Newsletter - Schellenberg Wittmer

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Newsletter - Schellenberg Wittmer
a vo c a ts
août 2014
Newsletter
Auteurs:
Hans Kuhn
Martin Lanz
Banking & finance
Consultation concernant la LSFin et la LEFin – Refonte complète
de la législation suisse sur les marchés financiers
En juin 2014, le Conseil fédéral a mis en consultation les projets de loi sur les services financiers (LSFin)
et de loi sur les établissements financiers (LEFin). Cette consultation se terminera mi-octobre. Ces projets de lois instituent une protection accrue des clients, soumettent les gestionnaires de fortune à une
surveillance prudentielle et centralisent les bases légales sur la surveillance des prestataires de services financiers dans un seul acte législatif. En outre, un nouveau régime concernant les prospectus permet une réglementation accrue du marché primaire. Cette Newsletter donne un aperçu de ces projets de
lois. D’autres Newsletters portant sur des sujets spécifiques seront publiées dans les semaines à venir.
1
INTRODUCTION
Le droit suisse des marchés financiers fait face à des changements importants. Après l’entrée en vigueur en 2009 de
la loi sur la surveillance des marchés financiers (LFINMA)
qui avait regroupé les autorités de surveillance des
banques et des assurances, le Conseil fédéral a présenté
un avant-projet de loi sur l’infrastructure des marchés
financiers (LIMF; cf. notre Newsletter de janvier 2014).
Cette proposition de loi règle l’organisation et le fonctionnement des infrastructures des marchés financiers, établit
des règles de conduite pour le commerce de papiersvaleurs et règlemente le marché des dérivés. En juin 2014,
deux autres importantes propositions de lois ont suivi, soit
la loi sur les services financiers (LSFin) et la loi sur les établissements financiers (LEFin).
2 L O I S U R L E S S E R V ICE S FI N A N CIE R S
2 . 1 P our q uo i un e lo i sur l e s s e rv i c e s
f i n a n c i e rs ?
La LFSin est le fruit d’un travail de la FINMA qui, en 2010, a
publié un document de discussion concernant la règlementation de la production et de la distribution de produits
financiers. Après une audition publique, la FINMA a présenté en 2012 la prise de position „Règles applicables à la
distribution“. Le Conseil fédéral a ensuite chargé le Département fédéral des finances d’élaborer un projet en collaboration avec la FINMA et le Département de la justice.
Le projet vise à renforcer la protection des clients et à
créer des conditions règlementaires homogènes pour tous
les prestataires de services financiers. Le recours à une
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protection accrue des clients est justifié par les expériences vécues lors de la crise financière, notamment les
cas Madoff et Lehman. Les règles de conduite sont en
grande partie fondées sur le droit européen, en particulier
sur la Directive sur les marchés d’instruments financiers
révisée (MiFID 2) et sur le règlement correspondant
(MiFIR). L’euro-compatibilité du droit suisse est largement
considérée comme nécessaire, mais pas suffisante pour
l’accès continu des prestataires de services financiers
suisse au marché européen.
Le projet impose aux prestataires de services financiers de
respecter en plus les règles de conduite suivantes:
>>
Les prestataires de services financiers doivent agir
dans le meilleur intérêt (best execution) de leurs clients
en utilisant les connaissances techniques requises et
en faisant preuve de diligence et de sérieux.
>>
Pour les transactions de clients, ils doivent mener une
vérification de l’adéquation (pour les prestataires qui
fournissent des services de gestion de fortune et de
conseil en placement), respectivement une vérification du caractère approprié (pour les prestataires qui
fournissent d’autres services financiers) des opérations proposées, sauf pour les mandats execution only
et pour la tenue pure de comptes et de dépôts.
>>
Les prestataires de services financiers doivent informer les clients sur les instruments financiers proposés et sur les risques qui y sont liés.
>>
Ils ont des obligations d’établir des documents et de
rendre des comptes.
2 . 2 Qu i e st sou m i s à l a L S F i n ?
La LSFin établit des règles de conduite et des exigences
organisationnelles pour toute personne qui fournit à titre
professionnel des services financiers (Prestataires de services financiers). En font partie les banques, négociants en
valeurs mobilières, assurances, directions de fonds ainsi
que les gestionnaires de fortune. La LSFin soumet les
conseillers à la clientèle à une obligation d’enregistrement
et à une obligation de formation. La LSFin est également
applicable aux prestataires de services financiers étrangers exerçant des activités transfrontalières en Suisse. Les
services financiers couverts sont définis de manière très
large; en font partie, en sus de la gestion de fortune et du
conseil en investissement, également la conservation pure
de valeurs patrimoniales et la transmission d’ordres qui
ont pour objet des instruments financiers.
Le projet prévoit pour les conseillers à la clientèle (cette
notion se base sur la notion de services financiers et est
donc large) une obligation d’enregistrement dans un
registre public. De plus, ils doivent conclure une assurance
responsabilité civile professionnelle et s’affilier à un
organe de médiation. Les conseillers à la clientèle doivent
en outre disposer des connaissances techniques nécessaires et se perfectionner régulièrement.
