Bahloul J. — Le Culte de la table dressée : rites et traditions de la

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Bahloul J. — Le Culte de la table dressée : rites et traditions de la
Journal d'agriculture traditionnelle
et de botanique appliquée
Bahloul J. — Le Culte de la table dressée : rites et traditions de la
table juive algérienne
Jacques Barrau
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Barrau Jacques. Bahloul J. — Le Culte de la table dressée : rites et traditions de la table juive algérienne. In: Journal
d'agriculture traditionnelle et de botanique appliquée, 30ᵉ année, bulletin n°3-4, Juillet-décembre 1983. pp. 317-318.
http://www.persee.fr/doc/jatba_0183-5173_1983_num_30_3_3908_t1_0317_0000_2
Document généré le 28/09/2015
- 317 Puisque cette traduction française se réclame d'ethnologie, on peut aussi s'étonner de lire,
en page 180, que, au Brésil, la farine de manioc « est utilisée comme condiment » (mais là, l'erreur
est certainement due aux auteurs de la version originale anglaise). En fait, la farinha de manioc
sert, en Amérique tropicale, à éponger la sauce comme chez nous le pain. Ce curieux classement
de cette farinha comme « condiment » est justifié par le fait que : « elle est présente sur toutes les
tables de restaurant, à la façon du parmesan râpé en Italie ». On ne peut trouver meilleur exemple
d'interprétation abusive parce que caricaturalement ethnocentrique de la place et du rôle d'un
aliment dans le repas des autres. Curieusement « Herbes et épices » ne parle point de l'utilisation
des sous-produits de l'extraction de la fécule de manioc pour préparer en cette même Amérique
tropicale de véritables condiments !
Toujours à propos de l'Amérique du Sud et toujours à la page 180 de « Herbes et épices »,
il est surprenant de lire que le Quinoa (Chenopodium quinoa Willd.) est un condiment alors qu'il
s'agit d'une pseudo-céréale ayant servi et servant d'aliment de base.
Bref, on pourrait aisément relever d'autres erreurs du même ordre. Il n'en reste pas moins,
que, en dépit de ces dernières, « Herbes et épices » (et j'élimine délibérément l'abusif « Botanique
et Ethnologie » rajouté par l'éditeur français !) apporte aux lecteurs sous une forme agréable une
information générale sur ce sujet complétée par une fort belle illustration.
Si toutefois ces lecteurs veulent en savoir plus et mieux sur les épices et disposer à leur égard
d'une information botanique et économique précise, qu'ils se reportent donc à l'excellent Spices
de J.W. Purseglove, E.G. Brown, CL. Green et S.R.J. Robbins. Le maître-d'œuvre de cet ouvrage,
J.W. Purseglove, l'un des meilleurs spécialistes mondiaux de la botanique des plantes tropicales
nous avait déjà comblé, en 1968, avec la publication de son Tropical crops, chef-d'œuvre
d'Agro-Botanique des pays tropicaux. Spices est de la même veine et de la même qualité. Je regrette
toutefois que l'excellente illustration de Spices ne soit pas aussi abondante que celle de Tropical
Crops.
Dans son Guide culinaire des épices, aromates et condiments, publié en 1978, Robert Landry
ne se pique ni de botanique ni d'ethnologie. Il met cependant à la disposition des lecteurs son
incontestable érudition « épicière » complétée par l'excellente connaissance pratique qu'il a acquise
à ses fourneaux de l'usage de ces épices, aromates et condiments. C'est là un petit ouvrage
sympathique, accessible au public à un prix modeste et foisonnant d'informations utiles. Je ne ferai
pas grand grief à l'auteur de quelques petites erreurs qu'on peut relever dans son texte, sachant
la peine qu'il a prise à s'informer auprès de spécialistes. Il est toutefois dommage de relever, pour
seul exemple (en p. 98) que « le cacao est une poudre aromatique tirée des cabosses (fèves) du
cacaotier... » alors que la cabosse est le nom donné au fruit du cacaoyer (il suffit de consulter le
« Petit Larousse » pour le savoir) contenant des graines ou « fèves » qui, elles, servent à préparer
le cacao. Péché mineur comme quelques autres qui n'enlèvent rien à l'intérêt du Guide culinaire
des épices, aromates et condiments de Robert Landry.
