes sont utilisés pour regrouper les variétés très proches : par exemple, le cultigroupe « Charentais », dans la variété botanique cantalupensis, regroupe les variétés ou cultivars proches entre eux mais différant cependant par leur précocité, leurs résistances à diverses maladies, leur biologie florale… Actuellement plusieurs variétés botaniques de Cucumis melo sont cultivées comme « légumes » : On peut citer les suivantes : - tibish, ressemblant à un type sauvage mais plus gros. Il est consommé cru et est cultivé au Soudan exclusivement ; - chate, de forme ronde à ovale, côtelé. Le cultigroupe Carosello est encore cultivé dans le Sud de l’Italie ; - flexuosus, de forme allongée à très allongée, souvent appelé melon-serpent ou concombre-serpent. Il est cultivé de la Méditerranée (alficoz en Espagne, fakous ou fegous au Maghreb, adjour au Soudan, acur en Turquie) jusqu’en Inde (kakri) (Fig. 1) ; - momordica, dont les fruits ont un épiderme très fin et éclatent à maturité, cultivé en Inde ; - acidulus, avec une chair blanche très ferme et légèrement acidulée, également cultivé en Inde ; - conomon, est utilisé comme du concombre en Chine et au Japon (Fig 1). D’autres variétés botaniques ont des fruits sucrés qui sont consommés à maturité. Ils correspondent davantage à une utilisation comme « fruits ». On peut citer : - cantalupensis, à fruits ronds ou ovales, en général à chair orange. Le cultigroupe « Charentais », le plus cultivé en France actuellement, en fait partie ; - reticulatus, caractérisé par la présence de « broderies » sur l’écorce, est parfois rattaché au groupe précédent. Le cultigroupe des « Cantaloupes » nord-américains est très représentatif ; - ameri, très cultivé en Asie centrale. Ce sont des gros fruits ovales, assez tardifs, à chair blanche très sucrée et juteuse, d’excellente qualité ; - inodorus, très cultivé en Espagne ou en Turquie par exemple. Les fruits sont ovales à chair blanche, l’écorce peut être jaune, vert foncé ou tachetée. La chair est sucrée, juteuse, non aromatique. Beaucoup de variétés ont une très longue durée de conservation après récolte ; 5 - makuwa, cultivé en Extrême-Orient. Les fruits sont petits, précoces, moyennement sucrés et parfumés ; - chinensis, également cultivé en Extrême-Orient. Les fruits sont pyriformes et la chair est de médiocre qualité. Enfin une dernière variété botanique est représentée par dudaim dont le fruit de la taille d’une orange n’est pas consommé (Fig. 2). Il est utilisé de la Turquie à l’Afghanistan pour parfumer une pièce, en mettant les fruits mûrs dans une coupe. 2 – DIVERSITE EN FRANCE Le melon, décrit de façon certaine par PLINE L’ANCIEN, est nommé dans le capitulaire De Villis de CHARLEMAGNE. Il a probablement continué à être cultivé dans le sud (Comtat, Provence…), mais il ne devient vraiment important qu’à la Renaissance. Il est alors représenté par de nombreux botanistes. En 1752, DE COMBLES cite une dizaine de variétés et l’édition de 1792 du Bon Jardinier décrit une quinzaine de variétés tout en insistant sur les six meilleures. JACQUIN en 1832 décrit plus de 80 variétés (JACQUIN, 1832). La plupart porte des noms de lieux, souvent étrangers (melon de Séville, de Madère, de Candie…). Ces variétés étaient-elles réellement cultivées en France ou bien, ressources génétiques avant l’heure, étaient-elles seulement présentes chez des « collectionneurs » ? La même question peut se poser pour les descriptions de Ch. NAUDIN au Muséum (NAUDIN, 1859) ou de VILMORIN (VILMORIN-ANDRIEUX & CIE, 1925). Différents recoupements permettent de penser qu’environ une trentaine de variétés principales étaient cultivées de façon significative en France, avec pour certaines d’entre elles des cultivars proches et de très nombreuses synonymies. Par exemple : - le « Melon maraîcher » ou « Melon français » ou « Melon commun » ou « Gros morin » ou « Tête de Maure » ; - le « Melon des Carmes » dont on peut distinguer le long, le rond, celui à écorce blanche et celui à graine blanche ; - le « Cantaloup petit Prescott fond noir », le « Cantaloup gros Prescott fond noir », le « Cantaloup Prescott fond blanc », le « Cantaloup Prescott à ombilic saillant » ou « Prescott cul de singe », le « Cantaloup gros Prescott fond blanc » (Fig. 3). Ces cultivars appartenaient à plusieurs variétés botaniques : cantalupensis, reticulatus et inodorus. La plupart était destinée à des marchés locaux, en particulier à cause de la faible durée de conservation après récolte des types cantalupensis et reticulatus. Le type inodorus plus tardif était cultivé essentiellement dans le Sud de la France : « Olive d’hiver », « Melon de Pourrières », « Cavaillon espagnol », « Melon blanc d’Antibes d’hiver » en sont des représentants (Fig. 3). Une réduction drastique de la diversité s’est faite dans la seconde moitié du XXe siècle et aujourd’hui seul le cultigroupe « Charentais » est présent de manière significative sur les marchés. Par ailleurs, ce type n’est consommé qu’en France. Le « Charentais » est très probablement le descendant du « Cantaloup hâtif de vingt-huit jours » déjà connu au début du XIXe siècle. On reconnaissait à cette époque sa bonne qualité gustative, mais il était surtout apprécié pour sa précocité : une trentaine de jours entre la floraison et la maturité alors qu’il faut le double pour les types tardifs. Globalement, la qualité de la chair orange, fondante, sucrée et surtout très aromatique a imposé ce type. Demande des producteurs de melon ou demande des consommateurs ? Il est difficile de le dire, mais toujours est-il que les sélectionneurs ont travaillé presque exclusivement ce type pour le marché français. Il n’y a 6 pas eu d’essais d’homogénéisation ni d’amélioration des « Sucrin de Tours » (Fig. 3), « Prescott », « Petit gris de Rennes », « Noir des Carmes » ou « Maraîcher d’Avignon ». 3 – AMELIORATION DU CULTIGROUPE « CHARENTAIS » Malgré l’étroitesse du marché, le « Charentais » est cependant l’un des cultigroupes où des efforts importants de sélection utilisant une partie de la variabilité de l’espèce ont été réalisés. Quelques exemples permettent de l’illustrer. 3.1 – Biologie florale Les melons sauvages de l’espèce C. melo, comme la plupart des cucurbitacées, sont monoïques, c’est-à-dire que des fleurs mâles et des fleurs femelles sont présentes sur la même plante (Fig. 4). Cependant de nombreux cultigroupes sont andromonoïques avec des fleurs mâles et des fleurs hermaphrodites sur la même plante. Ce caractère (monoïque/andromonoïque) est sous contrôle monogénique, l’allèle andromonoecious (symbole a) étant récessif. Les « Charentais » traditionnels sont andromonoïques. La production de semences hybrides F1 avec une lignée andromonoïque servant de parent femelle, nécessite une castration manuelle des fleurs hermaphrodites. L’opération est relativement rentable puisqu’une pollinisation réussie permet la production de 300 à 500 graines. Cependant, d’autres systèmes ont été développés comme la stérilité mâle nucléaire (cinq gènes récessifs sont disponibles), par exemple par la société CLAUSE (LECOUVIOUR et al., 1990). Le sélectionneur de melon de la société TEZIER, Raymond MORLE, a choisi d’utiliser la monoécie pour faciliter la production de semences hybrides F1 sans castration du parent femelle. L’introduction « brutale », c’est-à-dire par rétrocroisements successifs en sélectionnant uniquement sur la biologie florale, de l’allèle a+ contrôlant la monoécie dans une lignée de « Charentais » aboutit à un fruit de gros calibre et ovale. Un gène Oval fruit shape, lié à a, a été décrit (WALL, 1967). Cette observation de sélectionneur a été analysée plus finement, soit