Bulletin spécial – Pornographie sur ordinateur au travail: mandat

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Bulletin spécial – Pornographie sur ordinateur au travail: mandat
BULLETIN
L'Espace RH
25 mars 2011
Bulletin spécial – Pornographie sur ordinateur au travail: mandat
nécessaire pour la police, l'employeur a plus de latitude
Par : Maria Giagilitsis et Brian Smeenk | Toronto
Dans un arrêt rendu plus tôt cette semaine, la Cour d'appel de l'Ontario a rendue une décision étonnante sur les droits au respect de la vie
privée en milieu de travail. L'affaire R v. Cole (PDF – an anglais seulement) traite d'accusations criminelles portées contre un enseignant
pour possession de pornographie juvénile. La Cour a déclaré que l'employé a une expectative raisonnable du respect de la vie privée
relativement au contenu de son ordinateur en milieu de travail. La police ne pouvait donc pas fouiller l'ordinateur de l'enseignant sans
mandat de perquisition. L'employeur a obtenu plus de latitude, sans toutefois avoir carte blanche. Bien que cette décision puisse semer la
confusion, elle n'est pas aussi préjudiciable qu'elle le semble à première vue relativement à la capacité de l'employeur de contrôler l'usage
de son matériel informatique.
Jusqu'à maintenant, la règle générale était la suivante : les renseignements personnels enregistrés par les employés sur les ordinateurs en
milieu de travail étaient traités comme appartenant à l'employeur et ce dernier y avait accès. Les employeurs pouvaient clairement
enquêter sur le mauvais usage d'un outil de travail et prendre des mesures contre les employés qui violaient leurs politiques. Il était
présumé que les employeurs pouvaient remettre à la police du matériel susceptible d'entraîner des accusations criminelles. Toutefois, dans
la décision rendue cette semaine, en raison de l'attente raisonnable de respect de la vie privée, les procureurs au criminel ne seront pas en
mesure d'utiliser de nombreuses images obtenues par la police à partir d'un ordinateur en milieu de travail dans le cadre du procès criminel
d'un enseignant. Cependant, la Cour a déclaré que des considérations différentes s'appliquent aux employeurs. Ceci soulève de nouvelles
questions sur les mesures que les employeurs peuvent prendre pour s'assurer que les employés ne fassent pas mauvais usage de leur
matériel.
Les faits établis
L'école secondaire où travaillait un enseignant de Sudbury lui a fourni un ordinateur portable. L'enseignant utilisait l'ordinateur portable
pour enseigner la technologie des communications. Il était également chargé de superviser un programme d'ordinateurs portables à
l'intention des étudiants.
L'enseignant était habilité à accéder à distance aux données enregistrées sur les ordinateurs portables utilisés par les étudiants. Il s'est
prévalu de cette faculté de façon régulière. Alors qu'il passait en revue les fichiers informatiques d'un étudiant, il a découvert des photos
d'une autre étudiante qui posait nue. L'enseignant a copié les photos sur le disque dur de son ordinateur portable (fourni par l'école), au
lieu de déclarer l'incident.
Le technicien informatique de l'école a découvert les photos de l'étudiante qui posait nue dans un fichier « caché » sur l'ordinateur de
l'enseignant. Il les a trouvées alors qu'il faisait un balayage des données routinier. Lorsqu'il s'est aperçu que la jeune fille était une
étudiante, le technicien a avisé le directeur. Le directeur lui a demandé de copier les images, avec l'historique de surf sur Internet de
l'enseignant, sur un disque. L'historique comprenait un nombre important de sites pornographiques. L'employeur a remis ces
renseignements, avec les photos de l'étudiante qui posait nue, à la police. La police a examiné le disque et l'ordinateur portable sans avoir
obtenu au préalable un mandat à cet effet.
L'enseignant a été accusé de possession de pornographie juvénile et d'utilisation criminelle d'un système informatique. Devant le tribunal,
l'avocat de l'enseignant a plaidé que l'enseignant avait une expectative raisonnable du respect de la vie privée relativement au contenu de
son ordinateur portable. La question a été portée en appel devant la plus haute instance de l'Ontario.
Rebondissements intéressants
La Cour d'appel a fait valoir que l'enseignant jouissait de l'usage exclusif de l'ordinateur portable et que l'ordinateur portable était protégé
par un mot de passe personnel. La Cour a également noté que les enseignants avaient généralement le droit d'utiliser les ordinateurs de
l'école à des fins personnelles.
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Toutefois, les preuves démontraient également que le manuel des politiques et des procédures de l'école interdisait le contenu explicite du
point de vue sexuel sur les ordinateurs de l'école. Le manuel énonçait également que toutes les données et tous les messages étaient
considérés comme appartenant au conseil scolaire. Aussi, le manuel avisait les enseignants que l'école consulterait les courriels privés si
elle soupçonnait un mauvais usage du matériel et les utilisateurs étaient avisés de ne pas tenir pour acquis que les fichiers enregistrés sur
le réseau ou un disque dur étaient privés.
