EXPRESS – INFO n°0 9/ 2 0 10 - institut des droits de l`homme des

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EXPRESS – INFO n°0 9/ 2 0 10 - institut des droits de l`homme des
Institut des Droits de l’Homme des Avocats
Européens
Eu r o p e a n B a r H u m a n R i g h t s In s t i t u t e
EXPRESS – INFO
n °0 9 / 2 0 10
SEPTEMBRE 2010
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NSS C
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LIBERTE
D’EXPRESSION
LIBERTE D’EXPRESSION
L’article 10 de la Convention
Article 10
SANOMA UITGEVERS B.V. C. PAYS-BAS ………..1
DROIT A UN RECOURS EFFECTIF
Article 13
MCFARLANE C. IRLANDE …………………………4
DROIT A LA VIE
Grande Chambre
LA SAISIE DE MATÉRIAUX PROVENANT
DE SOURCES CONFIDENTIELLES DE
JOURNALISTES JUGÉE ILLÉGALE
Article 2
BEKIRSKI C. BULGARIE…………………..……….6
INTERDICTION DES TRAITEMENTS
INHUMANS ET DEGRADANTS
SANOMA UITGEVERS B.V. C. PAYS-BAS
14.09.2010
Violation de l’article 10
Article 3
Y.P ET L.P. C. FRANCE …………………………..8
ISKANDAROV C. RUSSIE……………………...….10
9
DROIT A UN PROCES EQUITABLE
Article 6
RUMPF C. ALLEMAGNE .……………………………11
DROIT AU RESPECT DE LA VIE PRIVEE ET
FAMILIALE
Article 8
UZUN C. ALLEMAGNE …..……………………… 13
DROIT A LA LIBERTE ET A LA SURETE
Article 5
SHOPOV C. BULGARIE………………………………15
ALERTE URGENTE AVOCATS……………………16
VIENT DE PARAITRE………………………...…….20
. L’affaire concerne des photographies, devant
accompagner un article au sujet de courses
automobiles illégales, que la société requérante fut
contrainte de remettre à la police qui enquêtait sur
une autre infraction, bien que les journalistes se
fussent fortement élevés contre l’obligation de livrer
des informations propres à permettre l’identification
de leurs sources.
Le 12 janvier 2002, une course de voitures illégale
eut lieu dans une zone industrielle à la périphérie de
la ville de Hoorn. La société requérante affirme que
des journalistes travaillant pour son magazine
Autoweek – et qui avaient l’intention de publier un
article au sujet des courses automobiles illégales – se
virent offrir la possibilité de prendre des photos de la
course à condition de donner l’assurance que
l’identité des participants ne serait pas divulguée.
Les photographies devaient être retouchées de
2
manière à ce que les voitures et les spectateurs ne
pussent être identifiés, puis sauvegardées sur un CDROM. Finalement, la course fut interrompue par la
police, qui était sur place. Il ne fut procédé à aucune
arrestation.
La police fut par la suite amenée à penser que l’un
des véhicules (une Audi RS4) qui avait participé à la
course de rue avait été utilisée pour s’enfuir par les
auteurs d’un casse bélier qui avait eu lieu le 1er
février 2001 au cours duquel un distributeur de
billets avait été dérobé et un passant menacé à l’aide
d’une arme à feu.
Plus tard dans la même journée, la police tenta de se
faire remettre le CD-Rom où se trouvaient contenues
les photographies en question. La société requérante
s’y refusa afin de protéger l’anonymat de ses sources
journalistiques. Le procureur d’Amsterdam délivra
alors à la société requérante une injonction au titre
de l’article 96a du code de procédure pénale lui
ordonnant de remettre les photographies ainsi que
toutes pièces connexes concernant la course. Le
rédacteur en chef du magazine refusa de remettre les
photographies, invoquant à nouveau l’engagement
que les journalistes avaient pris envers les
participants quant à la protection de leur anonymat.
Le 1er février 2002 à 18 h 01, le rédacteur en chef fut
arrêté et fut présenté au procureur d’Amsterdam. Il
fut libéré à 22 heures.
L’avocat de Sanoma Uitgevers B.V. invita les
procureurs, qui y consentirent, à solliciter
l’intervention du juge d’instruction de garde du
tribunal d’arrondissement d’Amsterdam qui, tout en
reconnaissant d’emblée que la loi ne lui donnait
aucune compétence en la matière, exprima l’avis que
les nécessités de l’enquête pénale l’emportaient sur
le privilège journalistique de la société requérante.
Le 2 février 2002 à 1 h 20 du matin, la société
requérante remit, non sans protester, le CD-ROM au
procureur, qui le plaça formellement sous main de
justice.
Le 15 avril 2002, la société requérante forma une
plainte devant le tribunal régional, sollicitant la
mainlevée de la saisie et la restitution du CD-ROM,
la délivrance à la police et au parquet d’une
injonction leur ordonnant de détruire les éventuelles
copies des données enregistrées sur le CD-ROM et
d’une autre leur interdisant de prendre connaissance
ou de faire usage des informations contenues dans le
CD-ROM. Le 19 septembre 2002, le tribunal
d’arrondissement fit droit uniquement à la demande
de mainlevée de la saisie et de restitution du CDROM à la société requérante.
Invoquant l’article 10, la société requérante se
plaignait d’avoir été contrainte de livrer à la police
des informations propres à permettre l’identification
des sources de ses journalistes.
Décision de la Cour
LE JOURNAL DES DROITS DE L’HOMME
Article 10
Comme la chambre, la Cour n’aperçoit aucune
raison de mettre en doute l’affirmation de Sanoma
Uitgevers B.V. selon laquelle ses journalistes
s’étaient engagés à ne pas révéler l’identité des
participants à la course automobile illégale en
question. L’affaire concerne une injonction de
remise de matériaux journalistiques renfermant des
informations propres à permettre d’identifier les
sources journalistiques. Cela suffit pour que la Cour
estime que l’injonction constituait en soi une
ingérence dans la liberté de la société de recevoir et
de communiquer des informations garantie par
l’article 10 § 1.
Contrairement à la chambre, la Grande Chambre
estime toutefois que l’ingérence n’était pas « prévue
par la loi ».
Il n’est pas contesté que l’ingérence litigieuse avait
une base légale (l’article 96a § 3 du code de
procédure pénale). La discussion porte sur la qualité
de la loi (en particulier sur les garanties procédurales
requises).
La Cour relève qu’une injonction de divulgation des
sources peut avoir un impact préjudiciable non
seulement sur les sources, dont l’identité peut être
révélée, mais également sur le journal ou toute autre
publication visée par l’injonction, dont la réputation
auprès des sources potentielles futures peut être
affectée négativement par la divulgation, et sur les
membres du public, qui ont un intérêt à recevoir les
informations communiquées par des sources
anonymes.
Au premier rang des garanties exigées doit figurer la
possibilité de faire contrôler la mesure par un juge
ou tout autre organe décisionnel indépendant et
impartial. Le contrôle requis doit être mené par un
organe, distinct de l’exécutif et des autres parties
intéressées, investi du pouvoir de dire, avant la
remise des éléments réclamés, s’il existe un
impératif d’intérêt public l’emportant sur le principe
de protection des sources des journalistes et, dans le
cas contraire, d’empêcher tout accès non
indispensable aux informations susceptibles de
conduire à la divulgation de l’identité des sources.
Dans les cas urgents, un contrôle indépendant mené
à tout le moins avant que les éléments obtenus ne
soient consultés et exploités devrait être suffisant
pour permettre de déterminer si une question de
confidentialité se pose et de peser les divers intérêts
en jeu. Un contrôle indépendant pratiqué seulement
après la remise d’éléments susceptibles de conduire
à l’identification de sources est inapte à préserver
l’essence même du droit à la confidentialité.
Le juge ou autre organe indépendant et impartial doit
donc être en mesure d’effectuer avant toute
divulgation cette mise en balance des risques
potentiels et des intérêts respectifs relativement aux
Supplément 09/2010
3
éléments dont la divulgation est demandée. La
décision à prendre doit être régie par des critères
clairs, notamment quant au point de savoir si une
mesure moins intrusive peut suffire. Le juge ou autre
organe compétent doit avoir la faculté de refuser de
délivrer une injonction de divulgation ou d’émettre
une injonction de portée plus limitée ou plus
encadrée, de manière à ce que les sources concernées
puissent échapper à la divulgation de leur identité.
En cas d’urgence, une procédure doit pouvoir être
suivie qui permette d’identifier et d’isoler, avant
qu’elles ne soient exploitées par les autorités, les
informations
susceptibles
de
permettre
l’identification des sources de celles qui n’emportent
pas semblable risque.
Aux Pays-Bas, depuis l’entrée en vigueur de l’article
96a, cette décision est confiée au procureur plutôt
qu’à un juge indépendant. Du point de vue
procédural, le procureur est une « partie » et ne peut
guère passer pour suffisamment objectif et impartial.
La Cour estime qu’on ne peut pas voir non plus dans
l’intervention du juge d’instruction en l’espèce une
garantie adéquate ; le juge d’instruction avait un rôle
uniquement consultatif et son intervention s’est faite
en dehors de toute base légale, comme il l’a du reste
lui-même reconnu. Il n’avait donc pas la faculté de
délivrer une injonction, de rejeter ou d’accueillir une
demande d’injonction ou de mettre des conditions ou
des limites à une injonction. Pareille situation ne
peut guère être réputée compatible avec l’état de
droit. La Cour ajoute qu’elle serait parvenue à cette
conclusion sur chacun des deux aspects mentionnés
s’ils avaient été considérés séparément.
Ces déficiences ne furent pas purgées par le tribunal
d’arrondissement, tout aussi impuissant à empêcher
le procureur et la police d’examiner les
photographies stockées sur le CD-ROM une fois
celui-ci parvenu en leur possession.
En conclusion, la qualité de la loi était déficiente
dans la mesure où il n’existait aucune procédure
entourée de garanties légales adéquates qui eût
permis à la société requérante d’obtenir une
appréciation indépendante du point de savoir si
l’intérêt de l’enquête pénale qui était en cours devait
l’emporter sur l’intérêt public à la protection des
sources des journalistes. Il y a donc eu violation de
l’article 10 à raison du fait que l’ingérence
incriminée n’était pas « prévue par la loi ».
Broadcasting Corporation c. Royaume-Uni, n° 25794/94,
décision de la Commission du 18 janvier 1996 ;
Dickson c. Royaume-Uni [GC], n° 44362/04, CEDH
2007-XIII ; Dudgeon c. Royaume-Uni (Article 50), 24
février 1983, §§ 21-22, série A n° 59 ; Ernst et autres c.
Belgique, n° 33400/96, § 94, 15 juillet 2003 ; Financial
Times Ltd et autres c. Royaume-Uni, n° 821/03, §§ 56
et 70, 15 décembre 2009 ; Goodwin c. Royaume-Uni,
n° 17488/90, 27 mars 1996, Recueil des arrêts et
décisions 1996-II ; Hassan et Tchaouch c. Bulgarie
[GC], n° 30985/96, § 84, CEDH 2000-XI ; K. et T. c.
Finlande [GC], n° 25702/94, § 141, CEDH 2001-VII ;
Kafkaris c. Chypre [GC], n° 21906/04, § 124, CEDH
2008 ; Kovacic et autres c. Slovénie [GC], nos
44574/98, 45133/98 et 48316/99, § 194, CEDH 2008 ;
Leyla Sahin c. Turquie [GC], n° 44774/98, § 88,
CEDH 2005-XI ; Maestri c. Italie [GC], n° 39748/98, §
30, CEDH 2004-I ; Mooren c. Allemagne [GC], n°
11364/03, § 134, CEDH 2009 ; Nordisk Film & TV
A/S c. Danemark (déc.), n° 40485/02, CEDH 2005XIII ; Observer et Guardian c. Royaume-Uni, 26
novembre 1991, §§ 59 et 60, série A n° 216 ; Roemen
et Schmit c. Luxembourg, n° 51772/99, §§ 46 et 47,
CEDH 2003-IV ; Rotaru c. Roumanie [GC], n°
28341/95, § 52, CEDH 2000-V ; Šilih c. Slovénie
[GC], n° 71463/01, §§ 120 et 226, 9 avril 2009 ; The
Sunday Times c. Royaume-Uni (n° 1), 26 avril 1979, §
49, série A n° 30 ; The Sunday Times c. Royaume-Uni
(n° 2), 26 novembre 1991, § 51, série A n° 217 ;
Tillack c. Belgique, n° 20477/05, § 56, CEDH 2007XIII ; Tolstoy Miloslavsky c. Royaume-Uni, 13 juillet
1995, § 37, série A n° 316-B ; Varnava et autres c.
Turquie [GC], nos 16064/90, 16065/90, 16066/90,
16068/90, 16069/90, 16070/90, 16071/90, 16072/90 et
16073/90, § 229, CEDH 2009 ; Voskuil c. Pays-Bas, n°
64752/01, 22 novembre 2007, §§ 49, 65, 71 ; Wieser et
Bicos Beteiligungen GmbH c. Autriche, n° 74336/01,
§§ 62-66, CEDH 2007-XI. Sources Externes :
Résolution sur les libertés journalistiques et les droits
de l'homme adoptée lors de la 4eme conférence
ministérielle européenne sur la politique des
communications de masse (Prague, 7-8 décembre
1994) ; Résolution sur le secret des sources
d'information des journalistes adoptée par le Parlement
européen le 18 janvier 1994 (Journal officiel des
Communautés européennes no C 44/34) ;
Recommandation no R(2000)7 sur le droit des
journalistes de ne pas révéler leurs sources
d'information adoptée par le Comité des Ministres du
Conseil de l'Europe le 8 mars 2000.