avec des lignées quasi-isogéniques (PÉRIN et al., 2002), soit en traitant des boutures de plantes monoïques avec du nitrate d’argent (RISSER, 1984). Cet inhibiteur de la synthèse de l’éthylène induit la formation d’étamines dans les fleurs femelles, transformant temporairement une plante monoïque en plante andromonoïque. Dans les deux cas (lignées quasi-isogéniques ou traitement avec AgNO3), l’absence d’étamines dans les fleurs femelles se traduit par des fruits plus allongés. Or un « Charentais » doit être rond. En fait, il ne s’agit pas d’une liaison génétique mais d’un effet épistatique du gène a suivant le fond génétique. R. MORLE, en partant de « Cantaloup d’Alger » variété monoïque à fruit aplati, a dû faire une sélection sévère pour ne conserver que des petits fruits ronds sur des plantes monoïques. Les premières variétés hybrides F1 monoïques, « Roméo » puis « Alpha », ont été inscrites au catalogue officiel en 1979 et 1981 respectivement. Actuellement la majorité des cultivars de « Charentais » est monoïque. 3.2 – Conservation du fruit après récolte Le melon est l’une des rares espèces chez laquelle existent les deux grands types de maturation du fruit. Le premier dit climactérique est caractérisé par la synthèse autocatalytique d’éthylène, le changement de couleur de l’écorce et la déhiscence du pédoncule du fruit, le développement d’arôme typique, le rapide ramollissement du fruit après la maturité. Chez le second type, sans crise climactérique, le stade de maturité du fruit est difficile à reconnaître et les fruits peuvent être de très longue durée de conservation allant jusqu’à plusieurs mois à température ambiante. L’un des inconvénients du type « Charentais », ainsi que de nombreux autres types climactériques, est la faible durée de conservation du fruit après maturité. La maturité du fruit 7 est repérée par le changement de couleur de l’écorce et la déhiscence du pédoncule. La récolte de fruits immatures se traduit par une faible teneur en sucre et un manque d’arôme. Jean-Paul GINOUX, de la société AMELIORATION DES SEMENCES LEGUMIERES, a introduit dans le type « Charentais » le caractère de longue durée de conservation après maturité à partir d’un géniteur présentant ce phénotype. Les premières obtentions, dont la variété « Dalton » (inscrite en 1991) est aujourd’hui encore très cultivée, ont abouti à des variétés ressemblant à des « Charentais » par leur fruit sphérique, leur chair orange et leur teneur en sucre, mais avec une écorce du fruit restant verte à maturité et de longue durée de conservation. Cependant, ces variétés sont peu aromatiques et un compromis entre la durée de conservation et la qualité aromatique a été trouvé avec les variétés dites de conservation intermédiaire dont « Lunastar » est un exemple. On distingue donc actuellement les types dont l’écorce reste verte à maturité et dont la durée de conservation est de l’ordre d’une quinzaine de jours, des types à écorce jaunissante. Ces derniers sont eux-mêmes subdivisés en « Charentais classique » et « Charentais intermédiaire » dont la durée de conservation est de l’ordre de 8 jours. Ils représentent actuellement la majorité des melons commercialisés en France. 3.3 – Résistances aux bioagresseurs Le melon est sensible à de nombreux agents pathogènes. Le gène Fom-1 de résistance aux races 0 et 2 de Fusarium oxysporum melonis, agent du flétrissement du melon, a été mis en évidence dans certaines populations traditionnelles de « Charentais ». Mais tous les autres gènes de résistance ont été introduits à partir de géniteurs plus ou moins éloignés (Tableau 1). Des évaluations ont été conduites pour trouver des sources de résistance aux bioagresseurs (PITRAT et al., 1996). Ainsi, la résistance à la race 1 de F. oxysporum melonis est relativement fréquente dans des accessions