Exécution forcée
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Exécution forcée
Claire Debourg Fiche de niveau 3. Droit des contrats / Responsabilité contractuelle / 13 novembre 2007 Exécution forcée L’exécution se définit comme l’accomplissement, la réalisation d’une chose. En droit, il s’agit de la réalisation, par le débiteur, de la prestation due. Par extension, il s’agit également de la sanction permettant d’obtenir cette réalisation si elle n’était pas spontanée. Les modalités d’exécution forcée Le créancier d’une obligation contractuelle non exécutée peut en effet demander au juge de contraindre à l’exécution le débiteur qui ne s’est pas exécuté spontanément. Le juge peut alors soit ordonner l’exécution forcée en nature de l’obligation, soit décider de convertir cette obligation en dommages et intérêts et contraindre le débiteur défaillant au paiement d’une somme d’argent (exécution par équivalent). Cette seconde forme d’exécution soulève un certain nombre de débats, notamment quant à sa véritable appartenance aux mécanismes d’exécution forcée et quant à sa distinction de la réparation du dommage causé par l’inexécution en cas de mise en jeu de la responsabilité contractuelle du débiteur. La forme d’exécution de principe est généralement considérée comme étant celle de l’exécution forcée en nature, mais il est difficilement parfois conciliable avec la nécessaire protection de la liberté individuelle du débiteur. La question a donc soulevé de nombreux débats quant à l’existence, les fondements et la portée du principe d’exécution forcée en nature, en partie relancés par le récent courant d’analyse économique du droit. Champ d’application de l’exécution forcée en nature Pour déterminer le régime de sanction applicable en cas de défaillance, il convient de distinguer entre différents types d’obligations. Obligations de donner : Pour les obligations de donner, il suffit de saisir le bien pour exécuter. La contrainte ne porte que sur le bien saisi et non sur la personne du débiteur. L’exécution forcée ne pose donc aucun problème. Obligations de faire et de ne pas faire : En cas d’inexécution de ces obligations, le principe posé par l’article 1142 C. civ. semble être celui d’une exécution par équivalent, c’est-à-dire par le paiement de dommages et intérêts. L’idée est qu’on ne peut pas contraindre matériellement le débiteur à faire ou ne pas faire quelque chose. Il s’agit de ne pas porter atteinte à son intégrité physique et à sa liberté. En principe, le juge doit donc convertir cette obligation insusceptible d’exécution forcée en nature en dommages et intérêts et ordonner une exécution par équivalent. Toutefois, cette sanction est apparue insatisfaisante au regard du principe de la force obligatoire des contrats. L’article 1142 C. civ. a donc été rapidement interprété comme n’interdisant pas nécessairement au juge d’ordonner une exécution en nature, à tel point qu’on parle aujourd’hui d’une inversion du principe. Il est aujourd’hui admis que le créancier d’une obligation de faire ou de ne pas faire peut en demander l’exécution en nature, à moins que cette exécution ne porte atteinte à une liberté essentielle du débiteur. La Cour de cassation a ainsi jugé que « la partie envers laquelle un engagement contractuel n'a point été exécuté a la faculté de forcer l'autre à l'exécution de la convention lorsque celle-ci est possible » (Cass. civ. 1re, 16 janvier 2007). Ce n’est donc que si l’exécution est impossible que le juge ordonnera l’exécution par équivalent. Des moyens détournés permettent également de parvenir à l’exécution en nature, sans contraindre la personne du débiteur. - En premier lieu, certaines obligations peuvent s’exécuter sans l’intervention du débiteur (essentiellement des obligations de ne pas faire). Le juge doit donc ordonner l’exécution forcée. Par exemple, l’article 1143 C. civ. permet au créancier d’une obligation de ne pas faire de demander la destruction de ce qui a été accompli en violation de cette obligation. Si le débiteur refuse, le juge peut autoriser le créancier à le faire, aux frais du débiteur. - D’autre part, l’article 1144 C. civ permet au créancier de faire exécuter l’obligation par un autre, au frais du débiteur défaillant (faculté de remplacement). - Enfin, le juge a souvent recours au mécanisme de l’astreinte. Il s’agit d’un moyen de contrainte indirect qui porte sur les biens du débiteur et qui vise à l’inciter à exécuter. Le juge lui accorde un délai pour exécuter et précise que, passé ce délai, il devra payer une certaine somme par jour de retard. On parle alors d’exécution forcée indirecte puisque la contrainte ne porte pas directement sur la personne du débiteur, mais sur ses biens. S’il n’exécute jamais, le juge le condamnera à des dommages et intérêts, qui s’ajouteront au montant de l’astreinte. Bibliographie Y-M. LAITHIER, Etude comparative des sanctions de l’inexécution du contrat, LGDJ, 2004. Les sanctions de l'inexécution des obligations contractuelles, Études de droit comparé, Bruylant, LGDJ, 2001. N. MOLFESSIS, « Force obligatoire et exécution : un droit à l’exécution en nature ? », RDC 2005, p. 37.