L’obligation d’enregistrement pour les prestataires de
services financiers étrangers est également une nouveauté. Celui qui veut fournir des services financiers transfrontaliers doit s’inscrire dans le registre des prestataires
de services financiers étrangers tenu par la FINMA.
"La LFSin institue une surveillance
prudentielle des gestionnaires de
fortune."
2 . 3 R è g l e s d e c ondu i t e e t pr i n c i p e s d ’ or g a n i s at i on
Les obligations qu’un prestataire de services financiers
doit observer vis-à-vis d’un client dépendent du fait que le
client soit un client professionnel ou client privé (classification de la clientèle). Les clients professionnels sont les
établissements financiers et les assurances ainsi que les
établissements de droit public, les institutions de prévoyance et les entreprises disposant d’une trésorerie professionnelle; les clients privés sont tous les autres clients.
Comme c’est déjà le cas selon la loi sur les placements
collectifs de capitaux, les clients privés fortunés peuvent
déclarer qu’ils souhaitent être considérés comme des
clients professionnels (opting-out); de même, les clients
professionnels peuvent déclarer qu’ils souhaitent être
considérés comme des clients privés (opting-in).
Les prestataires de services financiers doivent prendre par
le biais d’une organisation adéquate notamment des
mesures afin d’éviter des conflits d’intérêts; ceci s’applique aussi aux rétrocessions et aux opérations des collaborateurs.
2 . 4 In f or m a t i ons
f i n a n c i e rs
sur
les
i nstru m e nts
La LFSin présente le marché primaire sur une base entièrement nouvelle et règle de manière complète l’obligation
de publier un prospectus concernant les valeurs mobilières. Les dispositions pertinentes de la LSFin remplaceront les dispositions du CO sur le prospectus d’émission
des actions (art. 652a et 752 CO) et celles sur le prospectus
pour les emprunts par obligations (art. 1156 CO), qui seront
abrogées. Les dispositions de la LSFin s’inspirent de la
directive de l’UE sur le prospectus (Directive 2003/71/CE)
et de son règlement (Règlement 809/2004).
L’obligation de publier un prospectus vaut en principe pour
tout type de valeurs mobilières, également pour les produits structurés qui sont offerts au public ou admis au
négoce sur une plate-forme de négociation. La notion
„d’offre publique“ reste floue, cependant la LSFin apporte
des clarifications qui découlent de la directive de l’UE sur
le prospectus. L’obligation de publier un prospectus s’applique aussi à la revente de valeurs mobilières dans le
cadre d’une offre publique. L’intégralité, la cohérence et la
clarté du prospectus sont vérifiées par un organe de
contrôle agréé de la FINMA. L’examen a en principe lieu
avant la publication; pour les titres de créance, le Conseil
fédéral peut autoriser un examen postérieur à la publication. L’obligation de vérification pour les placements collectifs de capitaux continue à être réglée dans la loi sur les
placements collectifs de capitaux.
Suivant le modèle européen, la feuille d’information de
base regroupera les informations les plus importantes
(notamment le profil de risque et de rendement et les coûts)
sur un instrument financier dans une forme compréhensible. Une feuille d’information de base doit être établie
pour tout instrument financier qui est proposé à des clients
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privés dans le marché primaire ou secondaire, à l’exception
des actions, des bons de participation et de jouissance.
>>
Les gestionnaires de fortunes (indépendants), qui
étaient jusqu’alors soumis uniquement à la loi sur le
blanchiment d’argent, mais non à une surveillance
prudentielle;
>>
Les gestionnaires de fortune qualifiés (Asset Manager); soit quiconque administre à titre professionnel des
valeurs patrimoniales pour des placements collectifs de
capitaux ou des institutions de prévoyance suisses;
>>
Les directions de fonds;
>>
Les maisons de titres (les anciens négociants en
valeurs mobilières);
>>
Les banques
2 . 5 E x e r c i c e c oll e c t i f d e s dro i ts
Une autre innovation de la LSFin consiste en la facilitation de
l’exercice des prétentions de droit civil des clients contre les
prestataires de services financiers. Selon le Conseil fédéral,
les instruments actuels de procédure civile sont insuffisants, si bien que les actions des clients ont peu de chance
de succès. Les mesures suivantes vont changer la donne:
>>
>>
Tout prestataire de services financiers doit s’affilier à
un organe de médiation qui règle les litiges entre les
clients et les prestataires de services financiers dans
le cadre d’une procédure de règlement des litiges. La
procédure devant l’organe de médiation est gratuite
pour les clients; elle est financée par les prestataires
de services financiers.
Si un accord n’est pas trouvé lors de la procédure
devant l’organe de médiation, il faut faciliter l’exercice
des prétentions des clients par la voie judiciaire. Le
projet prévoit à cet égard deux options. Selon la première option, des tribunaux arbitraux permanents
doivent être mis en place devant lesquels les clients
peuvent faire valoir leurs droits contre un prestataire
de services financiers. Selon la seconde option, est
créé un fonds pour les frais de procès qui finance les
actions des clients à l’égard des prestataires de services financiers. Ce fonds est également financé par les
contributions des prestataires de services financiers.
