Lettre du Cabinet SIMON Associés / Novembre 2013
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Lettre du Cabinet SIMON Associés / Novembre 2013
LETTRE DES LA LETTRE DU CABINET SOMMAIR Novembre 2013 [email protected] PARIS 47 rue de Monceau 75378 PARIS Cedex 08 Tél. 01 53 96 20 00 LYON 7 rue de Bonnel 69003 LYON Tél. 04 72 61 75 15 NANTES 4 rue Maurice Sibille 44000 NANTES Tél. 02 53 44 69 00 SOMMAIRE CORPORATE ET DROIT DES SOCIETES : De la nécessité de bien définir son objet social p.2 Cass. com., 8 octobre 2013, pourvoi n°12-25.192 La possibilité pour un associé d’agir en responsabilité contre un cocontractant de la société p.2 Cass. com., 8 octobre 2013, pourvoi n°12-18.252 ENTREPRISES EN DIFFICULTE : Absence de privilège pour le titulaire d’une réserve de propriété p.3 Cass. com., 15 octobre 2013, pourvoi n°13-10.463 Bénéfice du délai de déclaration de quatre mois pour le cessionnaire demeurant à l’étranger p.3 Cass. com., 15 octobre 2013, pourvoi n°12-22.008 CONTRATS CIVILS ET COMMERCIAUX : L’appréciation de la notion d’emprunteur averti p.4 Cass. com., 5 novembre 2013, pourvoi n°11-25.111 L’interdépendance de contrats concomitants ou successifs p.4 Cass. com., 22 octobre 2013, pourvois n°12-18.059 et n°12-23.715 CONCURRENCE ET DISTRIBUTION : L’absence de cause dans les contrats de franchise MONTPELLIER CA Lyon, 7 novembre 2013, RG n°12/03645 33 bis rue du Faubourg Saint Jaumes 34000 MONTPELLIER Tél. 04 67 58 94 94 CA Paris, 25 octobre 2013, RG n°11/20079 Mise en œuvre d’une clause de résiliation sans faute et pratiques restrictives p.5 p.5 SOCIAL ET RESSOURCES HUMAINES : Irrégularité de forme de la lettre de licenciement remise par un tiers p.6 Cass. soc., 23 octobre 2013, pourvoi n°12-12.700 BRESIL * Nullité du licenciement d’un salarié ayant témoigné en faveur d’un autre salarié p.6 Cass. soc., 29 octobre 2013, pourvoi n°12-22.447 IMMOBILIER : CHINE * LUXEMBOURG * Révision de loyer et indice de référence fixe p.7 Obligation de l’entrepreneur avant la réception p.7 Cass. civ. 3ème, 16 octobre 2013, pourvoi n°12-16.335 Cass. civ. 3ème, 6 novembre 2013, pourvoi n°12-18.844 PROPRIETE INTELLECTUELLE : *Convention Organique Internationale Marque et nom patronymique p.8 Cass. com., 13 novembre 2013, pourvoi n°12-26.439 p.8 Le droit d’auteur et les idées www.simonassocies.com CA Paris, 16 octobre 2013, RG n°12/06709 DROIT DE LA SANTE : Vaccination contre l'hépatite B et sclérose en plaques : simplification de la preuve p.9 CE, 6 novembre 2013, n°345696 Responsabilité pénale du médecin en cas d’omission d’empêcher une infraction p.9 Cass. crim., 23 octobre 2013, pourvoi n°12-80.793 PROCEDURE CIVILE ET VOIES D’EXECUTION : ère Actualité SIMON ASSOCIÉS Page 13 L’appel d’une partie défaillante en 1 instance limité au rejet des prétentions adverses p.10 Cass. com., 19 novembre 2013, pourvoi n° 12-26.660 Fin de non-recevoir tirée d’une mention erronée dans l’acte d’assignation Cass. com., 19 novembre 2013, pourvoi n° 12-24.101 p.10 INTERNATIONAL : Fenêtre sur l’Afrique Subsaharienne p.11 La Lettre du Cabinet - L’actualité juridique (Novembre 2013) 2 CORPORATE ET DROIT DES SOCIETES De la nécessité de bien définir son objet social Cass. com., 8 octobre 2013, pourvoi n°12-25.192 Une société anonyme ayant pour objet social « le négoce au détail (…), la mise en œuvre et l’exploitation de tous commerces (…), la création, l’acquisition, la location, la prise à bail, l’installation, l’exploitation de tous établissements se rapportant aux installations spécifiées, la prise, l’acquisition, l’exploitation ou cession de tous procédés ou brevets concernant ces activités, la participation directe ou indirecte de la société dans toutes les opérations ou entreprises pouvant se rattacher à l’objet social », s’était engagée à l’occasion de l’acquisition de dix parts sociales d’une société civile immobilière, et sous réserve de la réalisation de certaines conditions, à céder les titres acquis. La Chambre commerciale de la Cour de cassation a néanmoins considéré que les statuts précisaient que la société avait notamment pour objet la participation directe ou indirecte dans toutes opérations ou entreprises pouvant se rattacher à l’objet social et toutes opérations contribuant à la réalisation de cet objet, « ce dont il se déduisait que la promesse de vente des parts détenues dans le capital de la SCI qui constituait une opération portant sur une participation, entrait dans l’objet social ». La clause dite « clause balai » de l’objet social, à savoir celle du cas d’espèce reprise cidessus, permettait de considérer que la promesse de vente litigieuse entrait dans l’objet social et que la société devait en conséquence l’honorer. La société, depuis transformée en société par actions simplifiée, refusa, une fois toutes les conditions réunies, de céder les dix parts acquises, soutenant ne pas être tenue par l’engagement pris, la promesse de cession de parts de société civile immobilière ne relevant pas de son objet social. Cet arrêt a le mérite de rappeler qu’une société est valablement engagée à l’égard des tiers par les actes qui se rattachent à son objet, à savoir ceux qui concourent à sa réalisation. L’objet social doit en conséquence être rédigé le plus précisément possible afin d’éviter toute difficulté. La possibilité pour un associé d’agir en responsabilité contre un cocontractant de la société Cass. com., 8 octobre 2013, pourvoi n°12-18.252 Dans cette espèce, une société X. exerçant dans le domaine agroalimentaire et commercialisant de la viande porcine avait conclu avec une société Y. du même secteur, un contrat de fourniture de porcs et une convention de cession partielle de fonds de commerce. Suite à cela, et en raison de difficultés financières grandissantes, les associés de la société X. ont abandonné les créances qu’ils détenaient à son encontre et l’ont recapitalisée. Cet arrêt indique que « la recevabilité de l’action en responsabilité engagée par un associé à l’encontre d’un cocontractant de la société est subordonnée à l’invocation d’un préjudice personnel et distinct de celui qui pourrait être subi par la société elle-même ». Ce principe est d’application constante en droit des sociétés et ce, que l’associé agisse contre un dirigeant social ou contre un cocontractant de la société. Les associés de la société X., finalement liquidée, ont alors reproché diverses fautes à la société Y., qui avait entre-temps acquis l’intégralité du