Transparence du patrimoine : réponses belges au questionnaire

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Transparence du patrimoine : réponses belges au questionnaire
Transparence du patrimoine : réponses belges au questionnaire
(Frédéric Georges, assistant et maître de conférences à l’Université de Liège,
avocat)
1. La localisation du débiteur
1.1.
Les personnes physiques
1.1.1. Notions de domicile, de résidence et d’adresse de référence
Le droit belge connaît la distinction entre domicile, résidence et adresse de référence. Le
domicile est le lieu où une personne a, d’une part, son habitation réelle et, d’autre part, le
centre de ses activités, de son patrimoine et de ses affections. La résidence, au contraire du
domicile qui est unique et marqué par un lien de droit, est une notion factuelle qui peut être
multiple dans le chef de la personne juridique. L’adresse de référence est celle d’une personne
physique inscrite au registre de la population au lieu où elle a établi sa résidence principale et
où, avec l’accord de cette dernière, une personne sans résidence est inscrite.
1.1.2. Localisation par des registres publics
1.1.2.1. Quels registres (de population, des étrangers, d’inscription aux organismes fiscaux,
sociaux) ?
Dans chaque commune belge sont tenus des registres de la population et un registre d’attente
pour les étrangers en attente de reconnaissance d’un statut. A l’échelon national, il existe un
registre national des personnes physiques.
1.1.2.2.
Ces registres, sont-ils accessibles aux créanciers, aux tribunaux, aux organes
chargés d’exécution ?
Ont accès au registre national des personnes physiques les autorités publiques, les notaires,
les huissiers de justice et les avocats indirectement via les deux ordres nationaux.
1.1.2.3.
Conditions d’accès et procédure d’accès
Une simple demande écrite suffit, pourvu que la personne qui sollicite l’information soit
habilitée à le faire.
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1.1.3. Autres moyens de localiser des personnes physiques (ex. : les commissariats de
police)
Il est possible de recourir à des expédients, tels les détectives privés, lorsque la personne
physique n’est plus domiciliée à l’endroit révélé par les registres.
1.2.
Les personnes morales.
1.2.1.
Notions de siège social, de siège d’opération et d’exploitation d’une succursale
Le siège social d’une personne morale équivaut à son domicile, tout comme à la résidence
d’une personne physique correspond le siège d’opération ou la succursale d’une personne
morale.
1.2.2. Localisation par des registres publics
Une récente loi du 16 janvier 2003 a créé une Banque-Carrefour des Entreprises, modernisé le
registre de commerce et créé des guichets-entreprises. Sa mise en oeuvre est en cours. Elle
permet un accès centralisé et plus aisé aux informations relatives aux commerçants, dont les
personnes morales.
2. La détermination du patrimoine du débiteur antérieurement à une décision de justice
2.1. Les organes/personnes compétents/habilitées pour demander des renseignements
2.1.1.
Le créancier et son avocat : sous certaines conditions posées par une circulaire
administrative, l’administration du cadastre, qui recense à des fins fiscales les
informations sur le patrimoine immobilier, peut transmettre le relevé du patrimoine
d’un débiteur.
2.1.2.
Le tribunal d’instance : non.
2.1.3.
L’huissier de justice : oui, il peut obtenir des informations du cadastre sur simple
demande.
2.1.4.
Autres organes compétents : non.
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5.3.Est-ce qu’une des personnes nommées ci-dessus (2.1.) peut demander au débiteur des
renseignements sur ses biens (déclaration de patrimoine) ?
Sans qu’aucune disposition légale le prévoie, un débiteur peut toujours être interrogé mais il
n’est en aucun cas contraint de répondre. Le droit belge ne connaît pas de déclaration de
patrimoine. Il n’existe qu’une seule exception. Si une personne qui n’est pas commerçant
décide de recourir au règlement collectif de dettes prévus aux articles 1675 bis et suivants du
Code judiciaire, elle est cependant tenue de communiquer au tribunal une liste de tous ses
biens, mobiliers et immobiliers. S’il s’avère qu’elle a caché une partie de ce patrimoine, elle
peut se voir révoquer le bénéfice de la procédure.
2.3.