SANOMA UITGEVERS B.V. C. PAYS-BAS requête no
38224/03 Violation de l'art. 10. Le juge Myjer, l’un des
membres de la majorité de la chambre qui avait conclu
à la non-violation, a exprimé une opinion séparée
concordante avec l’avis de la Grande Chambre selon
lequel il y a eu violation
Jurisprudence : Alinak c. Turquie, n° 40287/98, § 37,
29 mars 2005 ; Association Ekin c. France, n°
39288/98, § 56, CEDH 2001-VIII ; British
LE JOURNAL DES DROITS DE L’HOMME
Supplément 09/2010
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L’article 13 de la Convention
Grande Chambre
Le droit irlandais n’offre aucun recours
effectif pour des lenteurs injustifiées dans
une procédure pénale
MCFARLANE C. IRLANDE
10.09.2010
Violation des articles 13 et 6 § 1
L’affaire concerne le délai de plus de quatorze ans
mis par les autorités irlandaises pour entamer des
poursuites pénales contre le requérant, Brendan
McFarlane, pour des infractions qu’il aurait
commises en 1983 et pour lesquelles il fut mis hors
de cause en 2008.
En janvier 1998, M. McFarlane fut libéré sous
condition
après
avoir
purgé une
peine
d’emprisonnement en Irlande du Nord au motif qu’il
avait participé dans les années 1970 à un attentat à la
bombe dont l’Armée républicaine irlandaise (Irish
Republican Army – « l’IRA ») fut jugée responsable.
Quelques jours après sa libération, il fut arrêté et
placé en détention par la police irlandaise, puis
inculpé devant la Cour criminelle spéciale (Special
Criminal Court – la « SCC ») de Dublin de
séquestration arbitraire et de possession irrégulière
d’armes à feu, infractions qu’il aurait commises en
1983 après s’être évadé de prison. Le 13 janvier
1998, il bénéficia d’une libération conditionnelle,
assortie de certaines mesures de contrôle.
M. McFarlane engagea une procédure de contrôle
juridictionnel pour faire cesser les poursuites pénales
à son encontre au motif que le délai observé pour
entamer celles-ci compromettait ses chances de
bénéficier d’un procès équitable et que la nonconservation et la non-communication par les
autorités de poursuite de certains éléments de preuve
(tels que des empreintes digitales) avait réduit sa
capacité à contester la nature et la force des éléments
de preuve devant être utilisés lors de son procès. Ses
griefs relatifs au retard dans l’ouverture des
poursuites furent en fin de compte rejetés par la Cour
suprême en 2006 ; celle-ci conclut qu’il appartenait
manifestement aux autorités de poursuite de choisir
le moment auquel les poursuites devaient être
entamées. Quant à la perte des preuves, la Cour
suprême conclut que le juge statuant sur l’affaire
devrait établir s’il y avait eu une inéquité dont le
ministère public pouvait être tenu pour responsable.
Le requérant engagea une autre action en interdiction
des poursuites pour retard, qui fut rejetée en janvier
2008. M. McFarlane dut se déplacer quarante fois à
la SCC (un voyage de 320 km aller et retour) dans le
LE JOURNAL DES DROITS DE L’HOMME
cadre de la procédure pénale dirigée contre lui. Il fut
mis définitivement hors de cause en juin 2008.
Sous l’angle de l’article 6 § 1, le requérant se
plaignait du temps mis par les autorités irlandaises
pour engager des poursuites pénales contre lui. Sur
le terrain de l’article 6 § 3 d), il dénonçait la perte,
due selon lui à ce retard, d’éléments de preuve
cruciaux sur lesquels se fondait l’accusation, et
alléguait qu’il n’existait pas d’éléments à charge
hormis des interrogatoires de police contestables.
Invoquant l’article 8 § 2 (droit au respect de la vie
privée et familiale), il alléguait que son arrestation et
sa détention avaient constitué une ingérence
délibérée et disproportionnée dans sa vie privée et
familiale. Enfin, il invoquait aussi l’article 13 pour
se plaindre de l’absence en droit irlandais de recours
effectifs pour redresser ses griefs, notamment celui
relatif à la durée de la procédure.
Décision de la Cour
Article 13
La Cour ne trouve effectif aucun des recours internes
dont le gouvernement irlandais fait état.
En ce qui concerne le premier et principal recours
invoqué – recours en indemnisation de la violation
du droit constitutionnel à être jugé avec une
diligence raisonnable – la Cour estime qu’il existe
une incertitude importante quant à sa réalité.
Certes, le recours invoqué existe en théorie depuis
près de vingt-cinq ans, mais il n’a jamais été utilisé.
L’évolution et la disponibilité d’un recours que l’on
invoque, y compris sa portée et son champ
d’application, doivent être exposés avec clarté et
confirmés ou complétés par la pratique ou la
jurisprudence, et ce même dans le cadre d’un
système juridique inspiré de la common law et doté
d’une constitution écrite garantissant implicitement
le droit à être jugé dans un délai raisonnable (comme
c’est le cas de l’Irlande).
La Cour considère qu’il n’a pas été démontré que le
recours constitutionnel en indemnisation puisse être
valablement exercé dans le cas d’un délai mis par un
juge pour rendre une décision. De plus, le recours
constitutionnel invoqué ferait partie du contentieux
civil de la High Court et de la Cour suprême, pour
lequel aucune procédure particulière ou rationalisée
n’a été élaborée. Le recours en question s’analyserait
donc en un recours constitutionnel en indemnisation,
juridiquement complexe, notamment sur le plan
procédural, porté devant la High Court, puis
probablement en appel devant la Cour suprême, qui,
au moins au début, présenterait une certaine
nouveauté juridique. La Cour estime qu’il en découle
deux conséquences : la durée que pourrait avoir
pareille procédure (éventuellement plusieurs années)
et les frais et dépens potentiellement élevés
susceptibles d’être engendrés par le recours.
Supplément 09/2010
5
Quant aux autres recours invoqués par le
Gouvernement, la Cour juge ineffective une action
en indemnisation au titre de la loi de 2003 sur la
Convention européenne des droits de l’homme
puisque, entre autres choses, il semble que des
lenteurs imputables aux « tribunaux » ne pourraient
être dénoncées en justice par ce biais et que la loi de
2003, entrée en vigueur le 31 décembre 2003 alors
que la procédure engagée par le requérant était
pendante depuis près de six ans, n’est pas
rétroactive. Quant à la possibilité de solliciter une
ordonnance d’interdiction pour préjudice et risque
réel d’inéquité du procès à cause de la durée de la
procédure, elle est substantiellement différente d’une
action en indemnisation pour des délais fautifs et ne
saurait constituer un recours effectif devant être
utilisé pour dénoncer un délai raisonnable au sens de
l’article 6 § 1.
La Cour considère donc que le Gouvernement n’a
pas démontré que les recours qu’il invoque
constituent des recours effectifs qui étaient
disponibles en théorie et en pratique pour le
requérant à l’époque des faits. Partant, elle conclut
qu’il y a eu violation de l’article 13 combiné avec
l’article 6 § 1.
Article 6 § 1
La Cour constate que la procédure pénale dirigée
contre le requérant a duré plus de dix ans et six mois,
de l’arrestation de l’intéressé, le 5 janvier 1998, à
son acquittement, le 28 juin 2008.
Si la conduite du requérant a quelque peu contribué à
la durée de la procédure dirigée contre lui, elle ne
l’explique pas en totalité. D’autre part, le
Gouvernement n’a pas réussi à expliquer de manière
convaincante les délais imputables aux autorités qui
ont contribué à allonger la durée totale de la
procédure pénale.
Quant à ce qu’était l’enjeu du litige pour le
requérant, il faut noter que les accusations qui
pesaient sur celui-ci étaient graves et qu’il a dû
supporter leur poids et celui de la condamnation
qu’elle lui faisait encourir pendant environ dix
années et demie, au cours desquelles il a dû se
présenter régulièrement à un poste de police et aller
fréquemment à Dublin pour comparaître devant la
SCC.
La Cour conclut que la procédure pénale dirigée
contre le requérant a connu une durée excessive et
qu’il y a eu violation de l’article 6 § 1.
Griefs irrecevables
La Cour déclare les autres griefs du requérant
irrecevables : comme l’intéressé a été mis hors de
cause, il ne peut plus se prétendre victime d’une
violation de l’article 6 § 3 d) ; quant aux griefs
fondés sur l’article 8, ils ont été soumis en dehors du
délai.
LE JOURNAL DES DROITS DE L’HOMME
MCFARLANE C. IRLANDE requête no 31333/06
Exception préliminaire jointe au fond et rejetée (nonépuisement des voies de recours internes) ;
Partiellement irrecevable ; Violation de l'art. 13 ;
Violation de l'art. 6-1 ; Préjudice moral – pécuniaire.
Opinions séparées
Les juges Gyulumyan, Ziemele, Bianku et Power ont
exprimé une opinion dissidente commune et le juge
Lopez-Guerra a exprimé une opinion dissidente
séparée.
Jurisprudence : Akdivar et autres c. Turquie, 16
septembre 1996, § 65, Recueil des arrêts et décisions
1996-IV, Aksoy c. Turquie, 18 décembre 1996, § 54,
Recueil des arrêts et décisions 1996-VI ; Apostol c.
Géorgie, n° 40765/02, §§ 35, 38, CEDH 2006-XIV ;
Barfuss c. République tchèque, n° 35848/97, § 83, 31
juillet 2000 ; Barry c. Irlande (n° 18273/04, § 35, 15
décembre 2005 ; Belinger c. Slovénie ((déc.)), n°
42320/98, 2 octobre 2001 ; Berlin v. Luxembourg
((déc.)), n° 44978/98, 7 mai 2002 ; Boczoÿ c. Pologne,
n° 66079/01, § 51, 30 janvier 2007 ; Broca et TexierMicault c. France, nos 27928/02 et 31694/02, 21
octobre 2003 ; Bullen et Soneji c. Royaume-Uni (n°
3383/06, §§ 65-66, 8 janvier 2009 ; Bourdov c. Russie
(n° 2), n° 33509/04, § 99, CEDH 2009 ; Byrne c.
Irlande et Meskill c. CIE ; Cocchiarella c. Italie [GC],
n° 64886/01, § 102, CEDH 2006-V ; Crowther c.
Royaume-Uni, n° 53741/00, § 29, 1 février 2005 ;
Chypre c. Turquie [GC], n° 25781/94, §§ 352 et 353,
CEDH 2001-IV ; D c. Irlande ((déc.)), n° 26499/02, §§
84, 85, 100, 27 juin 2006 ; Deighan c. Irlande [1995] 2
IR 56 ; Deweer c. Belgique, § 46, 27 février 1980, série
A n° 35 ; Dublin City Council v Fennell [2005] IESC
33 ; Eckle c. Allemagne, 15 juillet 1982, §§ 73, 84,
série A n° 51 ; Ernst et autres c. Belgique, n° 33400/96,
15 juillet 2003 ; Etcheveste et Bidart c. France, nos
44797/98 et 44798/98, 21 mars 2002, § 80 ; Foley c.
Royaume-Uni, n° 39197/98, § 40, 22 octobre 2002 ; Ex
roi de Grèce et autres c. Grèce [GC], n° 25701/94, §
82, CEDH 2000-XII ; Forrer-Niedenthal c. Allemagne,
n° 47316/99, § 39, 20 février 2003 ; Gama da Costa c.
Portugal, n° 12659/87, décision of 5 mars 1990,
Décisions et rapports (DR) 65, p. 136 ; Grzinÿiÿ c.
Slovénie, n° 26867/02, § 108, CEDH 2007-V (extraits)
; Iliÿ c. Serbie, n° 30132/04, 9 octobre 2007 ; Issaïeva
c. Russie, n° 57950/00, § 153, 24 février 2005 ; Jahn et
autres c. Allemagne [GC], nos 46720/99, 72203/01 et
72552/01, § 86, CEDH 2005-VI ; Jordan c. RoyaumeUni (n° 2), n° 49771/99, § 44 10 décembre 2002 ;
Joseph Kemmy c. Irlande et the Attorney General ; K.,
F. et P. c. Royaume-Uni ((déc.)), n° 10789/84, 11
octobre 1984 ; Kudÿa c. Pologne ([GC], n° 30210/96,
§§ 152, 155, 157, 158, 159, CEDH 2000-XI ; Leandro
Da Silva c. Luxembourg, n° 30273/07, §§ 40 et 42, 11
février 2010 ; Lukenda c. Slovénie, n° 23032/02, § 65,
CEDH 2005-X ; Lutz c. France (n° 1), n° 48215/99, 26
mars 2002 ; Malkov c. Estonie, n° 31407/07, § 57, 4
février 2010 ; Martins Castro et Alves Correia de
Castro c. Portugal, n° 33729/06, 10 juin 2008 ; Massey
c. Royaume-Uni, n° 14399/02, § 27, 16 novembre 2004
; McMullen c. Irlande, n° 42297/98, § 39, 29 juillet
2004 ; Mifsud c. France ((déc.)) [GC], n° 57220/00, §
15, CEDH 2002-VIII ; Mirazoviÿ c. Bosnie-
Supplément 09/2010
6
Herzégovine ((déc.)), n° 13628/03, 16 mai 2006 ;
Mitchell et Holloway c. Royaume-Uni, n° 44808/98,
§§ 55-56, 69, 17 décembre 2002 ; Nikolova c. Bulgarie
[GC], n° 31195/96, § 79, CEDH 1999-II ; Nogolica c.
Croatie ((déc.)), n° 77784/01, CEDH 2002-VIII ;
Obasa c. Royaume-Uni, n° 50034/99, § 34, 16 janvier
2003 ; O'Donoghue c. the Legal Aid Board, the 2002
Act et the 2003 Act ; O'Reilly et autres c. Irlande, n°
54725/00, § 33, 29 juillet 2004 ; O'Reilly v Irlande, n°
21624/93, Commission's rapport du 22 février 1995, §§
65-66 ; Paroutis c. Chypre, n° 20435/02, § 27, 19
janvier 2006 ; Paulino Tomás c. Portugal ((déc.)), n°
58698/00, CEDH 2003-VII ; Pellegriti c. Italie ((déc.)),
n° 77363/01, 26 mai 2005 ; Pine Valley Developments
Ltd et autres c. Irlande, 29 novembre 1991, série A n°
222 ; Price et Lowe c. Royaume-Uni, nos 43185/98 et
43186/98, § 23, 29 juillet 2003 ; Prince Hans-Adam II
de Liechtenstein c. Allemagne [GC], n° 42527/98, §
45, CEDH 2001-VIII ; Reinhardt et Slimane-Kaïd c.