fonds de commerce de la société X., et demandé une indemnisation. Les demandes des associés résultant notamment de la dépréciation de la valeur des titres de la société X. ont été rejetées tant en première instance qu’en appel. La Cour de cassation ne fait dans cet arrêt que confirmer la position de la Cour d’appel de Rennes en ce qui concerne la possibilité pour un associé d’agir en responsabilité contre un cocontractant de la société. Quel que soit le cas, le préjudice subi par l’associé ne doit pas être le corollaire de celui subi par la société. En l’espèce, les associés demandaient réparation à la société Y. du préjudice subi du fait des abandons de créances consenties au profit de la société X. et de l’apport en capital de fonds propres réalisé. La Haute Cour a cependant retenu que la société Y. n’avait pas commis de faute et que la liquidation de la société X. résultait essentiellement de sa politique de vente à perte et, qu’en conséquence, le préjudice subi par la société X. ne résultait pas des agissements de la société Y. PARIS – LYON – NANTES – MONTPELLIER – BRESIL – CHINE – LUXEMBOURG La Lettre du Cabinet - L’actualité juridique (Novembre 2013) 3 ENTREPRISES EN DIFFICULTE Absence de privilège pour le titulaire d’une réserve de propriété Cass. com., 15 octobre 2013, pourvoi n°13-10.463 « En application des dispositions combinées des articles 2329 du code civil et L.624-9 du code de commerce, si la clause de réserve de propriété constitue une sûreté réelle, elle ne confère à son bénéficiaire aucun droit de préférence dans les répartitions ». Telle est la motivation de la présente décision de la Cour de cassation. En l’espèce, le débiteur en liquidation judiciaire avait conclu un contrat d’approvisionnement incluant une clause de réserve de propriété. Le cocontractant du débiteur avait déclaré, à titre privilégié, sa créance au titre dudit contrat mais omis de revendiquer le bien dans le délai de trois mois à compter de la publication du jugement d’ouverture au BODACC, fixé par l’article L.624-9 du code de commerce. Suivant la position du liquidateur, le juge-commissaire a considéré que le caractère privilégié de la créance n’était pas justifié et l’a donc admise à titre chirographaire. La Cour d’appel ayant confirmé l’ordonnance du juge-commissaire, le cocontractant du débiteur s’est pourvu en cassation. La Chambre commerciale rejette purement et simplement le pourvoi du cocontractant, jugeant que la clause de réserve de propriété dont bénéficie le cocontractant ne fait pas de lui un créancier privilégié de la procédure. Une telle sûreté n’est donc d’aucune utilité à son titulaire qui parallèlement ne revendiquerait pas, dans le délai de l’article L.624-9 précité, le bien objet de la réserve de propriété. En effet, le droit de propriété du réservataire reste inopposable à la procédure et le bien réservé peut être vendu par le liquidateur comme tout autre actif du débiteur. De la même façon qu’elle « n’est pas une condition de la revendication des marchandises vendues avec clause de réserve de propriété » (Cass. com., 20 octobre 1992, pourvoi n°90-18.867), la déclaration de créances ne peut suppléer la carence du créancier à revendiquer son bien en octroyant un rang privilégié à cette créance. Bénéfice du délai de déclaration de quatre mois pour le cessionnaire demeurant à l’étranger Cass. com., 15 octobre 2013, pourvoi n°12-22.008 Par cet arrêt, la Haute juridiction se prononce, à l’occasion d’une affaire bien connue, sur le délai applicable à la déclaration de créances effectuée par le cessionnaire demeurant à l’étranger d’une créance initialement détenue par un créancier de la société Technicolor (ex-Thomson) dont le siège social était situé en France. Par un jugement du 30 novembre 2009, le Tribunal de commerce de Nanterre a ouvert une procédure de sauvegarde au bénéfice de la société Technicolor. La société Banco Finantia, dont le siège social est situé au Portugal, a déclaré, le 7 avril 2010, au passif de la société Technicolor, la créance qu’elle détenait à son encontre, aux termes d’un acte de cession de créance conclu avec la société Bank of America. A la suite de l’admission de la créance de la société Banco Finantia, le débiteur, les mandataires judiciaires et le commissaire à l’exécution du plan ont interjeté appel de l’ordonnance du juge-commissaire, soulevant la tardiveté de la déclaration de créances, comme n’ayant pas été réalisée dans les deux mois de la publication du jugement d’ouverture au BO- DACC. Constatant que le délai de déclaration – deux mois pour les créanciers demeurant en France, augmentés de deux mois supplémentaires pour les créanciers demeurant à l’étranger – prévu par l’article R.622-24 du code de commerce n’était pas expiré au jour de la déclaration de créances de la société Banco Finantia, les Sages confirment l’arrêt de la Cour d’appel de Versailles qui avait justement déduit que ladite société n’était pas forclose à déclarer sa créance au passif de la société Technicolor. Motivant sa décision, la Cour de cassation précise (i) que le délai de déclaration applicable n’est pas un accessoire de la créance cédée, (ii) que la détermination du délai applicable doit se faire en considération de la personne du créancier cessionnaire déclarant, lequel avait en l’espèce son siège social à l’étranger, et enfin (iii) que l’allongement du délai de déclaration a pour seule finalité de compenser, au profit du créancier étranger, la contrainte résultant de l’éloignement. PARIS – LYON – NANTES – MONTPELLIER – BRESIL – CHINE – LUXEMBOURG La Lettre du Cabinet - L’actualité juridique (Novembre 2013) 4 CONTRATS CIVILS ET COMMERCIAUX L’appréciation de la notion d’emprunteur averti Cass. com., 5 novembre 2013, pourvoi n°11-25.111 Une banque octroie un prêt à la société X. (emprunteur), dirigé par M. X., afin de financer l’achat de parts sociales de la société T. Ce prêt a été consenti en 2004 et était remboursable en sept ans. M. et Mme Y. se portent cautions solidaires. L’emprunteur est déclaré en liquidation judiciaire En 2007, la société X. est déclarée en liquidation judiciaire. La banque déclare donc sa créance, met en demeure les cautions, puis assigne ces dernières en paiement. Les cautions s’opposent en invoquant le manquement, par la banque, à son devoir de mise en garde à l’égard de l’emprunteur. Les juges du fond relèvent ainsi que la banque n’a pas respecté son obligation de conseil