Présentation détaillée de l`Eglise St Julien

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Présentation détaillée de l`Eglise St Julien
EGLISE SAINT-JULIEN DE CHAURIAT
Paroisse Saint Pierre du Val d'Allier
Chauriat possède deux églises très proches : l'église Sainte-Marie, ancienne église paroissiale, en
partie carolingienne, remaniée au XIIe, rachetée à la révolution comme bien national et devenue
chai à vin, - les Caves de l'Abbaye, et l'église Saint-Julien, dédiée à Saint Julien de Brioude.
Edifiée aux XIe-XIIe siècles en même temps qu'un prieuré bénédictin dépendant du monastère de
Sauxillanges, rattaché à la grande abbaye de Cluny par l'intermédiaire de La Chaise-Dieu. A
l'époque, chaque abbaye avait sous sa dépendance un réseau de prieurés. Les églises les plus
remarquables étaient à l'usage, non des paroisses, mais des abbayes et de leurs prieurés. Le prieur
de Saint-Julien, seigneur de Chauriat, partageait son privilège - donc ses bénéfices - avec l'évêque
de Clermont, d'où les nombreuses querelles qui, au cours des siècles, opposèrent le prieur et les
habitants de Chauriat à l'Evêque de Clermont .
ARCHITECTURE
Eglise romane auvergnate composite. L'art roman auvergnat, empreint d'équilibre, de spiritualité,
est fidèle à l'austérité de l'art préroman. Il a des caractéristiques spécifiques, bien représentées par
les églises de type majeur (St-Nectaire, St-Saturnin). St-Julien est du même type, mais incomplet
car probablement ruiné par les tremblements de terre du XVe siècle. Période où le roi fait fortifier le
bourg.
Historique de la construction
Vers 1050, Construction des parties basses de la nef et des collatéraux.
Vers 115O, Construction du Transept
XVe – Réfections importantes : la voûte de la nef, après écroulement, est reconstruite plus
basse par souci de solidité. Elle masque alors les tribunes des bas-côtés, (fenêtres encore visibles à
l'extérieur de l'église côté Nord). Ces tribunes, voûtées en ¼ de cercle, servent à épauler le berceau
central, et sont elles-mêmes renforcées par des contreforts extérieurs.
− Le chevet à fond plat remplace le choeur à chapelles rayonnantes qui devait exister
auparavant, peut-être en raison d'un manque de ressources financières des moines.
− 1840 - Classée « Monument Historique », elle subit d'importantes réfections : façade Ouest,
reconstitution de la mosaïque polychrome de la façade sud.
− 1865 – Peintures intérieures conformes à la mode italianisante de l'époque.
− 1885 - Le clocher, détruit au moment de la Révolution, et remplacé par une tour carrée, est
reconstruit dans le type octogonal classique des clochers romans auvergnats, avec flèche.
− 1845 – Modification de la façade ouest qui dénature la travée du narthex. L'intérieur de
l'église est entièrement peint, comme à Issoire
.
INTERIEUR
Entrée par la façade ouest, par un portail aux vantaux du XIIe siècle.
Dimensions (proches de St-Nectaire): longueur : 38 mètres environ; Largeur de la nef : 5m environ.
Plan : Nef de 4 travées : Narthex ( vestibule jadis réservé aux catéchumènes en attente du baptême,
première travée de la nef), suivi d'une triple nef (nef centrale flanquée de bas-côtés étroits) à 3
travées d'inégale longueur
.La voûte en berceau brisé reposant sur des arcs doubleaux a été reconstruite plus basse que la voûte
primitive. Colonnes cylindriques au centre, engagées dans des piles cruciformes aux extrémités.
Bas-côtés voûtés d'arête, et scandés par des arcs doubleaux qui retombent maladroitement sur les
piles cylindriques des 2ème et 3ème travées. Les tribunes qui les surmontent ont été cachées par la
voûte reconstruite au Xve.