Informations fournies par des registres publics
2.3.1
Les différents registres
2.3.1.1. Le registre foncier (cadastre) ; existe en droit belge. C’est la seule source
d’informations officielles qui ne concerne que le patrimoine immobilier
2.3.1.2. Le recours au Registre de commerce et aux greffes des tribunaux de commerce, en
cours de restructuration (voy. supra), permet de découvrir un certain nombre d’informations
sur la vie de la société ; il n’y a cependant aucun relevé de la fortune patrimoniale du
commerçant.
2.3.1.3. Le fichier des saisies est régi par les articles 1390 et suivants du Code judiciaire. Il a
fait l’objet d’une importante amélioration par une loi du 29 mai 2000, qui centralise et
informatise la gestion des avis de saisie, de délégation de sommes, de cession, de règlement
collectif de dettes. Cette loi n’est pas encore en vigueur en raison de l’importance logistique
que nécessite la mise en place du système.
2.3.1.4. Le registre des débiteurs défaillants : il existe de telles données à la Banque
nationale de Belgique, qui recense les débiteurs qui n’ont pas respecté le remboursement de
crédits bancaires.
2.3.1.5. Le registre d’immatriculation d’automobiles est accessible aux huissiers de justice,
qui peuvent connaître si un débiteur a une voiture immatriculée à son nom. Il existe
également un registre des navires et bateaux.
5.3.3.1.Le registre matrimonial : fait l’objet d’une publicité lors du mariage des époux, par
mention au livret de mariage.
2.3.1.7. Autres registres et immatriculations : sans objet en droit belge.
2.3.2.
Conditions d’accès au registre (et procédure d’accès) : très variables et impossibles à
résumer même brièvement.
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2.4.
Les renseignements fournis par des tiers
2.4.1.
Les tiers personnes tenues de fournir des renseignements : non, sauf saisie-arrêt
entre leurs mains. L’administration fiscale dispose par contre d’un arsenal de dispositions
législatives particulières qui lui permettent d’interroger les tiers.
2.4.1.1. L’employeur du débiteur : non, sauf saisie-arrêt entre ses mains.
2.4.1.2. Les établissements bancaires (indiquez s.v.p., s’il y a des organismes centraux
susceptibles de fournir des renseignements, p.ex. : le Fichier central des chèques) : il
n’y en a pas en droit belge. Seule une saisie-arrêt-conservatoire entre les mains
d’une banque contraint celle-ci à déclarer les avoirs qu’elle détient pour le compte
d’un débiteur.
2.4.1.3. Les organismes/administrations fiscaux : oui, pour le patrimoine immobilier via
l’administration du cadastre.
2.4.1.4. Les organismes/administrations sociaux : les huissiers de justice sont autorisés à
consulter la Banque carrefour de la sécurité sociale qui leur indiquera si un débiteur est salarié
auprès d’un employeur.
2.4.1.5. Autres (p. ex. : l’avocat du débiteur) : non.
2.4.2.
La demande d’informations auprès des tiers est-elle liée aux conditions suivantes :
N’étant qu’exceptionnellement autorisée en droit belge, chaque demande doit respecter des
prescriptions particulières qu’il serait trop long d’énumérer ici.
5.3.3.
La demande des informations auprès des tiers se fait-elle sous condition d’une
requête (simple) du créancier ? En principe non. La loi ou les circulaires
administratives règles les conditions qui doivent être réunies.
5.3.4.
Une autorisation préalable du tribunal compétent, est-elle nécessaire ? En principe
non. La loi ou les circulaires administratives règles les conditions qui doivent être
réunies.
2.4.5.
L’étendue des informations (veuillez, s.v.p., faire référence à la structure de la
question 2.4.1.) ? Très faible et ponctuelle.
2.4.6.
Les sanctions en cas d’inexécution/d’exécution incomplète ou fautive
En matière de saisie-arrêt, le refus de fournir des informations peut être sanctionné par la
condamnation du tiers aux montants dus par le débiteur.
2.5.
La manière dont l’information est fournie : par écrit, actuellement.
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2.6.
Les limites à l’obligation de fournir des informations
2.6.1.
Le respect de la vie privée du débiteur et de sa famille
5.3.3.