et de mise en garde, ce qui a causé un préjudice à M. et Mme Y., correspondant aux sommes dues à la banque en leur qualité de caution et, ordonnant la compensation entre les créances, ils considèrent que la créance de la banque à l’égard de M. et Mme Y. est éteinte. Les magistrats, qui avaient relevé le fait que M. X. avait notamment suivi une formation en gestion d’entreprise et exercé les fonctions de directeur général, ont toutefois considéré que ces éléments ne permettaient pas de considérer qu’il s’agissait d’un emprunteur averti dans l’activité qu’il envisageait de reprendre par le rachat des parts de la société T., via la société X., ne disposant d’aucune expérience particulière dans l’activité commerciale qu’il allait exercer. La notion d’emprunteur averti s’apprécie en considération de différents critères (capacité de l’emprunteur à mesurer le risque pris, critère professionnel, caractéristiques de l’opération, etc.) qui, selon les juges du fond n’étaient donc pas remplis au vu des éléments relevés. Or, la Cour de cassation revient sur cette position, considérant que les motifs invoqués ne permettaient pas d’établir que la société X. était un emprunteur averti. L’interdépendance de contrats concomitants ou successifs Cass. com., 22 octobre 2013, pourvois n°12-18.059 et 12-23.715 La société E. et la société B. ont conclu un contrat de location financière portant sur du matériel de téléphonie. Ce matériel était loué par la société E. (simple organisme de financement) mais était fourni par la société ETS, un contrat de vente ayant été conclu entre ces deux sociétés. La société E. informe son partenaire, la société B., qu’elle souhaite mettre un terme à leur relation et résilier le contrat de location en raison du défaut de règlement des loyers et elle l’assigne en paiement de diverses sommes. La société B., de son coté, fait assigner la société ETS qui a vendu le matériel. La Cour d’appel prononce la résolution du contrat de vente, pour manquement de la société ETS à son obligation de délivrance, et du contrat de location financière et constate que le contrat de location était demeuré inexécuté dès l’origine. En conséquence, la société B. n’a pas été condamnée au versement d’indemnités à l’égard de la société E. La Cour de cassation confirme la position adoptée par les juges du fond. Elle souligne que « les contrats concomitants ou successifs qui s’inscrivent, comme en l’espèce, dans une opération incluant une location financière, sont interdépendants ». Le sort des deux contrats était donc lié. Or, il n’était pas établi que le matériel avait bien été livré par la société ETS à la société B. et que cette dernière l’avait refusé ; il en résultait en conséquence que le contrat de location financière n’avait pas été exécuté. La résolution du contrat de vente et du contrat de location financière devait donc être prononcée. Afin d’obtenir une indemnisation, la société E. se fondait sur le fait que le contrat de location prévoyait qu’en cas de résolution du contrat de vente, le locataire dédommagerait la société E. de tout préjudice subi par cette dernière par le versement d’une indemnité. Or, la résolution du contrat a été prononcée, non sa résiliation pour l’une des causes imputables au locataire telles que visées dans le contrat. Les dispositions contractuelles relatives à l’indemnisation en cas de résiliation n’avaient donc pas lieu de s’appliquer. PARIS – LYON – NANTES – MONTPELLIER – BRESIL – CHINE – LUXEMBOURG La Lettre du Cabinet - L’actualité juridique (Novembre 2013) 5 CONCURRENCE ET DISTRIBUTION L’absence de cause dans les contrats de franchise CA Lyon, 7 novembre 2013, RG n°12/03645 Moins d’un an après la signature d’un contrat de franchise, une société franchisée a fait assigner devant le Tribunal du commerce sa tête de réseau aux fins de voir prononcer la nullité du contrat qui les liait pour manquement aux obligations précontractuelles d’informations du franchiseur ou, à défaut, la résolution pour manquement aux obligations de communication de savoir-faire et d’assistance. En effet, l’article 1108 du code civil prévoit que la cause, comme l’intégrité du consentement, est une condition essentielle à la validité des conventions. Déboutée de l’intégralité de ses demandes en première instance, la société franchisée a interjeté appel du jugement entrepris. Les juges du fond déboutent toutefois la société franchisée et relèvent notamment que le contrat de franchise mentionne que « le franchisé a pu examiner et apprécier les réalisations du franchiseur notamment au travers de son magasin ainsi que son savoir-faire dont il reconnait expressément le bien fondé, la réalité, la spécificité et l’originalité et que c’est pour acquérir ce savoir-faire sans avoir à poursuivre des recherches et des expériences personnelles qu’il s’est adressé au franchiseur ». Devant la Cour d’appel, la société franchisée décide de soulever un moyen de droit, régulièrement avancé en matière de nullité du contrat de franchise, à savoir la nullité pour l’absence de cause du contrat faute de savoir-faire (pour exemple : Cass. com. 14 septembre 2012, pourvoi n°09-17.079). En l’espèce, la société franchisée faisait valoir, pour l’essentiel, que son franchiseur ne disposait pas d’expérience suffisante dans l’exploitation de son concept, de sorte qu’il n’était pas capable de mettre à son profit un savoir-faire. Mise en œuvre d’une clause de résiliation sans faute et pratiques restrictives CA Paris, 25 octobre 2013, RG n°11/20079 Les clauses de résiliation anticipée des contrats à durée indéterminée peuvent être détachées de toute faute, la ou les partie(s) bénéficiaire(s) de ce type de clause pouvant alors résilier le contrat à tout moment, sans avoir à justifier leur décision par une faute de leur cocontractant. La Cour d’appel de Paris a eu à se prononcer récemment sur les fautes reprochées au concédant dans la mise en œuvre d’une telle clause contenue dans un contrat de concession exclusive. Le distributeur développait essentiellement trois arguments : en premier lieu, la clause de résiliation sans faute était selon lui illicite car créait un déséquilibre significatif dans les droits et obligations des parties ; en deuxième lieu, le délai de résiliation avait été trop bref compte tenu de la durée des relations commerciales ; enfin, le concédant avait, toujours selon lui, abusé de son droit de résiliation en lui faisant espérer la poursuite des