Transept saillant avec massif barlong et croisillons.
− croisée du transept (carré, symbole de la terre) surmontée d'une coupole (symbole du ciel)
sur « trompes » ( petites voûtes en cul de four qui permettent de passer du plan carré au plan
octogonal. La coupole est soutenue par quatre grandes arcades extradossées de murs
diaphragmes qui s'ouvrent sur la nef et les croisillons par des baies jumelées (source
d'éclairage).
− Les deux croisillons sont dotés de deux absidioles (chapelles) orientées vers l'est. La
première travée des croisillons est voûtée en ¼ de cercle pour épauler la coupole. La
deuxième est surmontée d'un berceau transversal.
Sanctuaire : choeur et bas-côtés surélevés à travées droites, mais à chevet plat au lieu de l'abside
avec déambulatoire et chapelles rayonnantes attendues, qui existaient peut-être dans l'église
primitive et se seraient écroulés au XVe. Peut-être également y eut-il une crypte.
EXTERIEUR
Façade sud Belle perspective. On retrouve les caractéristiques du roman auvergnat :
− massif barlong du transept avec son clocher octogonal
− rare décor de mosaïques polychromes de style byzantin (tuf volcanique, arkose blonde, grès,
andésite violette), à damiers cloisonnés par des cordons de billettes d'origine tunisienne
− modillons à copeaux d'origine mozarabe (Cordoue) soulignant la corniche.
− grands arcs de décharge correspondant aux divisions intérieures des travées.
MOBILIER
Choeur
Retable en bois du XVIIIe siècle surmontant le maître-autel, racheté sans doute à une grande
congrégation, ou démonté lors de la Révolution, mis à l'abri dans un village, puis remonté : travail
remarquable, belles volutes, ornementation riche. Les statues en bois initialement placées sur ce
retable sont dans une chapelle latérale Sud : un Christ encadré de deux saints.
Il abrite une belle Vierge romane en bois classée XIe siècle, perdue à la Révolution, retrouvée très
abimée en 1885, récemment restaurée par les Beaux-Arts. Autrefois Vierge noire marouflée, elle est
devenue polychrome.
Chapelles
Le vitrail de la fenêtre centrale du Choeur retrace la vie légendaire de Sainte Marcelle, sainte
locale dont la « statue miraculeuse »se trouve dans la chapelle du croisillon sud. Originaire de
Chauriat, cette petite paysanne a vécu au IXe siècle. Le 4 juillet, un pélerinage honore chaque année
le petit oratoire qui lui est dédié sur le puy de Mur. Une jolie chasse du XIVe contenant ses reliques
a dû être mise à l'abri, et n'est plus visible dans l'église.
Dans la même chapelle :
- (15) - Statue de Saint Sébastien en bois polychrome
- (16) - statue de saint Verny, patron des vignerons, charmante statue de la fin du XVIIIe,
intéressant document sur l'habillement de l'époque. Les conscruts la promenaient dans les vignes
jadis, et la molestaient en cas de mauvaise récolte.
- Statues « baroques » en bois doré.
LES CHAPITEAUX
Préservée des invasions barbares par sa situation géographique, l'Auvergne a gardé des traces
multiples du passé gallo-romain, notamment dans la sculpture romane : sirènes, masques entre des
feuilles d'acanthe, personnages courts, trapus, draperies larges.
NARTHEX
Le narthex faisait la transition entre les désordres du monde, qu'on abandonne, et l'Harmonie du
monde sacré dans lequel on entre. Ce qu'il en reste à Chauriat après les réfections du XVe est
reconnaissable à des colonnes surbaissées (réemploi?) et à des chapiteaux « moralisants » qui
flétrissent les vices et les pièges du démon.
(1) - A gauche en entrant, une tête d'homme crache des sauriens qui lui mordent les oreilles :
représentations issues de l'Apocalypse, représentant peut-être la médisance.
