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LES VISITES DÉCOUVERTES Parcours « Centrifuge » Du 15 juin au 28 août 2016 Les Abattoirs vous proposent de faire un détour dans ses collections à travers un choix d’œuvres qui explore les influences réciproques de l’art et de l’espace urbain. L’ exposition « Centrifuge » Rez-de-chaussée du musée 1. Brassaï (Gyula Halàsz, dit), Graffiti, 1950-1955 .4 2. Franck Scurti, What’s a public sculpture ? n°4, 1965 3. Richard Fauguet, Série de 12 figures, 1997-2001 4. Hervé Di Rosa, Le peuple René au grand complet, 1959 5. Martin Arnold, Whistle Stop, 2014 .5 .2 .3 .1 Les Abattoirs s’associent au festival « Rose Béton » au travers des expositions « Epoxy » et « Centrifuge ». Ensemble ils explorent les résonances entre les formes artistiques du Street art et ses nombreuses pratiques (le graffiti, le bombing, le pochoir…) et les collections du musée. Le choix des œuvres et la présentation de nouvelles acquisitions s’y mêlent, jouant sur la saturation, l’envahissement, le bruit, le son et le détournement. Brassaï (Gyula Halàsz, dit), Graffiti, 1950-1955 D’après toi, qui a fait ces graffitis ? Brassaï lui-même ? Prends ton temps pour regarder la série de photographies de Brassaï. Ce sont des graffitis parisiens qui ont été réalisés par des inconnus. Brassaï commence dans les années 1930 à recueillir les images de ces graffitis au hasard de ses nombreuses promenades dans la capitale. Que vois-tu ? Au cours de celles-ci, il observe beaucoup les murs et trouve très intéressant tout ce qui se passe dessus : il y a les craquelures et ces graffitis que des personnes dessinent clandestinement. Il commence alors à les photographier dans le but de les collecter. Il s’agit de photographies en noir et blanc. Elles représentent, comme le nom de la série l’indique, des graffitis gravés dans des murs. Il y a dans la salle d’exposition, un même dessin qui a été photographié à 10 ans d’intervalle. Le trouves-tu ? En observant bien les deux photographies de ce graffiti, on constate qu’il s’agit du même dessin mais photographié à 10 ans d’intervalle. Le visage dessiné dans la pierre a bien changé... le temps est passé par là ! Après les avoir photographiés Brassaï les reproduit parfois dans un petit carnet, accompagnés de l’adresse où il les a découverts, pour revenir voir leur évolution ou constater leur disparition. En décidant de les reproduire systématiquement, l’artiste les sauve d’une totale disparition : « Vous avez eu vraiment une très heureuse idée de constituer cette collection, car sans la photo le graffiti existe, mais […] sans la photo, ils seraient voués à la destruction. » Pablo Picasso. Brassaï poursuivra cette quête durant 30 ans. Pourquoi selon toi ? Ce qui a plu à Brassaï dans ces graffitis, ce sont leur simplicité et leur efficacité qui nous projettent aux origines de l’art et des premiers graffitis. Pour lui, ces dessins ne sont pas du vandalisme car ils sont porteurs d’un désir plus fort que celui d’abîmer un mur. Ils nous parlent de l’amour, de la naissance, de la vie, de la mort et de la magie aussi... 0 00 ée n , 5àB 5 9 n1 rooklyn, New Yor k, e st u n« gr af fi Fu t ur a 2 Le graffiti représente une forme d’expression très ancienne puisqu’il existe depuis plus de 30 000 ans. L’art a commencé sur les murs des grottes préhistoriques, c’est ce qu’on appelle l’art pariétal. Mais le graffiti tel qu’on le connaît aujourd’hui est né à la fin des années 1960 aux États-Unis. Ce sont les adolescents des quartiers pauvres du pays qui les premiers affichent leurs noms un peu partout, pour dire et montrer qu’ils existent. Mais en 50 ans d’existence, cette pratique a beaucoup évolué en passant de simples lettres taguées à des dessins beaucoup plus complexes ou abstraits. C’est le cas du travail hybride de Futura, l’un des précurseurs du street art. Son travail, bien loin des graffitis de Brassaï et des tous premiers lettrages des États-Unis se situe entre le graffiti et l’abstraction. t tis r a ti- icain. r é m »a Franck Scurti, What’s a public sculpture ? n°4, 2007 Observe de loin l’œuvre de Franck Scurti. Peux-tu la décrire ? Il s’agit d’une sculpture. Mais elle ne ressemble pas à celles que l’on trouve habituellement dans un musée… elle est couverte de graffitis ! D’après toi, qui a tagué l’œuvre ? Il semblerait que des graffeurs soient passés par là ! ? lt , Ti n n 19 ée 