relations contractuelles, puis en l’évinçant du renouvellement dans le but de provoquer sa chute. Ce dernier argument est écarté par la Cour, les éléments versés aux débats par le distributeur n’étant pas suffisamment probants. L’argument tenant au déséquilibre significatif est également écarté, au motif que la clause prévoyait la faculté de résiliation du contrat sans faute au profit de chacune des parties. Le moyen tiré de la brièveté du délai de résiliation est en revanche retenu, bien que le concédant ait respecté le préavis de huit mois prévu contractuellement. Eu égard à la durée des relations contractuelles – dix-neuf ans – la Cour estime que le préavis aurait dû être de douze mois. La date prise en compte pour le calcul de la durée des relations commerciales est celle du premier contrat de concession conclu entre les parties. Les dommages et intérêts accordés au distributeur correspondaient à la perte de marge brute calculée pendant quatre mois sur la base des quatre derniers exercices. PARIS – LYON – NANTES – MONTPELLIER – BRESIL – CHINE – LUXEMBOURG La Lettre du Cabinet - L’actualité juridique (Novembre 2013) 6 SOCIAL ET RESSOURCES HUMAINES Irrégularité de forme de la lettre de licenciement remise par un tiers Cass. soc., 23 octobre 2013, pourvoi n°12-12.700 Après avoir été déclaré inapte par le médecin du travail, un salarié avait été licencié par son employeur. La lettre de licenciement lui avait été remise à son domicile par un tiers, en l’occurrence le conseiller qui l’avait assisté durant l’entretien préalable. Le salarié avait saisi la juridiction prud’homale, soutenant que son licenciement se trouvait dépourvu de cause réelle et sérieuse. L’article L.1232-6 du code du travail prévoit que la lettre de notification du licenciement doit être adressée au salarié par lettre recommandée avec avis de réception. La Haute juridiction admet cependant que l’employeur puisse remettre la lettre de licenciement en main propre contre décharge au salarié, sans que cela ne constitue une irrégularité de procédure. A fortiori, elle considère que la remise en main propre de la lettre de licenciement par l’employeur ne prive pas le licenciement de cause réelle et sérieuse. En effet, selon la Cour de cassation, la notification du licenciement par lettre recommandée ne constitue pas une formalité substantielle. Il n’en va pas de même lorsque la lettre de licenciement est remise au salarié par un tiers qui n’est pas habilité à prononcer une telle mesure. De ce fait, si la Haute juridiction a considéré que la remise de la lettre de licenciement par un tiers ne prive pas le licenciement de cause réelle et sérieuse, il s’agit cependant d’une irrégularité de procédure ouvrant droit pour le salarié à une indemnité. Il sera tout de même rappelé que la Cour de cassation considère que la signature de la lettre de licenciement par l’employeur, ou toute personne habilitée à prononcer une telle sanction, demeure une formalité substantielle dont l’inobservation prive le licenciement de cause réelle et sérieuse (Cass. soc., 30 septembre 2010, n°09-40.114). Nullité du licenciement d’un salarié ayant témoigné en faveur d’un autre salarié Cass. soc., 29 octobre 2013, pourvoi n°12-22.447 Un salarié avait rédigé une attestation destinée à être produite dans le cadre d’un litige prud’homal concernant un autre salarié de la société, démarche dont il avait informé ses collègues de travail. Estimant que cette attestation était mensongère, l’employeur l’avait alors licencié pour faute grave. licenciement, prononcé à la suite d’un témoignage : nullité ou défaut de cause réelle et sérieuse ? Le salarié a demandé à la juridiction prud’homale de prononcer la nullité de son licenciement afin d’être réintégré dans l’entreprise. Elle estime que le licenciement prononcé en raison du contenu d’une attestation délivrée par un salarié au bénéfice d’un autre salarié est nul, en raison de l’atteinte portée à la liberté fondamentale de témoigner. Le salarié peut donc demander sa réintégration au sein de l’entreprise. Si la Cour de Cassation avait déjà eu l’occasion de préciser que le témoignage en justice ne peut, sauf abus, constituer ni une faute, ni une cause de licenciement (Cass. soc., 24 novembre 1994, pourvoi n°91-41.434), elle ne s’était en revanche pas encore prononcée sur la sanction affectant un tel La Cour de cassation se prononce au visa des articles 6 et 10 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales. La Haute juridiction a cependant posé une limite à l’exercice de la liberté de témoigner : le témoignage doit avoir été délivré de bonne foi. PARIS – LYON – NANTES – MONTPELLIER – BRESIL – CHINE – LUXEMBOURG La Lettre du Cabinet - L’actualité juridique (Novembre 2013) 7 IMMOBILIER Révision de loyer et indice de référence fixe ème Cass. civ. 3 , 16 octobre 2013, pourvoi n°12-16.335 er Un bail à usage professionnel à effet du 1 juillet 1988 comportait une clause de révision du loyer ainsi rédigée : « Le loyer sera révisé chaque année er ème le 1 juillet. Indice de référence : 4 trimestre 1987. Valeur 890 ». Au visa de l’article L.112-1 du code monétaire et financier qui répute non écrite « toute clause d’un contrat à exécution successive, et notamment des baux et locations de toute nature, prévoyant la prise en compte d’une période de variation de l’indice supérieure à la durée s’écoulant entre chaque révision », le preneur prétendait que la clause de révision devait être réputée non écrite au motif qu’assise sur un indice à base fixe - indice ème du 4 trimestre 1987 - elle conduisait à prendre en considération une période de révision supérieure à un an. Il sollicitait le remboursement des sommes payées au titre de la révision du loyer. La Cour de cassation confirme la décision des juges du fond qui ont validé la clause de révision, considérant qu’elle n’a pas pour conséquence de créer une distorsion entre la variation indiciaire et la durée s’écoulant entre deux révisions. Les parties avaient convenu contractuellement de la révision du loyer chaque année à la date anniversaire du contrat, impliquant une évolution de l’indice sur douze mois. ème La référence à l’indice du 4 trimestre 1987 n’est alors que l’illustration de cette volonté de prendre en compte les derniers indices publiés tant au début qu’à la fin de la période concernée par la révision et de faire coïncider ainsi la durée de cette période avec celle de la durée d’évolution des