France, 31 mars 1998, §§ 91-93, Recueil des arrêts et
décisions 1998-II ; Riccardi Pizzati c. Italie [GC], n°
62361/00, § 82, 29 mars 2006 ; Richard Anderson c.
Royaume-Uni, n° 19859/04, § 28, 9 février 2010 ;
Roche c. Royaume-Uni [GC], n° 32555/96, § 182,
CEDH 2005-X ; Scordino c. Italie (n° 1) [GC], n°
36813/97, CEDH 2006-V ; Sejdovic c. Italie [GC], n°
56581/00, § 46, CEDH 2006-II ; Selmouni c. France
([GC], n° 25803/94, § 74, CEDH 1999-V ; Sirros c.
Moore [1975] QB 118 ; Smith et Grady c. RoyaumeUni (satisfaction équitable), nos 33985/96 et 33986/96,
§ 28, CEDH 2000-IX ; Somjee c. Royaume-Uni, n°
42116/98, § 72, 15 octobre 2002 ; Šoÿ c. Croatie, n°
47863/99, 9 mai 2003 ; Sparrow ÿ Minister for
Agriculture, Fisheries et Food & Another ([2010] IESC
6 ; Steel et Morris c. Royaume-Uni n° 68416/01, § 105,
CEDH 2005-II ; Sürmeli c. Allemagne [GC], n°
75529/01, CEDH 2006-VII ; T. c. Royaume-Uni [GC],
n° 24724/94, § 55, 16 décembre 1999 ; Tomé Mota c.
Portugal ((déc.)), n° 32082/96, CEDH 1999-IX ; Vaney
c. France, n° 53946/00, 30 novembre 2004 ; Vernillo c.
France, 20 février 1991, § 27, série A n° 198 ; Vidas c.
Croatie, n° 40383/04, 3 juillet 2008 ; Vinÿiÿ et autres c.
Serbie, nos 44698/06, et seq., § 51, 1 décembre 2009 ;
Wittek c. Allemagne, n° 37290/97, § 49, CEDH 2002X ; ÿlhan c. Turquie [GC], n° 22277/93, § 97, CEDH
2000-VII ; Youri Nikolaïevich Ivanov c. Ukraine, n°
40450/04, § 63, CEDH 2009 (extraits).
D
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AV
VIIE
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L’article 2 de la Convention
DEUX DECES CONSECUTIFS A DES
TORTURES ET
A LA MAUVAISE PREPARATION D’UNE
OPERATION DE POLICE
BEKIRSKI C. BULGARIE
VLAEVI C. BULGARIE
02.09.2010
A l’unanimité :
Quatre violations de l’article 2
Deux violations de l’article 3
LE JOURNAL DES DROITS DE L’HOMME
Violation de l’article 38 (obligation de
coopérer avec la Cour)
Les requérants se plaignaient que leurs proches
parents avaient été tués par la police, Hristo à la suite
de tortures en détention et Marin Vlaev après que
des policiers eurent tiré sur son taxi au cours d’une
opération destinée à élucider un enlèvement.
Dans la première affaire, Hristo Bekirski fut
incarcéré en mai 1996 car il était accusé de meurtre
avec préméditation. Le 30 août 1996, alors qu’il
tentait prétendument de s’évader, il fut maîtrisé et
menotté par quelques policiers de garde à l’issue
d’une bagarre au cours de laquelle il avait frappé
deux policiers aux yeux. Un rapport médical établi
dans la soirée faisait état de nombreuses contusions
sur tout le corps et le visage de Hristo, qui ne furent
pas soignées sur-le-champ. D’après la famille de
Hristo, dont son père qui était détenu au même
moment dans le même centre et déclare avoir
personnellement entendu ses cris, Hristo Bekirski
aurait été torturé sans interruption du 30 août au
6 septembre. Enfin conduit à l’hôpital le 6 septembre
1996, il décéda le 8 septembre 1996 au matin alors
qu’il avait été soigné par des spécialistes. L’autopsie
effectuée le lendemain établit que le décès était dû
aux nombreuses blessures provoquées par un objet
contondant. Une enquête fut ouverte le jour du décès
et supervisée par l’autorité responsable du centre où
il avait été détenu. Elle fut suspendue à plusieurs
reprises car les autorités estimèrent que les policiers
de garde avaient agi en légitime défense et que les
blessures qui avaient provoqué le décès de Hristo
Bekirski lui avaient été infligées par les policiers le
30 août, lorsqu’il les avait agressés en tentant de
s’évader. En septembre 1997, un procureur du
parquet militaire découvrit des éléments de preuve
montrant que Hristo Bekirski avait été
systématiquement battu après les évènements du 30
août, et ordonna la reprise de l’enquête. Quatre
autres rapports médicaux furent rédigés par la suite.
Ceux commandés par les autorités établissaient que
toutes les blessures constatées sur le corps ne
pouvaient avoir été infligées à Hristo Bekirski que
pendant la bagarre et la tentative d’évasion du
30 août. Quant au rapport commandé par la famille
de Hristo Bekirski, préparé par un médecin de
l’Académie de médecine de Sofia, il estimait plus
probable que d’autres blessures aient été infligées
après le 30 août ; il notait aussi que les blessures
avaient été provoquées par divers objets, et que l’état
de santé de Hristo Bekirski avant sa mort nécessitait
qu’il reçoive des soins médicaux immédiats, ce qui
n’avait pas été le cas.
Quant à la seconde affaire, Marin Vlaev était
chauffeur de taxi. Il travaillait de nuit lorsque, le 27
août 1998 vers 4 heures du matin, il passa à
Supplément 09/2010
7
proximité d’un groupe de policiers postés près d’une
rue menant au village d’Odartsi. Les policiers
portaient soit des uniformes de police soit des vestes
au dos desquelles l’inscription « police » était bien
visible. Ils menaient une opération destinée à libérer
un otage détenu contre rançon. Lorsque Marin Vlaev
passa au volant de son taxi, ils venaient d’arrêter
l’individu soupçonné d’être l’auteur de l’enlèvement,
qui était venu chercher la rançon et gisait, blessé, sur
le bord de la route. Alors que Marin Vlaev avait
commencé par ralentir et s’était presque arrêté, il se
mit brusquement à accélérer après qu’un policier eut
ouvert la portière de sa voiture et présenté sa carte.
Plusieurs policiers ouvrirent le feu sur le taxi qui
s’éloignait. Atteint au dos et à la nuque par deux
balles, Marin Vlaev mourut sur le coup. Une enquête
fut ouverte une semaine plus tard et un certain
nombre de mesures d’enquête furent prises. En juin
2004, l’enquête fut suspendue, le procureur
considérant que les policiers avaient conclu de
manière raisonnable que Marin Vlaev pouvait être
un complice du ravisseur eu égard à son
comportement étrange et au fait que le ravisseur
avait indiqué que l’otage serait libéré dès qu’il aurait
récupéré la rançon. Le procureur conclut également
que les policiers s’étaient efforcés dans la mesure du
possible de ne pas mettre la vie de Marin Vlaev ou
de quiconque en danger puisqu’ils avaient ouvert le
feu dans une zone non résidentielle et avaient visé
les pneus du véhicule.
Invoquant les articles 2 et 3 de la Convention, les
requérants se plaignaient que leurs proches parents
avaient été tués par la police, que leur décès n’avait
pas fait l’objet d’une enquête adéquate et, dans
l’affaire Bekirski, que Hristo Bekirski avait été
maltraité par la police et n’avait pas bénéficié de
soins médicaux appropriés dispensés en temps et en
heure.
Décision de la Cour
Affaire Bekirski c. Bulgarie
Coopération avec la Cour
La Cour note que, en dépit de sa demande
expresse, les autorités bulgares ne lui ont pas fourni
le dossier complet de l’enquête sur le décès de Hristo
Bekirski. Eu égard aux difficultés rencontrées en
conséquence par la Cour pour établir les faits et à
l’importance que revêt la coopération de l’État avec
elle, elle conclut que le gouvernement bulgare a failli
à fournir toutes les facilités nécessaires à l’examen
de l’affaire, au mépris de l’article 38 de la
Convention.
Interdiction des mauvais traitements
Concernant la bagarre du 30 août, la Cour juge
que les policiers de garde ont eu recours à une force
raisonnable pour maîtriser Hristo Bekirski sachant
qu’ils craignaient pour leur sécurité – celui-ci les
ayant agressés avec une arme apparemment mortelle
LE JOURNAL DES DROITS DE L’HOMME
– et qu’ils redoutaient que Hristo Bekirski ne
constitue un danger pour autrui s’il réussissait à
s’échapper. Dès lors, il n’y a pas eu violation de
l’article 3 de ce chef.
Pour ce qui est de la période comprise entre le 30
août et le 6 septembre, la Cour note que de
nombreux témoins ont indiqué avoir entendu des cris
et des plaintes jour et nuit pendant cette période. De
plus, un procureur du parquet miliaire a trouvé des
éléments de preuve montrant que Hristo Bekirski
avait été systématiquement battu à plusieurs
occasions après sa tentative d’évasion. Par ailleurs,
les rapports médicaux faisaient état de blessures qui
n’étaient pas présentes après la bagarre du 30 août.
Eu égard à ce qui précède et au fait que le
Gouvernement n’a pas fourni toutes les informations
en sa possession, la Cour conclut que, du 30 août au
6 septembre, Hristo Bekirski a été systématiquement
battu et maintenu dans un état quasi permanent de
douleur physique et d’angoisse. En conclusion, il a
été torturé pendant sa détention, au mépris de
l’article 3.
Quant aux soins médicaux prodigués à Hristo
Bekirski, la Cour constate que les nombreuses
blessures qui lui ont été infligées le 30 août n’ont pas
été soignées. Il n’a pas non plus été conduit dans un
centre médical spécialisé pour y subir un contrôle.
Eu égard à l’état de santé de Hristo Bekirski et à la
nécessité manifeste de le traiter avec autre chose que
des antidouleurs, la Cour juge que les autorités
bulgares ne se sont pas acquittées de leur obligation
de fournir à Hristo Bekirski des soins médicaux
adéquats en temps et en heure, en violation de
l’article 3.
Droit à la vie
La Cour conclut que les tortures et l’absence de
soins médicaux, auxquelles s’ajoute la réticence du
Gouvernement à faciliter l’examen de l’affaire, ont
conduit à la mort de Hristo Bekirski, au mépris de
l’article 2.
Pour ce qui est de l’enquête menée sur le décès de
Hristo Bekirski, la Cour juge que, si elle a démarré
rapidement et a donné lieu à un certain nombre de
mesures, son impartialité est sujette à caution étant
donné que l’autorité d’enquête était celle qui
contrôlait l’établissement où Hristo Bekirski avait
été détenu et torturé. La Cour n’a pas été en mesure
de déterminer l’ampleur exacte des mesures
d’enquête qui ont été prises puisque le
Gouvernement ne s’est pas montré disposé à
coopérer. Partant, il y a eu violation de l’article 2 à
raison de l’absence d’enquête effective sur le décès
de Hristo Bekirski.
Affaire Vlaevi c. Bulgarie
Droit à la vie
La Cour estime que le comportement de Marin
Vlaev, qui a cherché à fuir en dépit de l’ordre de
Supplément 09/2010
8
s’arrêter
émanant
de
policiers
clairement
identifiables comme tels, a contribué à faire craindre
aux policiers qu’il ait un lien avec le ravisseur.
Sachant que les policiers devaient réagir dans
l’urgence puisque la vie de l’otage était toujours en
danger, la Cour considère qu’il était absolument
nécessaire pour les policiers d’utiliser leurs armes à
feu pour immobiliser la voiture et son chauffeur. Il
n’y a donc pas eu violation de l’article 2 pour ce qui
est du recours aux armes à feu.
Quant à la préparation et à la conduite de l’opération
de police, en revanche, la Cour constate qu’un plan
avait été prévu, que les policiers étaient équipés
d’armes à feu et de matériel de protection et qu’ils
avaient reçu pour instructions, soit dans la journée
soit juste avant l’intervention, d’appréhender les
ravisseurs par tous les moyens, y compris en utilisant
leurs armes à feu. Si l’improvisation est dans une
certaine mesure inévitable dans ce type d’opération
de police, la réaction quelque peu chaotique des
policiers à l’arrivée du chauffeur de taxi semble
indiquer qu’ils n’étaient pas prêts à voir une seconde
personne arriver sur les lieux et à envisager de
recourir à des moyens techniques pour immobiliser
le véhicule ou le poursuivre. Dès lors, l’opération de
police au cours de laquelle Marin Vlaev a trouvé la
mort n’a été ni préparée ni menée de manière à
réduire le plus possible le risque de blesser
grièvement ou de tuer, en violation de l’article 2.
Enfin, s’agissant de l’enquête menée sur le décès de
Marin Vlaev, la Cour note que les autorités bulgares
ne sont pas demeurées passives et ont montré une
volonté d’établir si le recours à la force par les
policiers était conforme à la législation interne. Or la
législation bulgare en vigueur à l’époque des faits,
appliquée en l’espèce par les autorités internes
compétentes, ne prévoyait pas de limiter le recours à
la force à ce qui était absolument nécessaire, au
contraire de ce qu’exige la Convention. De plus,
beaucoup des mesures d’enquête ont été prises avec
retard. Ces délais, ainsi que la durée totale de
l’enquête préliminaire, qui s’élève à près de six ans,
sont excessifs. Dès lors, l’enquête menée sur le décès
de Marin Vlaev n’a pas été effective, au mépris de
l’article 2.
BEKIRSKI C. BULGARIE requête no 71420/01 VLAEVI
os
C. BULGARIE requêtes n 272/05 et 890/05 Violation
de l'art. 38 ; Non-violation de l'art. 3 (volet matériel) ;
Violations de l'art. 3 (volet matériel) ; Violation de
l'art. 2 (volet matériel) ; Violation de l'art. 2 (volet
procédural) ; Dommage matériel - réparation ;
Préjudice moral – réparation. Jurisprudence : Aksoy c.
