TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE BORDEAUX

Transcription

TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE BORDEAUX
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TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE
DE BORDEAUX
ORDONNANCE DE RÉFÉRÉ
70C
Minute n° 14/
RG N0 14/01384
Rendue le TREIZE OCTOBRE DEUX MIL QUATORZE
Après débats du 08 Septembre 2014
Par mise à disposition au greffe, les parties ayant été préalablement
avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article
450 du code de procédure civile.
3 copies
Par Dominique DE MALAFOSSE, Première Vice-Présidente au
tribunal de grande instance de BORDEAUX, assistée de Laure
LARTIGUE, lors des débats, et de Véronique DUPHIL, lors du
délibéré, Greffières.
DEMANDERESSE
SAS LES VIVIERS ATLAS TOURISME
ayant pour sigle ATLAS TOURISME
sise 1 avenue Léon Lesca
33950 LEGE CAP FERRET
agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés
en cette qualité audit siège
représentée par Me Thomas FERRANT, avocat au barreau de
BORDEAUX
DEFENDERESSES
Madame E
COPIE délivrée
le
13/10/2014
à
Me Thomas FERRANT
à
Me Marie-Christine RIBEIRO
Madame S
R
V
-R
représentées par Me Marie-Christine RIBEIRO de la SELARL
CMC AVOCATS, avocats au barreau de BORDEAUX
-2Madame E
R
et Madame S
V
-R
ont, pour la période allant
du 1er janvier 2011 au 31 décembre 2013 signé avec la SAS LES VIVIERS
ATLAS TOURISME un contrat de location d'un emplacement destiné à
accueillir leur mobil-home dans le camping situé au lieu-dit
«Les Viviers» à Claouey - Lège Cap Ferret.
Faisant valoir que ces deux locataires n'avaient pas, dans le délai prévu à cet effet
jusqu'au 30 septembre 2013, accepté la proposition d'un nouveau contrat pour la
saison 2014 et qu'il ne pouvait être valablement considéré comme constituant un
contrat valable, la proposition qu'elles lui avaient renvoyée signée le 10 décembre
2013 «sous réserve de l'examen des clauses abusives et des modifications
unilatérales non contractuelles par la juridiction», la SAS LES VIVIERS ATLAS
TOURISME a, par actes d'huissier en date des 24 et 25 juin 2014, assigné Madame
E
R
et Madame S
V
-R
par devant le juge des référés du
tribunal de grande instance de Bordeaux dans le but d'obtenir :
– au visa de l'article 809 du code de procédure civile, la constatation de ce que les
défenderesses occupaient illégalement l'emplacement JS 29 du camping
«Les Viviers» ainsi que la condamnation subséquente de ces défenderesses à
procéder, à leurs frais, à l'enlèvement de leur mobil-home de cet emplacement, et
ce, sous astreinte de 100 € par jour de retard à compter de la date de signification
de la présente décision,
– au visa de l'article 809 du code de procédure civile, la condamnation des
défenderesses à leur payer la somme provisionnelle de 508,66 € correspondant au
règlement des impayés de loyers antérieurs au 1er janvier 2014, «outre une
indemnité à déterminer pour l'occupation sans droit ni titre de l'emplacement
depuis le 1er janvier 2014»,
– au visa de l'article 700 du code de procédure civile la condamnation des
défenderesses à lui payer la somme de 1 500 € à titre d'indemnité.
Lors de l'audience de référé, la SAS LESVIVIERS ATLAS TOURISME a réitéré
ses demandes tendant à obtenir le constat de l'occupation illégale de l'emplacement
litigieux par les défenderesses ainsi que la condamnation de ces dernières à
procéder sous astreinte à l'enlèvement de leur mobil-home ainsi qu'à lui payer la
somme de 1 500 € à titre d'indemnité sur le fondement de l'article 700 du code de
procédure civile.
Elle a en revanche pour le surplus modifié ses demandes initiales en sollicitant la
condamnation des défenderesses à lui payer une somme provisionnelle de 484,08 €
en règlement des loyers impayés antérieurs au 1er janvier 2014 ainsi qu'une
indemnité de 3 629 € TTC au titre de l'occupation sans droit ni titre pour la période
allant du 1er janvier 2014 au 8 septembre 2014, «le reste de la somme étant à
parfaire jusqu'à la libération effective de l'emplacement».
-3-
À cet effet, elle a soutenu que, aucun nouveau contrat valable n'ayant été signé, il
ne pouvait être contesté que les défenderesses occupaient actuellement
l'emplacement JS 29 sans droit ni titre et que cette occupation était constitutive
d'un trouble manifestement illicite qu'il appartenait au juge des référés de faire
cesser.
Madame E
R
et Madame S
V
-R
ont conclu au débouté de
la SAS LES VIVIERS ATLAS TOURISME en faisant valoir qu'elle ne
démontrait non seulement pas l'existence d'un trouble mais encore moins le
caractère manifestement illicite de celui-ci.
