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gestion
Entreprise
Comment évaluer son entreprise ?
L’évaluation de la valeur patrimoniale d’une entreprise conchylicole, en vue de sa transmission,
se heurte à la logique économique. Il faut parfois revoir le prix à la baisse pour que le repreneur
vive de son activité, ont souligné les intervenants lors d’un débat à La Tremblade.
verdissement ; de la présence d’algues malvenues ; et de sa salinité.
Et aussi, depuis peu, de sa salubrité.
Ainsi, en Charente-Maritime, toutes
les claires, jusqu’alors non classées,
ont été mises en A, mais avec des
obligations de suivi renforcé dans
certaines zones, ce qui implique un
risque de passage en B.
Valeur patrimoniale : les parcs
La valeur patrimoniale inclut les
parcs sur le domaine public maritime, car depuis 1983, on peut
prendre en compte le potentiel
de production apporté à la concession. Sur la Charente-Maritime,
la valeur des parcelles va de 12 à
627 euros l’are. Plusieurs critères
interviennent. La qualité de l’eau
- et le classement de la zone qui en
découle - peut entraîner des diminutions substantielles de valeur.
Les modifications des schémas
des structures et restructurations
des parcs influent aussi fortement
sur leur valeur. Le Chevalier est ainsi
passé, entre 2000 et 2005, de 69 à
146 euros l’are (+ 211 %), alors que
dans le même temps, les parcs non
restructurés n’ont pris que 15 à 20 %.
Très important aussi, la valeur biologique, combinaison de la croissance et
de la mortalité. Ainsi, le Creaa observe
« une augmentation de 86 % entre
le rendement du moins bon parc et
celui du meilleur ». Les observations
sont similaires pour les parcs de captage et de demi-élevage.
Le chantier
La loi d’orientation agricole, en
créant le « fonds agricole », permettra peut-être de mieux prendre en
compte l’établissement, l’équipement et le matériel (selon un argus),
les stocks (au prix de revient) mais
aussi la clientèle, puisque le « fonds
de commerce » n’existe pas dans ce
secteur. « Ce fonds unique pourra
normalement offrir des garanties
au banquier, indique Jean Hartz, qui
tient le point info sur l’installation et
la transmission en Charente-Maritime. Sans compter le fonds de
garantie régional bientôt activé. »
Mais le « fonds » peut aussi être
démantelé. « Je revends actuellement mon entreprise à un jeune,
témoigne l’ostréiculteur François
Patsouris. Il ne prend que ce qui
l’intéresse, donc pas mon vieux
La valeur d’un marais dépend de
son accessibilité – par bateau,
brouette, véhicule - ; de la possibilité de l’entretenir manuellement
ou à la pelle mécanique ; de sa
gestion, indépendante ou non de
la marée (marais submersible ou
non) ; de sa productivité ; de son
f Favoriser
Solène Le Roux
Les marais
Un « fonds agricole » permet désormais la prise en compte des équipements comme de la clientèle.
Valeur de rentabilité
La valeur de rentabilité, vision économique globale de l’entreprise,
tient compte de sa capacité à faire
du bénéfice. Le repreneur « achète
un capital économique qu’il a à
charge de faire fructifier, explique
un banquier du Crédit agricole. On
s’appuie forcément sur la rentabilité pour accorder un crédit. L’EBE
(excédent brut d’exploitation) doit
être pérenne. » Correspondant aux
recettes auxquelles sont retirées les
dépenses courantes, l’EBE est en effet
utilisé pour rémunérer l’exploitant,
alimenter le fonds de roulement et
rembourser les emprunts. « Si 40 à
50 % de l’EBE futur est consommé
pour rembourser le prêt, ça commence à être dangereux. »
Chacune des deux parties – cédant
et repreneur - doit avoir son propre
conseiller pour arriver à la valeur la
plus juste.
Solène LE ROUX
la transmission progressive et les choix stratégiques
Il existe aussi plusieurs outils de transmission
progressive : parrainage, location, prêt-vendeur,
association (a priori idéale, mais pas facile à gérer).
« La transmission progressive a l’avantage de
rassurer les clients et le banquier, témoigne Éric
Perrault, qui parraine le jeune repreneur de son
exploitation. On lève le pied progressivement,
en gardant un peu la main sur l’entreprise. On se
sent encore utile, et dans mon cas, les 4 salariés
ont la continuité de leur travail. Il faut par contre
faire savoir tôt qu’on souhaite transmettre, pour
avoir le choix du repreneur. »
Le compromis entre acheteur et vendeur sera
d’autant plus facilement trouvé qu’ils dispose-
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bateau ni certains de mes parcs. »
Il y a ce que le cédant espère tirer
de son entreprise, et ce qu’un
jeune peut y mettre. Se poser la
question « Si je démarrais, est-ce
que j’achèterais ? » permet de se
rendre compte de la différence parfois excessive. « Les futurs cédants
me posent souvent la question de
la valeur de l’entreprise, témoigne
Jean Hartz, Ça dépend d’eux :
veulent-ils récupérer un capital ou
installer un jeune ? »
Cultures MARINES n°197 - juin 2006
ront d’un délai pour la transmission. « Il faut
venir nous voir au moins trois ou quatre ans
avant la transmission », indique Jean Hartz.
Il faut aussi choisir un schéma d’élevage qui
fonctionne. Ainsi, l’élevage à plat demande
moins d’investissement que le surélevé mais
le rendement est moindre. La densité, le choix
du produit, influent aussi sur le rendement.
La délocalisation vers le large sur les filières
ostréicoles permet de gagner un an d’élevage,
mais implique de lourds investissements ou une
mutualisation des moyens.
En tout cas, « il est important d’avoir une
stratégie », souligne Jean Hartz, qui interpelle les
professionnels : « Peut-on donner des orientations pour les exploitations de demain, y a-t-il
des schémas obsolètes, est-il encore raisonnable, vu les problèmes de croissance, d’installer un éleveur sur des parcs uniquement
à Marennes-Oléron ? » En Charente-Maritime,
une commission de professionnels est à l’écoute
des futurs repreneurs, pour déceler un projet
qui ne tient pas la route, d’autant que le jeune
tombe parfois amoureux de l’affaire. « C’est arrivé qu’on dise à un jeune qu’il allait se casser
la gueule. »
S. L. R.