DUFOUR, MOTTET

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DUFOUR, MOTTET
Société en nom collectif
Volume 10, Numéro 5
Mai 2015
CAPSULE JURIDIQUE EN DROIT IMMOBILIER
Un courtier ne peut choisir à la place de l’acheteur
Garcia Lorenzo c.Migas et Royal Lepage Lavallée et al. 2015 QCCS 1327
Par Stéphanie Chartray, avocate
Dans cette récente décision, la Cour supérieure tient des propos sévères à l’endroit
d’un courtier immobilier en plus de retenir sa responsabilité en raison de son défaut
de transmettre à l’acheteur de l’information reçue de la part de son client vendeur.
Les faits
Marta Garcia Lorenzo et Michel Salko (ci-après les « les acheteurs ») recherchent
une propriété dans le secteur de l’Outaouais.
Par hasard, ils passent devant le 68, de la Baie et leur intérêt est immédiat. Ils
communiquent alors avec le courtier immobilier inscripteur, Jacques Tremblay, de
la firme Royal Lepage Vallée de l’Outaouais et une visite des lieux est organisée.
À l’occasion de la visite, ils signent une promesse d’achat d’un montant de
130 000 $.
La promesse d’achat est conditionnelle à une inspection préachat. Les acheteurs
lèvent cependant la condition relative à l’inspection préalable sans avoir pris
connaissance du rapport écrit de l’inspecteur préachat.
Dans le mois suivant leur prise de possession, les acheteurs découvrent que de
nombreux vices affectent leur immeuble, notamment la maison devient
extrêmement humide, de la moisissure est apparue de manière généralisée dans
l’ensemble du bâtiment et des infiltrations d’eau au niveau de la jonction des murs
et des plafonds sont survenues. La maison est dans un état de dégradation avancée
et les acheteurs ne peuvent plus y habiter.
Les demandeurs réclament la somme de 168 569 $, représentant le coût des travaux
correctifs requis pour corriger les vices dénoncés au vendeur et au courtier
immobilier. L’inspecteur préachat est également poursuivi mais nous n’en
traiterons pas dans la présente analyse.
Analyse
Responsabilité du vendeur
Dans l’analyse de la responsabilité du vendeur, le juge se questionne d’abord sur la
conduite des acheteurs. Il leur reproche de n’avoir posé aucune question au courtier
immobilier et aux vendeurs, notamment pour connaître l’historique de la maison.
La fiche MLS indiquait que certaines réparations avaient été effectuées, cependant
ils n’ont fait aucune vérification à cet effet et n’ont pas demandé à voir les pièces
justificatives attestant des travaux réalisés. Ils ont retenu les services d’un
inspecteur mais ont lu son rapport écrit que six mois après l’achat.
Par conséquent, ils n’avaient jamais pris connaissance du rapport écrit de
l’inspecteur avant de lever la condition stipulée à ce sujet dans l’offre d’achat. Si
les acheteurs avaient lu ce rapport, ils auraient pu constater que plusieurs vices
affectaient leur immeuble et leur décision d’acheter aurait pu être différente.
Le juge conclu donc que les acheteurs ne rencontrent pas le critère de l’acheteur
diligent puisqu’ils ont fait preuve d’une négligence évidente et que cela est fatal à
leur recours. Au surplus, ils n’ont pas dénoncé aux vendeurs les problématiques
affectant leur immeuble.
La poursuite contre le vendeur est donc mal fondée.
Responsabilité du courtier immobilier
Les choses en sont tout autre relativement à la poursuite contre le courtier
immobilier et l’agence immobilière. Le juge conclu que le courtier immobilier
instrumentant la vente a fait preuve d’un manque de professionnalisme important en
plus de manquer à ses obligations déontologiques. Surtout, il a contrevenu à son
devoir de conseil envers l’acheteur en ne lui divulguant pas des informations
importantes qui avaient été portées à sa connaissance.
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Notamment, il a été informé par le vendeur du fait que lorsque les rénovations de la
salle de bain ont été effectuées en 2005, celui-ci a appris que les murs de la salle de
bain à rénover n’étaient pas isolés. Il n’a cependant pas jugé bon de divulguer cette
information aux acheteurs, non plus qu’à l’inspecteur préachat alors qu’il était
présent lors de son inspection.
En refusant de transmettre cette information, il a carrément décidé à la place des
acheteurs et s’est arrogé le droit de prendre une décision qui ne lui appartenait pas.
Il devait fournir cette information aux acheteurs afin que ceux-ci puissent décider en
toute connaissance de cause.
En regard des témoignages entendus, le juge considère que la seule motivation du
courtier immobilier dans cette transaction était sa rétribution et que c’est pour cette
raison qu’il a fait défaut de divulguer cette information, manquant à ses obligations
professionnelles.
Le courtier immobilier est donc responsable d’un montant de 15 000 $, soit la
valeur des travaux liés à l’isolation, les seuls qui donnaient lieu à indemnisation.
Conclusion
Le courtier immobilier a l’obligation déontologique de transmettre aux acheteurs
toute information pertinente qui serait susceptible d’affecter de façon défavorable la
transaction.
Dans le doute, l’information doit être transmise. Ce n’est pas au courtier de décider
ce que l’acheteur a le droit ou non de savoir.
Dans cette affaire, le courtier immobilier s’en est tiré à bon compte en n’étant
condamné qu’à un montant de 15 000 $. Nous considérons que le courtier
immobilier aurait pu être condamné à un montant beaucoup plus important si le juge
n’avait pas conclu que les acheteurs avaient été négligents et si ceux-ci avaient
dénoncés en temps utile ces problématiques.
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Me Stéphanie Chartray a été admise au Barreau du Québec en 2011. Me Chartray pratique dans
le domaine du litige civil et commercial.
La firme Dufour, Mottet Avocats est en mesure de vous conseiller par l’entremise de plusieurs de
ses avocats, en droit immobilier et autres domaines de droit.
Richard Dufour, associé
Annie Cadieux, avocate
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Jean Marius Mottet, associé
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