indices retenus. Les demandes d’annulation de la clause et de remboursement des sommes versées par le preneur au titre de l’indexation des loyers ont donc été rejetées. La Cour d’appel a également retenu qu’en prévoyant une révision annuelle impérative, les parties avaient exprimé l’intention que l’indexation s’opère automatiquement chaque année à la date anniversaire du contrat. Aucune démarche du bailleur n’était nécessaire dès lors que le contrat prévoyait une révision annuelle impérative. Obligation de l’entrepreneur avant la réception ème Cass. civ. 3 , 6 novembre 2013, pourvoi n°12-18.844 A la suite de désordres liés à la construction d’une villa avec piscine, le maître d’ouvrage assigne en responsabilité contractuelle l’architecte et l’entrepreneur. La Cour d’appel le déboute de ses demandes. La Cour de cassation rejette le pourvoi formé contre l’architecte considérant que ce dernier n’avait reçu qu’une mission de réalisation des plans de permis de construire de telle sorte que les défauts d’altimétrie et de planimétrie ne sauraient lui être imputés. En revanche, le moyen de cassation soulevé contre l’entrepreneur est accueilli. La Cour de cassation considère qu’en l’absence de maître d’œuvre et de plans d’implantation, l’entrepreneur avait l’obligation de vérifier la conformité de la construction au permis de construire et à la réglementation applicable en matière d’urbanisme. En principe, le respect des règles d’urbanisme et notamment du permis de construire incombe au maître d’œuvre en charge de la conception de l’ouvrage. En l’espèce, la mission du maître d’œuvre excluait la réalisation des plans. C’est donc l’entrepreneur qui devait veiller au respect des règles d’urbanisme et était seul responsable en cas de non-conformité. Si la Cour de cassation fait peser une obligation sur l’entrepreneur avant la réception, elle ne qualifie pas la nature de l’obligation. La jurisprudence considère usuellement que l’obligation de l’architecte constitue une obligation de moyens quand l’obligation de l’entrepreneur constitue quant à elle une obligation de résultat. PARIS – LYON – NANTES – MONTPELLIER – BRESIL – CHINE – LUXEMBOURG La Lettre du Cabinet - L’actualité juridique (Novembre 2013) 8 PROPRIETE INTELLECTUELLE Marque et nom patronymique Cass. com., 13 novembre 2013, pourvoi n°12-26.439 Une entreprise familiale, entreprise X., fondée par le grand-père en 1899, fut successivement reprise par le fils puis par les petits-fils. Ces derniers fondèrent en 1970 une société anonyme dénommée SA Etablissements X. Quelques décennies plus tard, l’un de ces petits-fils céda ses titres dans la société et quitta ses fonctions de dirigeant. Il a néanmoins poursuivi ses activités professionnelles et fondé une société dans le même secteur d’activité, dénommée société Pierre X. Dans la foulée, il a déposé une marque reprenant son patronyme et ce, quelques mois après le dépôt par la société qu’il venait de quitter d’une marque incluant également le même patronyme. Cette dernière l’assigna alors afin d’obtenir l’annulation du dépôt de marque assortie d’une interdiction d’usage. La Cour d’appel avait fait droit à ces demandes. Le pourvoi reprochait à l’arrêt d’avoir annulé la marque aux motifs d’une fraude aux droits antérieurs de la société X., tout en se fondant sur des motifs afférents au risque de confusion. La Cour de cassation approuve l’arrêt qui relève que le dépôt de la marque incriminée était intervenu postérieurement au dépôt de la marque par la société X. pour des produits et services identiques et que, de surcroît, Pierre X. ne pouvait ignorer l’usage, notamment dans la dénomination sociale, du patronyme X. Dans ces conditions, la Cour d’appel a justement retenu que le dépôt de la marque incriminée était intervenu en violation des droits antérieurs de la société Etablissements X. L’arrêt approuve également les juges du fond d’avoir considéré qu’en reprenant dans la dénomination sociale de sa société le patronyme de son grand-père, en s’attribuant les mérites qui revenaient à la société Etablissements X. et en entretenant une confusion, la société Pierre X. avait adopté de mauvaise foi sa dénomination sociale en reprenant le patronyme X. En revanche, la Cour de cassation casse l’arrêt qui a prononcé une mesure d’interdiction d’usage générale de la dénomination « X » alors que, selon l’article L.7136 du CPI, le juge qui prononce une mesure d’interdiction d’usage d’un nom patronymique doit en délimiter le champ d’application. Or, la Cour d’appel avait fait interdiction de faire usage du nom X., dans la dénomination sociale et pour tout usage, en violation du texte précité car cela revenait à une interdiction d’ordre général. Le droit d’auteur et les idées CA Paris, 16 octobre 2013, RG n°12/06709 L’un des principes phares du droit d’auteur peut se résumer dans la formule suivante « Les idées sont de libre parcours ». Classiquement, on distingue en effet les idées, qui ne sont pas protégeables, et la forme d’expression de ces idées qui, elle, peut être protégée par le droit d’auteur si elle est originale. L’application de cette distinction fait l’objet de la décision commentée. Une personne avait imaginé de mettre en scène, dans les tribunes des enceintes sportives ou dans les salles de spectacle, un tableau vivant constitué des spectateurs présents, chacun de ces spectateurs se voyant assigner une place déterminée et attribuer une couleur de vêtement précise, de manière à ce que les spectateurs réalisent ensemble un canevas donnant à voir une image ou à lire un message. La qualification d’œuvre de l’esprit, objet de droit d’auteur, était discutée suite à l’action en contrefaçon de cette œuvre. Or, selon la Cour, la demanderesse tentait en réalité de s’approprier le procédé déjà connu du « tifo » consistant à faire réaliser par les spectateurs, soit par l’étendard coloré dont ils sont porteurs, soit par le vêtement coloré dont ils sont revêtus, un tableau vivant constitué d’un message ou d’une image. La seule différence avec le « tifo » consistant à faire porter par le spectateur un vêtement coloré de type poncho tandis que le « tifo » fait généralement porter au spectateur un étendard ou un drapeau coloré. Selon la Cour, cette seule différence résulte d’une simple idée, de libre parcours, et ne traduit pas un effort créatif portant l’empreinte de la personnalité de l’auteur et lui conférant le statut d’œuvre de l’esprit. Les demandes