Elles se sont portées demanderesses reconventionnelles dans le but d'obtenir la
condamnation de la SAS LES VIVIERS ATLAS TOURISME d'une part, à les
laisser, sous astreinte de 500 € par infraction constatée, pénétrer sur le terrain du
camping afin d'accéder au mobil-home dont elles sont propriétaires, d'autre part,
à leur payer la somme de 1 500 € à titre d'indemnité émanant de l'article 700 du
code de procédure civile.
À cet effet, elles ont soutenu :
– que, par suite de l'impossibilité matérielle dans laquelle elles s'étaient trouvées
(pour diverses raisons énoncées tant à la barre que dans leurs écritures auxquelles
il est expressément renvoyé) de retirer le courrier recommandé avec accusé de
réception que leur avait adressé la SAS LES VIVIERS ATLAS TOURISME au
mois d'août 2013, elles n'avaient reçu la proposition du contrat pour la saison 2014
que par un courrier recommandé daté du 4 octobre 2013 et à elle remis le 7 octobre
2013,
– qu'elles avaient, le 10 décembre 2013, signé le contrat qui leur avait été envoyé
et que dans ces conditions, il ne pouvait être valablement soutenu qu'elles étaient
occupantes sans droit ni titre de l'emplacement JS 29,
– que le juge du fond (à savoir la 5ème chambre du tribunal de grande instance de
Bordeaux) étaient actuellement saisis d'une procédure initiée par tous les
propriétaires de mobil-homes et visant à voir déclarer abusives certaines clauses
des contrats ainsi qu'à obtenir l'indemnisation du préjudice en résultant pour
chacun des locataires,
– qu'elles étaient parfaitement à jour de leur loyer pour la période antérieure au 1er
janvier 2014 et qu'il existait à tout le moins une contestation sérieuse concernant
la demande en paiement formulée par la SAS LES VIVIERS ATLAS
TOURISME.
-4M otifs de la décision
L'article 809 du code de procédure civile, sur lequel la SAS LES VIVIERS
ATLAS TOURISME fondent leurs demandes, permet au juge des référés, d'une
part, même en présence d'une contestation sérieuse, de prendre toutes mesures
conservatoires ou de remise en état qui s'impose pour faire cesser un trouble
manifestement illicite, d'autre part, lorsque l'obligation n'est pas sérieusement
contestable, d'allouer provision au créancier.
Les mérites des demandes formulées par la SAS LES VIVIERS ATLAS
TOURISME doivent donc être examinées à la lumière de ce texte.
1) sur la demande de condam nation des défenderesses à libérer l'emplacement
JS 29
Il appartient à la SAS LES VIVIERS ATLAS TOURISME qui s'en prévaut de
justifier de l'existence d'un trouble manifestement illicite qu'il appartiendrait au
juge des référés de faire cesser.
Tel n'est pas le cas en l'espèce.
En effet, outre le fait que la demanderesse ne produit pas le contrat signé avec les
défenderesses pour la période allant du 1er janvier 2011 au 31 décembre 2013 et
qu'il n'est donc pas possible pour le juge des référés de connaître si des conditions
particulières y étaient prévues concernant la conclusion d'un nouveau contrat pour
la saison suivante, il apparaît :
– qu'à la suite de deux courriels adressés les 24 et 29 septembre 2013 par Madame
S
V
-R
lui indiquant qu'elle avait des problèmes de courrier et lui
demandant de lui faire parvenir la proposition de contrat pour 2014, la SAS LES
VIVIERS ATLAS TOURISME lui a adressé une lettre datée du 4 octobre
2014 et rédigée en ces termes : «Le contrat de location d'emplacement qui nous
lie vient à expiration le 31 décembre 2013.
Comme convenu, nous avons le plaisir de vous proposer de conclure avec notre
société un nouveau contrat pour la saison 2014.
Je vous rappelle que vous disposez d'un délai expirant le 30 septembre 2013 pour
accepter ou refuser cette proposition. Le défaut de réponse de votre part avant
cette date équivaudra à un rejet de notre offre.
En cas d'accord de votre part, nous vous remercions de prendre rendez-vous avec
notre société pour la signature de ce contrat.
À défaut de passation d'un nouveau contrat, il vous faudra prendre toutes vos
dispositions pour libérer l'emplacement.
À toutes fins utiles nous vous précisons que l'offre qui vous est faites est conforme
aux conditions habituellement pratiquées par notre société. Nous vous ferons
également bénéficier, pour la saison suivante, d'une possibilité de conclure un
nouveau contrat »,
-5– que le 10 décembre 2014, les défenderesses ont signé, pour la saison 2014, un
contrat dont ne sont produites que les pages 1 et 14, cette dernière comportant sous
la signature des preneuses la mention manuscrite suivante : «bon pour accord sous
réserve de l'examen des clauses abusives et des modifications unilatérales non
contractuelles par la juridiction».