La protection des secrets
5.3.3.1.
secret fiscal : le fisc refusera de donner des informations s’il n’y est pas
légalement autorisé.
5.3.3.2.
secret social : la sécurité sociale refusera de donner des informations si elle n’y est
pas légalement autorisé.
5.3.3.3.
secret bancaire : il n’y a pas de secret bancaire au sens strict en Belgique, mais une
obligation de discrétion dont la banque ne peut être déliée que par l’intervention
d’une norme législative, par exemple en matière de saisie-arrêt.
5.3.3.4.
5.3.4.
autres : néant en droit belge.
Quel est l’effet des lois concernant la protection des données (informatiques) sur les
obligations de donner des renseignements ? Le fichier informatisé des saisies, non
encore effectif, prévoit de nombreuses mesures de protection pour éviter les abus
que favorise l’informatique.
5.3.5.
Limites encourues par le « principe de proportionnalité » (entre créance saisie et
l’information requise) ? Il s’agit d’un principe général également applicable à cet
aspect de l’exécution mais qui n’a pas donné lieu à des développements particuliers
en droit belge.
3.
La détermination du patrimoine du débiteur sur le fondement d’un titre
exécutoire
Voy ci-dessus sub. 2.
4.
Informations factuelles et juridiques
4.1.
Quels sont les problèmes d’application pratique recensés dans votre pays ?
L’absence de transparence patrimoniale est particulièrement ressentie en matière de
biens incorporels. La découverte de comptes bancaires pose particulièrement
problème. La découverte du patrimoine immobilier est par contre relativement aisée.
4.2.
Existe-il des propositions politico-juridiques pour réformer les procédures
existantes ? Actuellement non.
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4.3.
Existe-il des services de renseignements privés/commerciaux accessibles aux
créanciers : oui, ils se développent et recensent essentiellement des informations
relatives aux commerçants et aux sociétés (ex. : Graydon).
5.
Le contexte transfrontalier
5.1.
L’ accès aux informations sur le patrimoine du débiteur, est-il ouvert aux créanciers
étrangers/aux organes d’exécution étrangers. S’ils réunissent les conditions posées
par le droit belge pour l’accès aux informations, oui. Il est toujours possible de
recourir à un huissier belge pour contourner une éventuelle difficulté.
5.1.1.
En ce qui concerne la déclaration patrimoniale du débiteur ? Il n’en existe pas en
droit belge.
5.1.2.
En ce qui concerne les registres publics ? Cf 5.1.
5.1.3.
En ce qui concerne les renseignements fournis par des tiers ?
5.2.
Quelles sont les conditions d’un tel accès du créancier/d’un organe d’exécution
étranger : cf n° 5.1.
5.3.
Les renseignements sur le patrimoine du débiteur, s’étendent-elles aussi aux
biens/avoirs situés à l’étranger
5.3.1.
En ce qui concerne la déclaration patrimoniale ? Il n’y en a pas en droit belge.
5.3.2. En ce qui concerne les registres publics ? Non.
5.3.3.
En ce qui concerne les informations fournies par les tiers ? Pour les banques tiers
saisies, dans une certaine mesure, en raison d’une construction doctrinale et
jurisprudentielle. Il s’agit des biens placés dans des succursales à l’étranger. La
matière est cependant très controversée.
5.4.
Votre pays, a-t-il ratifié des conventions internationales qui traitent (entre autre) de
la transparence patrimonial (en matière de droit civil / commercial) ? Pas à notre
connaissance.
5.5.
Quel modèle de coopération transfrontalière serait à votre avis préférable pour une
amélioration de la transparence patrimoniale au niveau européen ?
5.5.1.
L’introduction d’un instrument communautaire (obligation du débiteur de déclarer
l’existence et la localisation de son patrimoine : « Décision européenne de
déclaration de patrimoine ») : pourquoi pas, même si pareil instrument n’est pas
dans nos mentalités.
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5.5.2.
L’introduction d’un instrument communautaire sur la coopération entre les organes
d’exécution en matière d’échanges d’informations sur le patrimoine du débiteur : ce
serait particulièrement opportun.
5.5.3.
Autre propositions
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