fondées sur le parasitisme sont également rejetées. La Cour considère à cette fin que la société appelante se borne à faire état du pillage de son travail sans justifier des investissements consacrés à la création revendiquée, dont elle ne démontre pas davantage qu’elle constituerait par la publicité un produit phare. PARIS – LYON – NANTES – MONTPELLIER – BRESIL – CHINE – LUXEMBOURG La Lettre du Cabinet - L’actualité juridique (Novembre 2013) 9 DROIT DE LA SANTE Vaccination contre l'hépatite B et sclérose en plaques : simplification de la preuve CE, 6 novembre 2013, n°345696 L'article L.3111-4 du code de la santé publique dispose qu’« une personne qui, dans un établissement ou organisme public ou privé de prévention, de soins ou hébergeant des personnes âgées, exerce une activité professionnelle l'exposant à des risques de contamination doit être immunisée contre l'hépatite B ». L'article L.3111-9 du même code, dans sa rédaction applicable à la date de la décision, précise que « sans préjudice des actions qui pourraient être exercées conformément au droit commun, la réparation d'un dommage imputable directement à une vaccination obligatoire pratiquée dans les conditions mentionnées au présent chapitre est supportée par l'Etat ». Dans cette affaire, une personne a subi dans le cadre de l'obligation vaccinale liée à son activité professionnelle, trois injections d'un vaccin anti-hépatite B, en octobre et novembre 1992, et en janvier 1993, puis un rappel en novembre 1993. Une sclérose en plaques a été diagnostiquée en septembre 1994. La victime a recherché, sur le fondement de l'article L.3111-9 du code de la santé publique, la responsabilité de l'Etat au titre de cette affection qu'elle impute à la vaccination en introduisant un recours devant le Tribunal Administratif. Les juges du fond ont rejeté la demande d’indemnisation de la victime aux motifs que le mode de preuve utilisé pour démontrer l’existence de présomptions graves, précises et concordantes, ne leur paraissait pas admissible. Ils ont estimé que seule la production de pièces médicales était susceptible d'établir la date d'apparition de ces symptômes. Le Conseil d’Etat a cassé cette décision et relevé que la responsabilité de l'Etat pouvait être engagée en raison des conséquences dommageables d'injections vaccinales contre l'hépatite B réalisées dans le cadre d'une activité professionnelle eu égard, d'une part, au bref délai ayant séparé l'injection des premiers symptômes d'une sclérose en plaques, validés par les constatations de l'expertise médicale, et, d'autre part, à la bonne santé de la personne concernée et à l'absence, chez elle, de tout antécédent à cette pathologie antérieurement à sa vaccination. La Haute Juridiction précise que « la preuve des différentes circonstances à prendre ainsi en compte, notamment celle de la date d'apparition des premiers symptômes d'une sclérose en plaques, peut être apportée par tout moyen ». Responsabilité pénale du médecin en cas d’omission d’empêcher une infraction Cass. crim., 23 octobre 2013, pourvoi n°12-80.793 Un médecin attaché au pôle gérontologique d’un hôpital a été poursuivi pour s'être abstenu d'informer les autorités judiciaires ou administratives de mauvais traitements infligés par des membres du personnel envers des pensionnaires hors d'état de se protéger. La Cour d’appel, confirmée par les juges de cassation, a requalifié les faits et l’a déclaré coupable du délit d’omission d’empêcher une er infraction, prévu par l’article 223-6 alinéa 1 du code pénal. Pour déclarer le prévenu coupable du délit d’omission d’empêcher une infraction, la Cour d’appel a relevé que le médecin, sachant que des membres du personnel avaient un comportement maltraitant envers des pensionnaires âgés et dé- pendants, s’est abstenu d’intervenir auprès de l’encadrement des infirmiers afin que soient prises des dispositions, telle qu’une meilleure surveillance. Les juges du fond ont également précisé qu’en cas d’échec de cette démarche, le médecin aurait dû alerter la direction de l’hôpital de la situation afin que des mesures appropriées soient prises pour préserver la qualité des soins dispensés aux pensionnaires. La Cour de cassation a considéré « qu’en l’état de ses énonciations, la cour d’appel a, sans insuffisance ni contradiction et sans méconnaître le principe du secret médical, caractérisé les éléments constitutifs du délit [d’omission d’empêcher une infraction] ». PARIS – LYON – NANTES – MONTPELLIER – BRESIL – CHINE – LUXEMBOURG La Lettre du Cabinet - L’actualité juridique (Novembre 2013) 10 PROCEDURE CIVILE ET VOIES D’EXECUTION L’appel d’une partie défaillante en 1ère instance limité au rejet des prétentions adverses Cass. com., 19 novembre 2013, pourvoi n°12-26.660 Le droit d’exercer un appel en intimant toutes les parties présentes en première instance ne permet pas pour autant de former systématiquement des demandes contre toutes ces parties en cause d’appel. Tel est le sens de la décision rendue le 19 novembre 2013 par la Chambre commerciale de la Cour de cassation. En l’espèce, un concessionnaire automobile avait vendu un véhicule neuf qui s’est avéré défaillant. L’acheteur a alors assigné le concessionnaire et le fabricant-concédant pour obtenir la résolution de la vente. Au cours de cette instance, le concessionnaire, qui était co-défendeur avec le fabricantconcédant, n’avait pas constitué avocat et était défaillant. Il ne s’est fait représenter en justice qu’à l’occasion de l’instance d’appel. Au cours de la première instance, une expertise judiciaire a conclu au défaut de conformité du véhicule, ainsi qu’au fait que ce défaut de conformité existait dès la fabrication. En cause d’appel, le concessionnaire a donc souhaité exercer un recours en garantie contre le fabricant-concédant, ce que la Cour d’appel d’Angers a admis. Cet arrêt est sévèrement cassé par la décision du 19 novembre 2013. En effet, en vertu de l’article 547 du code de procédure civile, le concessionnaire disposait du droit d’exercer un appel et d’intimer toutes les parties : l’acheteur comme le fabricant-concédant. En revanche, ses prétentions en cause d’appel ne pouvaient pas donner lieu à des demandes nouvelles, qui sont irrecevables en application de l’article 564 du code procédure civile. En admettant l’appel en garantie formulé en cause d’appel par le concessionnaire alors qu’il n’avait pas été représenté devant le Tribunal de première