>>
Le projet introduit une action collective. Les associations et autres organisations peuvent agir contre les
prestataires de services financiers pour violation des
obligations civiles lors de la fourniture de services
financiers. Ils peuvent aussi avoir recours au fonds
pour les frais de procès.
>>
Enfin, la loi prévoit une procédure de transaction de
groupe. Les associations et organisations, qui sont
légitimées à introduire une action collective, règlent
par une transaction de groupe conclue avec les prestataires de services financiers les conséquences financières d’une violation des obligations civiles. L’approbation de la transaction par un tribunal cantonal
supérieur la rend obligatoire pour tous les clients
concernés, à l’exception des clients qui déclarent sortir de la transaction (opting-out).
"La position des clients est améliorée par une information plus complète et par un exercice des droits
simplifié."
3 L O I S U R L E S E TA B L I S S EME N T S FI N A N CIE R S
3 . 1 Qu ’ e st - c e q u ’ un é ta bl i ss e m e nt f i n a n c i e r ?
Parallèlement au projet de LSFin, le Conseil fédéral a présenté un projet de loi sur les établissements financiers
(LEFin). Ce projet regroupe les conditions d’autorisation
ainsi que les principes de surveillance concernant les établissements financiers. Les établissements financiers sont
les intermédiaires financiers suivants:
Les assurances ne sont pas des établissements financiers.
Elles sont soumises à la loi sur la surveillance des assurances (LSA).
Le Conseil fédéral propose deux options s’agissant de la
surveillance prudentielle qui doit être mise en place pour
les 2’300 gestionnaires de fortune indépendants: surveillance directe de la FINMA ou surveillance indirecte par un
organisme de surveillance supervisé par la FINMA. Les
gestionnaires de fortune actuels sont exclus de la surveillance s’ils se limitent à s’occuper de leurs clients existants
et ont une expérience suffisante (grandfathering).
3 . 2 E x i g e n c e s prud e nt i e ll e s pour l e s é ta bl i ss e m e nts f i n a n c i e rs
La LEFin établit des conditions générales d’autorisation
que tous les établissements financiers doivent remplir (en
particulier concernant l’organisation et la garantie d’une
activité irréprochable). De plus, il existe des exigences
spécifiques à certains établissements. Une autorisation
d’un niveau élevé englobe en principe une autorisation
d’un niveau plus faible (autorisations en cascade). Les exigences pour les banques et les négociants en valeurs
mobilières (les nouvelles maisons de titres) restent en
grande partie inchangées.
3 . 3 Con f or m i t é f i s c a l e
La LEFin prévoit une obligation pour les établissements
financiers de vérifier la conformité fiscale de leurs clients.
Les établissements financiers doivent avant d’accepter des
valeurs patrimoniales vérifier s’il existe un risque élevé
qu’elles n’ont pas été ou ne sont actuellement pas fiscalisées correctement. S’il y a des indications d’un risque élevé,
des investigations supplémentaires sont nécessaires. L’obligation d’évaluer les risques et d’entreprendre des clarifications supplémentaires s’applique uniquement en relation
avec des Etats avec lesquels la Suisse n’a pas conclu d’accord sur l’échange automatique de renseignements en
matière fiscale. Si un établissement financier présume que
des valeurs patrimoniales ne sont pas correctement fiscalisées, il doit résilier la relation d’affaires existante, respectivement ne pas nouer une nouvelle relation d’affaires. Ce
devoir de diligence s’applique aussi pour les assurances.
4
E V A L U AT I O N G L O B A L E
La consultation pour la LSFin et la LEFin prendra fin le 17
octobre 2014. Il ne faut pas compter sur des projets révisés
par le parlement avant mi-2015. L’entrée en force de ces
lois n’interviendra pas avant 2016.
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Les premières réactions indiquent que certains éléments
des projets de lois seront fortement contestés. Pour la
LSFin, il s’agit notamment des propositions d’exercice collectif des droits. Pour la LEFin, l’introduction d’une surveillance prudentielle pour les gestionnaires de fortune et le
modèle de surveillance seront contestés ainsi que les dispositions pour s’assurer de la conformité fiscale des clients.
De plus, la justification du regroupement de l’ancienne
législation de la surveillance dans LSFin laisse place au
doute. Il est certes incontesté que la loi sur les banques
n’est plus au goût du jour d’un point de vue formel. Toutefois, chaque adaptation purement formelle est associée à
des coûts d’adaptation. Il n’est pas certain que les bénéfices
du regroupement proposé priment sur les coûts encourus.
Si le parlement devait se rallier aux projets du Conseil
fédéral, les prestataires de services financiers et les établissements financiers devraient se préparer à d’importantes adaptations. En particulier, les prestataires de services financiers devront adapter leur processus de conseil
pour les clients privés au nouveau cadre légal. Les gestionnaires de fortune indépendants entreront dans une nouvelle ère avec la surveillance de la FINMA ou d’un nouvel
organisme de surveillance. Enfin, la nouvelle obligation de
publier un prospectus dans les marchés primaire et secondaire ainsi que la nécessité d’avoir une feuille d’information de base entrainera d’importantes adaptations.
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