Turquie, 18 décembre 1996, Recueil des arrêts et
décisions 1996-VI ; Anguelova et Iliev v.Bulgarie, n°
55523/00, CEDH 2007-IX ; Anguelova c. Bulgarie, n°
38361/97, CEDH 2002-IV ; Aydin c. Turquie, 25
septembre 1997, Recueil 1997-VI ; Bati et autres c.
LE JOURNAL DES DROITS DE L’HOMME
Turquie, nos 33097/96 et 57834/00, CEDH 2004-IV
(extraits) ; Irlande c. Royaume-Uni, 18 janvier 1978,
série A n° 25 ; Khachiev et Akaïeva c. Russie, nos
57942/00 et 57945/00, 24 février 2005 ; Klaas c.
Allemagne, 22 septembre 1993, série A n° 269 ; Labita
c. Italie [GC], n° 26772/95, CEDH 2000-IV ; Mahmut
Kaya c. Turquie, n° 22535/93, CEDH 2000-III ;
McKerr c. Royaume-Uni (déc.), n° 28883/95, 4 avril
2000 ; Mojsiejew c. Pologne, n° 11818/02, 24 mars
2009 ; Natchova et autres c. Bulgarie [GC], nos
43577/98 et 43579/98, CEDH 2005 VII ; Orhan c.
Turquie, n° 25656/94, CEDH 2002 ; Salman c. Turquie
[GC], n° 21986/93, CEDH 2000-VII ; Selmouni c.
France [GC], n° 25803/94, CEDH 1999-V ; Stoyan
Mitev c. Bulgarie, n° 60922/00, 7 janvier 2010 ; Tahsin
Acar c. Turquie [GC], n° 26307/95, CEDH 2004-III ;
Tanrikulu c. Turquie [GC], n° 23763/94, CEDH 1999IV ; Timurtas c. Turquie, n° 23531/94, CEDH 2000-VI
; Velikova c. Bulgarie, n° 41488/98, CEDH 2000-VI ;
Yasa c. Turquie, 2 septembre 1998, Recueil 1998-VI.
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L’article 3 de la Convention
LE RENVOI AU BELARUS D’UN
OPPOSANT POLITIQUE ET DE SA
FAMILLE LES EXPOSERAIT A UN RISQUE
DE MAUVAIS TRAITEMENTS
Y.P ET L.P. C. FRANCE
02.09.2010
A l’unanimité :
Violation de l’article 3
en cas de renvoi au Belarus
Au Belarus, Y.P. a été arrêté, détenu et battu par la
police pour ses activités en tant que membre du
Front populaire biélorusse, notamment pour des faits
d’ « hooliganisme » en février 1999, fait mentionné
dans un rapport2 du Centre de défense des droits de
l’homme « Viasna ». En octobre de la même année,
il fut détenu et frappé par les autorités pour sa
participation à la « marche pour la liberté » à Minsk.
Entre 2002 – après, selon le requérant, avoir été
agressé suite à son élection à la présidence du comité
central du parti à Moghilev – et 2004, il commença à
chercher asile en Allemagne et en Norvège, en vain.
En octobre 2004, Y.P. allègue avoir été emmené
dans un bois par la police et battu jusqu’à en perdre
connaissance. Le requérant déclare avoir été
également violenté lors de son arrestation et
assignation à résidence, la veille des élections
législatives. Son fils, également membre du parti, fut
arrêté à différentes reprises, notamment en octobre
Supplément 09/2010
9
2004 alors qu’il distribuait des tracts contre les
modifications apportées à la Constitution biélorusse,
qui permettaient au président de demeurer au
pouvoir à vie. Quelques mois auparavant, un
traumatisme crânien avait été diagnostiqué chez le
jeune homme après sa détention pour avoir participé
à un meeting contre la dictature.
En février 2005, à leur arrivée en France, à
Strasbourg, ils déposèrent immédiatement une
demande d’asile auprès de l’Office français de
protection des réfugiés et apatrides (OFPRA), qui fut
refusée au motif que le requérant n’avait pas fait de
déclaration assez précise quant à son engagement
politique et aux persécutions alléguées.
Des certificats médicaux établis à l’automne 2005 à
Strasbourg font état d’une cicatrice frontale chez
Y.P. et d’un « état anxio-dépressif grave,
directement en relation avec les traumatismes subis
au Belarus » chez L.P. Le fils du requérant a
également subi une intervention chirurgicale à
Strasbourg pour soigner des séquelles au bras droit.
La Commission de recours des réfugiés (CRR),
saisie par les requérants, confirma le refus de la
demande d’asile. La famille se rendit alors en
Norvège, en Suède et au Danemark. Ils furent
renvoyés du Danemark vers la France, où ils firent
l’objet d’arrêtés de reconduite à la frontière en 2007
et 2008. En mars 2008, le petit garçon des
requérants, né en 2006, fut hospitalisé à Paris en
raison de conditions de vie précaires de la famille.
Le 29 avril 2008, l’OFPRA, sur demande de
réexamen par les requérants – qui faisaient valoir
qu’un retour au Belarus signifierait leur incarcération
pendant deux à cinq ans – leur refusa de nouveau
l’asile. Placés au centre de rétention de Rouen, ils
firent auprès de la Cour européenne des droits de
l’homme une demande de suspension de la mesure
de renvoi à leur encontre, que la Cour accorda en
vertu de l’article 39 de son Règlement (mesures
provisoires) pour la durée de la procédure devant
elle. Suite au rejet de leur demande auprès de
l’OFPRA, les requérants engagèrent un recours
devant la cour nationale du droit d’asile (CNDA,
ancienne CRR), en vain.
Invoquant en particulier l’article 3, les requérants
alléguaient que leur renvoi vers le Belarus les
exposerait à un risque de subir des mauvais
traitements.
Décision de la Cour
Épuisement des voies de recours internes
Il existe en France un recours administratif suspensif
pour les étrangers faisant l’objet d’un arrêté de
reconduite à la frontière, pour en demander
l’annulation dans les quarante-huit heures suivant sa
notification. On ne saurait reprocher aux requérants
de ne pas avoir introduit ce recours, dans la mesure
où leur demande d’asile antérieure n’avait pas abouti
LE JOURNAL DES DROITS DE L’HOMME
et que la situation au Belarus était la même qu’alors.
La Cour rappelle que lorsqu’un requérant a utilisé
une voie de droit apparemment effective et
suffisante, il ne saurait se voir reprocher de ne pas
avoir essayé d’en utiliser d’autres, qui étaient
disponibles mais ne présentaient guère plus de
chances de succès. Ainsi, la Cour estime que les
requérants ont démontré l’existence de circonstances
particulières qui les dispensaient de l’obligation
d’épuiser la voie de recours indiquée par le
gouvernement français. Leur requête est donc
recevable.
Article 3
La Cour estime le récit d’Y.P. crédible : il a fourni
des éléments confirmant son engagement politique et
les persécutions subies, notamment les attestations
de l’association « Viasna » et les certificats
médicaux. Dans leur refus de sa demande d’asile –
en raison de déclarations jugées peu personnalisées
et peu circonstanciées – les autorités françaises n’ont
mentionné aucun rapport international sur la
situation au Belarus. Elles n’ont par ailleurs
considéré ni la poursuite alléguée de son activité
politique en France ni le sort réservé à d’autres
opposants comme des indications qu’Y.P. pourrait
être recherché.
Le passage du temps ne diminue pas
automatiquement le risque auquel Y.P. serait exposé
au Belarus. Si le Conseil de l’Europe3 a récemment
relevé quelques évolutions positives en matière de
démocratie, il note aussi les obstacles au
rétablissement du statut d’invité spécial au Conseil
de l’Europe du Belarus – suspendu en 1997 en raison
de la dégradation de la situation des droits de
l’homme – notamment la persistance du harcèlement
de l’opposition. La Cour relève à cet égard qu’un
individu ayant exercé des fonctions politiques
similaires à celles d’Y.P. a disparu dans des
circonstances inexpliquées et que d’autres sont
régulièrement arrêtés.
Le degré de militantisme du requérant est
suffisamment démontré par ses activités à Moghilev.
Par ailleurs la probabilité que des données sur lui et
sa famille soient mises à disposition des autorités
biélorusses en cas de retour est confortée par les
brutalités et intimidations subies par le fils d’Y.P. En
outre, leur demande d’asile en France pourrait être
analysée comme « discréditant le Belarus » 4 et
constituer une infraction passible d’une peine de
prison, en vertu du Code pénal bélarussien. Du seul
fait de leur lien avec Y.P., les membres de sa famille
pourraient également être exposés à des
persécutions.
Ainsi, à l’heure actuelle, un renvoi des requérants
vers le Belarus emporterait violation de l’article 3.
Supplément 09/2010
10
ANCIEN CHEF DE L’OPPOSITION
POLITIQUE TADJIKE TRANSFÉRÉ
ILLÉGALEMENT DE RUSSIE AU
TADJIKISTAN
ISKANDAROV C. RUSSIE
23.09.2010
A l’unanimité :
Violation des articles 3 et 5
Devant la Cour, le requérant, Mokhamadrouzi
Iskandarov, reprochait aux autorités russes de l’avoir
enlevé et transféré illégalement de Russie au
Tadjikistan alors qu’il courait le risque sérieux d’y
être maltraité.
M. Iskandarov, qui avait été l’un des chefs de
l’Opposition tadjike unie dans les années 90, avait
critiqué ouvertement le président du Tadjikistan
avant de s’installer en Russie le 11 décembre 2004.
Accusé au Tadjikistan, en son absence, de terrorisme
et de différentes autres infractions, il fut placé sur
une liste internationale de personnes recherchées et,
le 1er décembre 2004, le procureur général de la
Fédération de Russie reçut une demande
d’extradition le concernant. M. Iskandarov fut arrêté
en Russie le 9 décembre 2004 en vue d’être extradé,
mais l’extradition fut refusée le 1er avril 2005 car il
avait introduit une demande d’asile, qui était encore
pendante. Il fut libéré le 4 avril 2005 et habita
ensuite avec un ami à Korolev (région de Moscou).
Devant la Cour, il alléguait que, dans la soirée du 15
avril 2005, alors qu’il se promenait, il avait été
abordé par deux hommes portant des uniformes de la
police de la route, et que ceux-ci, aidés par plusieurs
hommes aux traits slaves qui avaient cerné le
périmètre, l’avaient menotté puis l’avaient emmené
en voiture. Il aurait ensuite été gardé prisonnier et
battu toute la nuit dans un sauna situé en un lieu non
déterminé, puis emmené dans une forêt où ses
ravisseurs se seraient entretenus avec d’autres
hommes, avec lesquels ils auraient parlé russe sans
accent. Il en aurait conclu qu’il s’agissait d’agents
des forces de l’ordre russes. Il aurait ensuite été
emmené à un aéroport, les yeux bandés. Ses papiers
d’identité n’auraient pas été vérifiés, et il n’aurait
entendu dans l’avion aucune instruction ou autre
information habituellement communiquées dans les
appareils civils. Il aurait gardé les yeux bandés
pendant tout le vol. L’appareil aurait atterri à
l’aéroport de Douchanbé, où il aurait été remis aux
forces de l’ordre tadjikes.
Détenu sous un faux nom les dix premiers jours
suivant son arrivée, M. Iskandarov aurait été
régulièrement battu, enfermé dans une cellule sale et
minuscule ; il n’aurait pas été autorisé à sortir de sa
cellule ni à se laver, et il n’aurait pratiquement pas
été nourri. Il aurait fait une déclaration l’incriminant,
sous la menace et par crainte pour sa vie. Il n’aurait
LE JOURNAL DES DROITS DE L’HOMME
vu son avocat pour la première fois que 13 jours
après son arrivée au Tadjikistan, et il ne lui aurait
toujours parlé qu’en présence du personnel
pénitentiaire. En octobre 2005, il fut condamné à 23
années de prison. Par la suite, il adressa aux autorités
russes de nombreuses plaintes relatives au caractère
irrégulier de sa détention et de son transfert au
Tadjikistan. Toutes furent rejetées ou restèrent sans
réponse.
Plusieurs institutions, telles que l’Union européenne,
Human Rights Watch, Amnesty International ou
encore le Département d’Etat des Etats-Unis,
auraient établi des rapports sur la détention de M.
Iskandarov ainsi que sur la situation des droits de
l’homme au Tadjikistan en général jusqu’au 15 avril
2005.
Invoquant les articles 3 et 5, M. Iskandarov se
plaignait d’avoir été irrégulièrement détenu et
transféré au Tadjikistan, et d’avoir en conséquence
été maltraité et persécuté en raison de ses opinions
politiques.
Décision de la Cour
Etablissement des faits
La Cour souligne que M. Iskandarov a fait une
description globalement claire et cohérente de son
transfert de Russie au Tadjikistan. Ses allégations
selon lesquelles les autorités russes l’ont extradé
illégalement sont étayées par les rapports du
Département d’Etat américain. Le gouvernement
russe n’a pas expliqué comment le requérant, que
l’on avait vu pour la dernière fois dans la région de
Moscou dans la soirée du 15 avril 2005, était arrivé
au Tadjikistan. Etant donné que la route la plus
courte entre Korolev et Douchanbé est longue de
3 660 kilomètres et traverse deux Etats souverains
(le Kazakhstan et l’Ouzbékistan) la Cour ne juge pas
plausible l’hypothèse selon laquelle les ravisseurs de
M. Iskandarov aient pu l’emmener illégalement au
Tadjikistan en moins de deux jours par un autre
moyen de transport qu’un aéronef. En conséquence,
elle admet les allégations du requérant selon
lesquelles il a été arrêté et mis dans un avion par des
agents russes qui l’ont transféré au Tadjikistan sans
avoir à se conformer aux contrôles transfrontaliers
habituels.