instance, le fabricant-concédant aurait été privé du double degré de juridiction dans le cadre de sa défense à l’appel en garantie. N’ayant pas fait valoir de prétentions reconventionnelles à l’égard de l’acheteur, ni formulé de demande à l’égard du fabricant-concédant en première instance, l’appel du concessionnaire devait être strictement limité au rejet des prétentions de l’acheteur ou du fabricant-concédant. Mais il ne pouvait pas, à défaut de l’avoir fait en première instance, ajouter des demandes nouvelles. Cette décision rappelle ainsi l’impérieuse nécessité qu’il y a à faire valoir l’ensemble de ses prétentions dès la première instance, sous peine de les voir déclarées irrecevables en cause d’appel. Dans la présente espèce, le concessionnaire ne disposait pas d’un autre choix que d’introduire une nouvelle instance, en assignant le fabricant-concédant afin d’obtenir soit sa garantie, soit la résolution de la vente initiale. Fin de non-recevoir tirée d’une mention erronée dans l’acte d’assignation Cass. com., 19 novembre 2013, pourvoi n°12-24.101 A l’occasion d’une demande faite sur le fondement de l’article L.624-3 du code de commerce tendant à faire condamner le dirigeant d’une personne morale au paiement des dettes sociales, la Cour de cassation a rappelé l’impérieuse nécessité d’une convocation de ce dirigeant en vue de sa comparution personnelle à l’audience. En l’espèce, le dirigeant avait été destinataire d’une assignation le visant personnellement, mais qui mentionnait par erreur la formule générale selon laquelle : « Faute de comparaître ou de se faire représenter, il [NB : le défendeur] s'expose à ce qu'un jugement soit rendu contre lui sur les seuls éléments fournis par le demandeur ». Il est obligatoire, dans le cadre d’une assignation devant un Tribunal de commerce, de faire mention des conditions dans lesquelles le défendeur peut comparaître (article 855 du code de procédure civile). Or, au lieu de mentionner que le défendeur devait comparaître en personne, l’assignation mentionnait la faculté de se faire représenter. La Cour d’appel a considéré qu’il s’agissait d’un vice de forme n’entrainant pas la nullité à défaut de faire grief. Dans cet arrêt du 19 novembre 2013, la Cour de cassation énonce au contraire que cette mention erronée est une fin de non-recevoir, rendant la demande irrecevable sans que l’on puisse opposer que l’irrégularité ne fait pas grief. PARIS – LYON – NANTES – MONTPELLIER – BRESIL – CHINE – LUXEMBOURG La Lettre du Cabinet - L’actualité juridique (Novembre 2013) 11 INTERNATIONAL Fenêtre sur l’Afrique Subsaharienne Dans le prolongement du voyage officiel de la Ministre du Commerce Extérieur, Madame Nicole Bricq, les 18 et 19 novembre derniers en Côte d’Ivoire et au Ghana, nous avons décidé de mettre la lumière sur l’Afrique Subsaharienne, une des zones prioritaires sur laquelle la Ministre souhaite voir développer les échanges commerciaux. d’attraction des IDE en Afrique, au-delà des matières premières, les investisseurs étrangers cherchent les consommateurs africains. Les produits de base sont de puissants moteurs de croissance à court terme et le secteur manufacturier et des services gagnent du terrain (notamment les télécommunications) alors qu’augmente le pouvoir d’achat d’une classe moyenne émergente. La situation géographique Le facteur démographique L’Afrique subsaharienne (soit 51 pays au total) regroupe tous les pays de l’Afrique à l’exclusion des pays d’Afrique du Nord (i.e. Maroc, Algérie, Egypte, Lybie et Tunisie). La situation économique Une croissance positive - La Banque Mondiale indiquait en juin dernier que les perspectives économiques de l’Afrique subsaharienne sont positives avec un taux de croissance de 5,3% en 2012 et 5,6% en 2013. Si l'on exclut l'Afrique du Sud, le taux de croissance de la région devrait atteindre 6%. La tendance s'est du reste généralisée, avec plus d'un tiers des pays d'Afrique subsaharienne affichant des taux de croissance égaux ou supérieurs à 6%, et près de 40% des pays de la région enregistrant une croissance entre 4 et 6%. Plus récemment, dans son bulletin du 31 octobre dernier, le Fond Monétaire International précisait que, d’après les projections de son dernier rapport sur les perspectives économiques régionales de l’Afrique subsaharienne, la croissance du Produit Intérieur Brut régional devrait être de l’ordre de 5% en 2013 pour atteindre 6% en 2014 (les pays exportateurs de pétrole et les pays à faible revenu affichant les meilleurs résultats). Il ressort ainsi que la région est la plus dynamique à l'échelle mondiale après l'Asie du Sud-Est, même si les rythmes de croissance varient à l’intérieur même de la région subsaharienne. La population mondiale estimée, à mi-2013, à 7,2 milliards devrait augmenter de près d'un milliard de personnes au cours des douze prochaines années, pour atteindre 8,1 milliards en 2025 et 9,6 milliards en 2050. L’Afrique représente aujourd’hui un peu plus de 15% de la population mondiale. Lors de la conférence de presse des Nations Unies en juin 2013 sur le rapport relatif à la révision de 2012 des perspectives de la population mondiale (rapport révisé tous les deux ans), il a été souligné qu’au niveau des pays, la croissance générale d’ici à 2050 devrait intervenir dans les pays qui connaissent un taux de fécondité important, principalement en Afrique, ainsi que dans des pays déjà fortement peuplés tels l’Inde, l’Indonésie, le Pakistan, les Philippines ou les États-Unis. Les changements démographiques et sociaux que connaît l’Afrique sont donc de nouveaux moteurs de croissance interne. L’urbanisation, la hausse de la population active et l’avènement de la classe moyenne sont autant de facteurs pouvant stimuler la croissance. Le rapport sur le commerce et le développement 2013, publié le 12 septembre dernier par les Nations Unies (CNUCED), indique que, selon un certain nombre de prévisions, la proportion de la classe moyenne dans la population mondiale totale devrait passer de 26% en 2009 à 41% en 2020 et à 58% en 2030, et augmenter de plus du quadruple dans les pays en développement : - Les flux d’investissements - Les Flux d’Investissements Directs Etrangers (IDE), après avoir nettement diminué en 2009 et 2010, ont fait un bond de 25% en 2011, pour atteindre, selon les estimations, 35,6 milliards de dollars. Si les ressources naturelles demeurent le principal pôle - l’Asie devrait connaître la plus forte