73 à Toulouse, est un What’s a public sculpture ? n°4 semble avoir été vandalisée, à la manière des objets du graffeur Tilt. -a «g ra ffi ti st r ti »r Mais...le graffiti est-il vraiment du vandalisme ? internationalem nnu ent . e co Pour Tilt, le graffiti n’est pas du vandalisme, tant que ce dernier n’empêche pas à l’objet sur lequel il est peint de fonctionner ! Par exemple une poubelle pourra toujours recevoir et contenir des déchets même si elle se trouve couverte de tags. L’intervention des graffeurs sur elle ne l’empêche pas de fonctionner : elle n’est donc pas vandalisée. Et toi, qu’en penses-tu ? Rapproche-toi maintenant, observe de plus près les graffitis. Que remarques-tu ? S’agit-il de vrais tags ? Ils ont été gravés dans la sculpture et non tagués dessus. Ces graffitis sont donc faux ! C’est l’artiste Franck Scurti qui les a reproduits, après les avoir vus dans la rue. Pourquoi a-t-il voulu reproduire des graffitis et donner l’impression que ses sculptures ont été taguées ? Franck Scurti se moque, il cherche à nous tromper avec cette fausse dégradation. Il veut nous faire comprendre que l’œuvre n’appartient pas seulement à l’artiste qui la crée mais aussi aux habitants de la ville dans laquelle elle se trouve. C’est pour ça que l’artiste appelle son œuvre What’s a public sculpture ? Il nous pose la question « Qu’est ce qu’une sculpture publique ? ». Richard Fauguet, Série de 12 figures, 1997-2001 Peux-tu décrire l’œuvre de Richard Fauguet ? L’œuvre se déploie sur les murs. Il s’agit d’une série de silhouettes découpées dans du Vénilia, un papier autocollant décoratif, puis collées aux murs du musée. Pourrais-tu deviner ce qu’elles représentent ? Richard Fauguet fonctionne comme un artiste pirate qui pille son inspiration dans l’histoire de l’art et le monde de tous les jours. Ainsi, les œuvres que tu as sous les yeux, reproduisent, grâce à un matériau du quotidien, les silhouettes d’œuvres emblématiques de l’art moderne et contemporain. Connais-tu certaines d’entre elles ? Saurais-tu dire laquelle est la petite danseuse de Degas ? Ou le célèbre lapin de Jeff Koons ? Richard Fauguet n’est pas le seul artiste à investir les murs et à s’inspirer de l’art moderne et contemporain, c’est aussi le cas du street artist KR. Si une partie de son travail trouve ses origines dans le tag, il est également très influencé par l’art. Ses coulées s’inspirent d’ailleurs de la technique du dripping inventée par Jackson Pollock après la seconde guerre mondiale, aux États-Unis. La peinture coule, éclabousse, explose, zigzague en tous sens ! C’est ce qu’on appelle l’expressionnisme abstrait. Les silhouettes sont collées telles des ombres chinoises sur les murs de la salle. Elles sont un incroyable tremplin à l’imaginaire et à la capacité de se raconter des histoires. ratique le graffiti de p uis 1 est né à m da r e st , il p 968 1 en Del ta Sculpter c’est donner forme à un volume et le positionner dans l’espace. Les figures, collées aux murs, transforment la salle d’exposition, elles créent des vides et des pleins… Am Quelles histoires te racontes-tu en regardant ces mystérieuses silhouettes ? Outre le jeu de reconnaissance et de devinette, c’est le rapport à la sculpture que les œuvres interrogent qui retient notre attention. S’agit-il toujours selon toi de sculptures ? Delta est un artiste qui, comme Richard Fauguet, occupe des surfaces murales. Son travail se base sur une idée de rupture et de fractionnement de la surface plate du mur sur lequel il peint. L’idée est de percer le mur, d’en franchir les limites ! 98 0. Hervé Di Rosa, Le peuple René au grand complet, 1984 Approche toi de l’œuvre d’Hervé Di Rosa, que vois-tu ? Hervé Di Rosa nous montre une multitude de drôles de personnages ! Apparemment il s’agit du peuple René. Comment sont-ils ? Avec leurs yeux de Cyclope et leurs sourires en banane, leurs énormes têtes posées sur des pantalons à rayures, les Renés semblent incarner un curieux Monsieur Tout le monde. Ils sont comme nous et comme l’artiste. Ils viennent de partout, sont rigolos, bagarreurs, élégants, idiots, intelligents… À quoi te font-ils penser ? Au départ, Hervé Di Rosa veut être un dessinateur de bandes dessinées, mais n’étant pas reconnu comme tel, il décide de se tourner vers la peinture. Néanmoins ses œuvres s’inspirent beaucoup de l’univers des bandes dessinées, des dessins animés, des