Mauvais traitements
La Cour considère tout d’abord le climat politique
général au Tadjikistan au moment des faits, en se
fondant sur des éléments issus de plusieurs sources
objectives. Elle observe que la situation générale des
droits de l’homme au Tadjikistan a soulevé de
nombreuses préoccupations, notamment concernant
le traitement des détenus. En particulier, des rapports
montrent que les agents de l’Etat y pratiquaient
couramment la torture, en toute impunité. Les
conditions de détention étaient dures, voire
Supplément 09/2010
11
potentiellement mortelles, et plusieurs détenus sont
morts de faim.
Examinant la situation personnelle de M.
Iskandarov, la Cour note qu’il était l’un des
adversaires possibles du président tadjik pour les
élections présidentielles à venir. Au moment où il a
été transféré du territoire russe, des rapports
montraient qu’un autre chef charismatique de
l’opposition, critique envers le régime, M.
Chamsiddinov, avait été maltraité. En conséquence,
même s’il n’est pas possible d’établir que M.
Iskandarov a effectivement subi de mauvais
traitements au Tadjikistan, les caractéristiques
particulières de son profil et de sa situation auraient
dû permettre aux autorités russes de prévoir qu’il
risquerait d’y être maltraité. Etant donné qu’aucune
ordonnance d’extradition n’a été prononcée contre
lui, M. Iskandarov n’a pu contester son éloignement
devant un tribunal.
Ainsi, en transférant l’intéressé au Tadjikistan, les
autorités russes ont manqué à l’obligation qui leur
incombait de le protéger contre les risques de
mauvais traitement. Ainsi, il y a eu violation de
l’article 3.
Détention irrégulière
La Cour juge profondément regrettable que les
agents de l’Etat aient eu recours à des méthodes
opaques à l’égard de M. Iskandarov. Elle souligne
que la détention du requérant ne se fondait pas sur
une décision prononcée en vertu des lois nationales,
et conclut qu’il a été transféré de manière irrégulière
dans le but de contourner le rejet par le parquet
général de la demande d’extradition. Sa détention
n’a été ni reconnue ni consignée dans un quelconque
registre des arrestations ou des détentions. Dans ces
conditions, le droit des personnes à la liberté et à la
sûreté a été totalement bafoué.
Par conséquent, il y a eu violation de l’article 5 § 1.
ISKANDAROV C. RUSSIE requête no 17185/05 Violation
de l'art. 3 ; Violation de l'art. 5-1 ; Préjudice moral –
réparation. Jurisprudence : Ahmed c. Autriche, 17
décembre 1996, Recueil des arrêts et décisions 1996VI ; Al-Moayad c. Allemagne (déc.), n° 35865/03, 20
février 2007 ; Altun c. Turquie, n° 24561/94, 1 juin
2004 ; Amuur c. France, 25 juin 1996, § 42, Recueil
1996-III ; Assanidzé c. Géorgie [GC], n° 71503/01,
CEDH 2004-II ; Benham c. Royaume-Uni, 10 juin
1996, Recueil 1996-III ; Boujlifa c. France, 21 octobre
1997, Recueil 1997-VI ; Bozano c. France, 18
décembre 1986, série A n° 111 ; Cruz Varas et autres c.
Suède, 20 mars 1991, série A n° 201 ; Chypre c.
Turquie [GC], n° 25781/94, § 147, CEDH 2001-IV ;
D.H. et autres c. République tchèque [GC], n°
57325/00, CEDH 2007-XII ; De Wilde, Ooms et
Versyp c. Belgique, 18 juin 1971, série A n° 12 ;
Fatgan Katani et autres c. Allemagne (déc.), n°
67679/01, 31 mai 2001 ; Guiorgui Nikolaïchvili c.
Géorgie, n° 37048/04, CEDH 2009-... ; Guzzardi c.
Italie, 6 novembre 1980, série A n° 39 ; H.L.R. c.
LE JOURNAL DES DROITS DE L’HOMME
France, 29 avril 1997, Recueil 1997-III ; Kafkaris c.
Chypre [GC], n° 21906/04, CEDH 2008-... ; Ladent c.
Pologne, n° 11036/03, CEDH 2008-... ; Mamatkulov et
Askarov c. Turquie [GC], nos 46827/99 et 46951/99,
CEDH 2005-I ; Mathew c. Pays-Bas, n° 24919/03,
CEDH 2005-IX ; McKerr c. Royaume-Uni (déc.), n°
28883/95, 4 avril 2000 ; Metchenkov c. Russie, n°
35421/05, 7 février 2008 ; Medvedyev et autres c.
France [GC], n° 3394/03, CEDH 2010-... ; Mooren c.
Allemagne [GC], n° 11364/03, CEDH 2009-... ;
Mouminov c. Russie, n° 42502/06, 11 décembre 2008 ;
N. c. Royaume-Uni [GC], n° 26565/05, 27 mai 2008 ;
Natchova et autres c. Bulgarie [GC], nos 43577/98 et
43579/98, CEDH 2005-VII ; Nasroulloïev c. Russie, n°
656/06, 11 octobre 2007 ; Nnyanzi c. Royaume-Uni, n°
21878/06, 8 avril 2008 ; Ryabikin c. Russie, n°
8320/04, 19 juin 2008 ; Said c. Pays-Bas, n° 2345/02,
CEDH 2005-VI ; Salman c. Turquie [GC], n°
21986/93, CEDH 2000-VII ; Scozzari et Giunta c.
Italie [GC], nos 39221/98 et 41963/98, CEDH 2000VIII ; Soering c. Royaume-Uni, 7 juillet 1989, série A
n° 161 ; Stašaitis c. Lituanie, n° 47679/99, 21 mars
2002 ; T. c. Royaume-Uni [GC], n° 24724/94, 16
décembre 1999 ; Vilvarajah et autres c. Royaume-Uni,
30 octobre 1991, série A n° 215 ; X et Y c. Suède, n°
7376/76, décision de la Commission du 7 octobre
1976, Décisions et rapports (DR) 7, p. 123 ; X c.
Autriche, n° 8278/78, décision de la Commission du 13
décembre 1979, DR 18, p. 154.
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L’article 6 de la Convention
PREMIER ARRET PILOTE CONCERNANT
UNE AFFAIRE DIRIGEE CONTRE
L’ALLEMAGNE : LA DUREE EXCESSIVE
DE PROCEDURES DEVANT LES
JURIDICTIONS INTERNES CONSTITUE UN
PROBLEME SYSTEMIQUE
RUMPF C. ALLEMAGNE
02.09.2010
A l’unanimité :
Violation des articles 6 § 1 et 13
L’affaire concerne la durée excessive d’une
procédure judiciaire devant les juridictions internes,
un problème récurrent qui est à l’origine des
violations de la Convention les plus fréquentes
constatées par la Cour dans des affaires dirigées
contre l’Allemagne. Plus de la moitié des arrêts
concernant l’Allemagne dans lesquelles la Cour a
conclu à une violation soulevaient cette question. La
Cour a donc jugé approprié d’appliquer la procédure
d’arrêt pilote, qu’elle a élaborée ces dernières années
pour traiter de grands groupes d’affaires identiques
Supplément 09/2010
12
tirant leur origine d’un même problème structurel
et/ou systémique.
Afin de faciliter l’exécution effective de ses arrêts, la
Cour peut, dans un arrêt pilote, identifier clairement
l’existence de problèmes structurels ou systémiques
à l’origine des violations et indiquer à l’Etat en cause
des mesures ou actions spécifiques à prendre pour y
remédier.
Entre 1959 et 2009, la Cour a rendu des arrêts dans
plus de 40 affaires dirigées contre l’Allemagne dans
lesquelles elle a constaté des violations répétées de la
Convention en raison de la durée excessive de
procédures civiles. Rien qu’en 2009, elle a conclu à
13 reprises à la méconnaissance de l’exigence du
délai raisonnable posée par l’article 6 § 1. Dans un
arrêt rendu en août 20062, elle avait déjà souligné
l’absence de recours effectif pour dénoncer la durée
excessive d’une procédure judiciaire et avait attiré
l’attention du gouvernement allemand sur son
obligation de choisir, sous le contrôle du Comité des
Ministres, les mesures générales à intégrer dans son
ordre juridique interne afin de mettre un terme à la
violation constatée par la Cour et d’en effacer autant
que possible les conséquences.
Si la Cour se félicite d’une initiative législative prise
récemment par le gouvernement allemand en vue de
traiter le problème, elle note également que
l’Allemagne n’a à ce jour mis en œuvre aucune
mesure destinée à améliorer la situation, malgré son
importante jurisprudence constante à ce sujet. Le
caractère systémique du problème ressort également
du fait que quelque 55 requêtes dirigées contre
l’Allemagne concernant des problèmes similaires
sont actuellement pendantes devant la Cour et que
leur nombre ne cesse de croître. Dès lors, les
violations constatées dans la présente affaire sont la
conséquence des manquements du gouvernement
allemand et doivent passer pour résulter d’une
pratique incompatible avec la Convention.
La Cour dit, à l’unanimité, que l’Allemagne doit
introduire rapidement, et au plus tard dans un délai
d’un an à compter de la date à laquelle l’arrêt sera
devenu définitif, un recours interne effectif
permettant de dénoncer la durée excessive d’une
procédure judiciaire. Un recours doit passer pour
effectif dès lors qu’il permet soit de faire intervenir
plus tôt la décision des juridictions saisies, soit de
fournir au justiciable une réparation adéquate pour
les retards déjà causés.
La Cour n’a pas jugé nécessaire d’ajourner l’examen
des requêtes similaires avant la mise en œuvre des
mesures voulues. La poursuite du traitement de
l’ensemble des affaires similaires pendantes
rappellera régulièrement à l’Allemagne l’obligation
qui lui incombe en vertu de la Convention et, en
particulier, celle découlant de l’arrêt rendu en
l’espèce.
LE JOURNAL DES DROITS DE L’HOMME
Invoquant l’article 6 § 1, M. Rumpf se plaignait de
la durée excessive de la procédure devant les
juridictions administratives. Sur le terrain de l’article
13, il dénonçait en outre l’absence dans l’ordre
juridique allemand d’un recours effectif qui lui eût
permis de se plaindre de la durée de la procédure
judiciaire.
Décision de la Cour
Article 6 § 1
La période à prendre en considération a commencé
le 30 novembre 1993 et s’est terminée le 7 mai 2007,
date de réception de la décision définitive de la Cour
constitutionnelle fédérale. La procédure a donc duré
au total 13 ans et 5 mois pour quatre degrés de
juridictions.
La Cour observe que la procédure ne présentait
aucune complexité particulière du point de vue du
droit ou des faits. M. Rumpf a certes fait valoir ses
intérêts parallèlement dans le cadre d’une procédure
en référé, mais il s’agit là d’une situation
procédurale courante. En outre, cette action s’est
terminée bien avant le début de la procédure d’appel
et l’on ne saurait donc considérer qu’elle a eu pour
conséquence de retarder la procédure principale.
Les retards intervenus dans la procédure ne sauraient
pour la plupart être imputés à M. Rumpf. En ce qui
concerne la procédure devant le tribunal
administratif, on ne peut le tenir pour responsable
que d’un retard d’environ deux mois, résultant de ses
demandes de prorogation du délai fixé par le tribunal
plus d’un an après l’introduction de la procédure.
Le principal retard a eu lieu devant la cour
administrative d’appel, devant laquelle la procédure
est demeurée pendante pendant près de huit ans.
Deux avocats seulement sont intervenus dans cette
procédure et cette juridiction n’a demandé des
éclaircissements au sujet de la représentation de M.
Rumpf que neuf mois après l’intervention du second
avocat de l’intéressé. La désignation d’un conseil
supplémentaire n’a donc pas eu pour effet de
prolonger la procédure. Un retard important de deux
ans et demi a été occasionné par la tentative
déployée, en vain, pour retrouver les dossiers
manquants, retard qui, pour la Cour, est imputable au
gouvernement allemand. La requête en récusation
pour partialité soumise ultérieurement au cours de la
procédure ne saurait justifier le défaut de fixation
d’une nouvelle audience pendant près de trois ans.
Seul le retard intervenu dans la procédure devant la
Cour constitutionnelle fédérale doit être imputé à M.
Rumpf, son avocat n’ayant soumis les observations
complémentaires requises que six mois après le délai
fixé à l’origine.
La Cour note que le fonctionnement de la société de
M. Rumpf dépendait de l’issue de la procédure. Si
l’intéressé a subi une perte financière du fait du refus
final de lui délivrer les permis, il a également
Supplément 09/2010
13
éprouvé un préjudice occasionné par la durée de la
procédure et l’incertitude qui en est résultée quant à
la reprise de son activité. Si la procédure avait été
menée dans les délais, il aurait pu commencer plus
tôt à réorganiser sa société ou à la transférer.
Par ces motifs, la Cour dit, à l’unanimité, qu’il y a eu
violation de l’article 6 § 1.
Article 13
La Cour souligne que dans de nombreuses autres
affaires dirigées contre l’Allemagne, elle a conclu à
l’absence en droit allemand de recours effectifs
propres à fournir un redressement pour la durée
excessive d’une procédure civile. Partant, elle
conclut, à l’unanimité, qu’il y a eu en l’espèce
violation de l’article 13, l’intéressé n’ayant disposé
d’aucun recours qui lui eût permis d’obtenir une
décision reconnaissant son droit de faire entendre sa
cause dans un délai raisonnable, garanti par l’article
6 § 1.
RUMPF C. ALLEMAGNE REQUETE NO 46344/06
Violation de l'art. 6-1 ; Violation de l'art. 13 ;
Dommage matériel - demande rejetée ; Préjudice moral
– réparation. Jurisprudence : Abduvalieva c.
Allemagne, n° 54215/08, 26 novembre 2009 ; Adam c.
Allemagne, n° 44036/02, 4 décembre 2008 ; Afflerbach
c. Allemagne, 39444/08, 24 juin 2010 ; Bähnk c.
Allemagne, n° 10732/05, 9 octobre 2008 ; Ballhausen
c. Allemagne, n° 1479/08, 23 avril 2009 ; Bayer c.
Allemagne, n° 8453/04, 16 juillet 2009 ; Bottazzi c.
Italie [GC], n° 34884/97, CEDH 1999-V ; Bozlar c.