Alors que la SAS LES VIVIERS ATLAS TOURISME ne contestent pas avoir
reçu le 12 décembre 2014 ce document (contrat précité signé le 10 décembre 2014
par les défenderesses), il apparaît, à supposer même (ce qui n'est pas démontré au
cas d'espèce, vu l'absence de production du contrat signé pour la période allant du
1er janvier 2011 au 31 décembre 2013) que le précédent contrat ait prévu
l'obligation pour le locataire sortant de signer pour la saison suivante un nouveau
contrat avant le 30 septembre 2013, que l'envoi par le bailleur de la lettre précitée
du 4 octobre 2013 était de nature à permettre aux défenderesses de penser qu'il
n'était pas trop tard pour signer un nouveau contrat.
Par ailleurs, la matérialité tant de la signature et de l'envoi par les défenderesses
du document daté du 10 décembre 2013 et intitulé «CONTRAT DE LOCATION
D'UN EMPLACEMENT SAISONNIER SAISON 2014» et de sa réception par la
SAS LES VIVIERS ATLAS TOURISME le 12 décembre 2013, étant avérée au
vu des pièces du dossier et des observations respectives des parties, il ne peut être
affirmé avec certitude que les défenderesses seraient actuellement sans droit ni
titre.
En effet, seul le juge du fond est habile à déterminer la portée qui doit s'attacher
à la mention manuscrite apposée par les défenderesses sur le document signé le
10 décembre 2013 et à en tirer les conséquences juridiques quant à sa validité.
Il existe dès lors à tout le moins contestation sérieuse concernant le fait que les
défenderesses sont actuellement sans droit ni titre et puissent en conséquence être
à l'origine d'un trouble «manifestement illicite» qu'il appartiendrait au juge des
référés de faire cesser.
Il convient donc à cet égard de renvoyer les parties à se pourvoir au fond comme
il appartiendra.
2) sur la dem ande en paiement d'un arriéré de loyers et d'une indem nité
d'occupation
Le contrat signé entre les parties pour la période allant de janvier 2011 au
31 décembre 2013 n'étant versé aux débats par aucune des parties, il n'est pas
permis au juge des référés de connaître le montant et la périodicité de la redevance
dont les défenderesses étaient débitrices pour la période antérieure au 1er janvier
2014.
-6Alors que la SAS LES VIVIERS ATLAS TOURISME a varié dans le montant de
sa demande en paiement (508,66 € réclamés dans la citation et 484,08 € réclamés
à l'audience), ce simple constat impose au juge des référés, même après avoir
déchiffré la «facture» quasi illisible produite par la demanderesse, de débouter
cette dernière de cette prétention.
La demande en paiement d'une indemnité d'occupation étant le corollaire d'une
occupation reconnue sans droit ni titre et l'affirmation d'une telle occupation
relevant au cas d'espèce de la seule compétence du juge du fond, il convient de
renvoyer sur cette question la demanderesse à se pourvoir au fond comme il
appartiendra.
3) sur la demande reconventionnelle formulée par Madame E
Madame S
V
-R
R
et
La validité et la portée du document signé le 10 décembre 2013 par les
défenderesses (et dont ces dernières ne fournissent au surplus que la 1ère et la
14ème pages) ressortant de la seule compétence du juge du fond et celui-ci étant
seul habile à déterminer si les défenderesses sont ou non occupantes sans droit ni
titre, il apparaît que le juge des référés n'est pas en mesure de statuer sur les
mérites de la demande reconventionnelle.
Il convient donc sur ce point également de renvoyer les parties à se pourvoir au
fond comme il appartiendra.
4) sur les dépens et l'article 700 du code de procédure civile
Chacune des parties conservera à sa charge les dépens qu'elle a exposés.
Par ailleurs, l'équité, résultant des circonstances précitées de l'espèce, s'oppose à
ce qu'il soit fait application des dispositions de l'article 700 du code de procédure
civile en faveur de l'une quelconque des parties.
Par ces m otifs
Nous, juge des référés du tribunal de grande instance de Bordeaux, statuant par
une ordonnance contradictoire et en premier ressort,
Vu l'article 809 du code de procédure civile,
-7Dit n'y avoir lieu à référés concernant les demandes respectivement formulées par
les parties aux fins de voir constater une occupation sans droit ni titre, d'obtenir la
condamnation de Madame E
R
et Madame S
V
R
à
libérer l'emplacement JS 29 sous astreinte, d'obtenir la condamnation de
Madame Eugénie ROUSSEAUX et Madame S
V
-R
au
paiement d'une indemnité d'occupation, et d'obtenir la condamnation de la SAS
LES VIVIERS ATLAS TOURISME a laissé Madame Eugénie ROUSSEAUX et
Madame S
V
-R
pénétrer dans le camping pour accéder à
leur mobil-home.
Renvoie sur ces questions les parties à se pourvoir au fond comme il appartiendra.
Déboute la SAS LES VIVIERS ATLAS TOURISME de sa demande en paiement
d'un arriéré de loyers pour la période antérieure au 1er janvier 2014.
Dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de
procédure civile en faveur de l'une quelconque des parties.
Dit que chacune des parties conservera à sa charge les dépens qu'elle a exposés
La présente décision a été signée par Dominique DE MALAFOSSE, Première
Vice-Présidente, et par Véronique DUPHIL, Greffière.
Le Greffier,
Le Président,

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