illustrations et même des jouets ! L’art d’Hervé Di Rosa te semble-t-il joyeux ? C’est en tout cas ce qu’il tente de faire ! Dans les années 80, Hervé Di Rosa trouve que l’art a pris la grosse tête, qu’il manque de simplicité et ne partage plus grand chose avec le public. Pire encore… qu’il a perdu son sens de l’humour. Pour Hervé Di Rosa, l’art doit alors se réconcilier avec son public. C’est ainsi qu’il décide de créer avec une bande de copains, la Figuration Libre ! Un mouvement qui parle du quotidien à travers des œuvres colorées, humanistes, poétiques et surtout très drôles ! Mais qui est René ? éco uvr e le gr en 198 8 su r le che min de l’é c ole . Ce drôle de bonhomme peuple les compositions de l’artiste depuis le début des années 1980. Hervé Di Rosa le décline à toutes les sauces : sous formes de décalcomanies, de dessins animés et figurines plastiques. Il va jusqu’à mettre en scène la vie de son personnage favori. Il lui fait rencontrer sa femme, Renée, dans un tableau intitulé : Je t’aimerai normalement. Il lui donne plus tard une famille, trois enfants : Renette, René junior et l’adorable Bébé-René. Il y aura aussi, René et ses copains, René et ses collègues de bureau, ect... is en 1972, et d i fit af « René, c’est le tout premier personnage que j’ai dessiné et j’y suis terriblement attaché ». Hervé Di Rosa. M ist est Pa r à é n Hervé Di Rosa n’est pas le seul à créer de drôles de personnages, c’est aussi le cas de Mist, comme tu peux voir sur l’image ci-dessus. Il est d’ailleurs considéré comme l’un des plus talentueux graffeurs de sa génération pour exceller aussi bien dans le dessin de lettres que dans celui de personnages. Martin Arnold, Whistle Stop, 2014 Que vois-tu dans le film de Martin Arnold ? Il s’agit d’un dessin animé mettant en scène le personnage de Daffy Duck. Il semble être en proie à une violente crise d’angoisse au sein d’une situation qui nous est inconnue. Pour son film, Martin Arnold est allé chercher les images d’un cartoon de Daffy Duck. Dans cet épisode le canard apprend, à la suite d’un coup de téléphone, sa mobilisation par l’armée américaine. L’idée de partir faire la guerre le plonge dans un grand état de stress. C’est cette même scène que l’artiste reproduit, à sa façon, en boucle dans son film. sp er s na on ge « Debilz », édité sine, à6 n ré 6 6 se ex em pl s. re ai ise l’un de ses t réal pre s i M mi er Que ressens-tu devant le film de Martin Arnold ? Penses-tu que la version originale provoquait les mêmes émotions ? Si les artistes contemporains sont nombreux à trouver leur inspiration dans la culture populaire (dessins animés, bd, jeux vidéos...), les graffeurs le sont tout autant ! Mist, par exemple, a conçu toute une série de figurines faisant référence au monde des jouets. Comment est représenté Daffy Duck ? Martin Arnold a fait le choix de nous montrer le personnage de Daffy Duck totalement décomposé. À tel point qu’il ne reste plus que quelques membres au canard... ses pattes, son bec, sa langue et ses mains. Il est plongé dans une telle obscurité, qu’il tend à disparaître par moment, à la manière d’un fantôme. Pourquoi manque-t-il des parties du corps de Daffy Duck ? Le film de l’artiste renvoie à la manière dont on produisait les cartoons à l’origine. Les dessinateurs peignaient séparement chaque élément de l’image (l’arrière plan, les parties du corps, les yeux...) sur des feuilles transparentes, des celluloïds. Ensuite, ces feuilles étaient superposées pour obtenir l’image entière. Dans Whistle Stop, Martin Arnold n’a gardé que les celluloïds des parties en mouvement du corps de Daffy Duck. Ainsi il éclate en mille morceaux l’image initiale pour en créer une nouvelle. Mais celle-ci est beaucoup plus difficile à déchiffrer car l’œil doit s’adapter pour recomposer le personnage. Est-ce une œuvre pour enfants ? Pas seulement ! C’est un dessin animé oui, mais le propre de l’art est de toucher tout le monde, même si c’est à des niveaux différents. L’œuvre de Martin Arnold peut sembler enfantine, mais elle n’a en réalité rien d’innocent. Au contraire elle dévoile les artifices du cinéma, en nous révélant ses combines et ses trucages. « Il y a toujours autre chose derrière ce qui nous est montré, qui n’est pas représenté. Et c’est précisément cela qui est le plus intéressant à prendre en compte. » Martin Arnold. Merci de votre visite, bon retour ! À bientôt !