originaires d’Asie centrale et d’ExtrêmeOrient, alors que la résistance à la race 1-2 n’a été mise en évidence que dans quelques accessions d’Extrême-Orient. La résistance au virus de la mosaïque du concombre (CMV) n’a été trouvée que dans des accessions d’Extrême-Orient, au virus de la mosaïque jaune de la courgette (ZYMV) dans une accession indienne, au virus des taches annulaires du papayer (PRSV) également dans des accessions indiennes. La résistance à la colonisation par le puceron Aphis gossypii et à la transmission des virus par ce puceron a été mise en évidence dans des accessions indiennes et d’Extrême-Orient. Les résistances aux différentes races d’oïdium (Sphaerotheca fuliginea) ainsi qu’au mildiou (Pseudoperonospora cubensis) ne se trouvent que dans des accessions indiennes. Deux conclusions peuvent être retirées de ces évaluations : - l’Inde et l’Extrême-Orient sont les origines géographiques de la plupart des résistances aux maladies ; - quelques accessions cumulent de nombreuses résistances : par exemple MR-1, de type momordica originaire de l’Inde, est résistant à l’oïdium, au mildiou, au Fusarium races 0, 1 et 2 ainsi qu’à Alternaria cucumerina ; PI 414723, également de type momordica originaire de l’Inde, est résistant au puceron Aphis gossypii, au virus de la jaunisse des cucurbitacées transmise par pucerons (CABYV), au ZYMV, au PRSV ainsi qu’au Fusarium et à l’oïdium ; PI 161375, de type chinensis originaire de Corée, est résistant au puceron A. gossypii, au virus de la criblure du melon (MNSV), au CMV et au Fusarium races 0 et 1. L’introduction de résistances aux maladies venant de ces types « exotiques » dans le cultigroupe « Charentais » nécessite un important travail de sélection. On peut citer les travaux de Georgette RISSER (INRA) d’introduction dans le type « Charentais » des résistances aux différentes races de F. oxysporum melonis. Parfois, des travaux d’amélioration ont déjà été réalisés dans des types variétaux assez proches du groupe « Charentais » ; c’est le cas en particulier pour certaines résistances à l’oïdium qui ont été introduites dans le type « cantaloup américain » depuis les années 1930-1940 (JAGGER et SCOTT, 1937 ; PRYOR et 8 al., 1946). Les hauts niveaux de résistance à l’oïdium sont souvent liés à des nécroses du feuillage qui apparaissent dans certaines conditions (jour court, faible ensoleillement, forte charge en fruit, déséquilibre de la fertilisation…). La résistance à l’oïdium est nettement dominante alors que la nécrose est récessive, justifiant l’intérêt des hybrides F1. En utilisant ces géniteurs américains, Louis HEDDE de la société Caillard a créé en 1973 « Pharo », premier hybride F1 commercial de type « Charentais » et de plus résistant à l’oïdium. 4 – RESSOURCES GENETIQUES Il existe bien entendu des grandes collections de melon au niveau mondial. La plus importante est probablement la banque nord-américaine (National Plant Germplasm System) avec environ 3000 accessions. Il est difficile de connaître l’état exact de la collection de l’Institut Vavilov en Russie. La collection française comporte environ 2000 accessions. Les ressources génétiques sont maintenues depuis 1996 par un réseau associant l’INRA et neuf sélectionneurs privés. La plus grande partie des accessions a été apportée par l’INRA qui avait constitué, par échange avec différents laboratoires ou chercheurs, une collection depuis les années 1950. Plusieurs centaines d’accessions ont été également apportées par la société SEMINIS en 2001. Les accessions sont décrites progressivement en utilisant environ 25 descripteurs dont la plupart concerne le fruit. De nombreuses évaluations pour les résistances aux maladies ont également été réalisées. L’ensemble des informations sur les données passeport classiques, les descriptions, les résistances aux