Allemagne, n° 7634/05, 5 mars 2009 ; Broniowski c.
Pologne [GC], n° 31443/96, CEDH 2004-V ; Bourdov
c. Russie (n° 2), n° 33509/04, CEDH 2009-... ; D.E. c.
Allemagne, n° 1126/05, 16 juillet 2009 ; Deiwick c.
Allemagne, n° 7369/04, 26 mars 2009 ; Evelyne
Deiwick c. Allemagne, n° 17878/04, 11 juin 2009 ;
Frydlender c. France [GC], n° 30979/96, CEDH 2000VII ; Glüsen c. Allemagne, n° 1679/03, 10 janvier 2008
; Grässer c. Allemagne, n° 66491/01, 5 octobre 2006 ;
Herbst c. Allemagne, n° 20027/02, 11 janvier 2007 ;
Herbst c. Allemagne, n° 20027/02, 11 janvier 2007 ;
Hub c. Allemagne, n° 1182/05, 9 avril 2009 ; HuttenCzapska c. Pologne [GC], n° 35014/97, CEDH 2006VIII ; Jesse c. Allemagne, n° 10053/08, 22 décembre
2009 ; Kindereit c. Allemagne, n° 37820/06, 8 octobre
2009 ; Kirsten c. Allemagne, n° 19124/02, 15 février
2007 ; Klasen c. Allemagne, n° 75204/01, 5 octobre
2006 ; Kressin c. Allemagne, n° 21061/06, 22
décembre 2009 ; Kuchejda c. Allemagne 17384/06, 24
juin 2010 ; Kudla c. Pologne [GC], n° 30210/96,
CEDH 2000-XI ; Kurt Müller c. Allemagne, n°
36395/07, 25 février 2010 ; Laudon c. Allemagne, n°
14635/03, 26 avril 2007 ; Leela Förderkreis e.V. et
autres c. Allemagne, n° 58911/00, 6 novembre 2008 ;
Lukenda c. Slovénie, n° 23032/02, CEDH 2005-X ;
Mianowicz c. Allemagne (n° 2), n° 71972/01, 11 juin
2009 ; Nanning c. Allemagne, n° 39741/02, 12 juillet
2007 ; Niedzwiecki c. Allemagne (n° 2), n° 12852/08,
1 avril 2010 ; Nold c. Allemagne, n° 27250/02, 29 juin
LE JOURNAL DES DROITS DE L’HOMME
2006 ; Perschke c. Allemagne, 25756/09, 24 juin 2010 ;
Petermann c. Allemagne, n° 901/05, 25 mars 2010 ;
Reinhard c. Allemagne, n° 485/09, 25 mars 2010 ;
Ritter-Coulais c. Allemagne, 32338/07, 30 mars 2010 ;
S. et Marper c. Royaume-Uni [GC], nos 30562/04 et
30566/04, CEDH 2008-... ; Schädlich c. Allemagne,
21423/07, 24 juin 2010 ; Scozzari et Giunta c. Italie
[GC], nos 39221/98 et 41963/98, CEDH 2000 VIII ;
Sinkovec c. Allemagne, n° 46682/07, 30 mars 2010 ;
Skugor c. Allemagne, n° 76680/01, 10 mai 2007 ; Sopp
c. Allemagne, n° 47757/06, 8 octobre 2009 ; Stork c.
Allemagne, n° 38033/02, 13 juillet 2006 ; Sürmeli c.
Allemagne [GC], n° 75529/01, CEDH 2006-VII ;
Volkmer c. Allemagne, n° 54188/07, 30 mars 2010 ;
Von Koester c. Allemagne (n° 1), n° 40009/04, 7
janvier 2010 ; Wildgruber c. Allemagne, nos 42402/05
et 42423/05, 21 janvier 2010 ; Xenides-Arestis c.
Turquie, n° 46347/99, 22 décembre 2005 ; Youri
Nikolaïevich Ivanov c. Ukraine, n° 40450/04, CEDH
2009-... (extraits).
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L’article 8 de la Convention
LA SURVEILLANCE PAR GPS D’UNE
PERSONNE SOUPÇONNEE
D’INFRACTIONS GRAVES ETAIT
JUSTIFIEE
UZUN C. ALLEMAGNE
02.09.2010
A l’unanimité :
Non-violation des articles 8 et 6 § 1
L’affaire concerne la surveillance du requérant par
GPS (système de géolocalisation par satellite) dans
le cadre d’une enquête pénale. C’est la première
affaire concernant une telle surveillance dont la Cour
européenne des droits de l’homme ait été saisie.
En octobre 1995, le procureur général près la Cour
fédérale de Justice (Generalbundesanwalt) ouvrit
une instruction contre M. Uzun et un complice
présumé pour participation à des attentats à la bombe
revendiqués par la « cellule anti-impérialiste », une
organisation qui poursuivait la lutte armée
abandonnée en 1992 par la Fraction armée rouge
(RAF), mouvement terroriste d’extrême gauche.
L’Office fédéral de la police judiciaire
(Bundeskriminalamt) fut chargé de l’enquête. Il
procéda notamment à la surveillance visuelle de M.
Uzun pendant les week-ends, à la surveillance au
moyen d’une caméra vidéo de l’entrée de
l’immeuble où l’intéressé vivait, à des écoutes
téléphoniques et à l’installation d’émetteurs dans la
voiture du complice présumé, que celui-ci et le
requérant utilisaient souvent ensemble. Les
Supplément 09/2010
14
intéressés ayant découvert les dispositifs et les ayant
détruits et étant donné qu’ils évitèrent de se parler au
téléphone, le procureur général ordonna leur
surveillance par GPS. L’Office fédéral de la police
judiciaire installa un récepteur GPS dans le véhicule
du complice présumé de M. Uzun en décembre
1995, ce qui lui permit de localiser la voiture. Cette
surveillance dura jusqu’à l’arrestation des deux
hommes, en février 1996.
Dans le cadre de la procédure pénale ouverte contre
les deux hommes, la cour d’appel de Düsseldorf
rejeta l’objection de M. Uzun à l’utilisation en tant
que preuves des informations obtenues grâce à la
surveillance par GPS. Elle estima que le recours au
GPS était autorisé par le code de procédure pénale et
qu’aucune décision judiciaire n’était nécessaire à
cette fin. En septembre 1999, la cour d’appel
condamna le requérant à une peine de treize ans
d’emprisonnement pour tentative de meurtre et pour
quatre attentats à la bombe. Elle conclut que les deux
hommes avaient posé des bombes devant le domicile
de députés et d’anciens députés et devant un
consulat. Les éléments de preuve comprenaient les
données obtenues grâce à la surveillance par GPS,
lesquelles étaient corroborées par les renseignements
recueillis au moyen d’autres méthodes de
surveillance. M. Uzun se pourvut en cassation, se
plaignant en particulier de l’utilisation au procès
d’éléments de preuve obtenus grâce à sa surveillance
par GPS. En janvier 2001, la Cour fédérale de
Justice (Bundesgerichtshof) le débouta.
En avril 2005, la Cour constitutionnelle fédérale
(Bundesverfassungsgericht) écarta le recours de M.
Uzun. Elle estima que l’atteinte causée au droit de
l’intéressé au respect de sa vie privée par sa
surveillance par GPS était proportionnée, eu égard à
la gravité des infractions et au fait qu’il s’était
dérobé à d’autres mesures de surveillance. Pour la
Cour constitutionnelle fédérale, les garanties
procédurales en place étaient suffisantes pour éviter
une surveillance totale permettant de dresser le profil
exhaustif d’une personne. Toutefois, le législateur
devait examiner si, eu égard à l’évolution future, ces
garanties étaient suffisantes pour fournir une
protection effective des droits fondamentaux et
éviter la mise en œuvre non coordonnée de mesures
d’enquête par différentes autorités.
Le requérant alléguait que sa surveillance par GPS et
l’utilisation des données ainsi obtenues dans le cadre
de la procédure pénale dirigée contre lui avaient
emporté violation de ses droits garantis par l’article
8. Ces données ayant constitué le fondement
essentiel de sa condamnation, il se plaignait en outre
d’une violation de l’article 6 § 1.
Décision de la Cour
La Cour observe tout d’abord que le récepteur GPS a
été intégré sur une voiture appartenant à un tiers (le
LE JOURNAL DES DROITS DE L’HOMME
complice de M. Uzun). Toutefois, en procédant de
la sorte, les autorités d’enquête avaient
manifestement l’intention de recueillir des
informations sur les déplacements des deux suspects,
étant donné que leurs précédentes investigations leur
avaient révélé que ceux-ci avaient utilisé la voiture
ensemble. On n’a pu faire le lien entre les
déplacements de la voiture du complice et M. Uzun
qu’en soumettant celui-ci à une surveillance visuelle
supplémentaire et aucune des juridictions internes
n’a contesté que l’intéressé avait été soumis à une
surveillance par GPS.
Les autorités d’enquête ont systématiquement
recueilli et conservé des données indiquant l’endroit
où se trouvait M. Uzun et les déplacements de celuici en public. Elles ont de surcroît utilisé ces données
pour suivre tous les déplacements de l’intéressé,
pour effectuer des investigations complémentaires et
pour recueillir d’autres éléments de preuve dans les
endroits où il s’était rendu, éléments qui ont ensuite
été utilisés dans le cadre du procès pénal.
La Cour estime que les aspects susmentionnés
suffisent pour conclure que la surveillance de M.
Uzun par GPS s’analyse en une ingérence dans
l’exercice par lui de son droit au respect de sa vie
privée garanti par l’article 8 § 1.
Sur le point de savoir si cette ingérence était «
prévue par la loi », la Cour estime qu’elle avait une
base dans le code de procédure pénale. Elle souligne
qu’il y a lieu de distinguer la surveillance par GPS
de déplacements en public d’autres méthodes de
surveillance par des moyens visuels ou acoustiques
car elle révèle moins d’informations sur la conduite,
les opinions ou les sentiments de la personne qui en
fait l’objet et porte donc moins atteinte au droit de
celle-ci au respect de sa vie privée. La Cour ne voit
donc pas la nécessité d’appliquer les mêmes
garanties strictes contre les abus que celles qu’elle a
développées dans sa jurisprudence sur la surveillance
des télécommunications, par exemple l’obligation de
définir précisément la durée maximale de l’exécution
de la mesure de surveillance ou la procédure à suivre
pour l’utilisation et la conservation des données
recueillies.
La Cour estime que la conclusion unanime des
juridictions internes selon laquelle la surveillance par
GPS était couverte par le droit interne était
raisonnablement prévisible, étant donné que les
dispositions pertinentes prévoyaient le recours à des
moyens techniques, en particulier « pour localiser
l’auteur d’une infraction ». En outre, le droit interne
subordonnait l’autorisation de la mesure de
surveillance par GPS à des conditions très strictes ;
en effet, une telle surveillance ne pouvait être
ordonnée qu’à l’égard d’une personne soupçonnée
d’une infraction extrêmement grave.
Supplément 09/2010
15
La Cour se félicite des modifications apportées au
droit allemand après l’enquête menée dans l’affaire
de M. Uzun car elles ont eu pour effet de renforcer la
protection du droit d’un suspect au respect de sa vie
privée, la surveillance systématique de celui-ci
devant être ordonnée par un juge lorsqu’elle dépasse
une durée d’un mois. Elle note toutefois que déjà en
vertu des dispositions en vigueur à l’époque des faits
la surveillance d’un individu par GPS était
susceptible d’un contrôle judiciaire. Elle estime que
le contrôle judiciaire ultérieur de la surveillance de
M. Uzun par GPS a offert une protection suffisante
contre l’arbitraire en l’espèce. Un tel contrôle, qui
permet d’exclure les éléments de preuve obtenus au
moyen d’une surveillance illégale par GPS, constitue
une garantie importante, en ce qu’elle décourage les
autorités d’enquête de recueillir des preuves par des
moyens illégaux. La Cour conclut que l’ingérence
dans l’exercice par M. Uzun de son droit au respect
de sa vie privée était « prévue par la loi ».
La Cour note que la surveillance M. Uzun par GPS,
ordonnée aux fins d’enquêter sur plusieurs
accusations de tentatives de meurtre revendiquées
par un mouvement terroriste et de prévenir d’autres
attentats à la bombe, était dans l’intérêt de la sécurité
nationale, de la sûreté publique, de la prévention des
infractions pénales et de la protection des droits des
victimes. La surveillance par GPS a seulement été
ordonnée après que d’autres mesures d’investigation,
moins attentatoires à la vie privée, se furent révélées
moins efficaces, et cette mesure a été mise en œuvre
pendant une période relativement courte (trois mois)
et n’a touché l’intéressé que lorsqu’il se déplaçait
dans la voiture de son complice. Dès lors, on ne
saurait dire que le requérant a été soumis à une
surveillance totale et exhaustive. L’enquête ayant
porté sur des infractions très graves, la Cour estime
que la surveillance de M. Uzun par GPS était
proportionnée aux buts poursuivis.
La Cour conclut, à l’unanimité, à la non-violation de
l’article 8 de la Convention. En outre, eu égard à
cette conclusion, elle dit, à l’unanimité, qu’aucune
question distincte ne se pose sous l’angle de l’article
6 § 1.
UZUN C. ALLEMAGNE requête no 35623/05 Exception
préliminaire jointe au fond et rejetée (victime) ; Nonviolation de l'article 8. Jurisprudence : Amann c.
Suisse [GC], no 27798/95, CEDH 2000-II ;
Association pour l'intégration européenne et les droits
de l'homme et Ekimdjiev c. Bulgarie, no 62540/00, 28
juin 2007 ; Bykov c. Russie [GC], no 4378/02, § 76,
CEDH 2009-... ; Dumitru Popescu c. Roumanie (no 2),
no 71525/01, §§ 70-71, 26 avril 2007 ; Herbecq et
Association « Ligue des droits de l'homme » c.
Belgique, nos 32200/96 et 32201/96, décision de la
Commission du 14 janvier 1998, Décisions et rapports
(DR) 92-B, p. 92 ; Iordachi et autres c. Moldova, no
LE JOURNAL DES DROITS DE L’HOMME
25198/02, 10 février 2009 ; Klass et autres c.