(3)- Chapiteau des sirènes – Thème fréquent à l'époque romane. Ces belles créatures au charme
maléfique, suppôts de Satan au Moyen-Age, symbolisent l'attrait des plaisirs de ce monde.
Sculpture de facture nette, grasse. Sens maléfique peut-être, mais avant tout motif ornemental qui
met en valeur les points forts du chapiteau, selon l'ordonnance de la corbeille corinthienne
(20) - Superposition d'in-folio: livres sacrés à l'entrée du temple ?
A gauche, Fonts baptismaux insérés dans le mur. Au-dessus, tableau du XXe siècle : Marthe et
Marie (le Christ s'éloigne), d' Elisabeth Faure, peintre fresquiste condisciple de Brayer.
BAS-COTE NORD
(4) - Jeune homme chevauchant un bouc, symbole de luxure, et âne musicien jouant de la harpe.
L'âne représente la sottise depuis l'Antiquité. (Même association des deux thèmes à St Nectaire
(7) - Tête dans les feuillages, dérivé de la corbeille corinthienne.
NEF CENTRALE
(5) - Aigles tenant dans leurs serres un petit mammifère – Style égyptien. D'après les Bestiaires,
l'aigle représente le Christ et sa supériorité sur le reste de la Création. Thème parvenu en occident
par l'intermédiaire des manuscrits.
(6) - La multiplication des pains ou la Cène – Trois scènes en un résumé théologique typique de
l'art populaire : sur deux faces, la multiplication des pains (5 pains et 2 poissons) puis à l'angle du
chapiteau un lavement des pieds – qui accompagne la Cène chez saint Jean, et enfin un Ange avec
deux femmes, - annonce de la Résurrection. Le thème de la Multiplication des Pains est fréquent
dans la sculpture des sarcophages paléo-chrétiens et voulait s'opposer aux hérétiques qui niaient
l'Eucharistie. Adaptation maladroite à la forme de la corbeille, personnages, naïfs, raides,
inexpressifs avec leurs yeux ronds et leurs larges oreilles. Ils sont serrés, les pieds alignés,
identiques, sous une table étroite dont la nappe forme une arabesque aux plis réguliers. Le Christ,
la tête plus grosse que celle des apôtres, bénit l'assemblée.
CROISEE DU TRANSEPT
Pile nord-est (3 faces historiées) :
(9) - Face nord - A l'entrée du déambulatoire côté nord, deux anges déploient des phylactères (ou
parchemins) . Au lieu de versets de l'Evangile, le sculpteur de Chauriat, s'est contenté d'inscrire
« angelus ». L'ange dans la sculpture s'est peu à peu substitué à l'Evangéliste.
(10) - Face Est - Un énorme masque renversé engoûle des serpents et des palmettes torsadées qui
prennent l'aspect d'un arbre, transposition des fantaisies ornementales des manuscrits.
(13) - Face Sud (dans le choeur) : deux chapiteaux curieux
− Un homme couché dans une perspective qui rappelle celle des gardiens du St-Sépulcre
(Issoire) semble maussade, et serre un objet rond dans la main droite.
−
A côté : deux figures énormes semblables à des masques évoquent des oeuvres populaires.
CHOEUR
(12) - Personnage en buste tenant des branches, variante du chapiteau romain à feuillages de type
corinthien, avec masque humain parmi les volutes.
BAS-COTE SUD
(18) - Combat d'anges avec dragon, et damné – Deux anges (Saint Gabriel et Saint Michel)
pourfendent un homme nu et un dragon, vision issue de l'Apocalypse.
(19) - Montreur de singe - Scène populaire pittoresque, thème médiéval fréquent. Une énorme
corde est passée au cou du singe, tirée par un homme vêtu à la mode du XIIe siècle. Au MoyenAge, « le diable a la figure du singe » dit un Bestiaire : le singe figure le pécheur suppôt de Satan,
que son dompteur, image du Bon Chrétien, retient captif par la doctrine chrétienne.