Jacques Barrau
Bahloul J. — Le Culte de la table dressée : rites et traditions de la table juive algérienne.
Éd. A.M. Métailié, Paris 1983, 304 p. Glossaire, importante bibliographie.
Diffusion P.U.F.
Ethnologue et sociologue, Mademoiselle Joëlle Bahloul nous offre, avec cet ouvrage et sous
une forme légèrement modifiée et augmentée ce qui fut sa remarquable thèse de Doctorat du
3e cycle en Ethnologie brillamment soutenue en 1981 à l'École des Hautes Études en Sciences
Sociales.
Dans le champ de l'anthropologie de l'alimentation, ce livre est un modèle de recherche
originale qui nous éclaire particulièrement sur la signification des saveurs, des gestes et des paroles
à propos de cuisine et de repas quant à l'identité culturelle.
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:
Joëlle Bahloul a su porter sur sa propre culture, la cuisine et les repas qui la caractérisent,
un regard à la fois impliqué et distancié.
Elle vit sa culture dans ses aspects culinaires et prandiaux mais sait aussi les voir « de
l'extérieur ».
Cela nous donne une étude fascinante de la cuisine et de la table sépharades dans leurs
dimensions matérielles, sociales et symboliques. L'étude est d'autant plus attachante qu'elle montre
comment la communauté sépharade algérienne émigrée en France a su préserver son identité en
maintenant au mieux ses traditions gastronomiques au sens vrai du terme.
Sous le beau titre d'« aliments mémoire », Mademoiselle Bahloul traite en quelques
chapitres aux titres évocateurs (« les animaux qu'on mange : des gardes frontières », « les
nourritures végétales un jardin déraciné »...) des aliments utilisés, des règles qui président à leur
usage et de leur symbolique. Elle nous apporte une nouvelle et éclairante contribution sur la
signification des interdits alimentaires de la religion juive.
Les deux autres parties de son ouvrage (« le culte du cuit : logique culinaire, logique sociale »
et « le calendrier alimentaire : le balisage du temps juif ») nous font pénétrer, par la cuisine et la
salle à manger, au cœur de la culture sépharade. Le sens des fêtes juives est clairement expliqué
au travers des repas qui les marquent.
En annexe, Mademoiselle Bahloul expose les méthodes suivies pour mener à bien sa
recherche et elle nous donne aussi quelques alléchantes recettes de la gastronomie juive algérienne.
C'est donc un bel exemple de recherche en anthropologie de l'alimentation et ce livre profite
encore du réel talent d'écrivain de son auteur, talent qui participe aussi de l'attachement chaleureux
que porte Mademoiselle Bahloul à la richesse de sa culture qu'elle sait ainsi faire comprendre et
apprécier.
Un livre à lire et à faire lire !
Jacques Barrau
Hubert A. — Le Pain et l'olive : aspects de l'alimentation en Tunisie. Éditions du Centre
National de la Recherche Scientifique, Centre régional de publication de Lyon,
1984, 152 p., bibliographie, index des termes arabes avec translittération,
illustrations.
Il s'agit là d'un inventaire descriptif des matières premières alimentaires, des techniques de
conservation des aliments, des techniques de cuisson des repas, des interdits, des variations
saisonnières de l'alimentation, des régimes particuliers à la grossesse, l'allaitement et le sevrage,
le tout se terminant par une brève comparaison entre l'alimentation de la ville et celle de la
campagne.
Ce petit manuel pourra être de quelque utilité à ceux qui, ne connaissant pas l'alimentation
et la cuisine tunisiennes, iraient y conduire des recherches. C'est en la matière un petit guide
pratique.
On regrettera toutefois le fait que cet ouvrage tient plus du catalogue que d'une véritable
étude en « ethnocuisine » ou en anthropologie de l'alimentation.
L'auteur nous avait habitués à d'autres de ses travaux dont on appréciait la qualité
ethnologique et ethnographique. Espérons que sur la base des données qu'elle a ainsi rassemblées,
Madame Hubert nous donnera prochainement une belle étude anthropologique de l'alimentation
tunisienne.
Jacques Barrau