Allemagne, 6 septembre 1978, § 50, série A no 28 ;
Kopp c. Suisse, 25 mars 1998, § 59, Recueil 1998-II ;
Kruslin c. France, 24 avril 1990, § 27, série A no 176A ; Lambert c. France, 24 août 1998, § 21, Recueil des
arrêts et décisions 1998-V ; Leander c. Suède, 26 mars
1987, § 58, série A no 116 ; Liberty et autres c.
Royaume-Uni, no 58243/00, 1 juillet 2008 ; Malone c.
Royaume-Uni, 2 août 1984, § 67, série A no 82 ;
Messina c. Italie (no 2), no 25498/94, § 65, CEDH
2000-X ; P.G. et J.H. c. Royaume-Uni, no 44787/98,
§§ 56, 57, 59-60, CEDH 2001-IX ; Peck c. RoyaumeUni, no 44647/98, CEDH 2003-I ; Perry c. RoyaumeUni, no 63737/00, CEDH 2003-IX ; Rotaru c.
Roumanie [GC], no 28341/95, §§ 43-44, CEDH 2000V ; S.W. c. Royaume-Uni, 22 novembre 1995, § 36,
série A no 335-B ; Streletz, Kessler et Krenz c.
Allemagne [GC], nos 34044/96, 35532/97 et 44801/98,
§ 50, CEDH 2001-II ; Valenzuela Contreras c.
Espagne, 30 juillet 1998, § 46 iii), Recueil 1998-V ;
Weber et Saravia c. Allemagne (déc.), no 54934/00, §§
93, 94, CEDH 2006-XI.
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L’article 5 de la Convention
L’IMPOSITION AU REQUÉRANT DE SOINS
PSYCHIATRIQUES PENDANT PLUS DE
CINQ ANS A PORTÉ ATTEINTE A SA VIE
PRIVÉE
SHOPOV C. BULGARIE
02.09.2010
A l’unanimité :
Violation de l’article 5 § 1
Violation de l’article 8
Saisi par le frère du requérant suite à la préconisation
du psychiatre, le procureur de district ordonna en
décembre 2002 le placement de M. Shopov en
hôpital psychiatrique, afin d’effectuer une expertise
pour déterminer la nécessité d’un traitement médical
obligatoire en vertu de la loi sur la santé publique.
Par un jugement du 3 avril 2003, le tribunal de
district décida du placement du requérant en hôpital
psychiatrique, au motif que, d’après les expertises,
d’après les expertises, son état de santé pouvait se
dégrader.
M. Shopov interjeta appel de ce jugement, contestant
l’équité de la procédure et la nécessité du traitement
psychiatrique. Par un jugement du 9 octobre 2003, le
tribunal de Sofia, estimant que le requérant ne
présentait aucun danger pour autrui, que le seul
risque pour sa santé tenait à son refus de se soigner
et que le traitement médicamenteux pouvait se faire
hors de l’hôpital, remplaça la mesure de placement
Supplément 09/2010
16
par un traitement médical obligatoire en hôpital
psychiatrique de jour.
M. Shopov refusant de se soumettre à ce traitement,
il fut appréhendé par la police à son domicile le 1er
décembre 2003 sur ordre du procureur, puis menotté
et conduit de force à l’hôpital psychiatrique. Un
traitement médical lui fut administré puis il quitta
l’hôpital fin décembre. Jusqu’en septembre 2009, le
requérant se rendit périodiquement à l’hôpital de
jour pour l’application du traitement psychiatrique
obligatoire, en exécution du jugement du 9 octobre
2003.
Sous l’angle de l’article 5 § 1, le requérant se
plaignait que son placement en hôpital psychiatrique
l’avait privé de sa liberté de manière irrégulière et
arbitraire, et, sous l’angle de l’article 8, du traitement
psychiatrique en hôpital de jour imposé contre sa
volonté pendant plus de cinq ans.
Décision de la Cour
Article 5 § 1
Le placement du requérant dans un établissement
psychiatrique contre son gré du 1er au 29 décembre
2003 a été ordonné par le procureur, alors que le
tribunal de Sofia avait décidé par un jugement que ce
traitement serait effectué en hôpital de jour. Ainsi, le
procureur et la police ont outrepassé les limites de ce
jugement et le placement de l’intéressé en hôpital
psychiatrique a été irrégulier, en violation de l’article
5 § 1.
Article 8
L’ingérence continue dans le droit au respect de la
vie privée du requérant, que constituait un traitement
contre son gré, avait une base légale, à savoir la loi
sur la santé publique de 1973, prévoyant la
possibilité de procéder à des soins psychiatriques
contre la volonté de la personne intéressée en cas de
risque d’aggravation sérieuse de son état de santé.
En revanche, le contrôle judiciaire à intervalles
réguliers, prévu par cette disposition quant à la
nécessité de poursuivre le traitement, n’a pas eu lieu
dans le cas de M. Shopov. La Cour relève que le
traitement obligatoire a été décidé pour une durée
indéterminée.
Par conséquent, le maintien des soins psychiatriques
obligatoires à son encontre pendant plus de cinq ans
n’était pas conforme au droit bulgare, d’autant
qu’aucun élément ne suggère que M. Shopov aurait
pu contester la poursuite du traitement - au moins
pour la période antérieure à l’entrée en vigueur de la
loi de 2005, qui a abrogé la loi sur la santé publique
de 1973. La Cour conclut qu’il y a eu violation de
l’article 8.
SHOPOV C. BULGARIE requête no 11373/04
Partiellement irrecevable ; Violation de l'art. 5-1 ;
Violation de l'art. 8 ; Préjudice moral – réparation.
Jurisprudence : Aerts c. Belgique, 30 juillet 1998,
Recueil des arrêts et décisions 1998-V ; CostelloRoberts c. Royaume-Uni, 25 mars 1993, série A no 247
; Glass c. Royaume-Uni, no 61827/00, CEDH 2004-II ;
Halford c. Royaume-Uni, 25 juin 1997, Recueil 1997III ; Hutchison Reid c. Royaume-Uni, no 50272/99,
CEDH 2003-IV ; Juhnke c. Turquie, no 52515/99, 13
mai 2008 ; Rotaru c. Roumanie [GC], no 28341/95,
CEDH 2000-V ; Storck c. Allemagne, no 61603/00,
CEDH 2005-V ; Winterwerp c. Pays-Bas, 24 octobre
1979, série A no 33 ; X. et Y. c. Pays-Bas, 26 mars
1985, série A no 91.
Observatoire sans frontières des violations des droits de la
défense et des droits des avocats dans le monde
En soutenant l’IDHAE, ce mois-ci vous êtes intervenus pour:
KIRGHIZSTAN - 2 août
2010 : Nurbek Toktakunov,
agressé au poste de police,
lors d'une visite au militant
des droits de l'homme
ouzbèk , Azimjan Askarov.
Le 2 août 2010,
Nurbek Toktakunov, avocat et
président de "Independent human
rights group", qui a été récemment
membre du Conseil de la
Constitution (COC), approuvée
par référendum, le 27 juin dernier,
a été agressé alors qu'il rendait
visite à son client, Azimjan
Askarov le directeur de
«
Vozdukh » (Air).
Le 2 août 2010, après qu'il ait
commencé à parler avec Azimjan
Askarov, au poste de police de
Jalalabad,
des policiers sont
intervenus et ont mis fin à
l'entretien de Nurbek Toktakunov,
en emmenant son client. Ils ont
LE JOURNAL DES DROITS DE L’HOMME
prétexté de raisons de sécurité. Ils
ont
surtout
indiqué
qu'ils
voulaient éviter des incidents car
les proches d'une victime tuée lors
des émeutes inter-ethniques entre
les Ouzbèks et les Kirghizes,
allaient arriver au poste de police.
De fait, subitement des inconnus
ont encerclé l'avocat, lui ont pris
son porte document et l'ont
menacé de représailles s'il
n'acceptait pas d'abandonner
l'affaire. Les policiers présents ont
mystérieusement disparu.
Supplément 09/2010
17
LE JOURNAL DES DROITS DE L’HOMME
COLOMBIE - 4 août 2010 :
Judith Maldonado Mojica,
agressée et frappée par deux
individus à moto.
Le 4 août 2010,
Judith Maldonado Mojica *, qui
travaille comme directrice du
collectif d'avocats 'Luis Carlos
Perez des droits de l'homme
(CCALCP) pour apporter une
assistance
juridique
et
pédagogique aux communautés
indigènes , a été agressée devant
les bureaux de la CCALCP à
Bucaramanga, par des hommes
armés à m...oto qui l'ont frappée,
l'ont insultée et ont menacé de la
tuer. Ils sont partis en emportant
son sac à main qui contenait des
documents et des appareils de
communication appartenant à la
CCALCP. Judith Maldonado
Mojica avait déjà été menacée. Le
12 mars 2010, elle a reçu sur son
téléphone portable des menaces
paraissant émaner du groupe
paramilitaire Águilas Negras
(Aigles Noirs). Un an plus tôt, le
31 Mars 2009, la maison de Judith
Maldonado Mojica, dans la ville
d'Arauca avait été curieusement
"cambriolée".
IRAN - 8 août 2010 :
Mohammad Mostafaei s'est
refugié à Oslo, avec un billet
offert par l'ambassade de
Norvège en Turquie.
Sa
femme et sa famille ont été
libérées le 7 août 2010 de la
prison d'Evin.
Mohammad
Mostafaei, avocat iranien des
droits
de
l’homme,
était
notamment...l’avocat de Sakineh
Mohammadi Ashtiani, une femme
de 43 ans condamnée à être
09 2010
/
lapidée pour une liaison extraconjugale, bien qu'il n'y ait pas de
preuve de son implication dans le
meurtre de son mari, ainsi qu’un
grand nombre de mineurs
délinquants,
de
prisonniers
politiques et d’autres personnes
condamnées à mort par lapidation.
Mohammed
Mostafaei
avait
ouvertement critiqué le système
judiciaire iranien. Il a qualifié la
condamnation à la lapidation de
Sakineh de " fausse déclaration de
culpabilité" et d'"absolument
illégale". Pour ses activités
d’avocat il avait été emprisonné à
plusieurs reprises. Pour échapper
à
l'arrestation,
Mohammad
Mostafaei avait réussi à franchir le
29 juillet 2010, la frontière pour
entrer en Turquie afin de
demander l’asile politique. Mais il
a été arrêté et a été détenu pendant
six jours. Il y a été interrogé dans
le commissariat de Kumkapi à
Istanbul. Le 6 aout, Mohammad
Mostafaei a été libéré grâce à
l’intervention
de
l’Union
Européenne, et en particulier la
Norvège qui avait annoncé qu’elle
était prête à lui accorder la
nationalité
norvégienne.
Mohammad Mostafaei est arrivé
le 8 aout à Oslo, avec un billet
offert par l'ambassade de Norvège
en Turquie. Il compte y demander
l'asile politique. Mohammad
Mostafaei avait été interrogé, le
24 juillet 2010, dans les bureaux
du procureur de la prison d’Evin,
pendant au moins une heure à la
prison avant d’être libéré. Plus
tard, cependant, il a de nouveau
été convoqué. Comme il ne se
trouvait pas à son bureau, un
mandat d'amener a été délivré
contre lui. Mohammad Mostafaei
n'ayant pas été davantage trouvé à
son domicile par les policiers
porteurs du mandat, son épouse,
Fereshteh Halimi, le frère de
celle-ci, Farhad Halimi, ainsi que
son père ont été arrêtés, sans
aucun motif légal, comme otages
pour le forcer à se rendre aux
autorités.Sa femme, Fereshteh
Halimi, été libéré le 7 aout 2010.
Le frère de celle-ci, Farhad
Halimi, ainsi que son père avaient
été libérés un peu plus tôt dans la
semaine qui précédait.
LE JOURNAL DES DROITS DE L’HOMME
IRAN - 8 septembre 2010 :
Javid Houtan Kian, le nouvel
avocat
de
Sakineh
Mohammadi Ashtiani, sous
la menace après avoir révélé
l'absence de suspension de la
peine de lapidation contre sa
cliente.
Javid Houtan Kian,
le nouvel avocat de Sakineh
Mohammadi Ashtiani, sous la
menace après avoir révélé
l'absence de suspension de la
peine de lapidation contre sa
cliente. Alors que le ministère
iranien des Affaires étrangères
vient d’annoncer la suspension de
la peine de lapidation contre
l’Iranienne
Sakineh
Mohammadi...Ashtiani
pour
adultère. Le nouvel avocat de
Sakineh, Javid Houtan Kian, qui
en tant qu’avocat de Mme
Ashtiani, aurait dû être la
première personne informée de la
décision, n'a à ce jour reçu aucun
document officiel écrit indiquant
la suspension de la peine de sa
cliente. L'information doit être
accueillie avec suspicion. En tout
état de cause, ni le ministère
iranien des affaires étrangères, ni
le gouvernement iranien, n’ont
pas le pouvoir de suspendre cette
peine qui concerne la seule
autorité judiciaire. Seules deux
personnes en Iran peuvent le faire:
le Chef du Pouvoir judiciaire, M.
Larijani, ainsi que le chef de la
branche n°9 du Conseil suprême
du
pays,
M.
Davoudi
Mazandarani., ce qui n’a pas été le
cas. Javid Houtan Kian a luimême effectué cette demande de
suspension à dix reprises, sans
jamais obtenir aucune réponse.