maladies et des photos est regroupé dans une base de données. Les semences de la totalité de la collection sont accessibles à toute personne ou laboratoire qui en fait la demande. La collection nationale regroupe la plupart des anciennes variétés françaises ainsi que quelques lignées de sélection, soit au total un peu moins de 100 accessions. La base de données est consultable sur le site internet http://www.avignon.inra.fr/rg_melon/public. Les informations sur le reste de la collection sont réservées aux membres du réseau. La disponibilité de semences identifiées et de bonne qualité germinative est évidemment un minimum pour une collection de ressources génétiques. Mais, la qualité des informations sur les accessions et l’accès à ces informations sont également très importants. 5 – CONCLUSIONS Du point de vue du consommateur français, la perte de variabilité au cours du XXe siècle est indéniable. L’offre de la production française s’est concentrée sur le cultigroupe « Charentais ». On peut parfois trouver sur les marchés des melons du type « Petit gris de Rennes » ou « Canari », mais leur importance économique est marginale. Cependant, cette variabilité n’est pas perdue ; elle est maintenue dans la collection nationale. Les ressources génétiques, c’est-à-dire le pool génique primaire avec les formes sauvages et cultivées de l’espèce, ont été utilisées pour « enrichir » le cultigroupe « Charentais » ainsi que d’autres types variétaux. Les exemples présentés sur la biologie florale, la qualité du fruit et les résistances aux bioagresseurs en sont une illustration. BIBLIOGRAPHIE JACQUIN, P.J. 1832. Monographie complète du melon, contenant la culture, la description et le classement de toutes les variétés de cette espèce, suivies de celles de la pastèque à chair fondante avec 9 la figure de chacune dessinée et colorée d'après nature. Rousselon, Paris (FRA). 199 pp et XXXIII planches. JAGGER, I.C. et SCOTT, G.W. 1937. Development of powdery mildew resistant cantaloupe No. 45. USDA Circul. 441, 1-5. KIRKBRIDE, J.H. 1993. Biosystematic Monograph of the Genus Cucumis (Cucurbitaceae). Parkway publishers, Boone (USA). 159 pp. LECOUVIOUR, M., PITRAT, M. et RISSER, G. 1990. A fifth gene for male sterility in Cucumis melo. Cucurbit Genet Coop Rep 13, 34-35. MOHAMED, E.T.I. et PITRAT, M. 1999. Tibish, a melon type from Sudan. Cucurbit Genet Coop Rep 22, 21-23. NAUDIN, C. 1859. Essais d'une monographie des espèces et des variétés du genre Cucumis. Ann Sci Nat 11, 5-87. PÉRIN, C., HAGEN, L.S., GIOVINAZZO, N., BESOMBES, D., DOGIMONT, C. et PITRAT, M. 2002. 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LJ 525, PI 79376 MR-1, PI 124112… PI 161375 PI 414723 PI 161375 PMR 5 PI 161375 Freeman’s cucumber PI 414723 PI 180280 PI 180283 PI 124112, PI 414723 PI 255478 Monogénique (nombreux gènes) Vat Prv1 Prv2 2 gènes récessifs Aphis gossypii Virus de la mosaïque du concombre (CMV) Virus de la mosaïque jaune de la courgette (ZYMV) Virus des taches annulaires du papayer (PRSV) Virus de la jaunisse des cucurbitacées transmise par pucerons (CABYV) Zym polygénique récessif Virus de la criblure du melon (MNSV) nsv Doublon CM 17187 Ogon 9 MR-1 Lignée Fom-1 Fom-2 polygénique récessif polygénique Contrôle génétique Fusarium oxysporum melonis races 0 et 2 races 0 et 1 race 1-2 Mildiou (Pseudoperonospora cubensis) Oïdium (Sphaerotheca fuliginea) nombreuses races Agent pathogène Inde Inde Inde Corée Inde Inde Corée Inde Corée USA Corée Chine Inde France Extrême-Orient Japon Inde Origine géographique agrestis momordica makuwa chinensis momordica chinensis reticulatus chinensis conomon momordica divers cantalupensis makuwa makuwa momordica Variété botanique Tableau 1. Quelques exemples de résistances aux maladies introduites ou en cours d’introduction dans le cultigroupe « Charentais ».