progression et le nombre de personnes appartenant à la classe moyenne dans cette région devrait être multiplié par 6 ; en Amérique centrale et en Amérique du Sud, ce nombre devrait être multiplié par 2,5 et ; il devrait tripler en Afrique subsaharienne. PARIS – LYON – NANTES – MONTPELLIER – BRESIL – CHINE – LUXEMBOURG La Lettre du Cabinet - L’actualité juridique (Novembre 2013) En 1980, à peine 28% des africains vivaient dans des villes. Aujourd’hui, c’est le cas de 40% du milliard de personnes que recense ce continent, soit une proportion approximativement analogue à celle observée en Chine et supérieure à celle qu’enregistre l’Inde. Selon les projections, en 2030, la moitié des africains vivront dans les villes et les 18 premières villes d’Afrique disposeront d’un pouvoir d’achat annuel combiné de 1 300 milliards de dollars. Le cadre juridique Le droit des affaires en Afrique subsaharienne a été marqué par l’adoption, par de nombreux pays africains, du traité relatif à l'Harmonisation en Afrique du Droit des Affaires (OHADA). Signé en 1993, le traité instituant l'OHADA poursuit comme objectif principal l'unification du droit des affaires afin d'assurer la sécurité juridique et judiciaire des activités économiques, de restaurer la confiance des investisseurs et de faciliter les échanges entre les Etats parties. Les autres objectifs du traité sont les suivants : mettre à la disposition de chaque Etat des règles communes simples, modernes et adaptées à la situation économique ; promouvoir l’arbitrage comme instrument rapide et discret des litiges commerciaux ; améliorer la formation des magistrats et des auxiliaires de justice ; favoriser l’institution d’une Communauté Economique Africaine. L'OHADA regroupe aujourd'hui 17 États (Bénin, Burkina Faso, Cameroun, Comores, Congo, Côte d'Ivoire, Gabon, Guinée Bissau, Guinée, Guinée Equatoriale, Mali, Niger, République Centrafricaine, République Démocratique du Congo, Sénégal, Tchad, Togo). Les langues de travail sont le français, l'anglais, l'espagnol et le portugais. Le droit de l'OHADA est ainsi utilisé pour propulser le développement économique et créer un vaste marché intégré afin de faire de l'Afrique un « pôle de développement ». Pour réaliser ces objectifs, l'OHADA s'est dotée d'un système institutionnel structuré autour des organes que sont (i) la Conférence des Chefs d'État et de Gouvernement, (ii) le Conseil des ministres (composé des ministres en charge de la justice et des finances des Etats parties) et (iii) le Secrétariat permanent qui est l'organe exécutif chargé d'assister le Conseil des ministres et de coordonner la préparation et le suivi de la procédure relative à l'adoption des Actes uniformes. 12 Deux autres organes spécialisés complètent le système institutionnel. Il s'agit de : la Cour commune de Justice et d'Arbitrage de l'OHADA (composée de neuf juges, non un organe de représentation des Etats Partis) et, l'École Régionale Supérieure de la Magistrature. La Cour commune de Justice et d'Arbitrage de l'OHADA est compétente pour connaître, en cassation, des pourvois contre les décisions rendues en dernier ressort en application des Actes uniformes de l'OHADA par les juridictions nationales des États parties. En cas de cassation, elle a le pouvoir d'évoquer afin de vider le contentieux sans aucun renvoi à une juridiction nationale. L'Ecole Régionale Supérieure de la Magistrature a vocation à former les professionnels de l'OHADA et à perfectionner leurs compétences. Elle est également un centre de recherche en droit des affaires. L'Organisation pour l’Harmonisation en Afrique du Droit des Affaires compte à son actif neuf Actes uniformes déjà entrés en vigueur dans les États parties, à savoir l’Acte uniforme : 1. relatif au droit commercial général (1997, révisé en 2010), 2. relatif au droit des sociétés commerciales et du GIE (1997), 3. portant organisation des sûretés (1997, révisé en 2010), 4. portant organisation des procédures simplifiées de recouvrement et des voies d’exécution (1998), 5. portant organisation des procédures collectives d’apurement du passif (1998), 6. relatif au droit de l’arbitrage (1999), 7. portant organisation et harmonisation des comptabilités d’entreprises (2000), 8. relatif aux contrats de transport de marchandises par route (2003), 9. relatif au droit des sociétés coopératives (2010). D'autres Actes uniformes sont en préparation sur le droit des contrats, le droit du travail et le droit de la vente aux consommateurs. Les 21 et 22 novembre 2013, se tenait à Libreville, en République Gabonaise, la première édition du Symposium Juridique de Libreville, sur le thème « Comment fabrique-t-on le droit en Afrique ? ». Cet évènement avait pour vocation de mettre en perspectives le droit des affaires à l’échelle africaine (notamment à la lumière du bilan des 20 ans de l’OHADA) et son adaptation aux enjeux du monde contemporain. PARIS – LYON – NANTES – MONTPELLIER – BRESIL – CHINE – LUXEMBOURG La Lettre du Cabinet - L’actualité juridique (Novembre 2013) 13 ACTUALITÉ SIMON ASSOCIÉS ÉVÈNEMENTS Simon Associés organise « Les Rencontres Simon Associés », le 12 décembre 2013, dans ses locaux à Paris, sur le thème : « La prise de participation au capital du distributeur ». Pour en savoir plus Simon Associés a participé au petit-déjeuner organisé en partenariat avec Le Medef, Valtus, EY et CF news, le 26 novembre 2013, au Medef, sur le thème : « PME-ETI : doper sa croissance par l’international ». Pour visionner la conférence, cliquez ici Simon Associés est intervenu à la conférence-débat organisée le 19 novembre 2013, par le Président de la CCI de Rennes et portant sur le thème : « Financement des entreprises : comment tirer parti des nouvelles règles du jeu ? ». Pour visionner la conférence, cliquez ici Me Jean-Charles Simon a participé, du 19 au 25 octobre 2013, au voyage de la délégation française en Chine, conduite par l’ancien Premier Ministre, M. Jean-Pierre Raffarin, dans le cadre des activités de Prospection et Innovation. CLASSEMENT Simon Associés classé en tant que Cabinet à « forte notoriété » en droit de la distribution par le Magazine Décideurs. Pour en savoir plus Cette liste des évènements n’est pas exhaustive. Vous pouvez consulter notre site internet www.simonassocies.com pour prendre connaissances des évènements, actualités et publications du Cabinet Simon Associés. PARIS – LYON – NANTES – MONTPELLIER – BRESIL – CHINE – LUXEMBOURG