Tant qu’il ne figure sur le dossier
de lapidation aucun document
officiel indiquant la suspension de
sa peine, celle-ci peut-être
exécutée à tout moment.. La peine
de la pidation peut toujours être
appliquée à tout moment.Javid
Supplément 09/2010
18
LE JOURNAL DES DROITS DE L’HOMME
Houtan Kian est aujourd'hui
ménacé. Il reste le seul à défendre
Sakineh Mohammadi Ashtiani.En
juillet 2010, c'est grâce à l’autre
avocat de Sakineh, Mohammad
Mostafaei, qui avait choisi
d'alerter l'opinion mondiale et de
faire des révélations à la presse
internationale, qu'une campagne
de soutien se crée, forçant les
autorités iraniennes à annoncer la
suspension de la lapidation. Mais,
après les révélation du sort de
Sakineh à la presse mondiale,
Mohammad Mostafaei, avait été
arrêté et détenu à la prison d'Evin
puis relâché. Il avait profité de ce
bref répit pour fuir l’Iran pour
s’exiler en Norvège à la suite à un
mandat d’arrêt contre lui. Sa
femme est détenue pendant une
semaine à Téhéran pour le forcer à
revenir.
CHINE - 9 septembre 2010 :
Chen Guangcheng , l'avocat
“aux pieds nus”, libéré de la
Prison de la ville de Linyi ,
dans
la
Province
de
Shandong.
Chen
Guangcheng , l'avocat “aux pieds
nus”, condamné en 2006 à quatre
années et trois mois dans prison, a
été libéré le 9 septembre 2010 de
la Prison de la ville de Linyi ,
dans la Province de Shandong.
Chen Guangcheng , aveugle
depuis l'enfance, qui a appris le
droit en braille, avait été arrêté
dans la nuit du 11 au...12 mars
2006, pour avoir aidé des
villageois à intenter une action en
justice contre les autorités de la
ville de Linyi, qu’ils accusaient
d’avoir enfreint la loi dans leur
mise en œuvre de la politique de
contrôle des naissances. femmes,
qui auraient subi des avortements
forcés, parfois à plus de sept mois
de grossesse sur ordre des
fonctionnaires locaux pour ne pas
troubler les statistiques et ainsi
éviter d'être sanctionnés par leurs
09 2010
/
supérieurs pour non respect de la
politique de l'enfant unique.. Il
avait été condamné en août 2006,
par le tribunal populaire de Yinan
à quatre ans et trois mois de
prison pour avoir dénoncé les
politiques de stérilisation forcée
des autorités de Shandong, qui le
poursuivait pour "destruction de
propriété
publique"
et
«
organisation de malfaiteurs en vue
de perturber la circulation ». Sa
peine avait été confirmée en
appel. Il aura passé quatre ans et
six mois en détention.
IRAN - 4 septembre 2010 :
Arrestation
de
Nasrin
Sotoodeh pour “conspiration
contre sécurité nationale et
propagande
contre
la
République Islamique”.
Nasrin
Sotoodeh,
l'avocate
des
journalistes et militants politiques
emprisonnés
après
l'élection
présidentielle de juin 2009, a été
arrêtée, le 4 septembre, pour
“conspiration contre sécurité
nationale et propagande contre la
République Islamique” et est
actuellement incarcérée. Selon
l'Agence
RAHANA,
Reza
Khanda...n, le mari de Nasrin
Sotoodeh, a révélé, le 5 septembre
qu'elle avait reçu trois jours avant
une convocation à se rendre le
matin du samedi 4 septembre
auprès du parquet rattaché aux
tribunaux révolutionnaires (dad
sarat amniah), dont les locaux sont
situés dans l'enceinte de la prison
d'Evin. Un mandat d'arrêt a été
délivré contre elle et elle n'est pas
retournée à son domicile depuis.
Selon, l'IFEX, le 28 août
précédent, le bureau de Nassrin
Soutodeh avait été perquisitionné
avant d'être fermé par les
autorités. Elle avait alors déclaré :
"Leur but est de vider le pays de
ses défenseurs des droits de
l'homme." Nasrin Sotoodeh qui a
représenté plusieurs personnalités,
notamment les journalistes Issa
LE JOURNAL DES DROITS DE L’HOMME
Saharkhiz et Mohammed Sedigh
Kabodvand, gravement malades,
avait indiqué qu'elle avait été
accusée dans la convocation de
“conspiration contre sécurité
nationale et propagande contre la
République Islamique”. Elle avait
aussi annoncé que quelles que soit
les circonstances, elle contestait
formellement ces accusations.
Nasrin Sotoodeh, membre du
Cercle des défenseurs des droits
de l’homme, créé à Téhéran par
Shirin Ebadi, Prix Nobel de la
paix, a assuré la défense de
plusieurs prisonniers politiques et
journalistes arrêtés à la suite de
l'élection
présidentielle
controversée de juin 2009. Elle
avait dénoncé les nombreuses
irrégularités de procédure et
notamment le fait que les
prisonniers,
notamment
les
journalistes incarcérés, soient
privés de leurs droits les plus
élémentaires. Ainsi, les avocats ne
pouvaient pas rendre visite à leurs
clients en détention, ni consulter
leur dossier. Au cours du mois
d'août 2009, a été convoquée à
plusieurs reprises par les agents
du ministère des Renseignements.
PAKISTAN – 6 septembre
2010 : Assassinat après son
enlèvement de l'avocat
balochi Zaman Marri.
Le
6
septembre, le corps de Zaman
Marri a été retrouvé dans le
secteur de Ghuncha Dhori de la
ville de Mastung, située à 40
kilomètres loin de ville Quetta. Il
avait une balle à sa tête. Le
cadavre était mutilé au point
qu'il ne n'a pas pu être
immédiatement identifié. Les
autorités de l'hôpital ont
confirmé que le corps portait
marques de tortures sévères sur
le visage et la poitrine, ainsi que
des lacérations sur les poignets
et les chevilles ttestant qu'il avait
été enchaîné.
Supplément 09/2010
19
LE JOURNAL DES DROITS DE L’HOMME
Shaheed Zaman Khan Marri, âgé
38, avait été enlevés le 19 aout
2010 près de son cabinet sur la
Jinnah Road, à Quetta qu'il était
sur sa route du retour vers Killi
Kamaloo. La cause de mort était
pensée pour être Vers sept
heures du soir deux véhicules
l'ont bloqué et la plaine et des
personnes en tenue civile l'ont
jeté à l'intérieur d'un fourgon.
Les spectateurs ont protesté et
ont essayé d'empêcher le
fourgon de partir mais les
personnes se sont présentés
comme les fonctionnaires du FC
(Frontalier Corp) et ont menacé
d'utiliser leurs armes à feu.
Les autorités du barreau du
Balochistan ont protesté contre
cet
enlèvement
et
cette
disparition. Les avocats ont
boycotté les juridictions et le
président de la Haute Cour de
justice du Balochistan était
intervenu de sa propre autorité
contre cette disparition auprès du
gouvernement
et
du
commandant du FC.
Zaman Marri avait représenté
beaucoup de détenus politiques
Balochi et disparu personnes
sans charge. Il avait dénoncé les
atrocités du Pakistan contre les
habitants du Baluch à l'occasion
de sa défense. Il avait reçu des
menaces de visiteurs inconnus
pour ne pas intervenir dans les
cas de disparitions dans les
juridictions.
OUGANDA – 15 septembre
2010 : Mbugua Mureithi
arrêté a Kampala alors qu'il
venait pour défendre ses
compatriotes
Mbugua Mureithi, avocat kenyan,
a été arrêté, à son arrivée le 15
septembre
à
l'aéroport
international d'Entebbe, alors qu'il
venait pour assurer la défense sept
suspects kényans, tous arrêtés au
Kenya dans le cadre de l'enquête
09 2010
/
sur le double attentat qui a fait 76
morts dans deux restaurants de
Kampala le 11 juillet, puis
transférés en Ouganda, "sans
aucune procédure d’extradition".
Mbugua
Mureithi
,
était
accompagné de al-Amin Kimathi,
fondateur du Forum musulman
des droits de l'Homme.Ils ont été
arrêtés par des policiers et des
agents de l’immigration ougandais
à leur arrivée à Entebbe, dans le
sud de l’Ouganda.
Mbugua Mureithi a été libéré le
18 septembre et immédiatement
renvoyé
au
Kenya.
Une fois à Nairobi, il a donné une
conférence de presse lors de
laquelle il a accusé les autorités
ougandaises de harcèlement. Il a
rapporté qu’ils ont été détenus et
conduits à travers l’Ouganda
pendant qu’ils étaient interrogés.
Lors de sa détention, il n’a pas pu
voir un avocat. Al Amin Kimathi
est, quant à lui, toujours détenu au
secret
sans
inculpation
ni
assistance juridique.
REPUBLIQUE
DEMOCRATIQUE
DU
CONGO
(RDC)
29
septembre 2010 : Nicole
Bondo Muaka et André
Marie Mwila
Kayembe,
membres de l’ONG des
droits de l’homme « Toges
Noires » arrêtés par les
services spéciaux de la police
nationale congolaise.
Le 29 septembre 2010, Me Nicole
Bondo Muaka, une Montréalaise
d’origine congolais...e, membre
de "Toges noires", ONG de
défense des droits de l’Homme, a
été arrêtée par les services
spéciaux de la police nationale
congolaise (DGRSS) à Kinshasa,
alors
qu’elle
attendait
le
dépannage de sa jeep Cherokee. Il
LE JOURNAL DES DROITS DE L’HOMME
lui est reproché d'avoir filmé
l’arrestation brutale par les gardes
du corps du Président Joseph
Kabila d’un individu accusé
d’avoir lancé une pierre sur le
cortège du Président.
Malgré les fouilles, la police n’a
annoncé aucune preuve de
l’existence de la vidéo qui a
conduit
à
l’arrestation
de
l’avocate. L’ambassadrice du
Canada à Kinshasa, a tenté
d'obtenir que l'on fournisse un
matelas à la ressortissante
canadienne.
Après la publication d’un
communiqué de presse dans la
soirée du 29 septembre 2010, le
Secrétaire Général de l’ONG
Toges Noires, Me André Marie
Mwila Kayembe, s’est rendu le
lendemain au lieu de détention de
Me Nicole Bondo. Curieusement,
il a été aussi arrêté vers 15 heures
30 par les mêmes services.Son
ordinateur portable, sa clé USB et
son téléphone ont été violement
arrachés. Son Avocat, qui est
arrivé sur le lieu pour l’assister,
n’a pas été autorisé à le
rencontrer. Toutefois, il a été
libéré sans inculpation à 17h40 et
ses effets personnels lui ont été
restitués.
RUSSIE – 30 septembre 2010
: Sapiyat Magomedova, une
avocate
du
Dagestan,
empêchée de se rendre à
Moscou et d’obtenir les
assistances
médicale
et
juridique complètes dont elle
a besoin.
Sapiat Magomedova, 31 ans,
avocate pénaliste à Khassaviourt,
dans le Caucase du Nord (Russie),
travaille sur des affaires portant
sur de graves violations des droits
de l'homme qui auraient été
commises par des membres des
forces de l’ordre. Au Daghestan,
en Russie, une avocate doit
répondre d’accusations portées
Supplément 09/2010
20
LE JOURNAL DES DROITS DE L’HOMME
contre elle par des membres des
forces de l’ordre après qu’elle eut
déclaré avoir été rouée de coups
par la police. Le 30 septembre,
des
restrictions
sur
ses
déplacements
lui
ont
été
imposées, ce qui l’empêche de se
rendre à Moscou où elle recevait
des soins réguliers pour ses
blessures après les coups reçus le
14 juin 2010 à l'antenne de police
de Khassaviourt et recevait le
soutien, notamment juridique,
d’organisations moscovites à
propos de l’enquête dont elle fait
l’objet.
KIRGHIZSTAN
30
septembre
2010
:
Taïr
Assanov, agressé en pleine
audience pour avoir demandé
une enquête sur les brutalités
policières dont son client et
neuf autres hommes ont été
victimes au cours de leurs
procès.
Le client de Taïr Assanovet neuf
autres hommes doivent répondre
d'accusations
allant
de
l'implication dans la mort du
chef de la police du district de
Kara-Suu à la participation à des
émeutes, en juin 2010 au
Kirghizistan. Selon certaines
informations, au cours d'une
suspension, plusieurs agents
seraient entrés dans la cage dans
une cage en acier à l'intérieur de
laquelle les accusés étaient
enfermés dans la salle d'audience
et auraient passé les 10 hommes
à tabac pendant une vingtaine de
minutes..
Le 30 septembre, Taïr Assanov a
réclamé une enquête sur ce
passage à tabac et a demandé
que les 10 hommes bénéficient
d'un examen médical. Des
proches du policier tué qui
étaient présents dans la salle ont
alors commencé à crier des
insultes contre Taïr Assanov
avant de l'attaquer à coups de
poing. Les membres du tribunal
ont mis du temps à intervenir et
le juge n'a pas cherché à
restaurer l'ordre ni à faire sortir
les auteurs de l'agression, qui ont
continué à crier des insultes. À la
fin de l'audience, des proches du
09 2010
/
policier tué ont suivi Taïr
Assanov hors de la salle et l'ont
attaqué. Ils l'ont frappé pendant
une dizaine de minutes. Des
policiers étaient présents durant
la scène mais ne sont pas
intervenus.
Avec la poursuite du procès, les
10 accusés et Taïr Assanov
risquent sous peu d'être de
nouveau victimes de violences.
TABLE DES MATIERES
Assassinés en 2009
Toujours en prison
Arrêtés puis libérés en 2009
Radiations, entraves
Menaces
Violences
Harcèlement
IDHAE
Supplément au
JOURNAL DES
DROITS DE L'HOMME
VIENT DE
PARAITRE
IDHAE
Cent avocats
assassinés,
emprisonnés,
persécutés dans le
monde..
Rapport 2010 de
l'Observatoire mondial
IDHAE des violations
des droits de la défense
et des droits des avocats
dans le monde.
L'
bservatoire sans
frontières des violations
des droits de la défense et
des droits de l’homme des
avocats dans le monde
Au service des avocats
depuis 1984
Directeur de la
publication :
Bertrand FAVREAU
Institut des Droits de
l’Homme des Avocats
Européens
European Bar Human
Rights Institute
4-6, rue de la Boucherie
L - 2012 Luxembourg
Copyright © 2010 by
IDHBB and European
Bar Human Rights
Institute.
www.idhae.org
e-mail :
[email protected]
120 pages.
LE JOURNAL DES DROITS DE L’HOMME
Supplément 09/2010

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