La décision de la Cour d'appel
La Cour a conclu que l'enseignant avait une attente raisonnable en matière du respect de la vie privée relativement au contenu de son
ordinateur portable, du moins envers la police. Par conséquent, la police a violé le droit de l'enseignant en faisant une perquisition et saisie
déraisonnable en vertu de la Charte canadienne des droits et libertés lorsqu'elle a saisi l'ordinateur portable et l'a fouillé sans avoir obtenu
un mandat de perquisition.
La Cour a fait une interprétation large de la politique visant l'utilisation des ordinateurs de l'école. Elle s'est concentrée sur les us et
coutumes réelles dans le milieu de travail. Bien que la politique énonçait que les ordinateurs devaient être utilisés à des fins
professionnelles, les employés les utilisaient de façon régulière pour enregistrer des renseignements personnels, notamment des données
financières et bancaires. Compte tenu des circonstances, la Cour a conclu que l'enseignant avait une attente raisonnable en matière de
respect de la vie privée relativement au contenu de son ordinateur portable. Cela signifie qu'il avait droit à une protection contre les saisies
et perquisitions de la police.
Cependant, la Cour a donné plus de latitude à l'employeur qu'à la police. Bien que la Cour a présumé que la Charte pouvait s'appliquer au
conseil scolaire [veuillez noter que cette question est litigieuse – la Charte ne s'applique pas à la plupart des employeurs], elle a conclu que
l'employeur n'avait pas violé les droits de l'enseignant prévus dans la Charte. L'employeur n'a pas agi abusivement lorsqu'il a accédé à
l'ordinateur portable de l'enseignant et a copié les photos sur un disque. L'employeur a trouvé ces photos dans le cadre de l'entretien
habituel d'un ordinateur – la Cour a reconnu que l'employeur avait le droit d'exercer cette activité sur son propre matériel.
Dans le même ordre d'idées, le directeur a agi de bon droit en visualisant certaines images trouvées par le technicien et en lui demandant
de copier les photos sur un disque et en ordonnant à l'enseignant de lui remettre l'ordinateur portable. Bien qu'il s'agissait d'une
« perquisition et saisie », il incombait au directeur de veiller à la santé et à la sécurité des étudiants. Les exigences ne pouvaient pas être
les mêmes pour le directeur et la police.
En ce qui concerne l'employeur lui-même, soit le conseil scolaire, il n'a pas violé les droits de l'enseignant prévus dans la Charte, et ce,
même s'il a fouillé l'ordinateur portable et conservé des preuves relativement à l'ordinateur de l'enseignant et à l'utilisation de l'Internet
avant de les remettre à la police. La fouille et la conservation de la preuve aux fins de discipline interne étaient conformes à l'obligation de
l'employeur d'assurer un environnement sécuritaire pour ses étudiants.
Analyse rapide
Cette affaire sera analysée et commentée par plusieurs personnes. Selon une analyse préliminaire, la décision n'est peut-être pas aussi
préjudiciable pour l'employeur qu'elle le semble à première vue.
Premièrement, il faut mettre l'accent sur le fait que l'attente raisonnable en matière de respect de la vie privée s'appliquait uniquement
contre la saisie et perquisition de la police dans cette affaire. Deuxièmement, il faut souligner que cette décision était fondée sur les droits
prévus dans la Charte. Ces droits ne s'appliquent pas à la plupart des relations d'emploi, surtout pas dans le secteur privé.
Il peut être débattu que la décision de la Cour place les droits individuels à la protection de la vie privée au-dessus des autres droits. Cela
peut être vrai en ce qui concerne les perquisitions et saisies de la police. Cependant, la décision appuie les employeurs qui maintiennent
des politiques bien rédigées selon lesquelles il est clair que l'employé n'a aucun droit à la protection de la vie privée en ce qui concerne les
ordinateurs de l'employeur. Elle favorise également les employeurs qui maintiennent activement, surveillent et mettent en application leurs
propres politiques sur l'utilisation des ordinateurs.
La décision reconnaît que l'employeur peut accéder aux données enregistrées par les employés sur les ordinateurs en milieu de travail
dans des circonstances appropriées. Elle accepte également que ces données peuvent être utilisées dans le cadre d'enquêtes internes et,
plus tard, dans des instances disciplinaires. Il est clair que l'employeur peut utiliser de telles données trouvées dans le cadre d'une
supervision et d'un entretien réguliers.
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La décision fait ressortir l'importance de disposer de politiques claires sur l'utilisation des ordinateurs. Elle met également en relief
l'importance de veiller à ce que les pratiques en milieu de travail respectent ces politiques.
Pour obtenir de plus amples renseignements sur le présent bulletin, veuillez communiquer avec les auteurs :
Maria Giagilitsis
416 868 3544
[email protected]
Brian P. Smeenk
416 868 3438
[email protected]
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Le présent document est un instrument d'information et de vulgarisation. Son contenu ne saurait en aucune façon être interprété comme un exposé complet
du droit ni comme un avis juridique de Fasken Martineau DuMoulin S.E.N.C.R.L., s.r.l. ou de l'un des membres du cabinet sur les points de droit qui y sont
discutés.
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